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12/06/2012 | FRANCE | N°11LY02360

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 12 juin 2012, 11LY02360


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 septembre 2011 sous le n° 11LY02360, présentée pour l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION, dont le siège est sis chez , ..., représentée par son président, par Me Létang ;

L'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Dijon n° 1000993 du 30 juin 2011 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération, en date du 2 mars 2010, par laquelle le conseil municipal de Sens a approuvé la modification n° 1 du

plan local d'urbanisme de cette commune ;

2°) d'annuler ladite délibération ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 septembre 2011 sous le n° 11LY02360, présentée pour l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION, dont le siège est sis chez , ..., représentée par son président, par Me Létang ;

L'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Dijon n° 1000993 du 30 juin 2011 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération, en date du 2 mars 2010, par laquelle le conseil municipal de Sens a approuvé la modification n° 1 du plan local d'urbanisme de cette commune ;

2°) d'annuler ladite délibération ;

3°) de condamner la commune de Sens à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que la présente requête est formée dans le délai d'appel et que son intérêt pour agir, au demeurant incontestable, a déjà été reconnu par la Cour dans une précédente instance ; que le jugement attaqué ne mentionne pas, en violation de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, son mémoire du 16 mars 2011 ; que la délibération contestée a été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que les convocations à la réunion du conseil municipal du 2 mars 2010 n'étaient pas accompagnées de la note explicative de synthèse imposée par l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales ; que les changements apportés au plan local d'urbanisme imposaient de recourir à la procédure de révision et non à la procédure de modification ; qu'en effet, la bande inconstructible prévue par l'article L. 111-1-4 constitue une protection édictée en raison des risques de nuisance, au sens de l'article L. 123-13 du même code, de sorte que sa réduction échappe, en vertu de ce même texte, au champ d'application de la procédure de modification ; que la modification contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en ce que la réduction de la marge de recul le long de la rocade de Sens n'est assortie d'aucune explication ou justification ; que le profil de principe concernant la route départementale 606, contenu dans l'étude d'entrée de ville Sud, est dépourvu de voie de desserte de la zone commerciale, et fait donc apparaître une contradiction avec l'article 1AUE 3 du règlement, qui prévoit l'aménagement de telles voies ; que la délibération contestée prévoit l'ouverture à l'urbanisation de terrains compris dans le périmètre éloigné du captage de Saint-Bond et porte atteinte, du fait de l'imperméabilisation des sols et de la pollution qui en résulteront, à la protection de la nappe phréatique, imposée par les dispositions de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique et de l'arrêté du préfet de l'Yonne du 21 septembre 1994 déclarant ce captage d'utilité publique ; que le sous-sol aquifère est particulièrement vulnérable ; que la commune n'a jamais réalisé les études complémentaires préconisées par le commissaire-enquêteur intervenu dans le cadre de la précédente procédure de révision ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 janvier 2012, présenté pour la commune de Sens, représentée par son maire en exercice, par Me Chaton, concluant au rejet de la requête et à la condamnation de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement attaqué, contrairement à ce qui est soutenu, vise l'ensemble des mémoires produits par les parties ; que le Tribunal aurait dû déclarer la demande irrecevable, comme il l'a fait par plusieurs jugements du même jour statuant sur les recours formés contre des permis de construire, dès lors que l'association requérante, loin de défendre l'urbanisme et l'environnement comme elle le prétend, regroupe des personnes animées par un intérêt commercial concurrent de celui de la société Les Anciens Etablissements Georges Schiever et fils et souhaitant seulement faire échec à son projet de centre commercial ; qu'elle a été créée dans le mois suivant la délivrance de la première autorisation d'urbanisme commercial, est composée de trois personnes ayant une activité dans une zone commerciale concurrente et ne justifie d'aucune activité autre que la contestation dudit projet ; que le projet de délibération joint aux convocations à la réunion du conseil municipal du 2 mars 2010 a suffi à satisfaire aux exigences de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, eu égard à la faible importance de la modification en cause du plan local d'urbanisme ; que le vice de procédure allégué -qui relève en réalité de la méconnaissance du champ d'application de la loi- relatif à la mise en oeuvre de la procédure de modification au lieu de la procédure de révision, n'est nullement constitué, dès lors que la réduction de la bande d'inconstructibilité prévue par l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme figurait déjà dans le plan local d'urbanisme approuvé le 16 avril 2009 ; que, pour la même raison, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation ne peut qu'être écarté, la délibération contestée ne modifiant en rien les règles d'aménagement du secteur concerné ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 mai 2012, présenté pour l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION par Me Le Fouler, concluant aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que l'allégation selon laquelle elle poursuivrait un intérêt commercial ne repose sur rien ; que la jurisprudence citée par la commune concerne des cas dans lesquels les associations requérantes agissaient en réalité pour le compte d'enseignes concurrentes, ce qui n'est nullement le cas en l'espèce ; qu'elle a été déclarée en sous-préfecture de Sens dès le 30 décembre 2004 ; qu'elle a exercé en 2009 un recours contre un permis de construire sans lien avec le projet de centre commercial que la délibération contestée vise à favoriser ; que si le projet de délibération peut tenir lieu de note de synthèse, c'est à la condition qu'il comporte des informations exhaustives ; qu'y font en l'espèce défaut l'indication des objectifs et enjeux, les observations du public, l'avis du commissaire enquêteur, l'exposé des modifications subséquentes, les avis des personnes publiques associées et l'explication des choix retenus ; que la délibération contestée a pour objet de mettre en cohérence le plan local d'urbanisme avec l'étude d'entrée de ville de sorte qu'elle intègre dans ce plan les dérogations autorisées par l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme, opérant ainsi la réduction d'une protection contre les nuisances, ce qui nécessitait une procédure de révision ; que l'étude censée justifier ces dérogations est manifestement insuffisante, en ce que le contexte physique et urbain n'est pas décrit, que l'impact environnemental et paysager est négligé et qu'elle ne contient aucune préconisation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mai 2012 :

- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- ainsi que les observations de Me Le Fouler, représentant le cabinet Letang et associés, avocat de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION, de Me Ciaudo, représentant le cabinet Chaton, avocat de la commune de Sens ;

Considérant que l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION relève appel du jugement, en date du 30 juin 2011, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté son recours pour excès de pouvoir dirigé contre la délibération du conseil municipal de Sens du 2 mars 2010 approuvant la modification n° 1 du plan local d'urbanisme de cette commune ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, contrairement à ce que soutient l'association requérante, la minute du jugement attaqué vise son mémoire du 16 mars 2011 qui, produit le jour de la clôture de l'instruction, a d'ailleurs nécessité la réouverture de celle-ci ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative manque dès lors en fait ;

Sur le fond :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal " ; que le défaut de note explicative de synthèse entache d'irrégularité les délibérations adoptées au cours de la réunion en cause, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux conseillers municipaux, en même temps que la convocation, les documents pouvant en tenir lieu ; qu'en l'espèce, les convocations à la réunion du conseil municipal du 2 mars 2010 étaient accompagnées du projet de délibération approuvant la modification du plan local d'urbanisme, dont la motivation retrace avec précision la procédure suivie, et d'un exposé des motifs indiquant, avec sa justification, chacun des changements apportés à ce plan ; que les élus ont ainsi bénéficié d'une information répondant aux exigences de l'article L. 2121-12 précité du code général des collectivités territoriales ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-13 alors en vigueur du code de l'urbanisme : " La procédure de modification est utilisée à condition que la modification envisagée : a) Ne porte pas atteinte à l'économie générale du projet d'aménagement et de développement durable mentionné au deuxième alinéa de l'article L. 123-1 ; b) Ne réduise pas un espace boisé classé, une zone agricole ou une zone naturelle et forestière, ou une protection édictée en raison des risques de nuisance, de la qualité des sites, des paysages ou des milieux naturels ; c) Ne comporte pas de graves risques de nuisance " ; que si la marge de recul des constructions imposée par l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme le long des autoroutes, routes express et routes classées à grande circulation doit être regardée comme une protection édictée en raison de risques de nuisance, sa réduction, que les plan locaux d'urbanisme peuvent prévoir en vertu de ce même texte, figurait en l'espèce déjà, le long notamment des routes départementales 606 et 660, dans le plan local d'urbanisme de Sens, tel qu'il a été approuvé par délibération du 16 avril 2009, et ne résulte donc pas de la délibération contestée, qui n'en modifie en rien l'assiette ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que la commune aurait dû engager une procédure de révision au lieu d'une procédure de modification, et aurait ainsi méconnu l'article L. 123-13 du code de l'urbanisme, manque en fait ;

Considérant que l'omission, dans le texte accompagnant l'un des profils de principe contenus dans le " projet urbain d'entrée de ville " annexé au rapport de présentation, de l'indication selon laquelle une voie de desserte interne de la zone 1AUE du lieu-dit " Champbertrand " pourra être aménagée dans la bande d'inconstructibilité jouxtant la route départementale 606, comme le prévoit l'article 1AUE 3 du règlement dans sa rédaction issue de la modification litigieuse, ne peut suffire à constituer, alors que ce graphique lui-même comporte la représentation d'une telle voie, une irrégularité de nature à entraîner l'annulation de la délibération contestée ;

Considérant que, pour la raison sus-indiquée, tenant à la préexistence, dans le plan local d'urbanisme approuvé en 2009, de la réduction de la marge de recul prévue par l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme, les moyens tirés de ce que cette mesure n'aurait pas été accompagnée d'une étude comportant l'ensemble des informations ou préconisations requises par cette disposition et procéderait d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés ; que, de même, il ne ressort pas des pièces du dossier que la modification critiquée comporterait ou induirait une extension, par rapport aux prévisions initiales du plan local d'urbanisme, de l'urbanisation de parcelles comprises dans le périmètre éloigné du captage de Saint-Bond ; qu'il n'est dès lors pas utilement argué de la dégradation du sous-sol aquifère et de la méconnaissance, à cet égard, des dispositions de l'article L. 1321-2 du code de la santé publique ou de l'arrêté du préfet de l'Yonne du 21 septembre 1994 déclarant d'utilité publique les périmètres de protection des eaux de ce captage ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Sens, que l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Sens, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION la somme qu'elle réclame en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu au contraire de condamner cette association, sur ce fondement, à verser à la commune de Sens une somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION est rejetée.

Article 2 : L'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION versera à la commune de Sens une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION DE SAUVEGARDE DE SENS ET DE SA REGION et à la commune de Sens.

Délibéré après l'audience du 15 mai 2012, à laquelle siégeaient :

M. Zupan, président de la formation de jugement,

M. Bézard, président,

M. Chenevey, premier conseiller.

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N° 11LY02360

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02360
Date de la décision : 12/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d'occupation des sols et plans locaux d'urbanisme. Légalité des plans. Modification et révision des plans. Procédures de modification.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : LETANG et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-06-12;11ly02360 ?
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