Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 15 février 2021 par laquelle le ministre de la justice a rejeté son recours hiérarchique formé contre la décision du 19 novembre 2020 du directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse rejetant sa demande tendant à la reconnaissance d'un accident de service survenu, selon elle, le 7 avril 2016, et d'enjoindre à ce dernier de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident.
Par un jugement n° 2102786 du 1er février 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 avril 2023, Mme C..., représentée par Me Maricourt, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler la décision du ministre de la justice du 15 février 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du ministre de la justice du 15 février 2021 est insuffisamment motivée ;
- l'administration n'a pas procédé à une nouvelle instruction de sa demande, en méconnaissance de l'injonction faite au directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse Grand-Nord, par un jugement du tribunal administratif de Lille du 16 septembre 2020 annulant une précédente décision de refus de reconnaissance d'accident imputable au service ;
- le rejet de sa demande méconnaît les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- il méconnaît les obligations en matière de santé et de sécurité incombant à l'employeur en vertu des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail.
Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2024, le ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 5 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 3 décembre 2024.
En application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées, par courrier du 25 février 2025, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la méconnaissance par les décisions en litige du champ d'application dans le temps de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, qui n'était pas encore entré en vigueur aux dates de survenance de l'accident invoqué par Mme C... et de présentation de sa demande et de ce qu'en conséquence, il y a lieu de procéder à une substitution de base légale et d'appliquer les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 alors en vigueur.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- l'ordonnance n° 2017-53 du 9 janvier 2017 ;
- le décret n° 2019-301 du 10 avril 2019 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dominique Bureau, première conseillère,
- les conclusions de M. Frédéric Malfoy, rapporteur public,
- et les observations de Me Maricourt, représentant Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., éducatrice spécialisée auprès de la protection judiciaire de la jeunesse depuis 2006, exerçait ses fonctions depuis le 27 mars 2012 au sein de l'unité éducative de milieu ouvert (UEMO) d'Hénin-Beaumont, relevant du service territorial éducatif en milieu ouvert (STEMO) de Béthune. Elle a été placée en congé de maladie ordinaire, à plusieurs reprises, au cours du second semestre de l'année 2015, puis en congé de maladie de longue durée pour la période comprise entre le 22 avril 2016 et le 21 octobre 2018. Par un courrier du 14 décembre 2017, Mme C... a sollicité la reconnaissance de l'imputabilité au service d'un accident qu'elle affirme avoir subi le 7 avril 2016. Le 25 mai 2018, la commission de réforme a émis un avis défavorable sur la demande de l'intéressée. Par une décision du 1er juin 2018, le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse Grand-Nord a rejeté sa demande. Par un jugement n°1806823, 180909 du 16 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision et enjoint au directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse de se prononcer à nouveau sur la demande de Mme C.... Par une décision du 19 novembre 2020, le directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse du Grand-Nord a, de nouveau, refusé de reconnaître que Mme C... avait été victime, le 7 avril 2016, d'un accident de service. Par un courrier du 17 décembre 2020, reçu le 18 décembre 2020, Mme C... a formé un recours hiérarchique, rejeté 15 février 2021 par une décision expresse du ministre de la justice. Mme C... relève appel du jugement du 1er février 2023 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 février 2021.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Tant la demande de première instance que la requête d'appel doivent être regardées comme tendant à l'annulation, non seulement de la décision du 15 février 2021 rejetant le recours hiérarchique de Mme C..., que de la décision initiale du directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse Grand-Nord du 19 novembre 2020 refusant de reconnaître qu'elle a été victime d'un accident de service.
En ce qui concerne la base légale des décisions contestées :
3. Lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée ; qu'une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point.
4. Aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction applicable avant sa modification par le II de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique instituant un congé pour invalidité temporaire imputable au service : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ".
