Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard a demandé au tribunal administratif de Rouen :
- d'annuler la décision du 30 mars 2023 par laquelle le préfet de l'Eure a délivré à la société par actions simplifiée (SAS) NJ Energie le permis de construire une unité de méthanisation sur le territoire de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard ;
- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2301822 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande et a mis à la charge de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard la somme de 1 500 euros à verser à la SAS NJ Energie en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 15 mars 2024, et un mémoire de production de pièces enregistré le 19 mars 2024, la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard, représentée par Me Hélène Colliou, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 mars 2023 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dans la mesure où, en méconnaissance de l'article R. 741-2 du code de justice administrative, les motifs du jugement ne mentionnent pas toutes les dispositions législatives ou réglementaires dont il a été fait application, notamment les articles du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard ; en outre, le tribunal a omis de se prononcer sur l'absence de plan à l'échelle de l'ensemble du chemin rural desservant l'assiette du projet et n'a pas réellement répondu au moyen relatif à la méconnaissance des articles A1 et A2 du règlement du PLU en l'analysant sous le seul angle de l'accès au terrain d'assiette du projet ;
- le dossier de demande de permis de construire est incomplet, ce qui n'a pas permis aux services instructeurs d'apprécier l'insertion du projet dans l'environnement existant : la notice architecturale ne décrit pas le bâti avoisinant du projet et notamment la présence d'une station d'épuration, l'environnement urbain et végétal du projet incluant un arbre implanté sur le chemin rural n°5 devant l'accès à la parcelle qui devra être abattu ; il ne comporte pas de plan à l'échelle de l'ensemble du chemin rural desservant l'assiette du projet et mentionne à tort que le chemin rural est stabilisé ; il ne mentionne pas l'ensemble des distances entre les différentes futures constructions projetées ; il n'explique pas clairement la manière dont l'injection de biogaz se fera dans le réseau, alors qu'il semble qu'une canalisation doive être créée sur le chemin rural n° 5 ou le long du fossé pluvial existant que la commune n'acceptera jamais ; le dossier de permis est taisant sur les nuisances sonores liées au projet ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme au regard des risques pour la sécurité et la salubrité publiques ; d'une part, la présence d'un oléoduc impose un retrait du projet de 11,50 mètres, alors que le bâtiment 7 aura moins de dix mètres de retrait ; si une prescription spéciale a été posée à cette fin, la société pétitionnaire n'a pas envisagé de déposer une demande de permis modificatif ; d'autre part, la présence d'une station d'épuration n'a pas été prise en compte par une prescription spéciale en dépit de sa proximité avec le projet alors qu'elle doit être étendue pour être mise aux normes ; enfin, les risques de nuisances sonores inhérents à ce type de projet ne donnent lieu à aucune prescription spéciale ;
- il méconnaît les dispositions des articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme dans la mesure où les aménagements et constructions prévus, à l'instar de la création d'un portail et d'une zone enrobée, de même que l'aménagement de voirie à l'intersection entre la route départementale n° 80 et le chemin rural n° 5, pourtant objet de la prescription n°2, ne sont pas autorisés dans la partie du terrain qui correspond à une zone de protection des lisières forestières ;
- il méconnaît les dispositions de l'article A3 du règlement du plan local d'urbanisme, en ce qui concerne la prescription spéciale relative à la création d'un double tourne à gauche sur la route départementale n°80, qui aboutit à créer un nouvel accès sur cette route et à porter atteinte à l'espace boisé classé et à la zone de protection des lisières forestières pourtant inscrits dans le règlement graphique du PLU ;
- la prescription spéciale de création d'un double tourne à gauche sur la RD n° 80 est insuffisante, irréalisable et méconnaît les dispositions de l'article L.421-6 du code de l'urbanisme : elle renvoie à des pièces absentes du dossier et à des déclarations de la société pétitionnaire et suppose l'accord du propriétaire de la parcelle support de l'espace boisé classé pour vendre ou de la commune pour incorporer cette parcelle à son domaine, est irréalisable ; la prescription nécessite le busage du fossé qui est soumis à déclaration préalable de travaux en application des dispositions de l'article R. 421-23 du code de l'urbanisme ; la voie de desserte au projet de construction doit s'apprécier au regard du chemin rural existant qui n'est ni adapté, ni sécurisé, en raison de son absence de visibilité d'un côté sur la route départementale n° 80 et de sa différence altimétrique avec cette route ; la prescription spéciale limitée à l'intersection entre le chemin rural n° 5 et la RD n° 80 est insuffisante alors que le chemin rural, en terre, n'est pas rectiligne, pas stabilisé et pas en bon état, que sa largeur de 3 mètres ne permet pas le croisement des véhicules et la sécurité des piétons, alors qu'il est fréquenté par des tracteurs, camions et randonneurs et que le projet induira plus de 400 rotations annuelles ;
