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26/06/2025 | FRANCE | N°22DA01502

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 1ère chambre, 26 juin 2025, 22DA01502


Vu la procédure suivante :





Procédure antérieure contentieuse :



La commune de Thieux, l'association du regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise (ROSO), M. C... B..., M. A... J..., M. G... D..., Mme I... E... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 5 mai 2017 par lequel le préfet de l'Oise a autorisé la société Parc Eolien Nordex LVI à exploiter deux éoliennes sur le territoire de la commune de Noyers-Saint-Martin, ainsi que la décision implicite portant rejet de leur recours

gracieux.



Par un jugement avant-dire droit n° 1703044 du 22 novembre 2019, le t...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure contentieuse :

La commune de Thieux, l'association du regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise (ROSO), M. C... B..., M. A... J..., M. G... D..., Mme I... E... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 5 mai 2017 par lequel le préfet de l'Oise a autorisé la société Parc Eolien Nordex LVI à exploiter deux éoliennes sur le territoire de la commune de Noyers-Saint-Martin, ainsi que la décision implicite portant rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement avant-dire droit n° 1703044 du 22 novembre 2019, le tribunal administratif d'Amiens a sursis à statuer sur cette demande jusqu'à l'expiration d'un délai de dix-huit mois à compter de la notification de ce jugement pour permettre la régularisation, le cas échéant, de l'arrêté du 5 mai 2017, au regard du vice de procédure tenant à l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact.

Par un jugement n°1703044 du 19 mai 2022, le tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté du 5 mai 2017, en l'absence de toute mesure de régularisation transmise au tribunal.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2022, et des mémoires complémentaires enregistrés les 5 septembre 2024 et 1er octobre 2024, ce dernier n'ayant pas été communiqué, la société Parc éolien " Les Hauts Bouleaux ", anciennement dénommée société Parc éolien Nordex LVI, représentée par Me Hélène Gelas, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 19 mai 2022 ;

2°) de rejeter la demande présentée en première instance par la commune de Thieux, l'association du regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise (ROSO), M. C... B..., M. A... J..., M. G... D..., Mme I... E... et M. F... H... ;

3°) à titre subsidiaire, de lui délivrer l'autorisation complémentaire de régularisation en l'assortissant, le cas échéant, des prescriptions nécessaires à la préservation des intérêts mentionnés à l'article L.511-1 du code de l'environnement ;

4°) à titre plus subsidiaire, d'enjoindre, sous astreinte, au préfet de l'Oise de lui délivrer l'arrêté de régularisation ou de prendre une décision sur la régularisation ;

5°) à titre encore plus subsidiaire, de surseoir à statuer sur la requête en application de l'article L.181-18 du code de l'environnement, pendant le temps nécessaire à la régularisation ;

6°) de mettre à la charge de chacun des demandeurs de première instance la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier pour être insuffisamment motivé en fait, au regard de l'article L. 9 du code de justice administrative, alors que, si le préfet n'a pas émis l'arrêté de régularisation dans le délai imparti, le vice tenant à l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact a été régularisé par la réalisation d'une étude chiroptérologique complémentaire dûment soumise au public dans le cadre d'une enquête publique complémentaire ;

- le tribunal a commis une erreur d'appréciation en retenant, dans son jugement avant-dire droit du 22 novembre 2019, l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact ; cette étude était suffisante, son insuffisance éventuelle n'était pas substantielle ;

- en tout état de cause, l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact a été régularisée par une étude complémentaire ;

- elle forme une requête distincte contre la décision tacite de refus de régularisation opposée par le préfet.

La requête a été communiquée le 28 juillet 2022 à l'association du regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise (ROSO) et autres, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et au préfet de l'Oise.

Vu :

- l'arrêt du 18 janvier 2024, par lequel la cour a sursis à statuer à l'exécution du jugement du 19 mai 2022 jusqu'à ce qu'il ait été statué sur l'appel de la société Parc éolien " Les Hauts Bouleaux " contre ce jugement ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Charte de l'environnement ;

- le code de l'environnement ;

- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Legrand présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Stéphane Eustache, rapporteur public,

- et les observations de Me Tatiana Boudrot, représentant la société Parc éolien " Les Hauts Bouleaux ".

Une note en délibéré présentée par la société Parc éolien " Les Hauts Bouleaux " a été enregistrée le 16 juin 2025.

