Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 4 mars 2022 par laquelle le maire de la commune de Fécamp a rejeté sa demande de requalification de son statut de vacataire en celui d'agent contractuel, de requalifier son emploi de vacataire en contrat d'agent contractuel au sens du décret n° 88-145 du 15 février 1988 et d'ordonner sa réintégration effective dans les effectifs de la commune en contrat à durée indéterminée, de procéder à la reconstitution de ses droits sociaux et de ses droits à pension et à la régularisation de ses rémunérations en qualité d'agent contractuel à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2015, ainsi qu'à la régularisation de sa situation auprès des organismes sociaux et caisses de retraite. Enfin, elle a demandé au tribunal de condamner la commune de Fécamp à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi.
Par un jugement n° 2201591 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 juin 2023, Mme A... C..., représentée par Me Vaysse, doit être regardée comme demandant à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 mai 2023 du tribunal administratif de Rouen ;
2°) d'annuler la décision du 4 mars 2022 ;
3°) de requalifier son emploi de vacataire en contrat d'agent contractuel au sens du décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
4°) d'enjoindre à la commune de procéder à sa réintégration en qualité d'agent contractuel à durée indéterminée et de régulariser sa situation à compter du 1er octobre 2015 ;
5°) de condamner la commune de Fécamp à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi ;
6°) de mettre à la charge de la commune de Fécamp, outre les entiers dépens, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle occupait un emploi de guide-conférencière répondant à un besoin permanent de la commune, laquelle a dès lors instauré avec elle un lien contractuel présentant les caractéristiques énoncées à l'article 3-1 de la loi du 26 janvier 1984 ;
- eu égard à la quantité, à la fréquence et à la durée de ses vacations, elle doit être regardée comme ayant été recrutée pour remplir un besoin permanent de la commune en matière de valorisation du patrimoine culturel et est dès lors fondée à demander la requalification de ses contrats en contrat à durée indéterminée ;
- elle a subi, du fait de son maintien en qualité de vacataire, un préjudice moral devant être réparé à hauteur de 5 000 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 11 octobre 2023, la commune de Fécamp, représentée par Me Tarteret, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A... C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la condamner aux entiers dépens.
Elle fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 10 octobre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 29 novembre 2023 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- et les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C... a été recrutée par la commune de Fécamp, par contrats de vacation conclus par intermittence, à compter du 5 juillet 2015 jusqu'au 26 août 2020 pour exercer les fonctions de guide-conférencière. Par courrier du 4 janvier 2022, l'intéressée a sollicité la reconnaissance par la commune de sa qualité d'agent contractuel employé sur le fondement d'un contrat à durée indéterminée, la régularisation de sa rémunération, de ses droits sociaux et droits à pension, ainsi que le versement d'une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi. Par un courrier du 4 mars 2022, le maire de Fécamp a refusé de faire droit à ses demandes. Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler la décision du 4 mars 2022, de requalifier son emploi de vacataire en contrat d'agent contractuel au sens du décret n° 88-145 du 15 février 1988, d'ordonner sa réintégration en contrat à durée indéterminée et de régulariser sa situation à compter du 1er octobre 2015. Enfin, elle a demandé au tribunal de condamner la commune de Fécamp à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi. Elle relève appel du jugement du 9 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa requête.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. La loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction issue de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, fixe aux articles 3-1 à 3-3 les cas dans lesquels les emplois permanents des collectivités territoriales peuvent par exception être pourvus par des agents non titulaires. L'article 136 de cette loi, qui a été codifié à l'article L. 9 du code de la fonction publique, fixe les règles d'emploi de ces agents et précise qu'un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions d'application de cet article. Aux termes de l'article 1er du décret du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les dispositions du présent décret s'appliquent aux agents contractuels de droit public des collectivités et des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 26 janvier 1984 (...). Les dispositions du présent décret ne sont toutefois pas applicables aux agents engagés pour une tâche précise, ponctuelle et limitée à l'exécution d'actes déterminés ".
3. Un agent de droit public employé par une collectivité ou un établissement mentionné au premier alinéa de l'article 2 de la loi du 26 janvier 1984 doit être regardé comme ayant été engagé pour exécuter un acte déterminé lorsqu'il a été recruté pour répondre ponctuellement à un besoin de l'administration. La circonstance que cet agent a été recruté plusieurs fois pour exécuter des actes déterminés n'a pas pour effet, à elle seule, de lui conférer la qualité d'agent contractuel. En revanche, lorsque l'exécution d'actes déterminés multiples répond à un besoin permanent de l'administration, l'agent doit être regardé comme ayant la qualité d'agent non titulaire de l'administration.
