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20/02/2025 | FRANCE | N°23DA01265

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 20 février 2025, 23DA01265


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société par actions simplifiée (SAS) Vert-Marine a demandé au tribunal administratif d'Amiens, à titre principal, de condamner la communauté de communes Nièvre et Somme à lui verser une somme de 300 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020 avec capitalisation, au titre du bénéfice attendu de l'exécution du contrat de concession de l'exploitation du centre aquatique intercommunal situé sur le territoire de la commune de Flixecour

t (Somme) pour une durée de cinq ans, à la passation duquel elle estime avoir été irréguliè...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Vert-Marine a demandé au tribunal administratif d'Amiens, à titre principal, de condamner la communauté de communes Nièvre et Somme à lui verser une somme de 300 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020 avec capitalisation, au titre du bénéfice attendu de l'exécution du contrat de concession de l'exploitation du centre aquatique intercommunal situé sur le territoire de la commune de Flixecourt (Somme) pour une durée de cinq ans, à la passation duquel elle estime avoir été irrégulièrement évincée, à titre subsidiaire, de condamner la communauté de communes Nièvre et Somme à lui verser une somme de 10 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020 avec capitalisation, au titre des frais d'études engagés pour la présentation de son offre, en toute hypothèse, de mettre à la charge de la communauté de communes Nièvre et Somme une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement no 2100046 du 3 mai 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande et a mis à la charge de la SAS Vert-Marine le versement, à la communauté de communes Nièvre et Somme, de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2023, et par des mémoires, enregistrés les 29 avril 2024 et 6 janvier 2025, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la SAS Vert-Marine, représentée par la SELARL AUDICIT, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) à titre principal, de condamner la communauté de communes Nièvre et Somme à lui verser une somme de 300 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020 avec capitalisation, en réparation du préjudice correspondant au manque à gagner résultant de son éviction irrégulière ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner la communauté de communes Nièvre et Somme à lui verser une somme de 10 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020 avec capitalisation, au titre des frais d'études engagés pour la présentation de son offre ;

4°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de toute partie succombante la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la communauté de communes Nièvre et Somme n'avait pas retenu, à l'issue de la procédure de mise en concurrence préalable à la passation du contrat de concession en cause, une offre irrégulière et qui devait être écartée, alors que celle-ci se référait à la convention collective des espaces de loisirs, d'attractions et culturels (ELAC), inapplicable aux entreprises privées exerçant, à but lucratif, l'activité de gestion d'installations sportives, qui doivent appliquer la convention collective nationale du sport ; l'engagement de régularisation de cette offre par la candidate retenue a été pris, d'ailleurs dans des termes non dépourvus d'ambiguïté, à une date postérieure à celle à laquelle les offres finales présentées par les candidates à l'attribution de la concession ont été analysées ;

- l'application de la convention collective ELAC par la candidate dont l'offre a été retenue a eu des incidences substantielles sur la définition du contenu de cette offre, en ce qui concerne les conditions d'emploi des salariés amenés à assurer la gestion de l'équipement, et, par voie de conséquence, en ce qui concerne l'appréciation de la valeur des offres des entreprises candidates ;

- elle disposait, dans ces conditions, d'une chance sérieuse de remporter le marché, dès lors que son offre, qui était régulière, a été classée en deuxième position, ce qui confirme sa pertinence, et dès lors qu'il n'est pas démontré par la collectivité qu'elle aurait envisagé de déclarer la procédure infructueuse ;

- par voie de conséquence, elle a droit à être indemnisée du préjudice résultant de l'absence de conclusion du contrat, lequel préjudice recouvre son manque à gagner, dont elle établit la consistance par la production de son compte d'exploitation prévisionnel et par une attestation établie par le commissaire aux comptes, sans qu'il y ait lieu à déduction de l'impôt sur les sociétés ; il incombera, le cas échéant, à la communauté de communes Nièvre et Somme d'appeler en garantie le candidat irrégulièrement retenu.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 janvier 2024, et par un mémoire, non communiqué, enregistré le 3 janvier 2025, la communauté de communes Nièvre et Somme, représentée par la SCP Manuel Gros, Héloïse Hicter, Audrey d'Halluin, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la SAS Vert-Marine une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- contrairement à ce que soutient la SAS Vert-Marine, l'engagement pris, le 18 décembre 2019, par la candidate retenue, d'appliquer, dans le cadre de l'exploitation de l'équipement concédé, la convention collective nationale du sport, l'a été sur sa demande et avant que le conseil communautaire se prononce, par une délibération du 14 janvier 2020, sur le choix du concessionnaire ;

