Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2011, présentée pour la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT, dont le siège est 8 rue Lamennais à Paris (75008) ;
La SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601820 du 18 novembre 2010 du Tribunal administratif de Grenoble qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 15 février 2006 par laquelle le conseil municipal de Saint-Gervais-les-Bains (Haute-Savoie) a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, en tant que cette délibération classe en zone A les parcelles cadastrées H 3192, H 3193, H 2433, H 2435 et H 2437, lui appartenant ;
2°) d'annuler cette délibération en tant qu'elle procède à ce classement ;
3°) de condamner la commune de Saint-Gervais-les-Bains à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La société requérante soutient que sa qualité de propriétaire des parcelles concernées lui confère un intérêt à agir ; qu'en premier lieu, les parcelles litigieuses étaient auparavant classées en zone UD au plan d'occupation des sols et avaient été déclarées constructibles par des certificats d'urbanisme du 17 février 1997 et du 30 octobre 1998 ; que ces parcelles sont desservies par tous les réseaux publics et sont entourées de terrains construits ; qu'elles ne sont pas exploitées actuellement ; que, si la chambre d'agriculture a demandé le classement en zone A des terrains situés entre les lieux-dits Devant les Granges et Les Granges d'En-Bas , les parcelles en litige ne sont pas situées entre ces deux lieux-dits ; qu'elles ne constituent pas le débouché naturel de la ferme Bochatay et ne sont pas nécessaires à l'exploitation de cette dernière, dont l'activité n'est en outre pas établie ; que leur caractère agricole n'est en rien démontré ; qu'ainsi, dans ces conditions, en les classant en zone A, le conseil municipal a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme ; qu'en deuxième lieu, si le I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme dispose que les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières sont préservées , aucun élément n'est apporté par la commune pour justifier l'intérêt pour l'exploitation agricole des parcelles litigieuses ; que, si la commune a invoqué la proximité d'un vaste espace naturel, cette circonstance est sans incidence sur l'application des dispositions précitées du I de l'article L. 145-3, la notion de continuité n'intervenant que pour apprécier les possibilités d'urbanisation au regard du III de cet article ; que, dès lors, le classement en litige méconnaît les dispositions du I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 février 2011, présenté pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains, représentée par son maire, qui demande à la Cour :
- de rejeter la requête ;
- de condamner la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La commune soutient, en premier lieu, que la requérante ne peut utilement se prévaloir de droits acquis qui résulteraient du classement en zone UD au plan d'occupation des sols de ses parcelles et des certificats d'urbanisme positifs du 17 février 1997 et du
30 octobre 1998 ; que ces certificats, dont la durée de validité était limitée à un an, mentionnaient d'ailleurs qu'une révision du plan d'occupation des sols avait été prescrite ; qu'ils ne pouvaient avoir un effet que s'agissant d'une éventuelle demande d'occupation ou d'utilisation du sol, et non s'agissant du plan local d'urbanisme lui-même ; qu'il résulte des termes mêmes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme que le seul intérêt agronomique, biologique ou économique d'un terrain suffit à justifier son classement en zone A, quand bien même cet intérêt demeurerait limité ; que la desserte du terrain par les réseaux publics, au demeurant non démontrée en l'espèce, ne peut, par elle-même, empêcher un classement en zone inconstructible ; que le classement en zone constructible de terrains voisins ou la présence de constructions sur ces terrains ne sauraient avoir la moindre incidence sur le propre classement des parcelles litigieuses ; qu'une des dernières exploitations du territoire communal, en outre dirigée par une personne relativement jeune à même d'en assurer la pérennité, est située à proximité des parcelles de la requérante ; que ces dernières sont les seules du secteur à ne présenter qu'une faible déclivité ; qu'elles font effectivement l'objet d'une exploitation, des vaches continuant à y paître après même l'approbation du plan local d'urbanisme ; qu'en tout état de cause, le seul potentiel agricole d'un terrain suffit à justifier son classement en zone A ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée a soutenir que le classement litigieux en zone A de ses parcelles est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en deuxième lieu, l'objectif de préservation de l'activité agricole, imposé par le I de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme, imposait d'adopter un classement en zone A dans le secteur, compte tenu notamment de la rareté et du manque de pérennité des exploitations agricoles subsistant sur le territoire communal ; que la proximité d'un vaste espace naturel n'a été évoquée qu'à titre accessoire ; qu'elle n'a pas laissé le soin à la chambre d'agriculture de désigner les parcelles présentant un intérêt pour l'agriculture ; que l'avis de la chambre d'agriculture confirme l'intérêt d'un classement en zone A ; qu'en application de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme, un terrain ne saurait être constructible en raison de sa continuité avec les bourgs, villages et hameaux existants, l'impératif de protection des espaces agricoles primant sur le principe de continuité ; que, comme le rappellent le rapport de présentation et le projet d'aménagement et de développement durable du plan local d'urbanisme, l'objectif de ce plan est de préserver les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières ; que le classement litigieux n'est donc pas entaché d'erreur manifeste au regard des dispositions de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ; que, dans l'hypothèse où elle estimerait fondé un des moyens d'annulation soulevés par la requérante, la Cour n'annulerait la délibération attaquée qu'en tant seulement que cette délibération procède au classement en zone A des parcelles litigieuses, et ce en raison du caractère divisible des dispositions du plan local d'urbanisme ;
