Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. Par une requête, enregistrée sous le n°2007484, l'association Secours catholique - Caritas France, l'association Médecins du monde, la Fédération des acteurs de la solidarité, l'Auberge des migrants, l'association Utopia 56, l'association Help Refugees Prism the Gift Fund, la fondation Abbé A..., Emmaüs France, la Ligue des droits de l'Homme, l'association la Cimade, le Syndicat des avocats de France, le Syndicat de la magistrature et l'association SALAM (Soutenons, Aidons, Luttons, Agissants pour les Migrants et les pays en difficulté), ont demandé au tribunal administratif de Lille :
1°) d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2020 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a interdit les distributions gratuites de boissons et denrées alimentaires en certains lieux du centre-ville de Calais, pour la période comprise entre le 1er octobre et le 19 octobre 2020 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II. Par une requête, enregistrée sous le n°2100364, les mêmes requérants ont demandé au tribunal :
1°) d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2020 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a interdit les distributions gratuites de boissons et denrées alimentaires en certains lieux du centre-ville et du secteur Beau Marais de la commune de Calais, pour la période comprise entre le 17 novembre 2020 et le 14 décembre 2020 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
III. Par une requête, enregistrée sous le n°2101109, les mêmes requérants ont demandé au tribunal :
1°) d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a interdit les distributions gratuites de boissons et denrées alimentaires en certains lieux du centre-ville et du secteur Beau Marais de la commune de Calais, pour la période comprise entre le 15 décembre 2020 et le 12 janvier 2021 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement nos 2007484, 2100364, 2101109 du 12 octobre 2022, le tribunal administratif de Lille a joint ces trois requêtes, les a rejetées en tant qu'elles émanent de l'association la Cimade, de la Fondation Abbé A..., du Syndicat de la magistrature et du Syndicat des avocats de France en son article 1er, a annulé les arrêtés du 30 septembre 2020, du 16 novembre 2020 et du 14 décembre 2020 du préfet du Pas-de-Calais en son article 2 et a condamné l'Etat à verser à l'association Secours catholique - Caritas France, l'association Médecins du monde, la Fédération des acteurs de la solidarité, l'Auberge des migrants, l'association Utopia 56, l'association Help Refugees Prism the Gift Fund, Emmaüs France, la Ligue des droits de l'Homme et l'association SALAM, la somme globale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en son article 3.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2022, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2022 ;
2°) de rejeter les demandes de première instance de l'association Secours catholique - Caritas France et autres.
Le ministre soutient que :
- son appel n'est pas tardif dès lors que le jugement du tribunal administratif de Lille ne lui a pas été notifié ;
- le jugement attaqué est irrégulier en ce qu'il se fonde sur une pièce, à savoir des extraits de conversations groupées, qui n'a pas été communiquée au préfet du Pas-de-Calais, en méconnaissance du principe du contradictoire ;
- la requête introductive d'instance devant le tribunal est irrecevable en tant qu'elle émane de l'association La Cimade, de la fondation Abbé A..., du Syndicat de la magistrature, du Syndicat des avocats de France, de l'association Help Refugees - Prism The Gift Fund et de l'association Utopia 56, ainsi que l'a fait valoir le raison le préfet du Pas-de-Calais dans ses écritures de première instance ;
- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, les mesures de police en cause étaient nécessaires, adaptées et proportionnées au but recherché de protection de l'ordre public, compte tenu des nuisances constatées sur la voie publique et notamment de l'abandon de déchets à l'origine de problèmes de salubrité, de la propagation du virus du COVID-19 du fait du regroupement de populations et du non-respect des règles de distanciation, ainsi que des tensions entre des migrants alcoolisés et des riverains ou entre les différentes communautés d'exilés ;