5. Aux termes de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, créé par le I de l'article 10 de l'ordonnance précitée du 19 janvier 2017, et dont les dispositions sont désormais reprises aux article L. 822-18 à L. 822-25 du code général de la fonction publique : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article (...) / II. - Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. (...) / VI. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités du congé pour invalidité temporaire imputable au service mentionné au premier alinéa et détermine ses effets sur la situation administrative des fonctionnaires (...) ".
6. L'application de ces dernières dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant notamment les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique d'Etat, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 24 février 2019, du décret du 21 février 2019 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique de l'Etat, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était au demeurant prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis. Il en résulte que les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017, sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 21 février 2019.
7. Le droit des agents publics à bénéficier d'une prise en charge par l'administration à raison d'un accident ou d'une maladie reconnus imputables au service est constitué à la date à laquelle l'accident est intervenu ou la maladie a été diagnostiquée. Du fait de l'annulation, par le jugement du 16 septembre 2020, de sa décision du 1er juin 2018, le directeur interdépartemental de la protection judiciaire de la jeunesse s'est retrouvé saisi de la demande de reconnaissance d'imputabilité au service, présentée par Mme C... le 14 décembre 2017, d'un accident du travail survenu le 7 avril 2016. Il lui appartenait ainsi d'examiner cette demande au regard des conditions de fond fixées par les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur, le 24 février 2019, de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Par suite, les décisions contestées du 19 novembre 2020 et du 15 février 2021 refusant de reconnaître que Mme C... avait été victime d'un accident imputable au service le 7 avril 2016 et rejetant le recours hiérarchique formé par cette dernière, ne pouvaient trouver leur base légale dans les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, issu de l'ordonnance du 19 janvier 2017, dont ces décisions ont fait application. Toutefois, le pouvoir d'appréciation dont dispose l'autorité administrative en vertu des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de cette ordonnance est le même que celui dont l'investit l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 et les garanties dont sont assortis ces textes sont similaires. Aussi dans cette mesure, et alors qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C... a bénéficié de la consultation de la commission de réforme qui a émis un avis le 25 mai 2018, il y a lieu de substituer ces dispositions à la base légale retenue par les décisions contestées.
En ce qui concerne le moyen tiré de défaut de motivation de la décision du 15 février 2021 :
8. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Et aux termes de l'article 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Enfin, aux termes de l'article L. 411-5 de ce code : " La décision rejetant un recours administratif dirigé contre une décision soumise à obligation de motivation en application des articles L. 211-2 et L. 211-3 est motivée lorsque cette obligation n'a pas été satisfaite au stade de la décision initiale ".
9. La décision du 19 novembre 2020 du directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse Grand Nord, refusant de reconnaître l'existence d'un accident imputable au service à l'origine de la pathologie de Mme C..., cite les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 et vise le décret du 14 mars 1986, dont elle fait application. Elle précise de manière suffisamment détaillée les considérations de fait sur laquelle elle se fonde en énonçant notamment que l'état anxiodépressif de l'intéressée " est lié à des difficultés professionnelles générales et à un contexte de travail global insusceptible de revêtir le caractère d'un évènement soudain, que l'intéressée n'apporte en outre aucun élément permettant de rattacher ces affections médicales à l'intervention de l'entretien hiérarchique qui s'est déroulé le 7 avril 2016 ". Les mentions que comporte cette décision sont ainsi de nature à mettre en mesure l'appelante d'en discuter utilement les motifs et le juge d'exercer son contrôle. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision du 15 février 2021 rejetant le recours hiérarchique de Mme C..., qui ne présentait pas un caractère obligatoire, doit être écarté.
