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06/02/2025 | FRANCE | N°24DA00549

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 1ère chambre, 06 février 2025, 24DA00549


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen :



- d'annuler l'arrêté du 16 août 2022, par lequel le maire de Cauville-sur-Mer a accordé à la société anonyme d'habitations à loyer modéré (SA HLM) Logeo Seine le permis de construire treize maisons individuelles et deux immeubles collectifs sur le terrain situé au lieu-dit " Le Village " sur le territoire de la commune, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux ;



- de mettre à la charge de la commune de Cauville-sur-Mer la somme de 1 500 euros au titre des disposition...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen :

- d'annuler l'arrêté du 16 août 2022, par lequel le maire de Cauville-sur-Mer a accordé à la société anonyme d'habitations à loyer modéré (SA HLM) Logeo Seine le permis de construire treize maisons individuelles et deux immeubles collectifs sur le terrain situé au lieu-dit " Le Village " sur le territoire de la commune, ainsi que la décision rejetant son recours gracieux ;

- de mettre à la charge de la commune de Cauville-sur-Mer la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les dépens de l'instance.

Par un jugement n°2300919 du 18 janvier 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande (article 1er) et a mis à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Cauville-sur-Mer au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative (article 2) et la somme de 1 500 euros à la société Logeo Seine au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative (article 3).

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 mars 2024 et des mémoires, complémentaire et de production de pièces, enregistrés les 18 avril 2024 et 17 août 2024, M. B... A..., représenté par Me Louis Cofflard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 août 2022 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Cauville-sur-Mer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête d'appel est recevable ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il ne comprend pas la minute signée conformément aux dispositions de l'article R.741-7 du code de justice administrative ;

- il est irrégulier dès lors que c'est à tort que le tribunal administratif a accueilli la fin de non-recevoir opposée en défense tirée de son absence d'intérêt à agir : il est voisin immédiat du projet dans la mesure où ses parcelles, certes non contiguës au projet, sont proches de la parcelle d'assiette du projet dont elles ne sont séparées que par une parcelle à l'état naturel ; eu égard au caractère naturel du terrain, aux caractéristiques du projet et notamment à son importance, et aux vues directes qu'il a sur les bâtiments projetés, aux nuisances sonores et visuelles résultant de ceux-ci, il dispose d'un intérêt pour agir en sa qualité de voisin immédiat ;

- le projet méconnaît les dispositions des articles L. 442-1 et R.421-19 du code de l'urbanisme en ce que l'opération projetée aurait dû faire l'objet d'un permis d'aménager, dès lors qu'elle constitue un lotissement ;

- le dossier de demande de permis de construire est insuffisant au regard des exigences posées par l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme, en raison de la mention erronée ou incomplète des parcelles d'assiette du projet, de l'absence d'indication du projet de lotissement communal et de l'omission de la superficie bâtie et de la destination sur le projet ;

- la décision attaquée méconnaît les dispositions de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, dès lors que le pétitionnaire ne justifie pas de sa qualité pour déposer une demande d'autorisation de construire ;

- elle est illégale du fait de l'illégalité du plan local d'urbanisme, en tant qu'il ne classe pas le terrain d'assiette du projet en espace proche du rivage, en violation des dispositions de l'article L.121-13 du code de l'urbanisme, et en tant qu'il classe le terrain d'assiette du projet en zone urbaine Uc constructible, par une appréciation manifestement erronée et en incohérence avec le plan d'aménagement et de développement durables et une orientation d'aménagement et de programmation (OAP) ;

- elle méconnaît directement les dispositions de l'article L.121-13 du code de l'urbanisme ;

- elle est incompatible avec une OAP ;

- elle méconnaît les articles du règlement de la zone Uc du plan local d'urbanisme, et en particulier les articles Uc1, Uc2, Uc3, Uc4 et Uc11 ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme, dès lors que la " maison commune " dont l'implantation est prévue sur la parcelle cadastrée AB n°409 ne pouvait faire l'objet d'un permis de construire distinct ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme, dès lors que l'autorisation d'urbanisme ne pouvait porter atteinte à un élément ayant fait l'objet d'une protection, en l'espèce un alignement d'arbres protégés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 mai et 20 septembre 2024, la SA HLM Logeo Seine, représentée par Me Stanislas Morel, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A... de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement n'est pas entaché d'irrégularité ;

- la requête est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2024 et un mémoire de production de pièces enregistré le 24 octobre 2024, la commune de Cauville-sur-Mer, représentée par Me Benoît Le Velly, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A... de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il appartient à la cour de vérifier si la minute du jugement est signée ;

- la requête est irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 27 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée avec effet immédiat en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Stéphane Eustache, rapporteur public,

- et les observations de Me Louis Cofflard, représentant M. A..., de Me Amandine Domingues représentant la SA HLM Logeo et de Me Mejat Gonze, substituant Me Levelly, représentant la commune de Cauville-sur-Mer.

Une note en délibéré enregistrée le 24 janvier 2025 a été présentée pour M. A....

Une note en délibéré enregistrée le 28 janvier 2025 a été présentée pour la SA HLM Logeo Seine.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme d'habitations à loyer modéré (SA HLM) Logeo Seine a déposé le 30 décembre 2021 auprès du maire de Cauville-sur-Mer une demande, complétée le 26 avril 2022, de permis de construire treize maisons individuelles et deux immeubles collectifs comportant 16 logements au lieudit " Le Village " sur le territoire communal, sur des terrains cadastrés AB 407 et ZK 143. Par un arrêté du 16 août 2022, le maire de Cauville-sur-Mer a accordé le permis de construire. Par un courrier du 18 novembre 2022, M. B... A..., voisin des parcelles d'assiette du projet, a adressé au maire de Cauville-sur-Mer un recours gracieux contre cet arrêté, qui a été rejeté par une décision notifiée le 22 novembre 2022. Par la présente requête, M. A... demande à la cour d'annuler le jugement n°2300919 du 18 janvier 2024 et l'arrêté du 16 août 2022. Il doit également être regardé comme demandant l'annulation de la décision rejetant son recours gracieux contre cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

En ce qui concerne la signature de la minute du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué est revêtu de la signature du rapporteur, de la présidente de la formation de jugement et de la greffière, et qu'il satisfait ainsi aux exigences des dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. Par suite, le moyen, qui manque en fait, doit être écarté.