- il s'en remet aux écritures de première instance du préfet du Pas-de-Calais s'agissant des autres moyens soulevés par les associations requérantes de première instance contre les arrêtés litigieux du 30 septembre 2020, du 16 novembre 2020 et du 14 décembre 2020, lesquels ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2023, l'association Secours catholique - Caritas France, l'association Médecins du monde, la Fédération des acteurs de la solidarité, l'Auberge des migrants, l'association Utopia 56, l'association Help Refugees Prism the Gift Fund, Emmaüs France, la Ligue des droits de l'Homme et l'association SALAM (Soutenons, Aidons, Luttons, Agissants pour les Migrants et les pays en difficulté), représentées par la SCP Spinosi, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Les intimées font valoir que :
- la requête d'appel du ministre de l'intérieur et des outre-mer est tardive et par suite irrecevable ;
- contrairement à ce que soutient le ministre, un rapport relatif au " diagnostic rapide eau, hygiène et assainissement " réalisé à Calais par l'association Solidarités International a été joint à leur mémoire en réplique produit dans l'instance n°2007484. Ce rapport contenait les extraits de conversations groupées auquel a fait référence le tribunal dans son jugement contesté. Il en résulte que le tribunal n'a pas méconnu le principe du contradictoire et que le jugement attaqué n'est pas irrégulier ;
- le ministre ne peut utilement contester le bien-fondé du jugement attaqué en ce qu'il aurait jugé recevable les conclusions d'annulation en tant qu'elles émanent de l'association la Cimade, de la fondation Abbé A..., du Syndicat de la magistrature et du Syndicat des avocats de France, dès lors que le tribunal les a précisément rejetées comme irrecevables ;
- contrairement à ce que soutient le ministre, les associations Help-Refugees - Prism the Gift Fund et Utopia 56 ont bien qualité et intérêt à agir à l'encontre des arrêtés du préfet du Pas-de-Calais en date des 30 septembre 2020, 16 novembre 2020 et 14 décembre 2020, ainsi que l'a jugé à raison le tribunal ;
- ainsi que l'a estimé à raison le tribunal, ces arrêtés ne sont pas nécessaires, adaptés et proportionnés aux buts recherchés de prévention des troubles à l'ordre public et sanitaires sur le territoire de la commune de Calais ;
- ces arrêtés sont par ailleurs entachés d'incompétence en ce qu'ils prononcent une interdiction de distribution de denrées dans l'enceinte des collèges, lycées et universités qui relèvent non de la police générale du maire mais de la police spéciale confiée par le code de l'éducation aux chefs d'établissement locaux d'enseignement et aux présidents d'université ;
- ils sont illégaux en ce qu'ils portent atteinte à la dignité humaine, protégée par le 1er alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un courrier en date du 7 janvier 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la requête d'appel présentée par le ministre de l'intérieur est irrecevable en l'absence de qualité de ce dernier pour faire appel du jugement du 12 octobre 2020 dès lors que les arrêtés du préfet du Pas-de-Calais en date des 30 septembre, 16 novembre et 14 décembre 2020 ont été pris non au nom de l'Etat mais au nom de la commune de Calais, sur le fondement du 1° de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales et que, par suite, le défendeur de première instance était le préfet du Pas-de-Calais, agissant au nom de la commune de Calais.
Des observations sur ce moyen d'ordre public ont été présentées par le ministre de l'intérieur le 9 janvier 2025 et ont été communiquées.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;
- la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 ;
- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thulard, premier conseiller,
- et les conclusions, de M. Eustache, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 8 septembre 2020, le préfet du Pas-de-Calais a mis en demeure la maire de la commune de Calais de prendre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, les mesures de police générale destinées à faire cesser les troubles qu'il estimait occasionnés par des distributions gratuites de boissons et denrées alimentaires organisées par des associations au bénéfice de migrants au sud et à l'est du centre-ville de Calais. Par un courrier du 10 septembre suivant, la maire a refusé de prendre ces mesures. Par un arrêté du 10 septembre 2020, pris dans le cadre du pouvoir de substitution qu'il tient de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, le préfet a interdit toute distribution gratuite de boissons et denrées alimentaires dans vingt-et-une rues, places, quais et ponts situés à l'est et au sud du centre-ville de Calais, pour la période comprise entre le 11 et le 30 septembre 2020. Cet arrêté est devenu définitif.