- c'est à bon droit que le tribunal administratif a rejeté les prétentions de la SAS Vert-Marine, dès lors qu'elle n'a commis aucune faute en choisissant l'offre de la concurrente de celle-ci, eu égard à cet engagement non équivoque et dépourvu d'incidence sur les termes de cette offre ;

- si la cour devait infirmer le raisonnement du tribunal administratif, elle devrait alors retenir que le choix, par une entreprise candidate à une mise en concurrence ayant pour objet l'attribution d'une concession, d'une convention collective inapplicable pour établir son offre ne peut légalement justifier que cette offre soit écartée ;

- la SAS Vert-Marine, dont l'offre était irrégulière pour prendre en compte, en méconnaissance du règlement de la consultation, une formule de révision modifiée par rapport à celle incluse dans le projet de contrat de concession, ne justifie pas qu'elle disposait d'une chance sérieuse d'emporter la concession ;

- dès lors que le choix, par la candidate retenue, d'une convention collective inapplicable pour établir son offre n'a eu aucune incidence sur la sélection des offres finales en présence, il n'existe pas de lien de causalité entre la prétendue faute qu'elle aurait commise en attribuant la concession à cette candidate et les préjudices dont fait état la SAS Vert-Marine ;

- la réalité du manque à gagner dont fait état la SAS Vert-Marine à hauteur d'une somme de 300 000 euros n'est pas suffisamment établie par le compte prévisionnel d'exploitation produit, qui tient compte de surcoûts, liés à la hausse du prix du gaz et à la crise sanitaire, qui n'étaient pas prévisibles à la date à laquelle son offre a été présentée ;

- la réalité des frais exposés par la SAS Vert-Marine pour présenter son offre n'est pas davantage établie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code du travail ;

- l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 ;

- le décret n° 2016-86 du 1er février 2016 ;

- l'arrêté du 21 novembre 2006 portant extension de la convention collective nationale du sport (n° 2511) ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me Détrez-Cambrai, substituant Me Boyer, représentant la SAS Vert-Marine, ainsi que celles de Me d'Halluin, représentant la communauté de communes Nièvre et Somme.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. La communauté de communes Nièvre et Somme a décidé, au terme d'une réflexion engagée fin 2016, de construire un centre aquatique intercommunal à Flixecourt (Somme), dont la livraison était prévue au cours de l'année 2020. Indépendamment des marchés conclus par elle à l'été 2018 en vue de la conception et de la construction de cet ouvrage, elle a décidé, par une délibération du conseil communautaire du 5 septembre 2018, d'en confier l'exploitation à une entreprise privée et a décidé d'engager la procédure de consultation préalable y afférente. L'avis d'appel public à la concurrence a été publié le 21 décembre 2018 au journal officiel de l'Union européenne (JOUE) et au bulletin officiel des annonces de marchés publics (BOAMP). Six sociétés ont présenté leur candidature dans ce cadre, mais, en définitive, seules trois d'entre elles, dont la société par actions simplifiée (SAS) Vert-Marine et la société Equalia, ont déposé une offre. Au terme de cette procédure, l'offre présentée par la société Equalia a été retenue.

2. Ayant été dûment informée de ce choix, la SAS Vert-Marine a, par un courrier adressé le 15 septembre 2020 au président de la communauté de communes Nièvre et Somme, demandé, par son conseil, de l'indemniser du préjudice résultant de l'éviction irrégulière dont elle estimait avoir été victime, lequel préjudice correspondait au bénéfice, évalué par elle à la somme de 300 000 euros, attendu de l'exécution du contrat de concession en cause. Cette demande préalable a fait l'objet d'une décision expresse de rejet en date du 9 novembre 2020.

3. La SAS Vert-Marine a alors porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens, en lui demandant, à titre principal, de condamner la communauté de communes Nièvre et Somme à lui verser une somme de 300 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020 avec capitalisation, au titre du préjudice correspondant au bénéfice attendu de l'exécution du contrat de concession de l'exploitation du centre aquatique intercommunal situé sur le territoire de la commune de Flixecourt pour une durée de cinq ans, à titre subsidiaire, de condamner la communauté de communes Nièvre et Somme à lui verser une somme de 10 000 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2020 avec capitalisation, au titre des frais d'études engagés pour la présentation de son offre.

