Vu la procédure suivante :
Par un arrêt avant-dire droit du 19 décembre 2024, la cour a statué sur la requête de la société civile d'exploitation agricole (SCEA) des Acacias dirigée contre le jugement n°2209368 du 16 octobre 2023, par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 9 juin 2022 par lequel le maire de Wannehain a délivré à la société Tisserin Habitat un permis de construire vingt-et-une maisons et de transformer un bâtiment en cellule commerciale et deux logements, sur un terrain situé 1 rue de la grande ferme, sur les parcelles cadastrées B26, B27, B469, B470, B471, B472, B815 et B818, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux.
Elle a annulé le jugement du tribunal pour irrégularité et a sursis à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 9 juin 2022, confirmé sur recours gracieux, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois pour permettre à la commune de Wannehain et à la SA HLM Tisserin Habitat de notifier à la cour un permis de construire régularisant les vices tirés de la méconnaissance de l'article L.431-9 du code de l'urbanisme, de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime et de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme et a réservé sa réponse sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain.
La commune de Wannehain, représentée par Me Sarah Kerrich, a présenté :
- un mémoire enregistré le 23 avril 2025 produisant, d'une part, le dossier de demande de permis de construire modificatif déposé par la SA HLM Tisserin Habitat, d'autre part, l'arrêté du maire de Wannehain du 14 avril 2025 portant dérogation expresse à la règle de distance entre le projet et les bâtiments agricoles de la SCEA des Acacias, sur le fondement des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, enfin, l'arrêté du 17 avril 2025 par lequel le maire de Wannehain a accordé à la société un permis de construire modificatif ;
- un mémoire enregistré le 24 mai 2025 par lequel elle conclut au rejet de la requête de la SCEA des Acacias et soutient, d'une part, que le nouveau moyen invoqué par la société tiré de l'illégalité de l'arrêté de dérogation du 14 avril 2025 eu égard à la méconnaissance de l'article L.123-19 du code de l'environnement, à l'absence de consultation de la chambre d'agriculture et à l'erreur manifeste dans l'appréciation des spécificités locales n'est pas fondé, d'autre part, que les vices identifiés par l'arrêt avant-dire droit ont été régularisés par le permis modificatif du 17 janvier 2025.
La SCEA des Acacias, représentée par Me David Deharbe, a présenté des mémoires enregistrés les 13 mai et 9 juin 2025 par lesquels elle conclut aux mêmes fins que la requête et demande en outre l'annulation du permis modificatif accordé le 17 avril 2025.
Elle soutient que :
- l'arrêté de dérogation du maire de Wannehain est illégal pour défaut de consultation du public, en méconnaissance de l'article L.123-19-1 du code de l'environnement, pour défaut de consultation de la chambre d'agriculture, en méconnaissance de l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime en son 4ème alinéa, pour erreur de droit et pour erreur manifeste d'appréciation ;
- le permis modificatif est illégal : du fait de l'illégalité de l'arrêté de dérogation, il méconnaît l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime ; il méconnaît l'article R.111-2 du code de l'urbanisme du fait du risque sanitaire induit par une distance d'éloignement inférieure à 60 mètres.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- l'arrêté du ministre de l'écologie et du développement durable du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de bovins, de volailles et/ou de gibier à plumes et de porcs soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement ;
- l'arrêté du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer du 10 novembre 2009 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les installations de méthanisation soumises à autorisation en application du titre Ier du livre V du code de l'environnement ;
- l'arrêté du ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer du 12 août 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation relevant du régime de l'enregistrement au titre de la rubrique n° 2781 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- l'arrêté du ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie du 27 décembre 2013 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations relevant du régime de l'autorisation au titre des rubriques n°s 2101 et 3660 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,