2. Par la suite, le préfet du Pas-de-Calais a de nouveau mis en demeure la maire de Calais de prendre des mesures de police générale destinées à faire cesser les prétendus troubles occasionnés par ces distributions gratuites de repas les 28 septembre, 14 novembre et 11 décembre 2020. La maire lui a fait connaître ses refus de donner suite à ces mises en demeure les 30 septembre, 16 novembre et 14 décembre 2020. Par des arrêtés successifs des 30 septembre, 16 novembre et 14 décembre 2020, le préfet du Pas-de-Calais a prolongé l'interdiction de la distribution gratuite de boissons et denrées alimentaires dans certains secteurs du centre-ville de Calais et en a étendu le périmètre d'application pour la période comprise respectivement entre le 1er et le 19 octobre 2020, entre le 17 novembre et le 14 décembre 2020 et, enfin, entre le 15 décembre 2020 et le 12 janvier 2021.
3. Par trois requêtes enregistrées sous les n°s 2007484, 2100364 et 2101109, l'association Secours catholique - Caritas France, l'association Médecins du monde, la Fédération des acteurs de la solidarité, l'Auberge des migrants, l'association Utopia 56, l'association Help Refugees Prism the Gift Fund, la fondation Abbé A..., Emmaüs France, la Ligue des droits de l'Homme, l'association la Cimade, le Syndicat des avocats de France, le Syndicat de la magistrature et l'association SALAM (Soutenons, Aidons, Luttons, Agissants pour les Migrants et les pays en difficulté) ont demandé l'annulation de ces arrêtés au tribunal administratif de Lille. Par un jugement du 12 octobre 2022, le tribunal a joint ces trois requêtes et a prononcé en son article 2 l'annulation des arrêtés du préfet du Pas-de-Calais en date des 30 septembre, 16 novembre et 14 décembre 2020. Le ministre de l'intérieur interjette appel de ce jugement.
Sur la recevabilité de la requête d'appel du ministre :
4. Aux termes de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, applicable à la notification des jugements des tribunaux administratifs : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, sans préjudice du droit des parties de faire signifier ces décisions par acte d'huissier de justice. ". Aux termes de son article R. 751-8 : " Lorsque la notification d'une décision du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel doit être faite à l'Etat, l'expédition est adressée au ministre dont relève l'administration intéressée au litige. Copie de la décision est adressée au préfet ainsi que, s'il y a lieu, à l'autorité qui assure la défense de l'Etat devant la juridiction. ".
5. En l'espèce, l'Etat avait la qualité de partie dans les instances n°s 2007484, 2100364 et 2101109, si bien que la notification du jugement du 12 octobre 2022 devait être adressée au ministre de l'intérieur. Or, il ressort des pièces du dossier, notamment du dispositif de ce jugement, que ce dernier n'a été notifié qu'à l'association Secours Catholique - Caritas France, représentant unique des requérants, et au préfet du Pas-de-Calais, une simple copie en étant par ailleurs adressée au ministre de l'intérieur.
6. Dans ces conditions, le délai d'appel n'a pas commencé à courir à l'encontre du ministre et la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de sa requête d'appel ne peut être qu'écartée.
Sur la régularité du jugement :
7. Aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire. (...). ".
8. Le ministre fait valoir que les premiers juges ont fondé leur jugement sur des " extraits de conversations groupées versées au dossier " dont le préfet du Pas-de-Calais n'a pas eu connaissance au cours de l'instruction. Contrairement à ce que soutiennent les associations intimées, aucune pièce au dossier de première instance ne contient de tels " extraits de conversations groupées ", pas même, comme elles le soutiennent, le rapport de diagnostic rapide Eau, hygiène et assainissement - ville de Calais qui a été établi en avril 2021 par Solidarités International et qui a été joint à un mémoire en réplique du 19 août 2021 dans l'instance n° 2007484.
9. Dans ces conditions, les premiers juges ont fondé leur jugement sur des éléments qui n'avaient pas été préalablement soumis au contradictoire et ont ainsi méconnu les dispositions précitées de l'article L. 5 du code de justice administrative. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.
10.. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par l'association Secours catholique - Caritas France, l'association Médecins du monde, la Fédération des acteurs de la solidarité, l'Auberge des migrants, l'association Utopia 56, l'association Help Refugees Prism the Gift Fund, la fondation Abbé A..., Emmaüs France, la Ligue des droits de l'Homme, l'association la Cimade, le Syndicat des avocats de France, le Syndicat de la magistrature et l'association SALAM devant le tribunal administratif de Lille.
