Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I - Par une requête, enregistrée sous le n° 2408242, M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lille :
1°) d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2024 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et lui a interdit d'y retourner pour une durée d'un an ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 600 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
II - Par une requête, enregistrée sous le n° 2408233, M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Lille :
1°) d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2024 par lequel le préfet du Pas-de-Calais l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Par un jugement n°s 2408233 et 2408242 du 5 septembre 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé les décisions du préfet du Pas-de-Calais en date du 28 juillet 2024 et a rejeté le surplus des conclusions de M. D... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 30 septembre 2024, le préfet du Pas-de-Calais demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 5 septembre 2024 ;
2°) de rejeter les demandes de M. D....
Il soutient que les éléments relatifs à la vie privée et familiale de M. D... ne permettent pas de retenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 novembre 2024, M. A... D..., représenté par Me Lokamba Omba, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête d'appel du préfet du Pas-de-Calais ;
2°) de confirmer le jugement d'annulation du 5 septembre 2024 ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros à verser à son conseil, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.
Il fait valoir que :
- les éléments relatifs à sa vie privée et familiale justifient l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français pour méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thulard, premier conseiller,
- et les observations de Me Seck substituant Me Lokamba Omba, représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., ressortissant turc né le 8 mai 1997 à Bandirma (Turquie), a fait l'objet le 28 juillet 2024 de deux arrêtés par lesquels le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, lui a interdit d'y retourner pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par deux requêtes distinctes, M. D... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler ces décisions. Par un jugement n°s 2408233 et 2408242 du 5 septembre 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé les décisions litigieuses et a rejeté le surplus des conclusions de M. D... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Le préfet du Pas-de-Calais interjette appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Il n'est pas contesté par le préfet du Pas-de-Calais que M. D... est entré en France une première fois en 2015 pour y rejoindre sa mère, alors qu'il était âgé de dix-ans ans. Toutefois, il est demeuré sur le territoire national en méconnaissance de deux décisions portant obligation de quitter le territoire français en date du 28 décembre 2017 et du 13 mai 2019 devenues définitives. Il a, par ailleurs, quitté la France en décembre 2020 pour se rendre en Belgique et ne résidait ainsi de manière continue sur le territoire national que depuis un peu plus de trois ans à la date de l'arrêté litigieux. M. D... ne démontre ni d'ailleurs n'allègue que les membres de sa famille présents en France y résideraient de manière régulière. Il est constant qu'il n'est pas isolé en Turquie, pays où demeure son père. Si l'intimé se prévaut de son mariage le 4 mars 2023 avec une ressortissante marocaine présente régulièrement en France, cette union demeurait très récente à la date de l'arrêté attaqué. Par ailleurs, alors que le préfet du Pas-de-Calais a explicitement contesté dans sa requête d'appel l'existence d'une vie commune entre les époux, M. D... n'a apporté aucune pièce de nature à l'établir, à la seule exception de ses propres déclarations lors de son audition par les forces de l'ordre le 27 juillet 2024. Dans ces conditions, aucune vie commune entre M. D... et son épouse ne peut être considérée comme établie au regard des pièces du dossier à la date du 28 juillet 2024. Enfin, l'épouse de l'intimé réside en France sous couvert d'un titre de séjour en qualité d'étudiante et n'a ainsi pas vocation à demeurer sur le territoire national à l'issue de ses études. Aucune pièce du dossier ne permet d'établir que les deux époux ne pourraient pas à l'avenir régulièrement résider en Turquie ou au Maroc. Si M. D... se prévaut, par ailleurs, de son intégration professionnelle, il ne produit des fiches de paie que depuis octobre 2023, soit depuis moins d'un an à la date de la décision attaquée. Il ne fait enfin état d'aucun autre lien privé particulier sur le territoire national.
4. Dans ces conditions, la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a obligé M. D... à quitter le territoire français n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des buts qu'elle poursuivait. Par suite, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler la décision du 28 juillet 2024 portant obligation de quitter le territoire français et, par voie de conséquence, les décisions subséquentes dont la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et celle portant assignation à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.
5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... en première instance et en appel.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, par un arrêté du 30 octobre 2023, publié le lendemain au recueil spécial n°140 des actes administratifs des services de l'Etat dans le département, le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation à M. B... C..., chef du bureau de l'éloignement, signataire de l'arrêté en litige, à l'effet de signer notamment les décisions d'éloignement. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté.
7. En deuxième lieu, la décision d'éloignement contestée comporte l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles s'est fondé le préfet du Pas-de-Calais pour obliger M. D... à quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation doit être écarté.
8. En troisième lieu, il résulte de la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Il appartient aux Etats membres, dans le cadre de leur autonomie procédurale, de déterminer les conditions dans lesquelles le respect de ce droit est assuré. Ce droit se définit comme celui de toute personne de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours d'une procédure administrative avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Il ne saurait cependant être interprété en ce sens que l'autorité nationale compétente est tenue, dans tous les cas, d'entendre l'intéressé lorsque celui-ci a déjà eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue sur la décision en cause.
9. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. D... a été auditionné par les forces de l'ordre le 27 juillet 2024 et qu'il a été spécifiquement interrogé sur les conditions de son séjour en France ainsi que sur son possible retour en Turquie. Il a ainsi pu présenter toute observation utile antérieurement à l'édiction le 28 juillet 2024 de la décision d'éloignement qu'il conteste. Le moyen tiré d'une méconnaissance de son droit d'être entendu doit ainsi être écarté.
10. En quatrième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, au regard notamment de la motivation retenue par le préfet du Pas-de-Calais dans son arrêté en date du 28 juillet 2024, qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. D... préalablement à l'édiction de la décision portant obligation de quitter le territoire français en litige.
11. En cinquième lieu, l'intimé n'assortit pas ses moyens selon lesquels la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait entachée d'une " erreur de fait " et d'une " erreur de droit " des précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.
12. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / (...) ". Son article L. 421-1 dispose que : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail. ". Aux termes de son article L. 422-8 : " La carte de séjour temporaire portant la mention " recherche d'emploi ou création d'entreprise " autorise l'étranger à exercer une activité professionnelle salariée jusqu'à la conclusion de son contrat ou l'immatriculation de son entreprise. ". Son article L. 423-23 dispose que : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. ". Aux termes de son article L. 435-1 : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...). ". Ses articles L. 423-7 et L. 423-8 disposent que : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. " et que " Pour la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7, lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, doit justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil, ou produire une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. / Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant. ".
13. A supposer que M. D... ait entendu faire valoir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français serait illégale en ce qu'il aurait été fondé à obtenir un titre de séjour sur le fondement d'une des dispositions citées au point précédent, les conditions de son séjour en France telles que rappelées au point 3 ne lui ouvraient, en tout état de cause, pas de droit au séjour en application des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, l'intimé, qui ne démontre ni même d'ailleurs n'allègue suivre un enseignement en France ou y poursuivre des études, être en recherche d'emploi ou en création d'entreprise, disposer d'un contrat de travail visé ou, enfin, être le père d'un enfant français mineur, ne dispose d'aucun droit au séjour sur le fondement des articles L. 422-1, L.421-1, L. 422-8, L. 423-7 ou L. 423-8 du même code.
14. En septième et dernier lieu, eu égard aux conditions du séjour en France de D... telles que rappelées au point 3, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
15. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'intimé n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais l'a obligé à quitter le territoire français.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an :
16. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public. ". Son article L. 612-10 précise que : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...). ".
17. En l'espèce, alors que M. D... ne conteste pas la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, l'intéressé relevait des dispositions qui permettaient à l'autorité préfectorale de lui interdire de retourner sur le territoire français pour une durée allant jusqu'à cinq ans. Eu égard à la durée de sa présence en France, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec le territoire français et à l'existence de précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre et non exécutées, telles que rappelées au point 3, et en l'absence de menace à l'ordre public, la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a limité la durée de cette interdiction à un an n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des objectifs qu'elle poursuit. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut ainsi être qu'écarté.
18. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le préfet du Pas-de-Calais lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an.
En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :
19. En premier lieu, par un arrêté du 30 octobre 2023, publié le lendemain au recueil spécial n°140 des actes administratifs des services de l'Etat dans le département, le préfet du Pas-de-Calais a donné délégation, à M. B... C..., chef du bureau de l'éloignement, signataire de l'arrêté en litige, à l'effet de signer notamment les décisions d'assignation à résidence. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision en litige doit être écarté.
20. En deuxième lieu, la décision contestée comporte l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles s'est fondé le préfet du Pas-de-Calais pour assigner M. D... à résidence. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation doit être écarté.
21. En troisième lieu et ainsi qu'il l'a déjà été dit au point 9, M. D... a été auditionné par les forces de l'ordre le 27 juillet 2024 et a alors pu présenter toute observation utile antérieurement à l'édiction le 28 juillet 2024 de la décision d'assignation à résidence qu'il conteste. Le moyen tiré d'une méconnaissance de son droit d'être entendu doit ainsi être écarté.
22. En quatrième lieu, l'intimé n'assortit pas ses moyens selon lesquels la décision l'assignant à résidence serait entachée d'une " erreur de fait " et d'une " erreur de droit " des précisions suffisantes permettant d'en apprécier la portée et le bien-fondé.
23. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : / 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; / (...). ".
24. Il ressort des pièces du dossier que M. D... relevait bien des dispositions précitées. L'intéressé ne fait par ailleurs valoir aucune conséquence concrète sur sa vie privée et familiale de cette décision, alors au demeurant que le préfet l'a assigné au domicile de son épouse. Les moyens invoqués par M. D... et tirés de ce que la décision l'assignant à résidence serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ou méconnaitrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent ainsi être écartés.
25. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Pas-de-Calais est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a annulé ses décisions du 28 juillet 2024.
Sur les frais de l'instance :
26. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font en tout état de cause obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par M. D... soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance d'appel.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille en date du 5 septembre 2024 est annulé.
Article 2 : Les demandes présentées par M. D... devant le tribunal administratif de Lille et devant la cour sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. A... D... et à Me Lokamba Omba.
Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais.
Délibéré après l'audience du 15 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller,
- M. Damien Vérisson, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juin 2025.
Le rapporteur,
Signé : V. Thulard
La présidente de la formation de jugement,
Signé : I. Legrand
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
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N°24DA02019