- et les observations de Me Kerrich, représentant la commune de Wannehain.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêt avant-dire droit du 19 décembre 2024, la cour, après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Lille pour irrégularité, a décidé, en application de l'article L.600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer sur la demande d'annulation présentée par la SCEA des Acacias contre l'arrêté du 9 juin 2022, confirmé sur recours gracieux, du maire de Wannehain portant délivrance à la société Tisserin Habitat d'un permis de construire vingt-et-une maisons et de transformer un bâtiment en cellule commerciale et deux logements, sur un terrain situé 1 rue de la grande ferme, sur les parcelles cadastrées B26, B27, B469, B470, B471, B472, B815 et B818. Ce sursis à statuer a été prononcé pour permettre à la commune de Wannehain et à la SA HLM Tisserin Habitat de notifier à la cour un permis de construire régularisant les vices tirés de la méconnaissance de l'article L. 431-9 du code de l'urbanisme, de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime et de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme. La cour a écarté les autres moyens invoqués à l'encontre de l'arrêté du 9 juin 2022 implicitement confirmé sur recours gracieux, à l'exception de celui-tiré de la méconnaissance de l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain, dont elle a réservé la réponse. A l'issue du délai imparti, le maire de Wannehain a transmis à la cour le permis modificatif délivré à la SA HLM Tisserin Habitat le 17 avril 2025 et l'arrêté de dérogation pris le 14 avril 2025 au titre du 4ème alinéa de l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime. La SCEA des Acacias persiste dans ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 9 juin 2022 implicitement confirmé sur recours gracieux et conteste en partie la régularisation intervenue. Elle demande, en outre, l'annulation du permis modificatif de régularisation accordé le 17 avril 2025.
Sur la régularisation des vices entachant l'arrêté du 1er juin 2022 :
2. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ". Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge qui a sursis à statuer sur leur fondement d'apprécier, pour statuer sur le litige lorsqu'une mesure de régularisation lui a été notifiée, si cette mesure assure la régularisation du vice qu'il a relevé quand bien même les parties, invitées à le faire, n'ont pas présenté d'observations devant lui sur ce point.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis :
3. Dans son arrêt avant-dire droit, la cour a estimé que l'absence d'information suffisante s'agissant du recensement de la végétation existante et de son traitement par le projet n'a pas permis à l'autorité administrative d'apprécier le respect, par le projet, des prescriptions de l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain, imposant, notamment, la plantation d'au moins un arbre par 100 mètres carré (m2) de terrains réservés au stationnement et à la desserte. Elle en a déduit que le permis de construire en litige a été délivré au vu d'un dossier de demande de permis de construire lacunaire, n'ayant pas permis à l'administration d'apprécier la conformité du projet à l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain, dont la méconnaissance ne peut être exclue.
4. Il ressort des pièces versées au dossier par la SA HLM Tisserin Habitat qu'à l'invitation de la cour dans son arrêt avant-dire droit, celle-ci a déposé le 12 mars 2025 une demande de modification, à titre de régularisation, du permis du 9 juin 2022, en cours de validité, portant sur l'état initial du site. Le plan de masse " végétation existante " a été complété le 10 mars 2025 de façon à mentionner que la parcelle comportait initialement des arbustes, quatre arbres de basse tige, une petite haie et un poirier à divers endroits du terrain précisément localisés et que l'ensemble de la végétation serait enlevé dans le cadre du projet. Le plan de masse " plantations état projeté " a été complété le même jour afin de préciser que treize arbres tiges seraient plantés sur les aires de stationnement, quatre arbres tige sur la place et que l'aménagement du jardin participatif serait géré par le béguinage et changerait au fil des saisons, qu'il serait bordé en front à rue d'une petite haie de type champêtre et que les espaces verts du béguinage seraient également gérés par celui-ci avec des plantations de type arbustes et arbres champêtres. Ces deux plans de masse font ainsi apparaître clairement les plantations maintenues, supprimées ou créées.
