Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société en nom collectif (SNC) Hôtelière de Loon-Plage a demandé au tribunal administratif de Lille, par deux demandes distinctes, de prononcer une réduction, d'une part, des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des locaux qu'elle exploite en tant qu'hôtel-restaurant à Loon-Plage, d'autre part, des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des mêmes locaux.
Par un jugement nos 1905034, 1908037 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Lille a prononcé les réductions demandées et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2022, et par un mémoire, enregistré le 26 juillet 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de remettre à la charge de la SNC Hôtelière de Loon-Plage les fractions de cotisation foncière des entreprises, de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxes annexes dont la décharge a été prononcée par ce jugement.
Il soutient que, pour prononcer une réduction de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises assignée à la SNC Hôtelière de Loon-Plage au titre de l'année 2018, ainsi que la réduction correspondante de la cotisation foncière des entreprises à laquelle ce contribuable a été assujetti, c'est à tort que le tribunal administratif de Lille, d'une part, a estimé que la production, par la SNC Hôtelière de Loon-Plage, telle que suggérée par l'administration dans ses écritures, de pièces complémentaires était sans intérêt pour la solution du litige et, d'autre part, a écarté la valeur locative établie, avant la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, par comparaison, alors même que cette évaluation ne fondait pas directement les impositions en litige et qu'elle avait été régulièrement déterminée, l'administration n'ayant indiqué que par erreur aux premiers juges renoncer au terme de comparaison utilisé pour ce faire.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2023, la SNC Hôtelière de Loon-Plage, représentée par Me Zapf, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que, dès lors qu'elle avait démontré que, pour déterminer la valeur locative initiale de son établissement, le service avait eu recours à un terme de comparaison ayant lui-même fait l'objet d'une évaluation irrégulière et que l'administration a expressément abandonné en cours d'instance, c'est à bon droit que le tribunal administratif a accepté d'y substituer le local-type qu'elle proposait, après avoir constaté que sa pertinence n'était pas contestée.
Par une ordonnance du 21 décembre 2022, le premier vice-président de la cour administrative d'appel de Douai a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, les conclusions de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique tendant à l'annulation du jugement du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Lille en ce qu'il a prononcé une réduction des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties et des taxes annexes auxquelles la SNC Hôtelière de Loon-Plage a été assujettie au titre de l'année 2018 dans les rôles de la commune de Loon-Plage à raison de ses locaux à usage d'hôtel-restaurant et en ce qu'il a mis à la charge de l'Etat, dans le cadre de ce litige, une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un arrêt n°22DA01556 du 12 octobre 2023, la cour a, d'une part, prescrit, avant dire-droit, un supplément d'instruction aux fins, pour la SNC Hôtelière de Loon-Plage, de produire, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de cet arrêt, des déclarations modèle CBD établies séparément pour ce qui concerne la partie hôtelière et la partie affectée à usage de restaurant de son établissement de Loon-Plage et présentant notamment le détail des surfaces affectées à l'une et l'autre de ces activités et, d'autre part, réservé jusqu'en fin d'instance tous droits et moyens sur lesquels elle n'a pas statué par cet arrêt.
Des pièces ont, à la suite de ce supplément d'instruction, été produites par Me Zapf, pour la SNC Hôtelière de Loon-Plage et enregistrées au greffe de la cour le 17 octobre 2023.
Par un mémoire, enregistré le 31 octobre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut aux mêmes fins que sa requête.
Il soutient, en outre, que :
- les mentions portées sur les déclarations produites par la SNC Hôtelière de Loon-Plage à la suite du supplément d'instruction prescrit par la cour sont discordantes, tant en ce qui concerne la surface des bâtiments que celle des parcs de stationnement, avec, d'une part, les éléments portés sur des déclarations de surface antérieurement souscrites en ce qui concerne les établissements en cause et, d'autre part, les informations que l'administration a pu collecter sur le site internet Géoportail, lesquels éléments et informations permettent de penser que ces bâtiments et parcs de stationnement représentent des surfaces supérieures à celles déclarées en dernier lieu ;
- il serait souhaitable que la SNC Hôtelière de Loon-Plage produise de nouvelles déclarations rectificatives, accompagnées de plans cotés.