Sur la jonction :
11. Les requêtes enregistrées au greffe du tribunal administratif de Lille sous les numéros 2007484, 2100364 et 2101109, présentées par les mêmes associations et organismes requérants, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur les fins de non-recevoir opposées en défense :
12. La circonstance que l'un des auteurs d'une requête collective ne justifie pas d'un intérêt ou d'une qualité à agir ne fait pas obstacle à ce que les conclusions de cette requête soient jugées recevables, mais seulement à ce que le juge accueille les conclusions propres à ce requérant, telles celles tendant au remboursement des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
13. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier et il n'est d'ailleurs pas contesté en défense que plusieurs des associations requérantes, à savoir l'association Secours catholique - Caritas France, l'association Médecins du monde, la Fédération des acteurs de la solidarité, l'Auberge des migrants, Emmaüs France, la Ligue des droits de l'Homme et l'association SALAM, ont intérêt et qualité à agir à l'encontre des arrêtés en litige. Il en résulte qu'en toute hypothèse, le préfet du Pas-de-Calais et le ministre de l'intérieure ne sont pas fondés à soutenir que les requêtes n°s 2007484, 2100364 et 2101109 sont irrecevables.
14. En ce qui concerne par ailleurs les conclusions propres à certains des requérants de première instance, l'administration fait valoir qu'elles seraient irrecevables en ce qui concerne l'association Help Refugees - Prism the Gift Fund, l'association la Cimade, l'association Utopia 56, la Fondation Abbé A..., le syndicat de la magistrature et le syndicat des avocats de France.
En ce qui concerne l'association Help Refugees - Prism the Gift Fund :
15. D'une part, si les requêtes formées devant le juge administratif doivent être rédigées en langue française, les requérants peuvent joindre à ces demandes des pièces annexes rédigées dans une autre langue. Si le juge a alors la faculté d'exiger la traduction de ces pièces lorsque cela lui est nécessaire pour procéder à un examen éclairé des conclusions de la requête, il n'en a pas l'obligation. Dès lors, contrairement à ce que fait valoir le préfet du Pas-de-Calais, le fait que les statuts produits par l'association Help Refugees - Prism the Gift Fund sont rédigés en langue anglaise est sans incidence sur l'appréciation de la capacité d'ester en justice de cette association.
16. D'autre part, si, en application des articles 5 et 6 de la loi du 1er juillet 1901, les associations non déclarées n'ont pas la capacité d'ester en justice pour y défendre des droits patrimoniaux, l'absence de la déclaration ne fait pas obstacle à ce que, par la voie du recours contentieux, toutes les associations légalement constituées aient qualité pour contester la légalité des actes administratifs faisant grief aux intérêts qu'elles ont pour mission de défendre. Par suite, le préfet du Pas-de-Calais n'est pas fondé à soutenir que l'association dite " Help Refugees - Prism the Gift Fund " ne serait pas recevable à présenter des conclusions propres.
En ce qui concerne l'association la Cimade :
17. Il ressort des articles 7.2 et 8 des statuts de l'association la Cimade qu'il revient au conseil national de l'association et, en cas d'urgence, au bureau national, composé du président de l'association, d'un vice-président, d'un ou de deux secrétaire(s) et d'un trésorier, de mandater le président pour représenter l'association en justice. Si les autorisations du bureau national de l'association, en date du 14 octobre 2020 et du 18 janvier 2021, mandatent explicitement le président de l'association pour contester les arrêtés litigieux du préfet du Pas-de-Calais, elles n'ont été signées que par le président de l'association et non par les autres membres composant le bureau national et sont, dès lors, irrégulières. Dès lors, le représentant légal de l'association la Cimade est dépourvu de capacité pour agir en justice à l'encontre des arrêtés attaqués.
