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16/10/2012 | FRANCE | N°12LY01614

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 16 octobre 2012, 12LY01614


Vu la requête, enregistrée le 26 juin 2012, présentée pour M. Robert , domicilié au ..., par Me Anceau, avocat ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1001051 du 7 juin 2012 par laquelle le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 13 novembre 2009 par laquelle le maire de Mours-Saint-Eusèbe a délivré un permis de construire à M. A et la décision du 14 janvier 2010 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite déci

sion ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mours-Saint-Eusèbe et de M. A une s...

Vu la requête, enregistrée le 26 juin 2012, présentée pour M. Robert , domicilié au ..., par Me Anceau, avocat ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1001051 du 7 juin 2012 par laquelle le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 13 novembre 2009 par laquelle le maire de Mours-Saint-Eusèbe a délivré un permis de construire à M. A et la décision du 14 janvier 2010 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mours-Saint-Eusèbe et de M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que sa demande d'annulation ne pouvait être rejetée pour tardiveté dès lors que sa lettre du 28 décembre 2009 ne constituait pas un recours gracieux de nature à révéler la connaissance acquise du permis attaqué ; que le panneau d'affichage du permis de construire n'était pas conforme aux exigences du code de l'urbanisme en l'absence de mention des voies et délais et du rappel de la formalité prescrite par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; que le permis a été délivré en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 en l'absence de mention du nom et du prénom du signataire ; qu'il méconnaît aussi l'article UD 7 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 septembre 2012, présenté pour la commune de Mours-Saint-Eusèbe, représentée par son maire, par la Selarl CMDF, avocats, tendant au rejet de la requête susvisée et à ce qu'il soit mis à la charge du requérant une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune fait valoir que la tardiveté retenue par le Tribunal doit être confirmée dès lors que le requérant avait connaissance acquise du permis de construire à la date de son recours gracieux du 28 décembre 2009 ; que ce recours gracieux n'a pas été notifié conformément aux prescriptions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme alors que les mentions du permis affiché rappelaient cette obligation ; que l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 n'est pas méconnu dès lors que l'identification du signataire, le maire, était possible ; que l'article UD 7 du règlement du plan local d'urbanisme communal n'est pas méconnu ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2012, présenté pour M. Jacques A, par la Scp Fayol et associés, avocats, tendant au rejet de la requête susvisée et à ce qu'il soit mis à la charge du requérant une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que la tardiveté retenue par le Tribunal doit être confirmée dès lors que le requérant a bien effectué un recours gracieux du 28 décembre 2009 ; que ce recours gracieux n'a pas été notifié conformément aux prescriptions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme alors que les mentions du permis affiché rappelaient cette obligation ; que l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 n'est pas méconnu dès lors que l'identification du signataire, le maire, était possible ; que l'article UD 7 du règlement du plan local d'urbanisme communal n'est pas méconnu ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 septembre 2012, présenté pour le requérant, tendant aux mêmes conclusions par les mêmes moyens ;

Vu la note en délibéré enregistrée le 1er octobre 2012 présentée pour la commune de Mours-Saint-Eusèbe ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2012 :

- le rapport de M. Moutte, président ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Lamamra, représentant Me Anceau, avocat de M. , celles de Me Fiat, représentant CDMF avocats affaires publiques, avocat de la commune de Mours-Saint-Eusèbe, et celles de M. A, défendeur ;

1. Considérant que par l'ordonnance dont le requérant relève appel, le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté, sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le maire de Mours-Saint-Eusèbe a délivré un permis de construire à M. A en raison de sa tardiveté ; que pour retenir cette tardiveté le Tribunal a estimé qu'un recours gracieux daté du 28 décembre 2009 révélait une connaissance acquise du permis de construire à cette date et que le recours gracieux n'avait pas interrompu le délai de recours dès lors qu'il n'avait pas été notifié dans les conditions prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) " qu'aux termes de l'article R. 411-7 du code de justice administrative : " La présentation des requêtes dirigées contre un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol est régie par les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ci-après reproduit : Art. R. 600-1.-En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. " ; qu'aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. " ; qu'enfin aux termes dudit article R. 424-15 : " Mention du permis explicite ou tacite ou de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite ou la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. Cet affichage n'est pas obligatoire pour les déclarations préalables portant sur une coupe ou un abattage d'arbres situés en dehors des secteurs urbanisés. Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. En outre, dans les huit jours de la délivrance expresse ou tacite du permis ou de la décision de non-opposition à la déclaration préalable, un extrait du permis ou de la déclaration est publié par voie d'affichage à la mairie pendant deux mois. L'exécution de cette formalité fait l'objet d'une mention au registre chronologique des actes de publication et de notification des arrêtés du maire prévu à l'article R. 2122-7 du code général des collectivités territoriales. Un arrêté du ministre chargé de l'urbanisme règle le contenu et les formes de l'affichage. " ;