5. Les informations apportées par la SA HLM Tisserin Habitat dans sa demande de permis modificatif sur le recensement de la végétation existante avant la délivrance du permis du 9 juin 2022 et son traitement par le projet ont permis à l'autorité administrative d'apprécier la suppression des cinq arbres de basse tige, de la petite haie et des arbustes qui se trouvaient sur le terrain d'assiette au regard de la plantation envisagée de dix-sept arbres tiges d'1,50 mètre à 2 mètres de haut et de l'aménagement du jardin participatif et des espaces verts du béguinage. Par suite, le vice tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis en l'absence d'information suffisante s'agissant du recensement de la végétation existante et de son traitement par le projet doit être regardé comme régularisé.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain :
6. Dans son arrêt avant-dire droit, la cour a réservé la réponse au moyen de la SCEA des Acacias tiré de la méconnaissance par le projet des dispositions de l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain dans l'attente de la réponse apportée sur la régularisation du vice précédemment identifié.
7. Aux termes de l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain : " (...) Pour les constructions à usage d'habitation, les espaces verts au sol, ou en terrasse, doivent couvrir au moins 10% de la surface du terrain. / Les aires de stationnement doivent être plantées à raison d'un arbre par 100 m2 de terrains réservés au stationnement et à la desserte au minimum. (...) ".
8. Il ressort du plan de masse " plantations état projeté " que la superficie de l'aire de stationnement et de desserte du projet sera de 1 275 m2. Par suite, la plantation annoncée de treize arbres tiges sur les aires de stationnement répond à la prescription posée par l'article UA13 du règlement du PLU de Wannehain d'au minimum un arbre par 100 m2 de terrains réservés au stationnement et à la desserte. Le moyen tiré de la méconnaissance par le projet des dispositions de l'article UA13 du règlement du PLU doit, par suite, être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime :
9. Dans son arrêt avant-dire droit, la cour a considéré que la règle d'éloignement de cent mètres entre, d'une part, les bâtiments d'élevage des bovins exploités par la SCEA des Acacias et, d'autre part, les constructions à usage d'habitation projetées s'imposait à l'autorité en charge de statuer sur la demande de permis de construire présentée par la SA HLM Tisserin Habitat. Elle a constaté qu'il ne ressortait pas du règlement du PLU de Wannehain qu'en application des 2ème et 3ème alinéas de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, des règles d'éloignement différentes de celles résultant du premier alinéa de cet article auraient été fixées pour tenir compte de l'existence de constructions agricoles antérieurement implantées. Elle a également estimé qu'il ne pouvait s'évincer du simple visa de l'avis de la chambre d'agriculture du Nord-Pas-de-Calais du 3 février 2022 de non-opposition à la délivrance du permis de construire que le maire de Wannehain aurait entendu en l'espèce implicitement autoriser, par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, une distance d'éloignement inférieure aux cent mètres requis entre les bâtiments d'élevage de la SCEA des Acacias et les habitations projetées pour tenir compte des spécificités locales.
10. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime : " Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, une distance d'éloignement inférieure peut être autorisée par l'autorité qui délivre le permis de construire, après avis de la chambre d'agriculture, pour tenir compte des spécificités locales. Une telle dérogation n'est pas possible dans les secteurs où des règles spécifiques ont été fixées en application du deuxième alinéa. ".
11. Il ressort des nouvelles pièces produites au dossier que, par un arrêté du 14 avril 2025, le maire de Wannehain a accordé une dérogation expresse à la règle de distance entre le projet et les bâtiments agricoles de la SCEA des Acacias, sur le fondement des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime. La SCEA des Acacias soutient que cet arrêté est illégal et que son illégalité prive de base légale le permis modificatif au regard de ces mêmes dispositions.
12. En premier lieu, la société soutient que l'arrêté de dérogation est entaché d'un vice de procédure pour défaut de consultation du public en méconnaissance de l'article L.123-19-1 du code de l'environnement, qui dispose que : " I. - Le présent article définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / Les dispositions du présent article ne s'appliquent pas aux décisions qui modifient, prorogent, retirent ou abrogent les décisions mentionnées à l'alinéa précédent soumises à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. / Ne sont pas regardées comme ayant une incidence sur l'environnement les décisions qui ont sur ce dernier un effet indirect ou non significatif (...) ".