En ce qui concerne l'association Utopia 56 :
18. Il ressort des articles 2 et 10 des statuts de l'association Utopia 56 que cette association a pour objet de venir en aide aux migrants sur l'ensemble du territoire national, directement ou par l'intermédiaire d'antennes locales, notamment en mobilisant et en organisant des équipes de bénévoles et en venant en appui d'autres organisations humanitaires. Il s'ensuit que, l'association requérante a intérêt pour agir à l'encontre des arrêtés litigieux du préfet du Pas-de-Calais, qui ont précisément pour objet d'interdire la distribution de denrées alimentaires et de boissons aux populations migrantes de la ville de Calais, auprès desquelles cette association intervient, quand bien même son siège se situe à Lorient et son intitulé suggérerait une implantation limitée au seul département du Morbihan.
En ce qui concerne la Fondation Abbé A... :
19. L'intérêt à agir d'une association s'apprécie en fonction de son objet statutaire.
20. Il ressort de ses statuts que la Fondation Abbé A... a principalement pour objet d'œuvrer pour l'accès au logement des personnes et des familles défavorisées rencontrant de graves difficultés de logement. Dès lors, à supposer même que l'interdiction de la distribution de denrées aux populations migrantes en certains lieux de la ville de Calais impacte négativement la mission de cette fondation d'informer ces populations des possibilités d'accès au logement dont elles peuvent bénéficier, la Fondation Abbé A... ne saurait justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation des arrêtés litigieux.
En ce qui concerne le syndicat de la magistrature :
21. Le syndicat de la magistrature, dont l'objet est régi par les dispositions de l'article L. 2131-1 du code du travail applicable aux syndicats professionnels, ne saurait utilement se prévaloir des termes généraux de ses statuts relatifs à la " défense des libertés et des principes démocratiques " pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation des arrêtés litigieux, qui ne portent par eux-mêmes aucune atteinte aux droits et prérogatives des magistrats judiciaires.
En ce qui concerne le syndicat des avocats de France :
22. Le syndicat des avocats de France, dont les statuts prévoient qu'il constitue un syndicat professionnel ayant pour objet la défense des intérêts matériels et moraux de la profession, et qui ne saurait utilement se prévaloir des termes généraux de ces mêmes statuts relatifs à la défense des droits et libertés, ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation des arrêtés litigieux
23. Il résulte de tout ce qui précède que l'administration est seulement fondée à soutenir que les conclusions propres présentées par l'association La Cimade, la fondation Abbé A..., le syndicat de la magistrature et le syndicat des avocats de France doivent être rejetées compte tenu de leur absence de qualité ou d'intérêt à agir à l'encontre des trois arrêtés en litige.
Sur les conclusions à fin d'annulation des arrêtés litigieux :
En ce qui concerne le cadre juridique applicable à la substitution du maire par le préfet en matière de police municipale :
24. D'une part, aux termes de l'article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est chargé, sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale (...) ". Aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l'éclairage, l'enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices et monuments funéraires menaçant ruine, l'interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autres parties des édifices qui puisse nuire par sa chute ou celle de rien jeter qui puisse endommager les passants ou causer des exhalaisons nuisibles ainsi que le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire, en quelque manière que ce soit, à la sûreté ou à la commodité du passage ou à la propreté des voies susmentionnées ; / 2° Le soin de réprimer les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, le tumulte excité dans les lieux d'assemblée publique, les attroupements, les bruits, les troubles de voisinage, les rassemblements nocturnes qui troublent le repos des habitants et tous actes de nature à compromettre la tranquillité publique ; 3° Le maintien du bon ordre dans les endroits où il se fait de grands rassemblements d'hommes, tels que les foires, marchés, réjouissances et cérémonies publiques, spectacles, jeux, cafés, églises et autres lieux publics (...) ; 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature, tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels, les maladies épidémiques ou contagieuses, les épizooties, de pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure (...). ".
25. D'autre part, aux termes de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale est assurée par le maire, toutefois : / 1° Le représentant de l'Etat dans le département peut prendre, pour toutes les communes du département ou plusieurs d'entre elles, et dans tous les cas où il n'y aurait pas été pourvu par les autorités municipales, toutes mesures relatives au maintien de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité publiques. / Ce droit ne peut être exercé par le représentant de l'Etat dans le département à l'égard d'une seule commune qu'après une mise en demeure au maire restée sans résultat ; / (...). ".