3. Considérant que M. a adressé le 28 décembre 2009 un courrier reçu le 31 décembre 2009 par la commune de Mours-Saint-Eusèbe dans lequel il demandait au maire de faire en sorte que l'acceptation du projet autorisé par un permis de construire délivré le 13 novembre 2009 à M. A soit révisée en raison de la méconnaissance des articles UD 7 et UD 11 du règlement du plan local d'urbanisme ; qu'un tel courrier, eu égard aux termes utilisés, constitue bien un recours gracieux ; que le requérant a fait dresser le 19 janvier 2010 un constat d'huissier dans lequel est précisé que le panneau de permis de construire de M. A ne comporte pas d'indication sur les délais et modalités du droit de recours ; que la production par la commune et M. A d'une attestation de la société chargée de la construction indiquant utiliser des panneaux comportant l'ensemble des mentions requises et l'avoir fait au cas d'espèce, de factures d'achat et de représentation desdits panneaux n'est pas de nature à remettre en cause les mentions précises du constat d'huissier alors même que les photographies qui y sont annexées ne permettent pas d'en vérifier l'exactitude ; que la production d'autres constats d'huissier datés des mois d'avril et mai 2010 postérieurement au premier constat indiquant la présence de l'ensemble des mentions prescrites par l'article R. 424-15 n'est pas plus de nature à établir leur existence à la date à laquelle M. a exercé son recours gracieux ; que cette présence n'est pas plus révélée par la photographie jointe par le requérant à son recours gracieux ni par des photographies sans date certaine de M. A ; que, dans ces conditions, la formalité de notification du recours gracieux prescrite par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'était pas opposable au requérant faute d'avoir été mentionnée sur le panneau d'affichage du permis de construire ; que même s'il n'a pas été notifié au bénéficiaire du permis le recours gracieux ayant eu pour effet de proroger le délai de recours, la demande enregistrée le 12 mars 2010, soit moins de deux mois après le rejet dudit recours par une décision du maire en date du 14 janvier 2010, n'était pas tardive ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée le président de la 2ème chambre du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 13 novembre 2009 par laquelle le maire de Mours-Saint-Eusèbe a délivré un permis de construire à M. A en raison de sa tardiveté ; qu'il y a lieu pour la Cour d'annuler l'ordonnance et de statuer sur cette affaire par la voie de l'évocation ;

5. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ; que si l'arrêté attaqué mentionne la qualité de son auteur, le maire de Mours-Saint-Eusèbe, il ne comporte pas l'indication du nom et du prénom de celui-ci ; que ni la signature manuscrite, qui est illisible contrairement à ce que soutiennent la commune et M. A, ni aucune autre mention de ce document ne permettent d'identifier la personne qui en est l'auteur ; que, par suite, alors même que le recours gracieux de M. a été rejeté par une décision du 14 janvier 2010, laquelle indique tant la qualité que le nom et le prénom du maire de Mours-Saint-Eusèbe, et que les signatures portées sur les deux actes sont ressemblantes, l'arrêté du 13 novembre 2009 est entaché d'une irrégularité de nature à affecter la légalité de l'acte attaqué ; que celui-ci doit dès lors, pour ce motif, être annulé ;

6. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen invoqué par le requérant n'est susceptible, en l'état de l'instruction, de fonder l'annulation de la décision attaquée ;

7. Considérant que les conclusions présentées par la commune de Mours-Saint-Eusèbe et M. A sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à celles présentées au titre des mêmes dispositions par le requérant ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance susvisée du Tribunal administratif de Grenoble du 7 juin 2012 est annulée.

Article 2 : Le permis de construire délivré le 13 novembre 2009 par le maire de Mours-Saint-Eusèbe à M. A et le rejet du recours gracieux du 14 janvier 2010 sont annulés.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Mours-Saint-Eusèbe et de M. A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Robert , à la commune de Mours-Saint-Eusèbe et à M. Jacques A. Copie en sera adressée au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Valence, en application de l'article R. 751-11 du code de justice administrative.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Zupan, président-assesseur.

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 octobre 2012

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N° 12LY01614

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01614
Date de la décision : 16/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles de procédure contentieuse spéciales. Introduction de l'instance. Obligation de notification du recours.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-François MOUTTE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : ANCEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-10-16;12ly01614 ?
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