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

4. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement (... ) ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 600-4 du même code : " Les requêtes dirigées contre une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code doivent, à peine d'irrecevabilité, être accompagnées du titre de propriété, de la promesse de vente, du bail, du contrat préliminaire mentionné à l' article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation , du contrat de bail, ou de tout autre acte de nature à établir le caractère régulier de l'occupation ou de la détention de son bien par le requérant. ".

5. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que la contestation d'une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le code de l'urbanisme est ouverte aux personnes physiques ou morales qui justifient de leur qualité d'occupant régulier ou de propriétaire d'un bien immobilier dont les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance sont de nature à être directement affectées par le projet et, d'autre part, qu'il appartient à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours tendant à l'annulation d'une telle décision, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, sans pour autant exiger du requérant qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de son recours. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est, d'une part, propriétaire des parcelles cadastrées AB 74, AB 76, AB 391, AB 392, AB 394, et ZK 144, d'autre part, nu-propriétaire de la parcelle AB 393. L'ensemble de ces parcelles est situé à proximité immédiate du projet de construction porté par la société Logeo Seine, prévu pour prendre place sur les parcelles cadastrés AB 407 et ZK 143.

7. Si les parcelles cadastrées ZK 144 et AB 392, constituées de terres agricoles et situées au nord du projet, sont contiguës à celui-ci, les autres parcelles, situées à l'est du projet, qui abritent la maison de M. A... et des hangars, sont séparées du projet par la parcelle cadastrée AB 409, qui est couverte d'une végétation haute et dense. Pour autant, ces parcelles se situent en face du projet et la maison de M. A... est installée à moins de 30 mètres du terrain d'assiette du projet et d'à peine plus des futures constructions . En dépit de la bande étroite de végétation qui les sépare, M. A... doit donc être considéré comme voisin immédiat du projet pour l'ensemble de ces parcelles.

8. L'appelant fait valoir l'ampleur du projet de construction litigieux qui consiste en la réalisation, d'une part, de treize maisons individuelles, d'autre part, de seize appartements répartis dans deux immeubles collectifs. D'une emprise totale de 1 831 m2 et couvrant deux parcelles d'une superficie totale de 9 464 m2, le projet tend à créer 29 logements locatifs sociaux qui n'existaient pas auparavant et 56 places de stationnement, modifiant l'aspect naturel du terrain et entraînant un accroissement des flux de circulation automobile. M. A... fait également état des nuisances sonores inhérentes aux futurs travaux et de leurs répercussions sur la qualité de vie dans la maison d'habitation, ainsi que des nuisances visuelles en raison de la proximité du terrain d'assiette du projet avec ses parcelles, même s'il ne fournit pas de photographie prise depuis sa maison d'habitation. Par suite, les allégations de M. A... sur les éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction sont suffisamment étayées pour le faire regarder comme justifiant d'un intérêt à agir pour contester l'arrêté du 16 août 2022.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que le jugement du tribunal administratif de Rouen est irrégulier pour avoir accueilli la fin de non-recevoir opposée par la société Logeo Seine tirée de son absence d'intérêt à agir et avoir rejeté sa demande comme irrecevable. Le jugement doit être annulé dans son intégralité.

10. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Rouen et devant la cour tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 août 2022 et de la décision implicite rejetant son recours gracieux, en répondant aux moyens soulevés dans le cadre des deux instances.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 16 août 2022 :

Au titre de la légalité externe :

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme :

11. M. A... soutient en première instance que la demande de permis de construire est lacunaire en ce qu'elle ne comprend pas l'avis rendu le 28 janvier 2022 par la direction du cycle du déchet de la communauté urbaine Le Havre-Seine Métropole, en méconnaissance de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme. S'il n'a pas repris ce moyen en appel, il ne l'a pas expressément abandonné, de sorte qu'il doit y être répondu.

12. Aux termes de l'article R.423-50 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur ".

13. Toutefois, premièrement, cette pièce ne fait pas partie de celles qui doivent être transmises par le pétitionnaire à l'appui de sa demande d'autorisation de construire. Deuxièmement, la consultation du service gestionnaire des déchets ménagers sur le territoire de la commune n'est pas au nombre des consultations imposées pour l'instruction d'un dossier de permis de construire par les dispositions du code de l'urbanisme ou d'autres lois et règlements. Troisièmement, il ressort de l'arrêté attaqué que l'avis émis le 28 janvier 2022 par la direction cycle du déchet de la communauté urbaine Le Havre Seine Métropole est dûment visé et que son article 2 impose que ses prescriptions seront strictement respectées. Quatrièmement, la commune de Cauville-sur-Mer a versé dans le cadre de la première instance l'avis en cause.

14. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 423-50 du code de l'urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles L. 442-1, R. 442-1, R. 442-2 et R. 421-19 du code de l'urbanisme :

15. Aux termes de l'article L.442-1 du code de l'urbanisme : " Constitue un lotissement la division en propriété ou en jouissance d'une unité foncière ou de plusieurs unités foncières contiguës ayant pour objet de créer un ou plusieurs lots destinés à être bâtis. ".

16. L'article R. 421-19 du code de l'urbanisme prévoit en son a) que les lotissements comportant la création ou l'aménagement de voies doivent être précédés de la délivrance d'un permis d'aménager, tandis que les articles L. 442-3 et R. 442-2 du même code permettent, sous conditions, que les projets ne relevant pas d'un permis d'aménager puissent faire l'objet d'un permis de construire valant déclaration préalable de lotissement.

17. Il ressort des pièces du dossier qu'une partie de l'assiette foncière du projet, celle correspondant à la parcelle AB 407, est issue d'une division foncière autorisée par une décision de non-opposition du 20 janvier 2022. La commune indique que " cette déclaration préalable tendait à regrouper les parcelles cadastrées AB 70, AB 72 et AB 284 en une emprise unique A, désormais parcelle AB 407, en détachant deux emprises D et C, désormais parcelles AB 408 et 409. Les parcelles ZK 143 et AB 407 devant être cédées à la société Logeo Seine, tandis que les parcelles AB 408 et 409 [seraient] conservées par la commune comme réserves foncières ". Comme le stipule expressément la promesse de vente du 9 novembre 2021, cette division foncière a eu pour but de créer plusieurs lots à bâtir, à savoir, d'une part, les lots correspondant aux parcelles ZK 143 et AB 407, appelées à devenir la propriété de la société Logeo, et, d'autre part, le lot correspondant à la parcelle AB 408, qui restera la propriété de la commune et accueillera une salle polyvalente communale.