- il méconnaît les dispositions de l'article N13 du règlement du plan local d'urbanisme et les articles L. 113-1 et suivants du code de l'urbanisme dans la mesure où la prescription n° 2 nécessitera l'abattage, soumis à déclaration préalable ou à autorisation d'urbanisme, des arbres présents sur la parcelle jouxtant la parcelle d'assiette du projet ;
- il méconnaît les dispositions de l'article A11 du règlement du plan local d'urbanisme, en prévoyant des couvertures par des bâches ou des tôles en bac acier.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet, 2024, la société NJ Energie, représentée par Me Stéphanie Gandet, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce que la cour sursoie à statuer pour permettre la régularisation des vices entachant l'arrêté attaqué, et en tout état de cause, à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête relatifs à la régularité du jugement et à l'illégalité de l'arrêté attaqué ne sont pas fondés.
Par un mémoire, enregistré le 29 juillet 2024, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête, y compris les conclusions présentées par la commune en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête relatifs à la régularité du jugement et à l'illégalité de l'arrêté attaqué ne sont pas fondés ; il s'en rapporte aux écritures de première instance du préfet de l'Eure et de la société NJ Energie.
Par une lettre du 30 septembre 2024, prise en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, la cour a invité les parties à présenter, avant le 7 octobre 2024, leurs observations sur l'éventuelle régularisation du vice tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaît les articles A1 et A2 du règlement du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard en tant qu'il autorise la construction d'une zone enrobée sur un secteur soumis au principe de protection des lisières forestières.
La société NJ Energie, représentée par Me Stéphanie Grandet, a présenté les 6 et 30 octobre 2024 un mémoire d'observations en réponse.
La commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard, représentée par Me Hélène Colliou, a présenté le 11 octobre 2024 un mémoire d'observations en réponse.
En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la présidente de la formation de jugement a invité le 29 octobre 2024 les parties à produire des pièces, ce que la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard a fait le 31 octobre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- les conclusions de M. Stéphane Eustache, rapporteur public,
- et les observations de Me Hélène Colliou, représentant la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard et de Me Borel, représentant la SAS NJ Energie.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) NJ Energie a déposé le 2 novembre 2022 une demande de permis de construire une unité de méthanisation sur la parcelle cadastrée ZB n°46 située sur le territoire de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard (27370) et classée en zone agricole du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune, approuvé le 3 avril 2019. Par un arrêté du 30 mars 2023, le préfet de l'Eure a délivré le permis de construire sollicité. La commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard interjette appel du jugement n° 2301822 du 1er février 2024 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté et a mis à sa charge la somme de 1 500 euros à verser à la SAS NJ Energie au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. (...) ".
3. Contrairement à ce que soutient la commune, le jugement attaqué vise le code de l'urbanisme et le règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard et cite précisément, en les reproduisant, les dispositions de ces textes dont il fait application dans ses motifs.
4. En second lieu, il ressort des motifs mêmes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Rouen, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a expressément répondu aux moyens soulevés par la commune. En particulier, il n'a pas omis d'examiner la conformité aux dispositions des articles A1 et A2 du règlement du PLU des aménagements de voirie routière envisagés pour faciliter l'accès à la parcelle d'assiette du terrain et y a précisément répondu au point 18, après avoir d'ailleurs cité les dispositions invoquées. A cet égard, il ne ressort pas de ses écritures en première instance que le tribunal se serait mépris sur la portée du moyen soulevé par la commune. En outre, le tribunal a répondu aux points 5 et 7 du jugement à la branche du moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis de construire en ce qui concerne les indications relatives au chemin rural permettant d'accéder à la construction projetée, même s'il n'a pas expressément écarté la critique de la commune relative à l'absence de plan à l'échelle de l'ensemble de ce chemin.