26. Il en résulte qu'en l'espèce, le préfet du Pas-de-Calais, substitué à la maire de Calais en vertu de l'article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales, a, en édictant les trois arrêtés en litige, exercé le pouvoir de police municipale général issu des dispositions de l'article L. 2212-2 du même code. Il lui appartenait en cette qualité de prendre les mesures adaptées, nécessaires et proportionnées afin de prévenir les troubles à l'ordre public mentionnés à l'article L. 2212-2.
27. A ce titre, le préfet du Pas-de-Calais a motivé l'édiction de ses interdictions successives de la distribution gratuite de boissons et denrées alimentaires dans certains secteurs du centre-ville de Calais par, premièrement, les atteintes à la tranquillité publique, telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues, générés par les rassemblements en lien avec cette distribution, deuxièmement par l'insalubrité, en mentionnant plus précisément dans son premier arrêté du 30 septembre 2020 le dépôt sauvage de déchets sur la voie publique et, enfin, troisièmement, par le risque épidémique lié à la COVID-19.
En ce qui concerne les atteintes à la tranquillité publique telles que les rixes et disputes accompagnées d'ameutement dans les rues :
28. Pour justifier de l'existence d'un risque pour la tranquillité publique, l'administration se contente de se référer à six mains courantes établies par la police municipale de Calais et relatives à des faits commis dans la seconde quinzaine de septembre. Ces faits concernent des évènements ponctuels et le plus souvent dénués de gravité. Il en est ainsi de la présence de deux migrants alcoolisés devant un centre social, qui ont quitté les lieux dès l'arrivée de la police, de la présence d'un migrant alcoolisé dans un parc ou du fait qu'un groupe d'exilés a tenté d'investir un local à vélo avant d'être rapidement dispersé. Par ailleurs, il ne ressort ni de ces mains courantes ni d'aucune autre pièce du dossier, que ces troubles présenteraient le moindre lien avec la distribution gratuite de repas de boissons et de denrées alimentaires organisées par les associations intimées dans les secteurs concernés par l'interdiction, et ce d'autant qu'à la date où ils ont été commis, était déjà en vigueur l'arrêté du 10 septembre 2020 l'interdisant jusqu'au 30 septembre 2020. Enfin, les articles de presse dont se prévaut l'administration sont antérieurs de plusieurs années aux arrêtés en litige et ne permettent pas d'établir un risque actuel pour la tranquillité publique consistant en des rixes, disputes ou ameutements causés par la distribution sur la voie publique d'une aide aux exilés vivant à Calais.
29. Il en résulte que les interdictions prononcées par le préfet du Pas-de-Calais dans ses arrêtés successifs des 30 septembre, 16 novembre et 14 décembre 2020 ne sont pas nécessaires au regard d'un risque d'atteinte à la tranquillité publique.
En ce qui concerne l'insalubrité causée par le dépôt sauvage de déchets sur la voie publique :
30. Il ressort des pièces du dossier et est d'ailleurs reconnu par les associations requérantes elles-mêmes que la distribution de denrées aux exilés vivant à Calais s'accompagne de dépôt sauvage de déchets sur la voie publique de nature à caractériser un risque d'insalubrité.
31. Toutefois, en interdisant la distribution gratuite de denrées uniquement dans certaines zones du centre-ville, les arrêtés litigieux ne s'opposent pas à ce que les distributions de denrées s'effectuent dans les mêmes conditions hors des périmètres d'interdiction et donc y compris dans certaines zones du centre-ville. Dans ces circonstances, les interdictions édictées ne sont pas de nature à remédier aux abandons de déchets consécutifs à l'activité de distribution de denrées.
32. Par ailleurs, ainsi que le font valoir à raison les associations requérantes, s'il est vrai que la gestion et la collecte des déchets n'est pas une compétence de la commune de Calais, les dispositions de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales permettent au maire, le cas échéant substitué par le préfet, de prendre toute mesure de police rendue nécessaire par une situation d'insalubrité, y compris lorsqu'elle est causée par des déchets, telle que la mise à disposition de bennes à ordure à proximité des lieux de distribution.