18. Toutefois, cette division de janvier 2022 ne saurait avoir eu pour effet, eu égard à la rédaction de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme applicable en l'espèce, de faire regarder le projet en cause comme une opération de lotissement alors que, par lui-même, il ne comporte pas de division. Par suite, le moyen tiré de ce que l'opération relevait du lotissement et que, comportant une voie interne, par application de l'article R.421-19 du code de l'urbanisme, elle aurait dû faire l'objet d'un permis d'aménager doit être écarté.

En ce qui concerne l'incomplétude du dossier de demande de permis de construire :

19. M. A... soutient que les services instructeurs ont été induits en erreur en raison des lacunes et incohérences du dossier de permis de construire.

20. Aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : /a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; /b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. 431-33-1 ; /c) Les informations prévues aux articles R. 431-34 et R. 431-34-1. /Pour l'application des articles R. 423-19 à R. 423-22, le dossier est réputé complet lorsqu'il comprend les informations mentionnées au a et au b ci-dessus. /Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente. ". Aux termes de l'article R.431-5 du même code : " La demande de permis de construire précise : (...) c) La localisation et la superficie du ou des terrains ; (...) ". Aux termes de l'article R. 431-9 de ce code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. (...) ".

21. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

22. En premier lieu, il ressort du formulaire de demande de permis de construire initial que la société pétitionnaire avait renseigné les références cadastrales de la parcelle d'assiette du projet sur deux pages différentes, la page 2 mentionnant la parcelle AB 407 d'une superficie de 6 787 m2 et la page 9 la parcelle ZK 143 d'une superficie de 2 677 m2. Dans sa demande complétée le 26 avril 2022, elle a pris soin d'indiquer d'abord la superficie totale de 9 464 m2, puis les références cadastrales des deux parcelles dans la fiche complémentaire, conformément aux prescriptions figurant dans le formulaire Cerfa lorsque le projet porte sur plusieurs parcelles cadastrales.

23. En deuxième lieu, il ne ressort pas du rapprochement des plans de découpage parcellaire, de situation et de masse que des ambiguïtés ou incohérences affecteraient la localisation et l'emprise du projet. A cet égard, la circonstance que la maison commune ne soit pas mentionnée sur le plan de découpage parcellaire, alors qu'elle l'est sur le plan de masse PC2a, ne caractérise aucune omission dans la mesure où le plan de découpage parcellaire n'a pas pour objet de figurer les projets de construction. En outre, la notice est dépourvue d'ambiguïté sur l'articulation entre le projet de la société Logeo et celui de la commune. Tant dans la demande initiale que dans celle complétée, l'intégralité des parcelles concernées par le projet est renseignée.

24. En troisième lieu, si le formulaire de demande de permis de construire indique la démolition totale de bâtiments datant des années 1950, qui correspondent aux anciens vestiaires du terrain de football, la notice architecturale précise qu'ils seront démolis par la commune avant la mise à disposition du site. Dès lors, la circonstance que la société Logeo Seine n'ait demandé qu'un permis de construire et non un permis de démolir ne révèle aucune omission.

25. En quatrième lieu, ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'est pas établi que le projet en cause serait un projet de lotissement communal, dont l'omission entraînerait l'insuffisance du dossier, et la notice est dépourvue d'ambiguïté sur l'articulation entre le projet de la société Logeo Seine et celui de la commune.

26. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de permis de construire n'est pas fondé.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R.423-1 du code de l'urbanisme :

27. M. A... soutient que la société Logeo ne justifie pas de sa qualité pour présenter la demande de permis de construire, en méconnaissance de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme et de l'article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales.

28. Aux termes de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme : " (...) La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R.423-1 pour déposer une demande de permis. ". Aux termes de l'article R.423-1 du même code : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : /a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) ". Aux termes de l'article L.2241-1 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil municipal délibère sur la gestion des biens et les opérations immobilières effectuées par la commune (...). /Toute cession d'immeubles ou de droits réels immobiliers par une commune de plus de 2 000 habitants donne lieu à délibération motivée du conseil municipal portant sur les conditions de la vente et ses caractéristiques essentielles. Le conseil municipal délibère au vu de l'avis de l'autorité compétente de l'Etat. Cet avis est réputé donné à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la saisine de cette autorité ".

29. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Toutefois, lorsque l'autorité saisie de la demande vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir le caractère frauduleux de cette attestation ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser pour ce motif le permis sollicité.

30. Il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Cauville-sur-Mer a, par une délibération du 29 juin 2021, déclassé des parcelles d'une superficie de 13 411 m2 correspondant à l'ancien terrain de football et incluant les parcelles d'assiette du projet et les a transférées dans le domaine privé communal et que, par une délibération du 23 septembre 2021, il a accepté de vendre une partie de ces parcelles dans la limite de 10 000 m2 en vue de permettre la construction d'un village de personnes âgées. Sur le fondement de ces délibérations, la commune de Cauville-sur-Mer a conclu avec la société Logeo Seine une promesse de vente le 9 novembre 2021 des parcelles de terrain nu d'une superficie de 9 925 m2 en vue de la " construction d'une résidence intergénérationnelle de 26 logements ", sous condition suspensive de l'obtention d'un permis de construire au plus tard le 30 septembre 2022.

31. Il ressort de la promesse de vente du 9 novembre 2021 que la société Logeo était immédiatement autorisée à déposer une demande de permis de construire pour réaliser son projet sur les parcelles ZK 143 et AB 407 qui lui seraient cédées par la commune. Le maire disposait ainsi d'informations confirmant l'attestation fournie par la société pétitionnaire dans sa demande. Si M. A... soutient que, par sa délibération du 23 septembre 2021, le conseil municipal ne pouvait légalement céder les parcelles à la société Logeo, sans méconnaître la donation de la parcelle ZK 143 consentie à la commune par un particulier aux fins de créer un terrain de football, en l'absence de toute situation frauduleuse, cette circonstance, à la supposer avérée, ne saurait faire regarder la société Logeo comme ne satisfaisant pas aux exigences de l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme cité au point 32.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L.421-6 du code de l'urbanisme :

32. M. A... soutient que la demande de permis de construire aurait dû également porter sur la " maison commune " appelée à être construite en entrée de site sur la parcelle AB 408, en application de L. 421-6 du code de l'urbanisme, dès lors qu'elle constitue un ensemble immobilier unique avec les constructions autorisées.