5. Par suite, la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis :
6. La commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard soutient que la notice architecturale est incomplète dès lors qu'elle ne décrit pas l'environnement urbain et végétal, notamment la station d'épuration située à proximité et l'arbre implanté sur le chemin rural n°5 devant l'accès à la parcelle d'assiette du projet, ne comporte pas de plan à l'échelle de l'ensemble du chemin rural dont elle indique à tort qu'il est stabilisé, ne mentionne pas toutes les distances entre les futures constructions, n'explique pas clairement les modalités d'injection de biogaz dans le réseau et ne comprend aucune précision sur les nuisances sonores liées au projet.
7. Aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : /a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; / b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. 431-33-1 ; / c) Les informations prévues aux articles R. 431-34 et R. 431-34-1. / Pour l'application des articles R. 423-19 à R. 423-22, le dossier est réputé complet lorsqu'il comprend les informations mentionnées au a et au b ci-dessus. / Aucune autre information ou pièce ne peut être exigée par l'autorité compétente. ". Aux termes de l'article R.431-8 du même code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : / a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ;/ c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; / d) Les matériaux et les couleurs des constructions ;/ e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. / Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. (...) ". Aux termes de l'article R.431-10 de ce code : " Le projet architectural comprend également : (...) / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche (...). ".
8. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
9. En premier lieu, d'une part, il ressort des pièces du dossier que la présence, sur la parcelle voisine du projet, de la station d'épuration communale est mentionnée, certes de manière concise, par la notice descriptive et la notice paysagère, mais aussi par le plan de situation PC1 du dossier de demande et des documents annexes, tels que le " rapport d'étude pédologique de caractérisation et de délimitation de zone humide " dressé par la société Esiris et le " pré diagnostic écologique et levée de doute milieux humides " établi par la société Socotec. D'autre part, les notices décrivent de manière complète et illustrée au moyen de graphiques et de photographies, l'environnement, proche et lointain, de la parcelle d'assiette du projet. En particulier, la présence d'un arbre à proximité de son accès apparaît nettement sur la photographie reproduite dans la notice paysagère.
10. En deuxième lieu, la circonstance que la notice paysagère mentionnerait à tort le caractère " stabilisé " du chemin rural n° 5 qui permet l'accès au projet et que le dossier de demande n'est pas accompagné d'un plan à l'échelle de la totalité de ce chemin n'est pas de nature à caractériser un dossier incomplet, alors que le chemin est présenté de manière précise comme doté d'une largeur de 3 à 4 mètres, " régulièrement emprunté par les gestionnaires de réseaux de transport et de distribution du gaz et des engins lourds " et que ses caractéristiques physiques ressortent de la photographie jointe à la notice paysagère ainsi que du document graphique " PC6 selon photographie n°4 ". Par ailleurs, les allégations de la commune sur le manque de sécurité du chemin rural n°5 et sur la nécessité d'abattre l'arbre implanté à proximité de l'accès au projet ne révèlent pas des manquements à la complétude du dossier alors que, d'une part, la sécurité des accès relève d'une appréciation de fond en lien avec le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, d'autre part, que l'arbre n'étant pas situé sur la parcelle, la société pétitionnaire n'avait pas l'obligation de mentionner son éventuelle suppression.
11. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que les plans de masse PC2 à échelle 1/1000 " implantation " et " contraintes " permettent de déterminer l'implantation des bâtiments les uns par rapport aux autres et mentionnent la plupart des distances entre eux. Si certaines distances ne sont pas indiquées, il ne ressort pas des dispositions précitées que cette lacune caractériserait une incomplétude du dossier de permis, alors, au surplus, que la commune n'invoque aucune disposition du code de l'urbanisme ou du règlement du PLU qui aurait été méconnue à cet égard.