Par un arrêt n°22DA01556 du 2 mai 2024, la cour a, d'une part, prescrit, avant dire-droit, une expertise, aux fins, notamment, pour l'expert, de déterminer, après s'être fait communiquer tous les éléments utiles et s'être rendu sur les lieux, les surfaces de chacune des parties composant l'immeuble exploité par la SNC Hôtelière de Loon-Plage et ses dépendances, notamment les parcs de stationnement, en distinguant les parties affectées à l'établissement hôtelier de celles affectées au restaurant, et, d'autre part, réservé jusqu'en fin d'instance tous droits et moyens sur lesquels elle n'a pas statué par cet arrêt.
L'expert désigné par la première vice-présidente, présidente de la cour par intérim, a remis son rapport le 3 septembre 2024.
Les parties ont été invitées à formuler des observations sur ce rapport.
Par un mémoire, enregistré le 13 septembre 2024, la SNC Hôtelière de Loon-Plage, représentée par Me Zapf, indique que le rapport d'expertise n'appelle pas d'observations de sa part.
Par une ordonnance du 18 septembre 2024, la première vice-présidente, présidente de la cour par intérim, a taxé et liquidé les frais et honoraires de l'expertise à la somme de 1 837,48 euros.
Par une ordonnance du 4 novembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 novembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. La société en nom collectif (SNC) Hôtelière de Loon-Plage, dont le siège est situé à Loon-Plage (Nord), a exercé, sur le territoire de cette même commune, une activité d'hôtellerie et de restauration, dans un immeuble dont elle est propriétaire. Elle a été assujettie, à raison de cet établissement, à la taxe foncière sur les propriétés bâties et à la cotisation foncière des entreprises, au titre de l'année 2018. Par deux réclamations introduites le 16 octobre 2018 et le 17 janvier 2019, la SNC Hôtelière de Loon-Plage a demandé une réduction de ces impositions et de leurs taxes annexes. Ses réclamations ayant été rejetées, la SNC Hôtelière de Loon-Plage a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en sollicitant, par deux demandes successives, la réduction, d'une part, des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des locaux qu'elle exploite en tant qu'hôtel-restaurant à Loon-Plage, d'autre part, des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des mêmes locaux. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relève appel du jugement du 21 avril 2022 par lequel le tribunal administratif de Lille a prononcé les réductions demandées et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par une ordonnance du 21 décembre 2022, les conclusions de la requête relative aux cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties et des taxes annexes ont été transmises au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative.
2. Par un arrêt avant dire-droit du 12 octobre 2023, la cour, avant de statuer sur les conclusions, dont elle restait saisie, de la requête par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a relevé appel de ce jugement, a prescrit un supplément d'instruction aux fins, pour la SNC Hôtelière de Loon-Plage, de produire, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de cet arrêt, des déclarations modèle CBD (locaux commerciaux et biens divers) établies séparément pour ce qui concerne la partie hôtelière et la partie affectée à usage de restaurant de son établissement de Loon-Plage et présentant notamment le détail des surfaces affectées à l'une et l'autre de ces activités.
3. La société a produit, dans le cadre de ce supplément d'instruction, des déclarations dont les mentions ont fait l'objet de critiques expresses de la part du ministre et se sont avérées incohérentes avec les déclarations précédemment souscrites pour le même établissement, ainsi qu'avec les caractéristiques de l'immeuble et de ses dépendances, telles qu'elles ressortent des données publiques de référence produites par l'Institut géographique national et librement accessibles au public sur le site internet Géoportail.
4. Dans ces conditions, la cour a, par un second arrêt avant dire droit, du 2 mai 2024, prescrit une expertise, aux fins, notamment, pour l'expert, de déterminer, après s'être fait communiquer tous les éléments utiles et s'être rendu sur les lieux, les surfaces de chacune des parties composant l'immeuble exploité par la SNC Hôtelière de Loon-Plage et ses dépendances, notamment les parcs de stationnement, en distinguant les parties affectées à l'établissement hôtelier de celles affectées au restaurant. L'expert ayant remis, le 3 septembre 2024, son rapport, il y a lieu, pour la cour, de se prononcer sur le fond du litige.
Sur le cadre juridique applicable :
5. L'article 34 de la loi du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 a défini de nouvelles modalités de détermination et de révision de la valeur locative cadastrale des locaux professionnels, en vue de l'établissement des impositions directes locales. A cette fin, le législateur a prévu la constitution de secteurs d'évaluation regroupant les communes ou parties de communes qui, dans chaque département, présentent un marché locatif homogène et le classement des locaux professionnels par sous-groupes, définis en fonction de leur nature et de leur destination et, à l'intérieur de ces sous-groupes, par catégories, en fonction de leur utilisation et de leurs caractéristiques physiques. Il a également prévu la fixation, dans chaque secteur d'évaluation, de tarifs par mètre carré déterminés à partir des loyers moyens constatés par catégorie de propriétés. La valeur locative de chaque propriété bâtie est obtenue par application à sa surface pondérée du tarif par mètre carré correspondant à sa catégorie modulé, le cas échéant, par l'application d'un coefficient de localisation.