33. Aux termes de l'article L.421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. /Le permis de démolir peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les travaux envisagés sont de nature à compromettre la protection ou la mise en valeur du patrimoine bâti ou non bâti, du patrimoine archéologique, des quartiers, des monuments et des sites. ".

34. Il résulte de ces dispositions que le permis de construire a pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'il autorise avec la législation et la réglementation d'urbanisme. Il s'ensuit, d'une part, que si une construction constituée de plusieurs éléments formant, en raison des liens physiques ou fonctionnels entre eux, un ensemble immobilier unique, doit en principe faire l'objet d'un seul permis de construire, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que, lorsque l'ampleur et la complexité du projet le justifient, notamment en cas d'intervention de plusieurs maîtres d'ouvrage, les éléments de la construction ayant une vocation fonctionnelle autonome puissent faire l'objet de permis distincts, sous réserve que l'autorité administrative ait vérifié, par une appréciation globale, que le respect des règles et la protection des intérêts généraux que garantirait un permis unique sont assurés par l'ensemble des permis délivrés. Il s'ensuit, d'autre part, que lorsque deux constructions sont distinctes, la seule circonstance que l'une ne pourrait fonctionner ou être exploitée sans l'autre, au regard de considérations d'ordre technique ou économique et non au regard des règles d'urbanisme, ne suffit pas à caractériser un ensemble immobilier unique. Des constructions distinctes, ne comportant pas de liens physiques ou fonctionnels entre elles, n'ont pas à faire l'objet d'un permis unique, mais peuvent faire l'objet d'autorisations distinctes, dont la conformité aux règles d'urbanisme est appréciée par l'autorité administrative pour chaque projet pris indépendamment.

35. Il ne ressort pas du dossier de permis de construire que la " maison commune " soit destinée exclusivement aux résidents du futur projet. Certes, la notice architecturale prévoit " l'implantation de la maison commune en entrée du site, dans sa partie sud afin d'en faciliter l'accès et de réduire les nuisances pour le voisinage. Cette position lui permet également de profiter d'espaces extérieurs tels que le potager partagé et le terrain de pétanque. ". Ces indications ne suffisent cependant pas, à elles seules, à caractériser des liens physiques et fonctionnels tels que le projet autorisé et la " maison commune " doivent être regardés comme un ensemble immobilier unique. Au demeurant, il apparaît que les deux projets ont une vocation fonctionnelle propre, sans que les deux opérations soient indispensables l'une à l'autre. Comme le soulignent les défenderesses, la société pétitionnaire n'est pas propriétaire de la parcelle cadastrée AB 408, dont la commune s'est réservée la propriété en vue de la constitution d'une réserve foncière et il n'existe en l'état ni projet formalisé de construction d'une " maison commune " ni demande de permis de construire déposée à cette fin. Ces deux projets de construction distincts, qui ne feront pas nécessairement intervenir le même maître d'ouvrage, sont implantés sur deux parcelles séparées et n'ont en commun que la voie de desserte. Ils sont donc indépendants l'un de l'autre et ne constituent pas un ensemble immobilier unique devant en principe faire l'objet d'un seul permis de construire.

36. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 421-6 du code de l'urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de l'exception d'illégalité du PLU de Cauville-sur-Mer :

37. Aux termes de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme : " Sous réserve de l'application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l'annulation ou la déclaration d'illégalité (...) d'un plan local d'urbanisme (...) a pour effet de remettre en vigueur (...) le plan local d'urbanisme (...) immédiatement antérieur ". L'article L. 600-12-1 du même code dispose que : " L'annulation ou la déclaration d'illégalité (...) d'un plan local d'urbanisme (...) sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l'utilisation du sol ou à l'occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d'illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d'urbanisme applicables au projet (...) ".

38. Si un permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation. Par suite, un requérant demandant l'annulation d'un permis de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut. Cependant, il résulte de l'article L. 600-12 du code de l'urbanisme que la déclaration d'illégalité d'un document d'urbanisme a, au même titre que son annulation pour excès de pouvoir, pour effet de remettre en vigueur le document d'urbanisme immédiatement antérieur. Dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu'un permis de construire a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l'article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

39. M. A... excipe de l'illégalité de plusieurs dispositions du PLU de Cauville-sur-Mer. Il indique également que sous l'empire du plan d'occupation des sols (POS) immédiatement antérieur, les parcelles du projet étaient classées en zone Uf qui correspond, selon le règlement de ce document, " au noyau ancien du village et ses extensions récentes où se trouvent les principaux équipements de la commune " et que le projet méconnaîtrait les articles Uf 1, Uf 2 et Uf 9 du POS s'ils étaient remis en vigueur.

Quant au classement des parcelles d'assiette du projet en zone Uc :

40. En premier lieu, M. A... soutient que le PLU de Cauville-sur-Mer est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ainsi que d'une incohérence avec le plan d'aménagement et de développement durables (PADD) en tant que le plan de zonage classe les parcelles d'assiette du projet en zone Uc.

41. Aux termes de l'article R. 151-18 du même code : " Les zones urbaines sont dites "zones U". Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter. ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

42. Aux termes de l'article L. 151-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit : /1° Les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ; /2° Les orientations générales concernant l'habitat, les transports et les déplacements, les réseaux d'énergie, le développement des communications numériques, l'équipement commercial, le développement économique et les loisirs, retenues pour l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale ou de la commune. (...) ". Aux termes de l'article L. 151-8 de ce code : " Le règlement [du plan local d'urbanisme] fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".

