Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen :
- d'annuler l'arrêté du 25 mai 2023 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
- d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pendant la durée de ce réexamen ;
- de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 2303069 du 22 février 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa requête.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 14 mai 2024, et des mémoires complémentaires et de production de pièces enregistrés les 4 juin 2024, 1er août 2024, 28 octobre 2024 et 2 mars 2025, M. B... A..., représenté par Me Elie Montreuil, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 25 mai 2023 ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler pendant la durée de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité dont est elle-même entachée la décision de refus de titre de séjour ; elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de renvoi est illégale en raison de l'illégalité dont est entachée la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2024, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
- il s'en rapporte à son mémoire de première instance.
Par une ordonnance du 27 mars 2025, la clôture d'instruction a été fixée au 16 avril 2025.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 avril 2024 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- et les observations de Me Elie Montreuil, représentant M. B... A....
Une note en délibéré présentée par M. A... a été enregistrée le 11 juin 2025.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., né le 2 octobre 2004 à Ratoma / Conakry, ressortissant de la République de Guinée, déclare être entré en France en novembre 2020. En dépit de sa présentation sous une autre identité dans le département du Nord, qui a refusé sa prise en charge, et de l'évaluation du service spécialisé concluant à sa majorité, la juge des enfants du tribunal judiciaire de Rouen a reconnu sa minorité et l'a confié aux services de l'aide sociale à l'enfance (ASE) de Seine-Maritime qui l'ont pris en charge. M. A... a déposé, le 12 septembre 2022, sur la plateforme dédiée du service préfectoral, une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 25 mai 2023, le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... demande l'annulation du jugement du 22 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les moyens développés en première instance :
2. Il appartient au requérant, tant en première instance qu'en appel, d'assortir ses moyens des précisions nécessaires à l'appréciation de leur bien-fondé. Il suit de là que le juge d'appel n'est pas tenu d'examiner un moyen que l'appelant se borne à déclarer reprendre en appel, sans l'assortir des précisions nécessaires ou sans joindre son mémoire de première instance auquel il fait référence.
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a déclaré devant la cour administrative d'appel " s'en rapporter à ses écritures de première instance ", sans les joindre et sans développer ni même reprendre les moyens déjà invoqués en première instance. Il ne met ainsi pas la cour à même de se prononcer sur ceux-ci.
En ce qui concerne les moyens développés devant la cour :
S'agissant de la décision portant refus d'admission au séjour :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance (...) entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française (...) ".
5. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " ou " travailleur temporaire ", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.
6. Pour rejeter la demande de titre de séjour formée par M. A..., le préfet de la Seine-Maritime a non seulement estimé que, compte-tenu des inexactitudes et irrégularités entachant les documents produits par l'intéressé pour justifier de son état civil, celui-ci ne pouvait être regardé comme étant âgé de moins de dix-huit ans lorsqu'il a été confié à l'ASE, mais s'est aussi fondé sur la situation de l'intéressé, appréciée de façon globale au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française.
7. M. A... ne conteste pas en appel le motif de refus tenant à son absence de minorité lorsqu'il a été confié à l'ASE. Il n'établit donc pas remplir l'une des conditions préalables nécessaires pour pouvoir prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, avant l'appréciation globale de sa situation par l'autorité administrative. En tout état de cause, il ressort certes des pièces du dossier que M. A... a intégré un cursus scolaire en lycée professionnel en vue de l'obtention du certificat d'aptitude professionnelle (CAP) " production et service en restaurations " et a conclu, dans ce cadre, un contrat d'apprentissage avec un établissement de restauration situé à Sotteville-lès-Rouen. Les attestations de professeurs, camarades de lycée, employeur et tiers qu'il produit témoignent de sa bonne intégration au sein de la société française. Cependant, à la date de la décision attaquée, M. A..., célibataire et sans charge de famille, était présent en France depuis seulement deux ans et demi. En outre, il ne justifie pas être dépourvu de toute attache en Guinée où il a vécu la majorité de son existence et où réside toujours sa mère. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme non fondé.
8. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 7, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts poursuivis, ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
10. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant refus d'admission au séjour.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
11. En premier lieu, l'ensemble des moyens dirigés contre la décision portant refus d'admission au séjour ayant été écartés, M. A... n'est pas fondé à en invoquer, par voie d'exception, l'illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français.
12. En deuxième lieu, M. A... ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui de sa demande d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
13. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points 7 et 9 du présent arrêt, les moyens tirés de ce que la décision obligeant M. A... à quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
14. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
15. L'ensemble des moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, M. A... n'est pas fondé à en invoquer, par voie d'exception, l'illégalité à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
16. Il suit de là que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination.
17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 25 mai 2023, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 31 juillet 1991. Les mêmes conclusions réitérées en appel doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Elie Montreuil et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise pour information au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 11 juin 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Damien Vérisson, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juin 2025.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°24DA00925 2