6. Aux termes du XVI de cet article, dans sa rédaction issue de la loi du 29 décembre 2015 portant loi de finances rectificatives pour 2015 : " (...) B. 1. En vue de l'établissement de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe d'habitation et de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, la valeur locative des propriétés bâties est corrigée par un coefficient de neutralisation. / Ce coefficient est égal, pour chaque taxe et chaque collectivité territoriale, au rapport entre, d'une part, la somme des valeurs locatives non révisées au 1er janvier 2017 des propriétés bâties imposables au titre de cette année dans son ressort territorial, à l'exception de celles mentionnées au 2, et, d'autre part, la somme des valeurs locatives révisées de ces propriétés à la date de référence du 1er janvier 2013. / Le coefficient de neutralisation déterminé pour chacune de ces taxes s'applique également pour l'établissement de leurs taxes annexes. / Les coefficients déterminés pour une commune s'appliquent aux bases imposées au profit des établissements publics de coopération intercommunale dont elle est membre. / (...) / D.- Pour les impositions dues au titre des années 2017 à 2025 : / 1° Lorsque la différence entre la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 et la valeur locative résultant du B du présent XVI est positive, celle-ci est majorée d'un montant égal à la moitié de cette différence'; / 2° Lorsque la différence entre la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 et la valeur locative résultant du même B est négative, celle-ci est minorée d'un montant égal à la moitié de cette différence. / Le présent D n'est applicable ni aux locaux mentionnés au 2 dudit B, ni aux locaux ayant fait l'objet d'un des changements mentionnés au I de l'article 1406 du CGI après le 1er janvier 2017 ". Ces dispositions ont été codifiées, à compter du 1er janvier 2018, aux I et III de l'article 1518 A quinquies du code général des impôts. Aux termes du IV de ce dernier article : " Pour la détermination des valeurs locatives non révisées au 1er janvier 2017 mentionnées aux I et III, il est fait application des dispositions prévues par le présent Code, dans sa rédaction en vigueur le 31 décembre 2016 ". Aux termes du XXII de l'article 34 de la loi précitée du 29 décembre 2010 : " A.- Des exonérations partielles d'impôts directs locaux sont accordées au titre des années 2017 à 2025 lorsque la différence entre la cotisation établie au titre de l'année 2017 et la cotisation qui aurait été établie au titre de cette même année sans application du XVI est positive (...) / B. - Les impôts directs locaux établis au titre des années 2017 à 2025 sont majorés lorsque la différence entre la cotisation qui aurait été établie au titre de l'année 2017 sans application du XVI et la cotisation établie au titre de cette même année est positive (...) ". Ces dispositions ont été codifiées, à compter du 1er janvier 2018, à l'article 1518 E du code général des impôts.
7. Il résulte des dispositions citées au point précédent que la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 utilisée pour lisser les variations de cotisations d'impôts locaux résultant de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels est déterminée conformément aux dispositions du code général des impôts dans leur rédaction en vigueur au 31 décembre 2016. Un contribuable peut invoquer l'illégalité du mode de détermination de cette valeur locative non révisée au 1er janvier 2017, y compris à raison de l'actualisation, par application des coefficients annuels de majoration prévus à l'article 1518 bis de ce code, d'une valeur locative déterminée antérieurement de manière irrégulière, pour solliciter, dans la mesure de l'application des dispositifs visés par les dispositions citées au point précédent, la réduction des cotisations d'impôts locaux résultant de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels.
8. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur le 31 décembre 2016 : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : / (...) / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; / (...) ". En outre, en vertu du I de l'article 324 Z de l'annexe III à ce code, dans sa rédaction applicable à la même date, l'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. Enfin, aux termes de l'article 324 AA de la même annexe : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ".
9. Aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2018 : " II. - A. - La valeur locative de chaque propriété bâtie ou fraction de propriété bâtie mentionnée au I est déterminée en fonction de l'état du marché locatif à la date de référence du 1er janvier 2013, sous réserve de la mise à jour prévue au III de l'article 1518 ter. / Elle est obtenue par application d'un tarif par mètre carré déterminé conformément au 2 du B du présent II à la surface pondérée du local définie au C du présent II. / B. - 1. Il est constitué, dans chaque département, un ou plusieurs secteurs d'évaluation qui regroupent les communes ou sections cadastrales de communes qui, dans le département, présentent un marché locatif homogène. / (...) / 2. Les tarifs par mètre carré sont déterminés sur la base des loyers moyens constatés dans chaque secteur d'évaluation par catégorie de propriétés. / (...) / Les tarifs par mètre carré peuvent être majorés de 1,1, 1,15, 1,2 ou 1,3 ou minorés de 0,7, 0,8, 0,85 ou 0,9, par application d'un coefficient de localisation destiné à tenir compte de la situation particulière de la parcelle d'assise de la propriété au sein du secteur d'évaluation. / C. - La surface pondérée d'un local est obtenue à partir de la superficie de ses différentes parties, réduite, le cas échéant, au moyen de coefficients fixés par décret, pour tenir compte de leur utilisation et de leurs caractéristiques physiques respectives. / (...) ".
10. Aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à compter du 30 juin 2018 : " Pour l'application du C du II de l'article 1498 du code général des impôts, la surface pondérée d'un local est la somme, le cas échéant arrondie au mètre carré inférieur, des superficies de ses différentes parties, affectées, le cas échéant, du coefficient mentionné au troisième alinéa. / La superficie des différentes parties d'un local, y compris celle des dégagements et sanitaires, est la superficie réelle, mesurée au sol, entre murs ou séparations et arrondie au mètre carré inférieur. / Lorsque l'une de ces parties a une valeur d'utilisation réduite par rapport à l'affectation principale du local, la superficie de cette partie est réduite par application d'un coefficient fixé à 0,5 lorsque cette partie est couverte et à 0,2 dans le cas contraire ".
11. Aux termes de l'article 1518 E du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année 2018 : " I. - Pour les biens mentionnés au I de l'article 1498 : / 1° Des exonérations partielles d'impôts directs locaux sont accordées au titre des années 2017 à 2025 lorsque la différence entre la cotisation établie au titre de l'année 2017 en application du présent code et la cotisation qui aurait été établie au titre de cette même année sans application du A du XVI de l'article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, dans sa rédaction en vigueur le 31 décembre 2016, est positive. / Pour chaque impôt, l'exonération est égale aux neuf dixièmes de la différence définie au premier alinéa du présent 1° pour les impositions établies au titre de l'année 2017, puis réduite chaque année d'un dixième de cette différence. / L'exonération cesse d'être accordée à compter de l'année qui suit celle au cours de laquelle la propriété ou fraction de propriété est concernée par l'application du I de l'article 1406, sauf si le changement de consistance concerne moins de 10 % de la surface de la propriété ou fraction de propriété ; / 2° Les impôts directs locaux établis au titre des années 2017 à 2025 sont majorés lorsque la différence entre la cotisation qui aurait été établie au titre de l'année 2017 sans application du A du XVI de l'article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 précitée, dans sa rédaction en vigueur le 31 décembre 2016, et la cotisation établie au titre de cette même année est positive. / Pour chaque impôt, la majoration est égale aux neuf dixièmes de la différence définie au premier alinéa du présent 2° pour les impositions établies au titre de l'année 2017, puis réduite chaque année d'un dixième de cette différence. / Cette majoration est supprimée à compter de l'année qui suit celle au cours de laquelle la propriété ou fraction de propriété est concernée par l'application du I de l'article 1406, sauf si le changement de consistance concerne moins de 10 % de la surface de la propriété ou fraction de propriété. / II. - Pour l'application du I : / 1° Les impôts directs locaux s'entendent de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la cotisation foncière des entreprises, de la taxe d'habitation et de leurs taxes annexes ; / 2° La différence définie au premier alinéa des 1° et 2° du même I s'apprécie pour chaque impôt en tenant compte de ses taxes annexes et des prélèvements prévus à l'article 1641. / Elle s'apprécie par propriété ou fraction de propriété bâtie pour la taxe foncière sur les propriétés bâties ; / 3° Selon le cas, le coût de l'exonération ou la majoration est réparti entre les collectivités territoriales et, le cas échéant, les établissements publics de coopération intercommunale, les établissements publics fonciers, les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers et de l'artisanat au prorata de leur part dans la somme des variations positives de chaque fraction de cotisation leur revenant ".