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A... C... est intervenue en qualité de guide-conférencière pour la commune de Fécamp afin d'assurer des visites découvertes ou thématiques ainsi que des ateliers sur la période allant du 5 juillet 2015 au 26 août 2020 et a conclu, à ce titre, près de quarante-et-un contrats de vacation. Elle justifie également de dix-sept fiches de paie pour les vacations effectuées entre décembre 2017 et juin 2020. Toutefois, comme l'a relevé le tribunal administratif, si Mme A... C... se prévaut de la quantité et de la régularité de ces contrats, ces seules circonstances ne sauraient suffire à établir, en l'absence de toute autre précision sur le contenu des missions accomplies, qu'elle aurait occupé un emploi permanent au cours de la période en litige dès lors, d'une part, que le nombre de contrats conclus diffère d'une année à l'autre, et, d'autre part, que leur durée varie d'une seule journée à un mois. A cet égard, l'intéressée, qui n'apporte aucun élément de nature à démontrer que ses missions avaient vocation à être renouvelées et pouvaient être anticipées par la commune, ne conteste pas en appel les chiffres avancés par celle-ci sur le nombre de visites qu'elle a effectivement réalisées pour le compte du service du patrimoine au cours des trois dernière années, à savoir cent-quinze en 2018, quarante-six en 2019 et quatre en 2020, et n'établit pas le recrutement postérieur de nouveaux vacataires pour exercer ces missions au sein de ce service. Enfin, si les divers contrats produits au dossier visent le décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, c'est pour préciser, qu'au regard de son article 1er, ses dispositions ne sont pas applicables aux agents engagés pour une tâche précise, ponctuelle et limitée à l'exécution d'actes déterminés. A cet égard, la circonstance que ces contrats visent également la délibération n° 18 du 12 octobre 2015 qui autoriserait le maire de la commune de Fécamp à recruter des agents contractuels ne saurait modifier la nature de ses engagements successifs en qualité de vacataire. Dans ces conditions, en dépit du nombre important de contrats en cause et quand bien même ses interventions s'inscrivaient dans le cadre de la mise en œuvre de la politique de valorisation par la commune de Fécamp de son patrimoine culturel, Mme A... C... ne peut être regardée comme ayant été recrutée pour occuper un emploi répondant à un besoin permanent au sens des dispositions susvisées. Par suite, en refusant la requalification de son statut de vacataire en agent contractuel, le maire de la commune de Fécamp n'a pas entaché d'illégalité sa décision.
5. En deuxième lieu, à supposer même que les fonctions exercées par Mme A... C... dans le cadre des différents contrats conclus avec la commune de Fécamp puissent être considérées comme ayant été effectuées dans le cadre de contrats à durée déterminée et non de vacations, les contrats versés au dossier, qui portent sur une période qui s'étend du 5 juillet 2015 au 26 août 2020, ne permettent pas, comme le relève la commune, de justifier d'une durée de services publics de six années sur des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique, de sorte que, à la date de la décision attaquée, elle ne pouvait, en application de l'article 3-4 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, bénéficier d'un contrat à durée indéterminée. Dès lors, et en tout état de cause, les conclusions tendant à la requalification de son contrat en contrat à durée indéterminée doivent être rejetées.
6. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme A... C... tendant à l'annulation de la décision du 4 mars 2022 ne peuvent qu'être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, de ses conclusions à fin d'injonction et, en l'absence d'illégalité fautive, de celles tendant à l'indemnisation du préjudice moral.
Sur les frais liés au litige :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Fécamp, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à Mme A... C... de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme A... C... la somme demandée par la commune au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Fécamp sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... C... et à la commune de Fécamp.
Délibéré après l'audience publique du 19 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,
- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,
- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 décembre 2024.
Le président-assesseur,
Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre-rapporteure,
Signé : M.-P. Viard
La greffière,
Signé : C. Huls-Carlier
La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Maritime en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
par délégation,
La greffière,
C. Huls-Carlier
N° 23DA01204 2