En ce qui concerne les moyens relatifs au défaut d'examen de la situation particulière de Mme C... et à la méconnaissance de l'injonction prescrite par le jugement du 16 septembre 2020 :
10. Il ressort des termes du jugement du 16 septembre 2020 que le tribunal administratif de Lille, après avoir annulé la décision du 1er juin 2018 du directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse Grand-Nord refusant de reconnaître que Mme C... avait été victime d'un accident imputable au service, au double motif que cette décision avait été signée par une autorité incompétente à cet effet et était insuffisamment motivée, a enjoint au directeur interrégional de la protection judiciaire de la jeunesse Grand-Nord de se prononcer à nouveau sur cette demande. Eu égard aux motifs de cette annulation contentieuse, et en l'absence de nouvelle circonstance de droit ou de fait pertinente, ce jugement impliquait seulement l'intervention d'une nouvelle décision, suffisamment motivée et signée par une autorité compétente, sans imposer à l'administration de reprendre dans son intégralité la procédure d'examen de la demande de Mme C... et, en particulier, de convoquer à nouveau l'intéressée, de la soumettre à un nouvel examen médical ou de procéder à une nouvelle consultation de la commission de réforme. Par suite, les moyens tirés de ce que les décisions contestées seraient intervenues à l'issue d'un examen insuffisant de la situation particulière de Mme C... et en méconnaissance du caractère exécutoire du jugement du 16 septembre doivent être écartés.
En ce qui concerne les moyens relatifs à la qualification d'accident de service de la rencontre de médiation du 7 avril 2016 :
11. Constitue un accident de service, pour l'application des dispositions précitées, un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, lequel peut conduire le supérieur hiérarchique à adresser aux agents des recommandations, remarques, reproches ou à prendre à leur encontre des mesures disciplinaires, un entretien, notamment d'évaluation, entre un agent et son supérieur hiérarchique, ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, quels que soient les effets qu'il a pu produire sur l'agent.
12. Il ressort des pièces du dossier qu'après le signalement par Mme C... à la directrice du STEMO de Béthune, durant le mois de juillet 2015, d'un vol d'argent liquide dont elle avait été victime sur son lieu de travail, ses relations avec les membres de son environnement professionnel se sont fortement dégradées, l'intéressée reprochant à sa supérieure hiérarchique directe, responsable de l'UEMO d'Hénin-Beaumont, d'être à l'origine de rumeurs selon lesquelles elle avait accusé du vol deux de ses collègues et de l'émergence à son détriment d'un climat conflictuel au sein du service. Mme C... a été placée en congé de maladie ordinaire à plusieurs reprises durant le second semestre 2015 et, sur le conseil de la directrice du STEMO, a consulté le médecin de prévention, qui l'a reçue à plusieurs reprises. Saisi d'un courrier de l'avocate de Mme C..., signalant une situation de harcèlement dont cette dernière s'estimait victime et réclamant l'engagement d'une enquête administrative, le directeur territorial de la protection judiciaire de la jeunesse a organisé une réunion, qui s'est tenue le 5 février 2016, à laquelle ont notamment participé Mme C... et la directrice de l'UEMO, et à l'issue de laquelle a été préconisée l'organisation d'entretiens visant à dissiper les malentendus à l'origine de cette situation et à rétablir l'apaisement entre les protagonistes. Le 23 février 2016, la directrice du STEMO a reçu, en présence d'un représentant syndical, Mme C... qui, au cours de cet entretien, a exposé plusieurs griefs concernant la responsable de l'UEMO. Ces deux agentes ont été conviées par la directrice du STEMO à une " rencontre de médiation ", organisée le 7 avril 2016. L'appelante affirme avoir été victime, au cours de cet entretien, d'un choc émotionnel entraînant une dégradation de son état psychique, à l'origine des arrêts de travail qui lui ont été prescrits à compter du 22 avril 2016, conformément aux recommandations du médecin de prévention qui l'avait reçue la veille et du congé de maladie de longue durée dont elle a bénéficié pour la période comprise entre le 22 avril 2016 et le 21 octobre 2018.