4. La SAS Vert-Marine relève appel du jugement du 3 mai 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande et a mis à sa charge le versement, à la communauté de communes Nièvre et Somme, de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la régularité de l'offre retenue :

En ce qui concerne l'irrégularité de l'offre initiale :

5. Aux termes de l'article L. 3121-1 du code de la commande publique : " L'autorité concédante organise librement une procédure de publicité et mise en concurrence qui conduit au choix du concessionnaire dans le respect des dispositions des chapitres I à V du présent titre et des règles de procédure fixées par décret en Conseil d'Etat. / Elle peut recourir à la négociation. / Ces dispositions s'appliquent sous réserve des règles particulières du chapitre VI du présent titre. ". Selon l'article L. 3124-1 du même code : " Lorsque l'autorité concédante recourt à la négociation pour attribuer le contrat de concession, elle organise librement la négociation avec un ou plusieurs soumissionnaires dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. / La négociation ne peut porter sur l'objet de la concession, les critères d'attribution ou les conditions et caractéristiques minimales indiquées dans les documents de la consultation. ". Aux termes de l'article L. 3124-2 du même code : " L'autorité concédante écarte les offres irrégulières ou inappropriées. ". Selon l'article L. 3124-3 de ce code : " Une offre est irrégulière lorsqu'elle ne respecte pas les conditions et caractéristiques minimales indiquées dans les documents de la consultation. ".

6. Aux termes de l'article R. 3124-1 du code de la commande publique : " Lorsque l'autorité concédante fait usage de la possibilité de négocier prévue à l'article L. 3121-1, elle peut décider de limiter le nombre de soumissionnaires admis à participer à la négociation. / Elle procède à la sélection du ou des soumissionnaires en appliquant les critères d'attribution fixés aux articles R. 3124-4 et R. 3124-5. ".

7. Par ailleurs, aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession : " I. - Les contrats de concession soumis à la présente ordonnance respectent les principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures (...) ".

8. Aux termes de l'article L. 2261-15 du code du travail, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les stipulations d'une convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel (...) peuvent être rendues obligatoires pour tous les salariés et employeurs compris dans le champ d'application de cette convention ou de cet accord, par arrêté du ministre chargé du travail, après avis motivé de la Commission nationale de la négociation collective. / (...) ".

9. Il résulte des dispositions du code du travail citées au point précédent que les stipulations d'une convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel rendues obligatoires par arrêté ministériel s'imposent aux candidats à l'octroi d'une délégation de service public lorsqu'ils entrent dans le champ d'application de cette convention. Par suite, une offre finale mentionnant une convention collective inapplicable ou méconnaissant la convention applicable ne saurait être retenue par l'autorité concédante et doit être écartée comme irrégulière par celle-ci.

10. Aux termes de l'article L. 2261-2 du code du travail : " La convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur. / En cas de pluralité d'activités rendant incertaine l'application de ce critère pour le rattachement d'une entreprise à un champ conventionnel, les conventions collectives et les accords professionnels peuvent, par des clauses réciproques et de nature identique, prévoir les conditions dans lesquelles l'entreprise détermine les conventions et accords qui lui sont applicables ".

11. Par un arrêté du ministre en charge du travail du 21 novembre 2006, la convention collective nationale du sport a été étendue et son champ d'application est ainsi défini par son article 1.1 dans sa version alors en vigueur : " La convention collective du sport règle, sur l'ensemble du territoire y compris les DOM, les relations entre les employeurs et les salariés des entreprises exerçant leur activité principale dans l'un des domaines suivants : / - organisation, gestion et encadrement d'activités sportives ; / - gestion d'installations et d'équipements sportifs. / (...) ".