Considérant ce qui suit :

1. La société Parc Eolien Nordex LVI a demandé le 30 octobre 2014 une autorisation unique pour exploiter un parc éolien, dénommé " Les Hauts Bouleaux ", composé de huit aérogénérateurs et de deux postes de livraison sur le territoire des communes de Noyers-Saint-Martin et Thieux. Le préfet de l'Oise lui a délivré, par un arrêté du 1er mars 2016, l'autorisation sollicitée au titre de l'ensemble du parc projeté, à l'exclusion des éoliennes E7 et E8, puis, par un arrêté du 5 mai 2017, une autorisation complémentaire au titre des éoliennes E7 et E8. La commune de Thieux, l'association du regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise (ROSO), M. C... B..., M. A... J..., M. G... D..., Mme I... E... et M. F... H... ont saisi le tribunal administratif d'Amiens pour demander l'annulation de l'arrêté du 5 mai 2017, ainsi que de la décision portant rejet implicite de leur recours gracieux. Par un jugement avant-dire droit du 22 novembre 2019, le tribunal administratif a sursis à statuer sur cette demande jusqu'à l'expiration d'un délai de dix-huit mois à compter de la notification du jugement, pour permettre la régularisation du vice de procédure tenant à l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact. Puis, par un jugement du 19 mai 2022, le tribunal a annulé l'arrêté du 5 mai 2017, en l'absence de transmission de toute mesure de régularisation. La société Parc éolien " Les Hauts Bouleaux ", anciennement dénommée société Parc éolien Nordex LVI, interjette appel de ce second jugement, auquel la cour a sursis à statuer par un arrêt du 18 janvier 2024.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. La société requérante reproche aux premiers juges d'avoir constaté qu'aucun arrêté de régularisation n'avait été pris à la date de leur jugement, sans tenir compte de la réalisation d'une étude chiroptérologique complémentaire, soumise à enquête publique. Toutefois, en indiquant au point 2 de leur décision que l'autorisation était entachée d'un vice entachant sa légalité et devait être annulée dans la mesure où ce vice n'avait pas été régularisé dans le délai imparti par le jugement prononçant un sursis à statuer, non plus qu'à la date de leur décision, les premiers juges ont suffisamment motivé leur décision. Si la société estime, pour sa part, que la régularisation avait déjà eu lieu même en l'absence de décision du préfet pour l'approuver, ce moyen n'a pas trait à la régularité mais au bien-fondé du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. À compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 181-18 du code de l'environnement, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. À ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Elles ne peuvent en revanche utilement soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse de moyens déjà écartés par la décision avant dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

5. En premier lieu, si la société requérante soutient que c'est à tort que le tribunal a considéré que le volet chiroptérologique de l'étude d'impact était insuffisant et que cette insuffisance avait privé le public d'une garantie, elle ne fait pas état de circonstances nouvelles qui remettraient en cause l'existence de ce vice retenu par le jugement avant-dire droit du 22 novembre 2019 qu'elle n'a d'ailleurs pas contesté. Par suite, la société requérante ne peut utilement faire valoir les moyens tirés de l'absence d'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact et de l'absence d'effet de son insuffisance éventuelle sur l'information du public, qui doivent être écartés.

6. En second lieu, à l'appui de son moyen tiré de la régularisation du vice tenant à l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact, la société fait valoir qu'après le jugement du 22 novembre 2019 elle a réalisé une étude chiroptérologique complémentaire et l'a transmise au préfet de l'Oise le 6 mai 2021, que la mission régionale d'autorité environnementale des Hauts de France a rendu un avis le 21 septembre 2021, qu'une enquête publique complémentaire a été menée en janvier 2022, que le commissaire-enquêteur a rendu son rapport et ses conclusions et que le préfet de l'Oise lui a annoncé l'édiction d'un arrêté complémentaire de régularisation au plus tard le 22 juillet 2022, après la réunion de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites en " formation éolien ".

7. Cependant, ni à la date du jugement attaqué, ni à la date du présent arrêt, le préfet n'a édicté l'arrêté de régularisation annoncé. Le préfet doit ainsi être regardé comme ayant refusé de procéder à la régularisation du vice. Dès lors, en l'absence de toute mesure de régularisation transmise au tribunal, l'arrêté du 5 mai 2017 demeure entaché d'illégalité au regard de l'insuffisance du volet chiroptérologique de l'étude d'impact.

8. Il résulte de tout ce qui précède que l'association ROSO et autres sont fondés à demander l'annulation de l'arrêté du 5 mai 2017 par lequel le préfet de l'Oise a autorisé la société Parc Eolien Nordex LVI à exploiter deux éoliennes sur le territoire de la commune de Noyers-Saint-Martin, ainsi que la décision implicite portant rejet de leur recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge des intimés, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, au titre des frais exposés par la société Parc Eolien Nordex LVI et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Parc éolien " Les Hauts Bouleaux " est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Parc éolien " Les Hauts Bouleaux ", à la commune de Thieux, à l'association " Regroupement des organismes de sauvegarde de l'Oise ", à M. C... B..., à M. A... J..., à M. G... D..., à Mme I... E..., à M. F... H... et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

Copie de l'arrêt sera transmise, pour information, au préfet de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 11 juin 2025 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,

- M. Damien Vérisson, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juin 2025.

La présidente-rapporteure,

Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°22DA01502 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01502
Date de la décision : 26/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Isabelle Legrand
Rapporteur public ?: M. Eustache
Avocat(s) : JEANTET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-26;22da01502 ?
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