43. Il ressort, d'une part, du PADD de Cauville-sur-Mer qu'il a pour premier objectif, au titre de l'habitat et du fonctionnement urbain, de " promouvoir une gestion économe de l'espace et confirmer la centralité ", ce qui suppose de " densifier prioritairement les secteurs déjà urbanisés dans la mesure où les conditions d'accès et le dimensionnement des réseaux sont suffisants (centre-bourg et le Tronquay) ", d'" ouvrir de nouveaux terrains à l'urbanisation, de façon raisonnée, pour accueillir de nouveaux habitants ", de " limiter l'étalement urbain vers les terres agricoles et les espaces naturels ". Il affiche des objectifs chiffrés de " 16 à 20 logements par hectare en programme dense et/ou locatif, 12 logements par hectare en accession à la propriété " et " ne pas consommer plus de 4 hectares d'espaces agricoles et naturels pour l'habitat ". Il poursuit également un deuxième l'objectif d'" adapter l'offre de logements aux besoins de la commune ", ce qui suppose d'" augmenter la capacité du parc de logements de la commune ", de " faciliter l'accessibilité au logement des ménages modestes (offre locative, offre sociale) ", de " diversifier le parc de logements et permettre la mixité des formes urbaines " et de " maintenir les ménages vieillissants sur la commune ". Il affiche l'objectif chiffré d'un maximum de 8 logements par an sur 10 ans pour gagner 160 habitants à l'horizon 2026.

44. Il ressort, d'autre part, du règlement écrit du PLU de Cauville-sur-Mer que " le secteur Urbain Central, noté Uc, correspond aux espaces bâtis centraux les plus denses observés à Cauville-sur-Mer ; le village et le Tronquay. Il s'agit de l'ensemble urbain cohérent situé à l'ouest de la RD940, formé autour de la rue Saint-Nicolas, de la rue du Général de Gaulle et des lotissements de la commune, ainsi que le long de la rue du Tronquay. Cet ensemble correspond au cœur de village de Cauville-sur-Mer ainsi que de son extension au Tronquay. Il se caractérise par une densité bâtie relativement importante, typique de centre-bourg de commune périurbaine (nombreuses formes urbaines de lotissement). Le tissu urbain observé est très hétérogène, composé à la fois de bâti traditionnel ancien plus ou moins préservé et de bâti récent de type pavillon classique isolé ou intégré à un lotissement. Objectifs poursuivis : L'objectif du règlement écrit est de conforter la densité urbaine et de renforcer le caractère central de ce secteur. ".

45. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est situé dans le quartier du Village, au bord des espaces déjà urbanisés, à quelques mètres de l'église Saint-Nicolas, au nord de l'axe compris entre la rue du général de Gaulle et de la rue Saint-Nicolas et à l'ouest des lotissements de la commune. Le classement en zone Uc de ce terrain est cohérent avec les objectifs des auteurs du plan, affichés dans le PADD, de conforter la densité urbaine notamment du centre-bourg déjà urbanisé et de favoriser la mixité sociale et générationnelle des logements. Dans ces conditions, sans qu'il soit besoin d'examiner la conformité du projet aux dispositions du POS antérieur, le classement du terrain d'assiette du projet en zone Uc ne révèle pas d'incohérence avec le PADD et ne procède pas d'une erreur manifeste d'appréciation.

46. En second lieu, M. A... soutient que le plan de zonage du PLU de Cauville-sur-Mer est entaché d'une incohérence avec l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) en ce qu'il classe les parcelles d'assiette du projet en zone Uc alors qu'elles ne sont pas couvertes par l'OAP.

47. Aux termes de l'article L.151-6 du code de l'urbanisme : " Les orientations d'aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l'aménagement, l'habitat, les transports, les déplacements et, en zone de montagne, sur les unités touristiques nouvelles. (...) ". Aux termes de l'article L.151-7 de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " I.- Les orientations d'aménagement et de programmation peuvent notamment : /1° Définir les actions et opérations nécessaires pour mettre en valeur l'environnement, les paysages, les entrées de villes et le patrimoine, lutter contre l'insalubrité, permettre le renouvellement urbain, favoriser la densification et assurer le développement de la commune ; (...) ".

48. Il ressort du PLU de Cauville-sur-Mer que celui-ci comprend une orientation d'aménagement et de programmation (OAP) d'une extension du centre-bourg qui permet de lier les espaces déjà urbanisés du centre-bourg avec ceux du Tronquay. La circonstance que le plan de zonage du PLU classe en zone Uc des terrains, et notamment le terrain d'assiette du projet, non situés dans le secteur couvert par l'OAP ne caractérise aucune incohérence avec celle-ci puisqu'elle se borne à promouvoir, dans le secteur qu'elle définit, le classement de terrains dans un autre type de zone, la zone à urbaniser AUc.

Quant à la non-inclusion des parcelles d'assiette du projet dans les espaces proches du rivage délimités par le règlement graphique du PLU :

49. M. A... soutient que le règlement graphique du PLU de Cauville-sur-Mer est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en tant que le plan de zonage ne représente pas les parcelles d'assiette du projet dans les espaces proches du rivage.

50. Aux termes de l'article R. 151-10 du code de l'urbanisme : " Le règlement est constitué d'une partie écrite et d'une partie graphique, laquelle comporte un ou plusieurs documents. /Seuls la partie écrite et le ou les documents composant la partie graphique du règlement peuvent être opposés au titre de l'obligation de conformité définie par l'article L. 152-1. ". Aux termes de l'article R.151-11 du même code : " Les règles peuvent être écrites et graphiques. / Lorsqu'une règle fait exclusivement l'objet d'une représentation dans un document graphique, la partie écrite du règlement le mentionne expressément. (...) ". Aux termes de l'article R.151-14 de ce code : " Le ou les documents graphiques font apparaître les limites des zones, secteurs, périmètres, espaces que le plan local d'urbanisme identifie en application de la présente section. ".

51. Aucune disposition n'impose de délimiter les espaces proches du rivage au rapport de présentation ou dans la partie graphique du règlement, même s'il est loisible aux auteurs du PLU de le faire. Toutefois, il ressort du règlement écrit du PLU de Cauville-sur-Mer que plusieurs secteurs comportent des dispositions itératives relatives à la déclinaison de la loi littoral et aux espaces proches du rivage qui précisent que : " Sur le plan de zonage sont représentés les Espaces Proches du Rivage au titre de la loi Littoral. ". Il ressort du plan de zonage du PLU de Cauville-sur-Mer que les espaces proches du rivage ont été délimités par une bande bleue crantée et que les parcelles d'assiette du projet n'y figurent pas. Cependant, l'erreur éventuelle dans les limites des espaces proches du rivage dans le plan de zonage reste sans incidence sur la légalité du PLU dès lors que le règlement du PLU et le classement des parcelles au plan de zonage permettent de satisfaire aux conditions posées par l'article L.121-13 du code de l'urbanisme.