12. Le champ d'application de la convention collective nationale des espaces de loisirs, d'attractions et culturels (ELAC), étendue par un arrêté ministériel du 25 juillet 1994, est ainsi défini par son article 1er, dans sa rédaction applicable au litige : " La convention collective nationale des espaces de loisirs, d'attractions et culturels règle, sur l'ensemble des départements français, y compris les DOM, les relations entre les employeurs et les salariés des entreprises de droit privé à but lucratif : / (...) - qui gèrent des installations et / ou exploitent à titre principal des activités à vocation récréative et / ou culturelle, dans un espace clos et aménagé avec des installations fixes et permanentes comportant des attractions de diverse nature (...). / Sont exclues du champ d'application les entreprises de droit privé, à but lucratif, répertoriées sous l'ancienne codification NAF 92.6 " gestion d'installations sportives " et " autres activités sportives ", remplacée par la codification suivante : 93. 11Z : " gestion d'installations sportives " (...) / gestion d'installations sportives à caractère récréatif et de loisir. / Et, plus précisément, les installations et les centres des activités suivantes : / les piscines ; les patinoires (...) ".

13. En en vertu de l'article 1er du règlement de la consultation, versé à l'instruction, cette consultation avait pour objet de confier l'exploitation par affermage, en application de l'ordonnance n° 2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, du futur centre aquatique de la communauté de communes Nièvre et Somme, situé sur le territoire de la commune de Flixecourt. L'avis d'appel public à la concurrence précise que le concessionnaire assurera les missions de service public attachées à l'établissement, incluant la gestion administrative et financière et la maintenance courante de l'équipement, ainsi que l'exploitation commerciale et technique du centre aquatique, dans le respect des normes d'hygiène et de sécurité. L'article 1er du règlement de la consultation précise que l'équipement à gérer est constitué notamment d'un bassin de nage d'une surface de 250 m², d'un bassin d'activités et de jeux d'une surface totale de 110 m², d'une pataugeoire pour enfant d'une superficie de 48 m², d'un solarium minéral extérieur couvrant 182 m², d'une salle de fitness de 115 m² et d'un espace forme de 120 m².

14. Eu égard aux caractéristiques de l'équipement et au contenu de la mission que la consultation avait pour objet de confier au futur délégataire, rappelés au point précédent, l'activité que ce dernier serait appelé à exercer dans ce cadre doit être regardée comme consistant en la gestion d'un équipement dont la vocation est principalement sportive alors même qu'il comporte accessoirement des espaces ludiques et de détente et quand bien même les dimensions de ses bassins ne permettraient pas l'organisation de compétitions officielles. Cette mission, qui ne se confond pas avec celle consistant en la gestion des parcs aquatiques entrant dans le champ d'application de la convention collective nationale des espaces de loisirs, d'attractions et culturels (ELAC), relève ainsi de la convention collective nationale du sport.

15. La communauté de communes Nièvre et Somme n'a pas contesté en première instance, et elle ne conteste pas davantage en appel, que l'offre retenue, présentée par la société Equalia, était définie, en ce qui concerne l'évaluation des coûts de fonctionnement, ainsi que la définition des modes d'organisation choisis pour l'accueil du public, ainsi que pour la surveillance et l'encadrement des activités, en tenant compte des stipulations de la convention nationale ELAC.

16. Dans ces conditions, en se référant, pour l'élaboration de son offre, à la convention collective nationale ELAC, alors que son activité relevait de la convention collective nationale du sport, la société Equalia a présenté, dans le cadre de la consultation en cause, une offre irrégulière, qu'il incombait, en principe, à la communauté de communes Nièvre et Somme d'écarter, sans qu'ait d'incidence le fait que le règlement de la consultation n'imposait pas aux candidats de préciser la convention collective dont ils entendaient faire application dans leurs relations avec le personnel affecté à la gestion de l'équipement en cause.

En ce qui concerne la régularisation de l'offre initiale :

17. Il résulte des dispositions précitées du code de la commande publique que l'autorité concédante peut librement négocier avec les candidats à l'attribution d'une concession l'ensemble des éléments composant leur offre, dès lors que cette négociation ne conduit pas cette autorité à remettre en cause l'objet de la concession, les critères d'attribution ou les conditions et caractéristiques minimales indiquées dans les documents de la consultation. Ces dispositions ne s'opposent pas à ce que, lorsqu'elle recourt à la négociation, l'autorité concédante y admette un soumissionnaire ayant remis une offre initiale irrégulière. La personne publique ne saurait engager de négociation avec un candidat dont l'offre est irrégulière que si cette irrégularité n'est pas susceptible d'avoir une influence sur la comparaison entre les différentes offres. Le respect du principe d'égalité de traitement des candidats implique toutefois qu'elle ne puisse retenir un candidat dont la régularisation de l'offre se traduirait par la présentation de ce qui constituerait une offre entièrement nouvelle. En tout état de cause, l'autorité concédante est tenue de rejeter les offres qui sont demeurées irrégulières à l'issue de la négociation.