12. Enfin, aux termes l'article 310 Q de l'annexe II au code général des impôts : " Pour l'application du second alinéa du I de l'article 1498 du code général des impôts, les propriétés bâties mentionnées au premier alinéa de ce même I sont classées selon les sous-groupes et catégories suivants : / Sous-groupe I : magasins et lieux de vente : / Catégorie 1 : boutiques et magasins sur rue. (...) / Sous-groupe V : hôtels et locaux assimilables : (...) / Catégorie 2 : hôtels supérieur (2 ou 3 étoiles, ou confort identique). (...) ".
Sur la détermination de la valeur locative cadastrale de l'établissement en cause :
13. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise, que l'immeuble en cause offre une surface totale de 1 615,25 m², composée d'une surface au rez-de-chaussée s'établissant à 882,53 m², excluant la surface d'un logement de fonction de 62 m², et d'une surface de 670,72 m² à l'étage. L'expert ajoute que le parc de stationnement attenant et les voies d'accès desservant celui-ci couvrent une surface totale de 2 035 m². Alors même que l'immeuble en cause était à l'abandon lors des opérations de l'expertise, il est constant, comme l'a fait observer l'administration dans un dire à l'expert, que l'immeuble était commercialement exploité au cours de l'année de l'imposition en litige.
14. Au vu du relevé détaillé annexé au rapport de l'expert, accompagné de plans cotés, la surface totale de la partie de l'immeuble affectée à l'usage de restaurant, activité dont l'existence n'a pas été contestée par la SNC Hôtelière de Loon-Plage dans ses écritures, peut être fixée à 213,69 m², laquelle surface inclut celle de la salle de restaurant, égale à 100,47 m², celle de la cuisine, s'élevant à 15,03 m², celle de la plonge, égale à 6,76 m², celles des réserves, soit 8,55 m² et 9,81 m², celles de deux chambres froides, à savoir 2,48 m² et 2,50 m², enfin celle du bar, de 68,09 m².
15. Dans ces conditions, il y a lieu de retenir que le surplus de la surface offerte par le bâtiment, à savoir 1 401,56 m², non comprise celle du logement de fonction, à savoir 62 m², ni celle des dépendances non bâties, d'une surface de 2 035 m², représente la surface brute de l'hôtel.
16. Afin de déterminer les surfaces pondérées à affecter à la partie exploitée en tant qu'hôtel de l'établissement en cause, il y a lieu, conformément aux dispositions citées au point 10 de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts et en tenant compte de l'utilité de chacune des pièces mesurées par l'expert, de retenir une pondération de 1 pour les chambres, regardées comme les pièces principales, et de 0,5 pour les autres pièces concourant à l'activité hôtelière, à savoir le bureau, la salle de réunion, l'accueil, le fitness room, les dégagements, les lingeries, le sas, le local lingerie, le local ménage, la chaufferie, ainsi que les sanitaires autres que ceux équipant les chambres, enfin, une chambre inutilisable et trois locaux techniques. Sur ces bases, la surface pondérée de la partie hôtelière de l'établissement en cause s'établit à 1 130,90 m².
17. S'agissant de la partie affectée à l'activité de restauration, il y a lieu de retenir, conformément aux mêmes dispositions de l'article 324 Z de l'annexe III au code général des impôts et en tenant compte de l'utilité de chacune des pièces mesurées par l'expert, une pondération de 1 pour la salle de restaurant et pour le bar, ainsi qu'une pondération de 0,5 pour les autres pièces concourant à cette activité, à savoir la cuisine, la plonge, les deux chambres froides et les deux réserves. Sur ces bases, la surface pondérée de la partie de l'établissement en cause affectée à l'activité de restauration s'établit à 191,11 m².
18. Dès lors qu'il n'est pas contesté que, conformément à l'article 310 Q de l'annexe II au code général des impôts, la partie de l'établissement en cause qui été exploitée, au cours de l'année 2018 en litige, en tant qu'hôtel relève, pour la détermination du tarif qui lui est applicable, de la catégorie HOT 2 et que la valeur locative de la partie de l'établissement alors affectée à l'activité de restauration doit être déterminée par référence au tarif applicable à la catégorie MAG 1, il incombe à l'administration, après avoir, le cas échéant, fait application d'un coefficient de localisation, de déterminer la valeur locative cadastrale totale de l'établissement sur ces bases et de procéder, par ailleurs, à l'évaluation du parc de stationnement attenant et de ses voies d'accès couvrant une surface totale de 2 035 m², ainsi qu'à celle du logement de fonction, représentant une surface brute de 62 m².