Quant à la méconnaissance par le plan de zonage du PLU de l'article L.121-13 du code de l'urbanisme :

52. Aux termes de l'article L.121-13 du code de l'urbanisme : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau. Toutefois, ces critères ne sont pas applicables lorsque l'urbanisation est conforme aux dispositions d'un schéma de cohérence territoriale ou d'un schéma d'aménagement régional ou compatible avec celles d'un schéma de mise en valeur de la mer. /En l'absence de ces documents, l'urbanisation peut être réalisée avec l'accord de l'autorité administrative compétente de l'Etat après avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites appréciant l'impact de l'urbanisation sur la nature. Le plan local d'urbanisme respecte les dispositions de cet accord. (...) ".

53. Pour déterminer si une zone peut être qualifiée d'espace proche du rivage au sens des dispositions précitées, trois critères doivent être pris en compte, à savoir la distance séparant le projet et le littoral, le degré d'urbanisation et d'aménagement des parcelles d'implantation, et non de l'espace dans lequel se situent les constructions envisagées, et la covisibilité, même seulement partielle, entre celle-ci et la mer. La covisibilité suppose de vérifier non seulement si le terrain est visible de la mer, mais aussi s'il a vue sur la mer et si partant, une construction édifiée sur ce terrain obstruera la vue pour les personnes résidant en arrière du terrain.

54. Il ressort du plan de zonage du PLU de Cauville-sur-Mer que les terrains compris dans les espaces proches du rivage sont classés soit en zone naturelle, soit en zone agricole, à l'exception de deux parcelles cadastrales classées en zone Uc qui forment une avancée vers la mer par rapport aux autres terrains urbanisés. Pour autant, certains terrains agricoles situés en avant du front bâti dans le quartier du Tronquay ou au nord du Village n'ont pas été inclus dans ces espaces. Les parcelles d'assiette du terrain classées en zone Uc sont, à l'image, de la quasi-totalité des parcelles ayant le même classement, en dehors des espaces proches du rivage.

55. En l'espèce, l'extrémité occidentale des parcelles du projet se situe à environ 700 mètres du rivage. Il est vrai qu'une partie d'entre elles se situe dans le prolongement d'un ensemble pavillonnaire, mais cette partie ne représente qu'environ un tiers de la superficie totale des parcelles. Pour les deux-tiers restants, les parcelles ne sont séparées du rivage que par des champs cultivés, sans relief et sans construction, de sorte qu'elles seront covisibles avec la mer. Dans ces conditions, eu égard, d'une part, à la faible distance séparant le rivage et les parcelles et, d'autre part, à l'absence de toute urbanisation et aménagement sur les terres séparant la partie principale des parcelles et le rivage, les parcelles doivent être regardées comme relevant des espaces proches du rivage.

56. Il résulte des dispositions précitées de l'article L.121-13 du code de l'urbanisme qu'une opération conduisant à étendre l'urbanisation d'un espace proche du rivage ne peut être légalement autorisée que si elle est, d'une part, de caractère limité, et, d'autre part, justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme selon les critères qu'elles énumèrent. Cependant, lorsqu'un schéma de cohérence territoriale comporte des dispositions suffisamment précises et compatibles avec ces dispositions législatives qui précisent les conditions de l'extension de l'urbanisation dans l'espace proche du rivage dans lequel l'opération est envisagée, le caractère limité de l'urbanisation qui résulte de cette opération s'apprécie en tenant compte de ces dispositions du schéma concerné.

57. Doivent être regardées comme une extension de l'urbanisation au sens de l'article L. 121-13 de ce code, l'ouverture à la construction de zones non urbanisées ainsi que la densification significative de zones déjà urbanisées.

58. Le schéma de cohérence territoriale Le Havre Pointe de Caux Estuaire, approuvé le 13 février 2012, ne détermine pas le régime applicable aux espaces proches du rivage et renvoie sur ce point aux documents d'urbanisme locaux. Il y a donc lieu d'examiner l'urbanisation telle qu'elle est autorisée par le PLU sur les parcelles en cause pour vérifier, conformément aux prescriptions de l'article L.121-13 du code de l'urbanisme, si les dispositions d'urbanisme applicables dans les espaces proches du rivage permettent de garantir l'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage.

59. Il ressort de l'article Uc 2 du règlement du PLU de Cauville-sur-Mer qu'il autorise plusieurs catégories de constructions, dont " les constructions à vocation d'habitation, leurs annexes et leurs extension ". Cependant, l'article Uc 9 limite l'emprise au sol des constructions à 40 % de la surface de la parcelle, " annexes et extension comprises ", en permettant toutefois une dérogation, notamment pour les " projets d'aménagement mixant différents types de logement (logements locatifs, seniors, logements sociaux...) ou promouvant des formes innovantes d'habitant ", dans la limite de 10 % d'emprise supplémentaire. Par ailleurs, l'article Uc 10 limite la hauteur maximale des constructions à 6,5 mètres à l'égout de toiture, sous une " forme urbaine globale de type R+1+C ". Il résulte de l'application des dispositions précitées combinées du règlement du PLU qu'elles ne sont pas susceptibles d'étendre de manière significative l'urbanisation existante. Dès lors qu'elle présente un caractère limité, l'extension de l'urbanisation prévue par les dispositions du règlement du PLU applicables en zone Uc ne méconnaît pas les prescriptions de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme :

60. Une opération qu'il est projeté de réaliser en agglomération ou, de manière générale, dans des espaces déjà urbanisés ne peut être regardée comme une "extension de l'urbanisation" que si elle conduit à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation de quartiers périphériques ou si elle modifie de manière importante les caractéristiques d'un quartier, notamment en augmentant sensiblement la densité des constructions. La seule réalisation dans un quartier urbain d'un ou plusieurs bâtiments qui est une simple opération de construction ne peut être regardée comme constituant une extension de l'urbanisation au sens de la loi.