13. Toutefois, dans la mesure où la dérogation, qui concerne un projet nominativement désigné, est un acte individuel, les dispositions précédentes ne lui sont pas applicables. Le moyen tiré du défaut de consultation du public est donc inopérant.
14. En deuxième lieu, la société soutient que l'arrêté de dérogation est entaché d'un vice de procédure pour défaut de consultation de la chambre d'agriculture, en méconnaissance de l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime en son 4ème alinéa.
15. Il ressort de l'arrêté de dérogation du 14 avril 2025 que le maire fait référence à l'avis favorable émis par la chambre d'agriculture du fait de la situation du " projet derrière un bâtiment déjà existant dans le périmètre de réciprocité, sans impact supplémentaire sur les exploitations agricoles voisines dont la SCEA des Acacias ". Certes, il n'est pas établi ni même allégué que le maire de Wannehain aurait procédé à une nouvelle consultation de la chambre d'agriculture avant de prendre la dérogation, mais il ressort de l'arrêté du 9 juin 2022 accordant le permis de construire initial à la SA HLM Tisserin Habitat que celui-ci visait l'avis favorable de la chambre d'agriculture du Nord-Pas-de-Calais du 3 février 2022. Cet avis relève que le futur projet, certes inclus dans le périmètre de réciprocité, est " plus éloigné que les habitations existantes et n'entravera pas le développement futur de l'exploitation d'élevage ". Dès lors que le projet de construction de la SCEA des Acacias n'a pas fait l'objet d'une modification de son implantation mais a seulement été complété, dans le cadre de la régularisation, par les informations manquantes sur la végétation existante et les plantations envisagées, un nouvel avis de la chambre d'agriculture ne s'imposait pas. Le moyen tiré du défaut de consultation de la chambre d'agriculture doit donc être écarté.
16. En troisième lieu, la société soutient que l'arrêté de dérogation est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions du plan d'aménagement et de développement durables (PADD) qui, en vertu de l'article L.151-5 du code de l'urbanisme, définit notamment les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers.
17. Certes, le PADD promeut le maintien de l'activité agricole dans la commune de Wannehain dans une logique de diversification et note comme enjeu la préservation de l'accessibilité des fermes et la conservation des possibilités d'extension. Toutefois, ce document, intégré au PLU, n'est pas directement opposable à la dérogation prise en vertu du 4ème alinéa de l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime. En tout état de cause, il n'est pas établi que la dérogation en cause remette en cause l'objectif de conservation et de développement de l'activité agricole dans la commune. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit donc être écarté.
18. En quatrième lieu, la société soutient que l'arrêté de dérogation est entaché d'une erreur d'appréciation.
19. D'une part, il ressort des pièces du dossier que quatre exploitations agricoles sur les cinq existant dans la commune sont installées dans le centre-bourg, à proximité de maisons d'habitation, que l'activité agricole exercée par la SCEA des Acacias se déploie de l'autre côté de la route qui borde le projet, que les bâtiments d'habitation envisagés se situent derrière l'église implantée en face et au plus proche de l'exploitation agricole de la société et qu'ils n'aggravent pas la proximité de la cohabitation entre logements et activités agricoles. En outre, la commune fait valoir, sans être contestée, sa politique en matière de logement favorisant la mixité sociale et intergénérationnelle et la forte demande de logements en attente, notamment pour le projet de béguinage. Par ailleurs, elle souligne le manque de foncier disponible sur la commune et les contraintes de développement urbain du fait de la plaine de Bouvines et de la trame verte et bleue. Compte tenu de ces éléments, la SCEA des Acacias n'est pas fondée à soutenir que le maire de Wannehain n'aurait pas pris en compte les spécificités locales pour justifier son arrêté de dérogation.