12. En quatrième lieu, il ressort de la notice descriptive qu'un poste d'injection GRDF, localisé sur les plans de masse à l'échelle 1/1000, est prévu pour la réception du biométhane et l'injection dans le réseau de distribution GRDF situé à proximité. Les modalités de raccordement sont précisées non seulement par cette notice mais aussi par une " étude technique détaillée de l'injection de biométhane dans le réseau de distribution de gaz " réalisée par la société GRDF, qui a été jointe en annexe à la demande de permis.
13. En cinquième lieu, il ne ressort pas des dispositions du code de l'urbanisme citées au point 7 que le dossier de demande de permis de construire doive comporter des éléments relatifs aux impacts sonores du projet. En tout état de cause, la notice descriptive du projet mentionne l'installation de caissons insonorisés et une distance d'éloignement de 300 mètres minimum avec les habitations les plus proches.
14. Il suit de là que le moyen tiré de l'incomplétude du dossier doit être écarté en toutes ses branches.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :
15. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".
16. En vertu de ces dispositions, lorsqu'un projet de construction est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, l'autorisation ne peut être refusée que si l'autorité compétente estime, sous le contrôle du juge, qu'il n'est pas légalement possible, au vu du dossier et de l'instruction de la demande, d'accorder l'autorisation en l'assortissant de prescriptions spéciales qui, sans apporter au projet de modification substantielle nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, permettraient d'assurer la conformité de la construction aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect.
S'agissant de la proximité avec un oléoduc :
17. Il ressort de l'article 5 de l'arrêté attaqué que, conformément aux indications données par la société des transports pétroliers par pipeline (TRAPIL) dans son avis du 8 décembre 2022, une prescription de " recul ou distance de 10 mètres par rapport à l'axe [du] pipeline " est prévue, ainsi que " l'ajout de la précision cartographique de l'ouvrage en classe B (1.5m) ", " pour éviter des difficultés et des désagréments consécutifs à une trop grande proximité ". La commune ne conteste pas le caractère suffisant de cette distance d'éloignement et ne peut pas utilement soutenir que le plan de masse fourni dans la demande localise le bâtiment 7 à une distance insuffisante par rapport à cet oléoduc, dès lors que le projet n'a été autorisé par le préfet qu'à la condition de respecter les prescriptions qui assortissent l'arrêté attaqué, notamment celles figurant à l'article 5. En outre, dans son " analyse de compatibilité d'un projet de construction d'une unité de méthanisation avec des canalisations de transport de gaz naturel et d'hydrocarbures ", la société Socotec a conclu à l'absence d'impact accidentogène supplémentaire du projet sur les infrastructures existantes et vice versa. Il suit de là que la commune n'établit pas que la proximité du pipeline serait de nature à porter atteinte à la sécurité publique.
S'agissant de la proximité avec la station d'épuration :
18. La commune se prévaut d'un avis du 29 décembre 2022 du syndicat intercommunal de traitement des eaux usées de la région de Thuit-Signol pour souligner le risque que représente le projet au regard de la station d'épuration située à proximité. Cependant, cet avis se borne à indiquer que la station " ne pourra souffrir d'éventuels arrêts prolongés en cas d'incidents ou d'accidents " et que le projet " compromet les possibilités de développement et de mise aux normes de cette installation " qui ne dispose pas de réserve foncière et doit " acquérir un terrain en extension de son site actuel ". La circonstance que la station d'épuration ne pourrait pas étendre ses installations sur la parcelle d'assiette du projet en litige ne démontre pas que le projet porterait par lui-même atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Par ailleurs, la réserve émise par le syndicat intercommunal sur les " éventuels arrêts prolongés " de la station d'épuration ne caractérise aucun risque certain pour la sécurité découlant de l'existence même du projet litigieux. Il suit de là que le risque lié à la proximité de la station d'épuration n'est pas établi et que la commune ne démontre pas qu'une prescription spéciale, dont elle ne précise d'ailleurs pas la teneur, aurait dû être ajoutée pour le prendre en compte.
S'agissant des nuisances sonores :
19. La commune, qui relève elle-même la prévision de caissons insonorisés mentionnés dans la notice descriptive du projet et la distance minimale de 300 mètres du projet avec les habitations les plus proches, ne démontre nullement que ces mesures ne seraient pas suffisantes pour éviter le risque de nuisances sonores excessives qu'elle allègue en termes généraux.