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 30 juin 2011, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 septembre 2011 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2012 :
- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
- et les observations de Me Garaud, représentant la Selarl Adamas affaires publiques, avocat de la commune de Saint-Gervais ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme : Les zones agricoles sont dites zones A . Peuvent être classées en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles (...) ; qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; que leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait fondée sur une erreur manifeste ou sur des faits matériellement inexacts ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du projet d'aménagement et de développement durable et du rapport de présentation, que l'un des objectifs du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Gervais-les-Bains est de favoriser le maintien et le développement de l'agriculture, dans un espace géographiquement contraint et caractérisé par une urbanisation diffuse ; que les parcelles cadastrées H 3192, H 3193, H 2433, H 2435 et H 2437, appartenant à la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT, situées au lieu-dit Le Pontet , ont été intégrées à une zone A, d'une superficie limitée, au sein de laquelle se situe une exploitation agricole ; que, si cette société soutient que l'activité de cette exploitation n'est pas démontrée, elle n'apporte aucun élément précis de justification à l'appui de ses allégations, alors que, notamment, l'avis émis au cours de la procédure d'élaboration du plan local d'urbanisme par la chambre d'agriculture, à qui contrairement à ce qui est allégué le conseil municipal n'a pas abandonné sa compétence, mentionne l'existence d'une exploitation agricole au lieu-dit Le Pontet ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des photographies des lieux produites par la commune, que les parcelles de la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT ne présenteraient aucun potentiel agronomique, notamment au regard de l'activité de ladite exploitation agricole ; que, dans ces conditions, le classement de ces parcelles en zone A n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation, alors même qu'elles faisaient antérieurement l'objet d'un classement en zone UD au plan d'occupation des sols, ce qui a justifié la délivrance de deux certificats d'urbanisme positifs, que des terrains contigus supportent des constructions et qu'elles seraient desservies par tous les réseaux publics ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme : I. - Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières sont préservées. La nécessité de préserver ces terres s'apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d'exploitation locaux. Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l'exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition (...) ; que ces dispositions ne s'opposent nullement à ce que des terrains qui ne seraient pas nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles fassent l'objet d'un classement en zone A par un plan local d'urbanisme, dès lors que, néanmoins, ce classement s'inscrit dans le cadre du parti d'urbanisme de la commune concernée et répond aux dispositions de l'article R. 123-7 précité du code de l'urbanisme, qui définit les critères d'un tel classement ; que, par suite, la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT ne peut utilement soutenir, pour contester le classement de ses parcelles en zone A au plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Gervais-les-Bains, que celles-ci ne seraient pas nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles au sens des dispositions précitées de l'article L. 145-3 du code de l'urbanisme ; qu'au demeurant, en l'espèce, compte tenu du parti d'urbanisme précité de la commune de Saint-Gervais-les-Bains, les parcelles litigieuses doivent être regardées comme nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles au sens de ces dispositions ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Gervais-les-Bains, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de mettre à la charge de cette société le versement d'une somme au bénéfice de cette commune sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Gervais-les-Bains présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE AUXILIAIRE DE GESTION, D'ETUDES ET DE PLACEMENT et à la commune de Saint-Gervais-les-Bains.
Délibéré après l'audience du 31 janvier 2012, à laquelle siégeaient :
M. Moutte, président,
M. Zupan, président-assesseur,
M. Chenevey, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 février 2012.
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N° 11LY00100
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