20. D'autre part, la SCEA des Acacias se borne à indiquer que l'extension de son activité se trouve limitée par le projet, sans faire état d'aucun projet concret d'extension, notamment en direction du terrain d'assiette du projet qui n'est, au demeurant, pas classé en zone agricole. En outre, si elle critique la réalisation de logements sur les parcelles concernées plutôt que sur la parcelle 442, classée en zone N et plaine de loisir, elle n'établit ni même n'allègue que le classement des parcelles serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation, ni que le choix du terrain d'assiette du projet ne serait pas adapté.
21. Il suit de là que le moyen tiré de l'erreur d'appréciation de l'arrêté de dérogation doit être écarté comme non fondé.
22. En cinquième et dernier lieu, dès lors que les moyens dirigés contre l'arrêté de dérogation ont été écartés aux points précédents, la société n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cet arrêté à l'appui de sa contestation de l'arrêté du 17 avril 2025 portant permis de construire modificatif.
23. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime doit être écarté.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme :
24. Dans son arrêt avant-dire droit, la cour a considéré que l'implantation du projet à moins de cent mètres des bâtiments agricoles exploités par la SCEA des Acacias, en méconnaissance des dispositions de l'article L.111-3 du code rural et de la pêche maritime, ne permettait pas d'assurer que le projet ne portait pas atteinte à la salubrité publique.
25. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
26. Pour l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, les risques d'atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique qu'il appartient à l'autorité compétente de prendre en compte sont aussi bien ceux auxquels peuvent être exposés les occupants de la construction pour laquelle le permis est sollicité que ceux que l'opération projetée peut engendrer pour des tiers.
27. En se bornant à souligner la proximité entre son exploitation et le projet de construction et le risque sanitaire induit par une distance d'éloignement inférieure à soixante mètres, la SCEA des Acacias n'établit pas la réalité de l'atteinte à la salubrité publique qui résulterait des nuisances olfactives et sonores susceptibles d'être causées au voisinage par son bétail. Il ressort des plans du projet qu'entre les bâtiments d'élevage exploités par la SCEA des Acacias et les premières maisons projetées s'interposent l'église de Wannehain et le jardin participatif du béguinage. Enfin, le risque de plaintes émanant des futurs occupants des logements projetés n'apparaît en tout état de cause pas avéré eu égard à la configuration des lieux et alors que ceux-ci sont informés de la préexistence de son exploitation. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme relatives à la salubrité publique ne peut qu'être écarté.
28. Il résulte de ce qui précède que la SCEA des Acacias n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 9 juin 2022 implicitement confirmé sur recours gracieux et mis à sa charge la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Wannehain au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative. Par suite, elle n'est pas fondée à demander l'annulation du permis de construire du 9 juin 2022, ni de la décision implicite rejetant son recours gracieux, non plus que du permis modificatif du 17 avril 2025.
Sur les frais liés au litige :
29. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ". Il résulte de ces dispositions que le paiement des sommes exposées et non comprises dans les dépens ne peut être mis à la charge que de la partie qui perd pour l'essentiel. La circonstance qu'au vu de la régularisation intervenue en cours d'instance, le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre la décision initiale, dont le requérant était fondé à soutenir qu'elle était illégale et dont il est, par son recours, à l'origine de la régularisation, ne doit pas à elle seule, pour l'application de ces dispositions, conduire le juge à mettre les frais à sa charge ou à rejeter les conclusions qu'il présente à ce titre.
30. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par la SCEA des Acacias au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SCEA des Acacias est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA des Acacias, à la société anonyme (SA) d'habitations à loyer modéré (HLM) Tisserin Habitat et à la commune de Wannehain.
Copie en sera adressée à la communauté de communes de Pévèle-Carembault.
Délibéré après l'audience publique du 26 juin 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juillet 2025.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°23DA02294 2