Sur l'application des mécanismes correctifs de neutralisation, de " planchonnement " et de lissage :
19. Il appartiendra à l'administration de définir le coefficient de neutralisation, tel que prévu au I de l'article 1518 A quinquies du code général des impôts, cité au point 6, applicable à la situation de la SNC Hôtelière de Loon-Plage en ce qui concerne l'établissement en cause.
20. La cour ayant jugé, par son arrêt avant dire droit du 12 octobre 2023, que la société était fondée à soutenir que le local de référence retenu par l'administration pour déterminer la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 de son établissement avait lui-même été irrégulièrement évalué et qu'il y avait lieu de lui substituer le local de référence proposé par la société, c'est-à-dire le local-type n° 475 du procès-verbal complémentaire de la commune de Lille, correspondant à un établissement hôtelier construit en 1930, d'une superficie pondérée de 475 m² et dont la valeur locative unitaire s'élève à 6,71 euros par mètre carré, moyennant l'application d'un abattement de 10 % à la valeur locative du terme de comparaison proposé, sur le fondement des dispositions de l'article 324 AA de l'annexe III au code général des impôts, pour tenir compte de la différence importante de superficie avec le local à évaluer, il appartiendra à l'administration, après avoir retenu ce dernier terme de référence pour déterminer, moyennant l'application de l'abattement de 10 %, la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 de l'établissement en cause, de tirer les conséquences de cette substitution de terme de comparaison pour apprécier si, après comparaison de cette valeur avec la valeur locative révisée, la SNC Hôtelière de Loon-Plage peut bénéficier, pour son établissement, du dispositif de " planchonnement " prévu au III de l'article 1518 A quinquies du code général des impôts.
21. Dès lors que cour a accueilli, par son arrêt avant dire droit du 12 octobre 2023, le moyen tiré de l'irrégularité des modalités d'évaluation du terme de comparaison utilisé pour déterminer la valeur locative non révisée au 1er janvier 2017 de son établissement et a regardé comme pertinent le terme de comparaison alternatif que la SNC Hôtelière de Loon-Plage proposait, à savoir le local-type n° 475 du procès-verbal complémentaire de la commune de Lille, dont les caractéristiques sont rappelées au point précédent, il appartiendra à l'administration de procéder, sur ces bases, au lissage prévu par les dispositions de l'article 1518 E du code général des impôts, cité au point 11.
22. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a prononcé la réduction que demandait la SNC Hôtelière de Loon-Plage des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des locaux qu'elle exploitait en tant qu'hôtel-restaurant à Loon-Plage, et, d'autre part, que la SNC Hôtelière de Loon-Plage a seulement droit à une réduction à concurrence de la différence entre la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été ainsi assujettie au titre de l'année 2018 et celle résultant des bases définies par les motifs du présent arrêt.
Sur les frais et honoraires de l'expert :
23. Il y a lieu, en application des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative et dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais et honoraires de l'expert, taxés et liquidés à la somme de 1 837,48 euros par une ordonnance du 18 septembre 2024 de la première vice-présidente, présidente de la cour par intérim, à la charge, pour moitié, de l'Etat et de la SNC Hôtelière de Loon-Plage.
Sur les frais liés au litige :
24. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre des frais exposés par la SNC Hôtelière de Loon-Plage et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Il est accordé à la SNC Hôtelière de Loon-Plage une réduction des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des locaux qu'elle exploitait en tant qu'hôtel-restaurant à Loon-Plage, à concurrence de la différence entre le montant mis à sa charge à ce titre et les cotisations assises sur les bases incluant les paramètres définis par les motifs du présent arrêt.
Article 2 : Le jugement nos 1905034, 1908037 du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Lille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Les frais et honoraires de l'expert, taxés et liquidés à la somme de 1 837,48 euros sont mis, pour moitié, à la charge de l'Etat et pour moitié à la charge de la SNC Hôtelière de Loon-Plage.
Article 4 : Les conclusions présentées par la SNC Hôtelière de Loon-Plage sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics, ainsi qu'à la SNC Hôtelière de Loon-Plage.
Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 19 décembre 2024 à laquelle siégeaient :
- M. François-Xavier Pin, président-assesseur, assurant la présidence de la formation
de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;
- M. Jean-François Papin, premier conseiller ;
- Mme Alice Minet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : J.-F. PapinLe président de la formation
de jugement,
signé : F.-X. Pin
La greffière,
Signé : E. Héléniak
La République mande et ordonne au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Elisabeth Héléniak
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N°22DA01556