33. Dans ces conditions, les arrêtés en litiges ne remédient pas aux risques pour la salubrité relevés par le préfet dans ses arrêtés en litige, alors que d'autres mesures moins contraignantes seraient de nature à le faire.
34. Il résulte par conséquent des points 30 à 33 que les interdictions prononcées par le préfet du Pas-de-Calais ne sont pas adaptées et proportionnées à la finalité poursuivie de lutte contre l'insalubrité.
En ce qui concerne le risque épidémique :
S'agissant du cadre juridique :
35. D'une part, aux termes de l'article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 : " L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ". L'article L. 3131-13 du même code dispose que : " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. Les données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire qui ont motivé la décision sont rendues publiques. / (...) / La prorogation de l'état d'urgence sanitaire au-delà d'un mois ne peut être autorisée que par la loi, après avis du comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19 ". Aux termes du I de l'article L. 3131-15 du même code, dans ses dispositions applicables au présent litige : " Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : / (...) / 6° Limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature ; / (...). ".
36. L'arrêté litigieux du 30 septembre 2020 est intervenu alors qu'était applicable la loi du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, dont l'article 1er dispose : " I. A compter du 11 juillet 2020, et jusqu'au 30 octobre 2020 inclus, hors des territoires mentionnés à l'article 2, le Premier ministre peut, par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19 : / (...) / 3° Sans préjudice des articles L. 211-2 et L. 211-4 du code de la sécurité intérieure, réglementer les rassemblements de personnes, les réunions et les activités sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public ; / (...) / II.- Lorsque le Premier ministre prend des mesures mentionnées au I, il peut habiliter le représentant de l'Etat territorialement compétent à prendre toutes les mesures générales ou individuelles d'application de ces dispositions.
Lorsque les mesures prévues au même I doivent s'appliquer dans un champ géographique qui n'excède pas le territoire d'un département, le Premier ministre peut habiliter le représentant de l'Etat dans le département à les décider lui-même. (...).. ".
37. Une nouvelle progression de l'épidémie de covid-19 sur le territoire national a conduit le Président de la République à prendre le 14 octobre 2020, sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique précités, un décret déclarant l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre 2020 sur l'ensemble du territoire de la République. L'article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire a prorogé l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 16 février 2021 inclus. Le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, le décret du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'urgence sanitaire. C'est dans ce cadre que sont intervenus les arrêtés litigieux du préfet du Pas-de-Calais en date des 16 novembre et 14 décembre 2020.
38. Par les dispositions précitées, le législateur a institué une police spéciale donnant aux autorités de l'Etat mentionnées aux articles L. 3131-15 à L. 3131-17 la compétence pour édicter, dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, les mesures générales ou individuelles visant à mettre fin à une catastrophe sanitaire telle que l'épidémie de Covid-19, en vue notamment d'assurer, compte tenu des données scientifiques disponibles, leur cohérence et leur efficacité sur l'ensemble du territoire concerné et de les adapter en fonction de l'évolution de la situation.
39. D'autre part, les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales cités au point 24 autorisent le maire, y compris en période d'état d'urgence sanitaire, à prendre les mesures de police générale nécessaires au bon ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques dans sa commune. Le maire peut, le cas échéant, à ce titre, prendre des dispositions destinées à contribuer à la bonne application, sur le territoire de la commune, des mesures décidées par les autorités compétentes de l'Etat, notamment en interdisant, au vu des circonstances locales, l'accès à des lieux où sont susceptibles de se produire des rassemblements. En revanche, la police spéciale instituée par le législateur fait obstacle, pendant la période où elle trouve à s'appliquer, à ce que le maire prenne au titre de son pouvoir de police générale des mesures destinées à lutter contre la catastrophe sanitaire, à moins que des raisons impérieuses liées à des circonstances locales en rendent l'édiction indispensable et à condition de ne pas compromettre, ce faisant, la cohérence et l'efficacité de celles prises dans ce but par les autorités compétentes de l'Etat.