20. Ainsi, la commune n'établit pas qu'en accordant le permis de construire sollicité, le préfet de l'Eure aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions précitées de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles A1 et A2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard :
21. Aux termes de l'article A1 " Types d'occupations ou d'utilisations du sol interdits " du règlement de plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard : " Ce qui n'est pas mentionné à l'article A2 est interdit. (...) / Dans les secteurs soumis à la protection des lisières forestières : • Toute construction ou opération non mentionnée à l'article A2. (...) ". Aux termes de l'article A2 " Types d'occupation ou d'utilisation du sol soumis à conditions spéciales " du même règlement : " Dans l'ensemble de la zone A / Les constructions et les aménagements nécessaires à l'implantation des différents réseaux et voies (eau potable, assainissement, électricité, voirie, etc., y compris les bassins de rétention des eaux pluviales), sous réserve d'un impact maîtrisé sur le milieu naturel et les paysages et à condition d'être compatibles avec le caractère de la zone. Certains des articles A3 à A13 pourront alors ne pas être appliqués. (...) / Dans les secteurs soumis au principe de protection des lisières forestières, seuls sont tolérés : * les aménagements ayant pour vocation la valorisation écologique et paysagère des sites ; * les extensions limitées et annexes contiguës aux constructions existantes, dans une limite de 30% de l'emprise au sol de la construction initiale, et ce dans une limite de 30m2 de surface de plancher. / Et dans l'ensemble de la zone A, à l'exception du secteur Aa (...) ". Eu égard à leur rédaction, les dispositions spéciales relatives aux lisières forestières doivent être regardées comme exhaustives et exclusives des autres conditions posées à l'article A2.
S'agissant de l'opérance du moyen :
22. En premier lieu, aux termes de l'article R.600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. (...) ".
23. La société pétitionnaire ne saurait utilement opposer à la commune la cristallisation en première instance du moyen tiré de la méconnaissance des articles A1 et A2 du règlement du PLU, dans la mesure où la cristallisation prévue par les dispositions précitées de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme ne vaut que dans une même instance. Par suite, la commune est recevable à étendre en appel son moyen, initialement limité à la critique des accès du projet, à la critique de ses aménagements internes.
24. En second lieu, l'article A2 comporte des dispositions générales qui définissent les " types d'occupation ou d'utilisation des sols " en zone agricole. Le glossaire du PLU précise que " les deux termes d'occupation et d'utilisation permettent de regrouper tous les types d'opérations. Ainsi, par exemple, une construction est une occupation et une aire de stationnement de surface est une utilisation du sol ". Par suite, d'une part, les prescriptions de l'article A2 s'appliquent au projet dans toutes ses composantes, y compris à ses éléments qui ne consistent pas en des bâtiments, mais en des aménagements réalisés à l'intérieur de la parcelle d'assiette du terrain pour distribuer l'accès aux différents bâtiments. D'autre part, l'accès au projet qui consiste, selon le glossaire du PLU, en un " espace par lequel les véhicules pénètrent sur le terrain d'assiette du projet depuis la voie de desserte ", constitue en lui-même une " utilisation " du sol au sens de l'article A2, de même que les voies intérieures au site. Ces ouvrages doivent ainsi respecter les prescriptions générales de l'article A2, alors même que l'article A3 ajoute des dispositions spéciales concernant les caractéristiques matérielles des accès. Enfin, les aménagements de voirie prescrits par le préfet de l'Eure à l'extérieur de la parcelle consistent également en une " utilisation des sols " au sens et pour l'application de l'article A2. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles A1 et A2 est opérant tant à l'égard des aménagements intérieurs de la parcelle qu'à l'égard des aménagements de voirie et d'accès.
