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24/04/2012 | FRANCE | N°11LY02123

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 24 avril 2012, 11LY02123


Vu la requête, enregistrée à la cour par télécopie le 26 août 2011 et régularisée le 31 août 2011, présentée pour le PREFET DE L'YONNE ;

Le PREFET DE L'YONNE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101050, du 11 juillet 2011, par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé ses décisions du 7 avril 2011, refusant de délivrer un titre de séjour à M. Hervé A, faisant obligation à ce dernier de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à

défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui ...

Vu la requête, enregistrée à la cour par télécopie le 26 août 2011 et régularisée le 31 août 2011, présentée pour le PREFET DE L'YONNE ;

Le PREFET DE L'YONNE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101050, du 11 juillet 2011, par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé ses décisions du 7 avril 2011, refusant de délivrer un titre de séjour à M. Hervé A, faisant obligation à ce dernier de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite et lui a fait injonction de délivrer à l'intéressé un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Hervé A devant le tribunal administratif ;

Il soutient que les premiers juges ne pouvaient se fonder sur une attestation rédigée par un médecin qui ne justifie pas de la spécialité " santé publique " pour contredire l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique ; que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il appartenait au préfet d'apporter la preuve de l'existence, dans le pays d'origine de M. A, de possibilités de traitement des complications susceptibles d'affecter l'intéressé ; qu'enfin, il n'existe pas de traitement connu permettant de soigner la pathologie dont M. A est atteint et que les soins qui lui sont prodigués n'ont qu'un caractère palliatif ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré à la cour par télécopie le 30 novembre 2011 et régularisée le 5 décembre 2011, présenté pour M. Hervé A, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient à titre principal, que l'appel interjeté par le PREFET DE L'YONNE est irrecevable en raison de sa tardiveté ; que les décisions en litige ont été signées par une autorité incompétente ; que la prise en charge médicale dont il bénéficie en France permet d'améliorer son état de santé et d'allonger son espérance de vie alors que les pièces contenues dans son dossier médical, parfaitement probantes, démontrent qu'un tel traitement n'existe pas dans son pays d'origine ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour qui la fonde ; que la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour qui la fonde ; que l'injonction est donc fondée ;

Vu le mémoire enregistré à la cour par télécopie le 20 décembre 2011 et régularisée le 23 décembre 2011 présenté pour le PREFET DE L'YONNE, qui persiste dans ses conclusions ;

Il soutient en outre que la requête d'appel est recevable et que le signataire des décisions en litige bénéficiait à cet effet d'une délégation de signature ;

Vu la décision du 18 novembre 2011, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. Hervé A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2012 :

- le rapport de M. Moutte, président,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Hervé A, ressortissant camerounais né le 15 février 1988, est entré en France le 19 juillet 2010, muni de son passeport revêtu d'un visa de court séjour ; qu'il a, le 19 novembre 2010, sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par les décisions en litige du 7 avril 2011, le PREFET DE L'YONNE a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement prise à son encontre ; que M. A a déféré ces trois décisions à la censure du tribunal administratif de Dijon, lequel, par jugement du 11 juillet 2011, a fait droit à sa demande, au motif que le refus de titre de séjour contesté avait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le PREFET DE L'YONNE fait appel de ce jugement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "La carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 11°/ à l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) " ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 11 mai 1998, dont sont issues les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur de santé publique, devenu le médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut pas avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 7 avril 2011 par laquelle le PREFET DE L'YONNE a refusé à M. A la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a été prise au vu d'un avis du 10 mars 2011, par lequel le médecin inspecteur de santé publique a estimé que si l'état de santé de l'intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, M. A pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est atteint de drépanocytose sévère entraînant de fréquentes crises vaso-occlusives et d'une complication grave d'ostéite, affections pour lesquelles il bénéficie en France d'un traitement et d'un suivi régulier en milieu hospitalier ; qu'il ressort également des pièces du dossier, et en particulier des certificats rédigés les 28 février et 29 avril 2011 par un médecin spécialiste exerçant au sein du centre hospitalier de Sens et du certificat rédigé le 9 mai 2011 par un médecin de l'hôpital Necker que le traitement de cette maladie ne peut être mené de manière aussi efficace dans son pays d'origine en raison d'infestations paludéennes, lesquelles ont auparavant suscité de graves crises chez l'intéressé, et que son maintien en France est nécessaire afin de mettre en place un traitement adapté et d'éviter les complications morbides et une mortalité prématurée ; que ces certificats peuvent être pris en compte même s'ils ne sont pas établis par des médecins spécialisés en santé publique et s'ils sont postérieurs pour deux d'entre eux à la date à laquelle a été prise la décision litigieuse alors qu'ils se réfèrent à des faits existant à cette date ; qu'ainsi, dans les circonstances de l'espèce, la décision en litige a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont annulé, pour ce motif, la décision du 7 avril 2011 par laquelle le PREFET DE L'YONNE a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français et désignant le pays de renvoi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'YONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé ses décisions du 7 avril 2011, par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. Hervé A, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement prise à son encontre et lui a fait injonction de délivrer à l'intéressé un titre de séjour dans le délai de quinze jours ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du PREFET DE L'YONNE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Hervé A, au PREFET DE L'YONNE et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2012 à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 24 avril 2012

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N° 11LY02123


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02123
Date de la décision : 24/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. Jean-François MOUTTE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : JOURDAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-04-24;11ly02123 ?
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