13. En premier lieu, Mme C... soutient que le refus de reconnaissance, en tant qu'accident imputable au service, de la rencontre de médiation du 7 avril 2016 méconnaît les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, issues de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Elle doit ainsi être regardée comme invoquant la méconnaissance, par les décisions contestées, des dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de cette ordonnance. A cet égard, elle fait valoir que cette réunion, qui a effectivement eu lieu pendant ses heures de service et sur son lieu de travail, est constitutive d'un événement unique et précis à l'origine de sa pathologie, alors même qu'elle se trouvait déjà dans une situation difficile, et que les experts ont relevé l'absence d'état antérieur. Toutefois, il ressort du rapport d'expertise établi le 26 février 2018 par le médecin psychiatre qui suit régulièrement l'intéressée depuis mai 2016, que celle-ci souffre depuis la fin de l'année 2015 de troubles anxiodépressifs présentant un caractère réactionnel à un environnement délétère marqué notamment par une dégradation de ses relations professionnelles avec sa supérieure hiérarchique directe, ainsi qu'avec ses collègues de travail, ayant nécessité un premier arrêt de maladie dès cette période. Ainsi, ces troubles ne constituent pas la conséquence directe de l'événement précis que constitue la rencontre de médiation du 7 avril 2016. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette rencontre aurait donné lieu de la part des supérieures de Mme C... à des comportements ou à des propos excédant l'exercice normal de leur pouvoir hiérarchique, l'appelante n'apportant aucune précision sur les circonstances à l'origine de la réaction émotionnelle intense qu'elle dit avoir éprouvée à cette occasion. Enfin, l'avis de la commission de réforme du 25 mai 2018, qui n'est entaché d'aucune contradiction interne, relève que " l'intéressée n'apporte pas la preuve qu'elle a été victime d'un fait accidentel à un moment précis " de sorte que l'arrêt de travail, les soins et examens spécialisés dont elle a bénéficié ne sont pas à prendre en compte au titre d'un accident de service. Dans ces conditions, l'entretien du 7 avril 2016 ne saurait être regardé comme un événement soudain et violent susceptible d'être qualifié d'accident de service, alors même qu'il a pu avoir un effet aggravant sur l'état de santé de l'intéressée. Par suite, les décisions contestées ne méconnaissent pas les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 dans leur rédaction applicable au litige.
14. En deuxième lieu, il est constant, comme le mentionnent d'ailleurs l'avis de la commission de réforme du 25 mai 2018 et le recours hiérarchique formé par Mme C..., que sa demande portait sur la reconnaissance d'un accident imputable au service. Les décisions contestées ont eu pour objet exclusif le rejet de cette demande. Par suite, et alors que, comme a été dit au point précédent, l'administration n'a ainsi pas méconnu les dispositions de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984, Mme C... ne saurait utilement soutenir que ces décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation en raison de l'existence d'un lien entre les troubles anxiodépressifs dont elle souffre et les conditions d'exercice de son activité professionnelle, qui ne pourrait être utilement invoqué qu'à l'encontre d'une décision refusant de reconnaître l'imputabilité au service de cette pathologie. Le moyen ainsi soulevé doit donc être écarté comme inopérant.
15. Enfin, Mme C... soutient que son employeur aurait méconnu ses obligations en matière de protection de la santé et de la sécurité posées par les dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail, notamment en tardant à prendre en considération ses demandes de mutation et tendant à la reprise de son activité professionnelle dans le cadre d'un mi-temps thérapeutique. Toutefois, un tel moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant dès lors qu'ainsi qu'il a été dit au point 13, la rencontre du 7 avril 2016 ne saurait être qualifiée d'accident du travail.
16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Sur les frais d'instance :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais, non compris dans les dépens, exposés par Mme C..., soient mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de la justice.
Délibéré après l'audience publique du 4 mars 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- Mme Dominique Bureau, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 mars 2025.
La rapporteure,
Signé : D. Bureau
La présidente de chambre,
Signé : M.-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au ministre de la justice ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
C. Huls-Carlier
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N°23DA00602