S'agissant de la légalité des arrêtés du préfet du Pas-de-Calais en litige :
40. Le préfet du Pas-de-Calais a pris les arrêtés contestés des 30 septembre, 16 novembre et 14 décembre 2020 en vertu des pouvoirs de police administrative générale conférés à la maire de Calais par les articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales. N'intervenant dès lors pas au titre de la police spéciale mentionnée aux articles L. 3131-15 à L. 3131-17 du code de la santé publique, il était soumis aux principes rappelés au point précédent et ne pouvait donc prendre de mesure destinée à lutter contre l'épidémie alors en cours de COVID-19 que pour des raisons impérieuses liées à des circonstances locales et à condition de ne pas compromettre, ce faisant, la cohérence et l'efficacité des mesures prises dans ce but par les autorités compétentes de l'Etat.
41. Or, en l'espèce, l'administration n'a fait valoir aucune spécificité propre à la ville de Calais, se contentant de se référer à la situation épidémique générale dans les Hauts-de-France et dans le département du Pas-de-Calais à la date d'édiction des arrêtés en litige. En particulier, il ne ressort pas des pièces du dossier que les secteurs du centre-ville de Calais concernés par les interdictions que le préfet du Pas-de-Calais a édictées présenteraient une densité de population particulièrement forte de nature à constituer une circonstance locale justifiant que ne soient plus permise, de façon impérieuse, la distribution d'aide alimentaire sur la voie publique. Par ailleurs, l'interdiction prononcée conduisait nécessairement certains des exilés vivant en centre-ville de Calais à rejoindre d'autres lieux de distribution, le cas échéant en empruntant des transports en commun, et conduisait ainsi à des rassemblements encore plus importants de personnes dans un même lieu, de nature à renforcer encore le risque de propagation de l'épidémie.
42. Par suite, la lutte contre l'épidémie alors en cours de COVID-19 ne permettait pas au préfet du Pas-de-Calais, agissant au nom et pour le compte de la commune de Calais, d'édicter légalement les mesures d'interdiction en litige.
43. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens d'annulation soulevés par les associations requérantes, qu'elles sont fondées à demander l'annulation des arrêtés du préfet du Pas-de-Calais en date des 30 septembre 2020, 16 novembre 2020 et 14 décembre 2020.
Sur les frais liés au litige :
44. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat à verser la somme totale de 4 000 euros à l'association Secours catholique - Caritas France, à l'association Médecins du monde, à la Fédération des acteurs de la solidarité, à l'Auberge des migrants, à l'association Utopia 56, à l'association Help Refugees Prism the Gift Fund, à Emmaüs France, à la Ligue des droits de l'Homme, et à l'association SALAM (Soutenons, Aidons, Luttons, Agissants pour les Migrants et les pays en difficulté) au titre des frais qu'elles ont engagés en première instance et en appel.
45. Les conclusions présentées sur le même fondement par l'association La Cimade, la fondation Abbé A..., le syndicat de la magistrature et le syndicat des avocats de France doivent en revanche être rejetées, ainsi qu'il l'a été dit au point 23.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 12 octobre 2022 du tribunal administratif de Lille est annulé.
Article 2 : Les arrêtés du 30 septembre 2020, du 16 novembre 2020 et du 14 décembre 2020 du préfet du Pas-de-Calais sont annulés.
Article 3 : L'Etat versera la somme totale de 4 000 euros à l'association Secours catholique - Caritas France, à l'association Médecins du monde, à la Fédération des acteurs de la solidarité, à l'Auberge des migrants, à l'association Utopia 56, à l'association Help Refugees Prism the Gift Fund, à Emmaüs France, à la Ligue des droits de l'Homme et à l'association SALAM en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais non compris dans les dépens.
Article 4 : Les conclusions présentées en première instance par l'association La Cimade, la fondation Abbé A..., le syndicat de la magistrature et le syndicat des avocats de France sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à l'association Secours Catholique - Caritas France, représentant unique pour l'ensemble des défendeurs.
Copie en sera transmise pour information au préfet du Pas-de-Calais et à la commune de Calais.
Délibéré après l'audience du 6 février 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 février 2025.
Le rapporteur,
Signé : V. Thulard
La présidente de la 1ère chambre
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : S. Pinto Carvalho
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Suzanne Pinto Carvalho
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N°22DA02653