61. Les deux parcelles ZK 143 et AB 407 classées en zone Uc s'implantent au nord du centre urbain de Cauville-sur-Mer, sur des terrains bordés au sud-ouest par une zone pavillonnaire dense, au sud par l'église et son cimetière et à l'est par des terrains peu densément construits. Au nord-ouest et au nord, les parcelles s'ouvrent sur de vastes terrains agricoles, qui s'étirent vers l'ouest jusqu'à la mer et vers le nord vers une coupure d'urbanisation identifiée par le PLU. Dans ces conditions, les parcelles doivent être regardées comme s'implantant dans un quartier urbanisé périphérique de Cauville-sur-Mer. Le projet prévoit la construction de treize maisons individuelles et de deux immeubles collectifs de 16 logements, conduisant ensemble à la création d'une surface de plancher de 1 831 m² sur un terrain d'une superficie totale de 9 464 m². Chaque maison ne comporte qu'un seul niveau, avec une hauteur maximale de 6,50 mètres, tandis que les deux immeubles collectifs comportent un niveau surmonté de combles (R+1+combles), avec une hauteur maximale de 9 mètres. Les bâtiments seront implantés de manière à créer un cœur d'îlot non bâti et végétalisé, sans clôture. Enfin, le projet prévoit la création de 56 places de stationnement, dont 13 couvertes. Au vu de ces caractéristiques, le projet ne conduira pas à étendre ou à renforcer de manière significative l'urbanisation du quartier périphérique où il s'implantera et il ne se traduit donc pas par une extension de l'urbanisation. Le moyen tiré de la méconnaissance directe de l'article L. 121-13 du code de l'urbanisme doit ainsi être écarté.

En ce qui concerne la compatibilité de l'arrêté litigieux avec l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) :

62. Aux termes de l'article L. 152-1 de ce code : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. /Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation. ".

63. Il résulte de ces dispositions qu'une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu'elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) d'un plan local d'urbanisme (PLU) et, en particulier, en contrarient les objectifs. La compatibilité d'une autorisation d'urbanisme avec les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) d'un plan local d'urbanisme (PLU) s'apprécie en procédant à une analyse globale des effets du projet sur l'objectif ou les différents objectifs d'une OAP, à l'échelle de la zone à laquelle ils se rapportent.

64. Il ressort de l'OAP d'une extension du centre-bourg que celle-ci promeut le développement de l'urbanisation entre le centre-bourg et le village du Tronquay. Ainsi qu'il a été dit au point 48 cette OAP n'impose pas que les nouvelles constructions soient situées exclusivement dans ce périmètre. La circonstance que le terrain d'assiette ne relève pas du secteur couvert par l'OAP ne caractérise aucune incompatibilité du projet avec celle-ci.71. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec l'OAP doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles de la zone Uc du règlement du PLU de Cauville-sur-Mer :

65. En premier lieu, M. A... soutient que le projet méconnaît les articles Uc 1 et Uc2 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU), au motif que ces articles ne permettent pas l'urbanisation du secteur classé en zone Uc, où s'inscrivent les deux parcelles du projet.

66. Aux termes du règlement du PLU, " le secteur urbain central, noté Uc, correspond aux espaces bâtis centraux les plus denses observés à Cauville-sur-Mer ; le village et le Tronquay. Il s'agit de l'ensemble urbain cohérent situé à l'ouest de la RD940, formé autour de la rue Saint-Nicolas, de la rue du général de Gaulle et des lotissements de la commune, ainsi que le long de la rue du Tronquay. Cet ensemble correspond au cœur de village de Cauville-sur-Mer ainsi que de son extension au Tronquay. Il se caractérise par une densité bâtie relativement importante, typique de centre-bourg de commune périurbaine (...). Le tissu urbain observé est très hétérogène, composé à la fois de bâti traditionnel ancien (...) et de bâti récent de type pavillon classique, isolé ou intégré à un lotissement ".

67. Il résulte de ces dispositions que la zone Uc ne couvre pas uniquement le lieu-dit du Tronquay, mais aussi le centre urbain de Cauville-sur-Mer. L'objectif poursuivi dans cette zone par les auteurs du PLU est de " conforter la densité urbaine et de renforcer le caractère central de ce secteur ", en y autorisant des constructions à vocation d'habitation ou de commerces ainsi que des équipements publics. Or les constructions projetées, destinées à l'habitation, s'inscrivent au sein de l'enveloppe urbaine du village de Cauville-sur-Mer, à l'ouest de la RD 940, dans un quartier situé aux abords de la rue Saint-Nicolas et du général de Gaulle, à proximité immédiate d'un lotissement existant et de l'église du village. Par suite, le projet ne méconnaît pas les articles Uc1 et Uc2 du règlement du PLU.

68. En deuxième lieu, si M. A... soutient que le projet méconnaît les articles Uc3 et Uc4 du règlement du PLU, en se bornant à faire valoir en des termes généraux que les voiries et réseaux devront être réalisés par la communauté urbaine, il ne précise pas quelles dispositions précises de ces articles, qui comprennent respectivement 10 et 15 sous-articles, sont méconnues.

69. En tout état de cause, d'une part, la société pétitionnaire n'est pas tenue d'être propriétaire de la voie privée de desserte du projet, mais seulement d'en avoir l'usage, ce qui n'est pas contesté en l'espèce. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la commune a acquis la voie privée et les terrains adjacents dans le but de réaliser les travaux d'élargissement nécessaires à la desserte du projet et de rétrocéder l'ouvrage à la communauté urbaine. Il n'est ni établi ni même allégué que ces travaux seraient incertains ou insuffisants pour assurer un accès ou une desserte conforme aux prescriptions des articles Uc 3 et Uc 4 du règlement du PLU.

70. En troisième lieu, si M. A... soutient que " l'article Uc11 apparaît tout autant méconnu au regard de l'atteinte très forte paysagère du projet, implanté à proximité immédiate d'un alignement d'arbres protégés ", il ne précise pas quelles dispositions précises de cet article, qui comprend 23 sous-articles, sont méconnus.