18. La communauté de communes Nièvre et Somme, notamment au vu de l'argumentation développée par la SAS Vert-Marine, a nourri un doute quant à la convention collective qu'il appartiendrait au concessionnaire choisi d'appliquer dans ses relations avec ses personnels et a, dans le cadre de la négociation finale engagée avec les candidates en lice, demandé à la société Equalia de lui préciser si elle entendait maintenir son projet d'appliquer la convention collective nationale ELAC et de faire connaître ses intentions dans l'hypothèse où l'inapplicabilité de cette convention à la concession en cause serait, avant que la collectivité décide du choix de l'attributaire, juridiquement établie.

19. D'une part, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'analyse des offres rédigé par le président de la communauté de communes Nièvre et Somme à l'attention du conseil communautaire, produit par la SAS Vert-Marine devant les premiers juges, que la prise en compte initiale, par la société Equalia, de la convention collective ELAC pour établir son offre n'a, en réalité, pas eu d'influence sur la comparaison entre les différentes offres, dès lors que les niveaux des charges de personnel prises en compte par les offres de la SAS Vert-Marine et de la société Equalia étaient comparables et dès lors que ces candidates avaient été départagées au regard des taux prévisionnels de fréquentation sur lesquels leur offre avait été bâtie, ainsi qu'au regard de la charge financière induite pour la collectivité et de l'ambition affichée dans la définition de la politique commerciale et des modalités d'accueil des publics scolaires.

20. D'autre part, par un courriel adressé à la communauté de communes Nièvre et Somme le 18 décembre 2019, soit avant que le conseil communautaire ne choisisse l'attributaire de la concession par sa délibération du 14 janvier 2020, la société Equalia, dont la commission chargée de l'examen des offres avait proposé de retenir l'offre, a répondu qu'elle confirmait son souhait d'appliquer la convention collective ELAC, qui lui apparaissait correspondre le mieux à son domaine d'activités, mais qu'elle s'engageait à " prendre en charge le changement de convention en cours de contrat si celle-ci ne serait pas applicable ".

6. Dans ces conditions, l'engagement pris, sur la demande de la communauté de communes Nièvre et Somme, par la société Equalia, avant que le conseil communautaire ne délibère sur le choix de l'attributaire de la concession en cause, de rendre conforme son offre à la convention collective nationale du sport, si celle-ci s'évérait applicable, et à garder à sa charge le coût qui serait induit par cette substitution, lequel engagement a été souscrit dans des termes dépourvus d'ambiguïté et sous la seule condition que l'application de la convention nationale du sport lui soit légalement imposée, a été de nature à régulariser son offre.

22. Il suit de là qu'en choisissant, au vu de cet engagement, l'offre déposée par la société Equalia, la communauté de communes Nièvre et Somme n'a pas retenu une offre irrégulière ni entaché d'irrégularité la procédure de mise en concurrence engagée par elle.

23. Dès lors, la SAS Vert-Marine n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été irrégulièrement évincée de la consultation en cause et ne peut ainsi prétendre à la condamnation de la communauté de communes Nièvre et Somme à réparer des préjudices correspondant au bénéfice attendu de la concession attribuée ou aux frais exposés par elle pour présenter son offre.

24. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS Vert-Marine n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Sur les frais de procédure :

25. D'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la communauté de communes Nièvre et Somme au titre des frais exposés par la SAS Vert-Marine, partie perdante dans la présente instance, et non compris dans les dépens.

26. D'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SAS Vert-Marine la somme de 2 000 euros que la communauté de communes Nièvre et Somme demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par la SAS Vert-Marine est rejetée.

Article 2 : La SAS Vert-Marine versera à la communauté de communes Nièvre et Somme la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Vert-Marine et à la communauté de communes Nièvre et Somme

Copie en sera transmise au préfet de la Somme.

Délibéré après l'audience publique du 30 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 février 2025.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : M. HeinisLe président de la formation de jugement,

F.-X. Pin

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La greffière,

E. Héléniak

La République mande et ordonne au préfet de la Somme, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth Héléniak

1

2

N°23DA01265


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01265
Date de la décision : 20/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL AUDICIT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-20;23da01265 ?
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