71. En tout état de cause, en ce qui concerne l'incidence paysagère du projet, il ressort de la notice architecturale que le terrain sera aménagé selon les principes et caractéristiques du " béguinage ", " en transcrivant l'image du clos masure propre à la région de la pointe de Caux ". La bonne insertion paysagère du projet est assurée par la hauteur modérée des bâtiments, comparable à celle des constructions existantes, la couverture par des ardoises ou la végétalisation des toitures, le parement des façades par des briques de terre cuite ou de la chaux dans un style traditionnel et la végétalisation du site, avec la création d'un " jardin verger " en son cœur et la plantation de haies arbustives dans son pourtour. En ce qui concerne l'incidence du projet sur un alignement d'arbres, le projet ne se situe pas sur la parcelle AB 409 sur laquelle figure l'alignement d'arbres identifié comme un élément paysager à protéger en application de l'article L.151-23 du code de l'urbanisme. Si le projet prévoit à proximité de cet alignement la création d'une voie de circulation intérieure et de places de stationnement, ainsi que la construction d'un bâtiment collectif, il envisage aussi de préserver une bande de terrain engazonnée entre l'alignement d'arbres et ces aménagements et constructions. Dans ces conditions, le projet ne modifie pas cet alignement mais l'intègre dans son aménagement paysager, en ménageant des vues vers lui et en l'utilisant comme écran avec les autres parcelles. Par suite, M. A... ne démontre pas en quoi le projet porterait atteinte à l'article Uc11 du règlement du PLU de Cauville-sur-Mer.

72. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions Uc1, Uc2, Uc3, Uc4 et Uc11 du règlement du PLU applicables à la zone Uc doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article L.151-23 du code de l'urbanisme et du règlement du PLU de Cauville-sur-Mer :

73. M. A... soutient que le plan de masse du projet révèle que les accès communs aux différentes maisons, en particulier la voie à sens unique qui longe l'alignement boisé, s'implantent à moins de 10 mètres de celui-ci, en méconnaissance des dispositions de l'article L.151-23 du code de l'urbanisme.

74. Aux termes de l'article L.151-23 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les sites et secteurs à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. Lorsqu'il s'agit d'espaces boisés, il est fait application du régime d'exception prévu à l'article L. 421-4 pour les coupes et abattages d'arbres. /Il peut localiser, dans les zones urbaines, les terrains cultivés et les espaces non bâtis nécessaires au maintien des continuités écologiques à protéger et inconstructibles quels que soient les équipements qui, le cas échéant, les desservent. ".

75. Cet article permet au règlement d'un plan local d'urbanisme d'édicter des dispositions visant à protéger, mettre en valeur ou requalifier un élément du paysage dont l'intérêt le justifie. Le règlement peut notamment, à cette fin, instituer un cône de vue ou identifier un secteur en raison de ses caractéristiques particulières. La localisation de ce cône de vue ou de ce secteur, sa délimitation et les prescriptions le cas échéant définies, qui ne sauraient avoir de portée au-delà du territoire couvert par le plan, doivent être proportionnées et ne peuvent excéder ce qui est nécessaire à l'objectif recherché. Une interdiction de toute construction ne peut être imposée que s'il s'agit du seul moyen permettant d'atteindre l'objectif poursuivi.

76. L'article L.151-23 du code de l'urbanisme n'est pas directement invocable à l'encontre d'une autorisation d'urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté comme inopérant.

77. Cependant, M. A... cite les dispositions du règlement du PLU qui régissent les alignements boisés et doit être regardé, ce faisant, comme invoquant également, et cette fois utilement, leur méconnaissance.

78. Le règlement du PLU de Cauville-sur-Mer prévoit en son titre V relatif aux dispositions applicables aux éléments répertoriés au titre, notamment, de l'article L. 151-23, que : " (...) Toute nouvelle construction devra observer un recul de 10 mètres par rapport aux alignements boisés et aux vergers, à l'exception des annexes et des extensions. (...). ". Ni le règlement ni le lexique du PLU ne définissent le terme de " construction ". A titre indicatif, le lexique annexé au PLU ne donne pas de définition de la notion de " construction ". En vertu du point 1.3 du lexique national de l'urbanisme : " Une construction est un ouvrage fixe et pérenne, comportant ou non des fondations et générant un espace utilisable par l'Homme en sous-sol ou en surface ". Il est précisé au point 2.3 que " la notion d'espace utilisable par l'Homme vise à différencier les constructions, des installations dans lesquelles l'Homme ne peut rentrer, vivre ou exercer une activité ".

79. Ainsi qu'il a été dit au point 71, il ressort du plan de zonage du PLU qu'un alignement boisé à préserver est identifié au titre de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme sur la parcelle AB 409 voisine du projet. M. A... soutient, sans être contesté, que la voie de circulation intérieure du lotissement et des places de stationnement seront situées à moins de dix mètres de l'alignement d'arbres protégé. Ces deux ouvrages sont ainsi destinés à créer un espace " utilisable " par l'homme, mais sans créer un bâtiment où leurs usagers pourraient y vivre ou exercer une activité. En outre, le règlement écrit du PLU, s'il ne définit pas la notion de " construction ", distingue clairement les règles applicables à celles-ci et celles applicables aux accès et places de stationnement. Ainsi, l'article Uc2 relatif à l'occasion et à l'utilisation du sol distingue les " constructions " à vocation d'habitation ou de commerces, et les " aires de stationnement ", tandis que l'article Uc 13 définit les " espaces libres " comme les " espaces non utilisés pour les constructions, la voirie et le stationnement ", en distinguant ces trois notions. Les auteurs du PLU n'ont donc pas entendu inclure, dans la notion de " construction ", les ouvrages consistant en des voies de circulation intérieure ou des places de stationnement. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du titre V du règlement du PLU de Cauville-sur-Mer doit être écarté comme inopérant.

80. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du 16 août 2022 et de la décision rejetant son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

81. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Cauville-sur-Mer, qui n'est pas dans cette instance la partie perdante, la somme demandée par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

82. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... le versement à la commune de Cauville d'une part et à la société Logeo Seine d'autre part, d'une somme de 1 500 euros chacune au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n°2300919 du 18 janvier 2024 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Rouen et devant la cour sont rejetées.

Article 3 : M. A... versera à la commune de Cauville-sur-Mer une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : M. A... versera à la société Logeo Seine une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la commune de Cauville-sur-Mer et à la société Logeo Seine.

Délibéré après l'audience publique du 23 janvier 2025 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,

- M. Vincent Thulard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 février 2025.

La présidente-rapporteure,

Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : S. Pinto Carvalho

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Maritime en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Suzanne Pinto Carvalho

N°24DA00549 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00549
Date de la décision : 06/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Isabelle Legrand
Rapporteur public ?: M. Eustache
Avocat(s) : COFFLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-06;24da00549 ?
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