S'agissant du bien-fondé du moyen :
Quant aux aménagements intérieurs à la parcelle :
25. Il ressort du règlement graphique du PLU que deux parties de la parcelle ZB 46, situées au nord-est et au nord-ouest, sont incluses dans le secteur soumis au principe de protection des lisières forestières, inconstructibles sur une largeur de 30 mètres. Il ressort du volet du plan de masse du projet consacré aux " aménagements et circulations " qu'une zone enrobée est prévue pour être créée au nord-est de la parcelle et qu'elle empiétera sur la lisière forestière. Alors que la parcelle est vierge de toute construction, cette zone ne peut être regardée comme une extension limitée ou une annexe contiguë à une construction existante. Dès lors que la zone enrobée a pour objet d'imperméabiliser et d'artificialiser le sol, elle ne peut davantage être regardée comme un " aménagement ayant pour vocation la valorisation écologique et paysagère des sites ". Ainsi, aucune des deux tolérances prévues à l'article A2 au sein des lisières forestières ne permet d'autoriser les aménagements prévus au nord-est du site.
Quant aux aménagements de voirie prescrits à l'extérieur de la parcelle :
26. L'article 2 de l'arrêté litigieux prescrit une liste de travaux à l'intersection de la route départementale (RD) n° 80 et du chemin rural n° 5 qui consistent en la création d'un double tourne à gauche borduré " par des bordures T2 coulées en place et d'une surlargeur en béton ", le dévoiement de la RD80 actuelle avec la création d'une nouvelle voie structurée, la création de deux îlots bordurés " avec l2 ", les signalisations verticale et horizontale réglementaires en lien avec l'aménagement, la reprise du talus, la création et l'élargissement du chemin d'accès avec mise en place de la signalisation réglementaire, le busage du fossé et la pose des glissières de sécurité. Le plan des travaux, annexé à l'arrêté, montre que l'élargissement du chemin rural et la création de surfaces de circulation aux angles de l'intersection seront en partie réalisés sur des zones soumises au principe de protection des lisières forestières. Ces aménagements, indissociables de la réalisation du projet, ayant pour effet d'imperméabiliser et d'artificialiser le sol, ne peuvent être regardés comme " ayant pour vocation la valorisation écologique et paysagère des sites ". Ils ne peuvent davantage être regardés comme des extensions limitées et annexes contiguës aux constructions existantes, la voirie déjà existante ne constituant pas une " construction " au sens que lui donne le glossaire du PLU. Aucune des deux tolérances prévues à l'article A2 au sein des lisières forestières ne permet d'autoriser les aménagements prévus à l'extérieur du site.
27. Il suit de là que la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard est fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaît en ses articles 1er et 2 les articles A1 et A2 du règlement du PLU.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article N13 du règlement du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard et des articles L. 113-1 et suivants du code de l'urbanisme :
28. D'une part, aux termes de l'article N13 " espaces libres et plantations " du règlement du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard : " (...) Les espaces boisés classés repérés par une trame spécifique au plan de zonage sont soumis aux dispositions des articles L. 113-1 et suivants et R. 113-1 et suivants du code de l'urbanisme. / Une attention particulière devra être portée à la qualité du traitement paysager des espaces visibles depuis la RD80. ". Aux termes de l'article L. 113-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies ou des plantations d'alignements ". Aux termes de l'article L.113-2 du même code : " Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. (...) ". En vertu du g) de l'article R. 421-23 et de l'article R. 421-23-2 du code de l'urbanisme, les coupes et abattages d'arbres dans les espaces boisés classés sont soumis, sauf exceptions, à une déclaration préalable de travaux.
29. Il résulte de l'application combinée de ces dispositions que la réalisation de travaux au sein d'un espace boisé classé, impliquant notamment des coupes ou abattages d'arbres, n'est pas interdit par principe, pourvu qu'il n'entraîne pas un changement d'affectation ou mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements et que ces coupes ou abattages soient précédés d'une déclaration préalable de travaux.
30. D'autre part, l'administration ne peut assortir une autorisation d'urbanisme de prescriptions qu'à la condition que celles-ci, entraînant des modifications sur des points précis et limités et ne nécessitant pas la présentation d'un nouveau projet, aient pour effet d'assurer la conformité des travaux projetés aux dispositions législatives et réglementaires dont l'administration est chargée d'assurer le respect. Le titulaire d'une autorisation d'urbanisme est recevable à demander l'annulation d'une ou de plusieurs prescriptions dont celle-ci est assortie. Il peut utilement soulever à l'appui de telles conclusions tout moyen relatif au bien-fondé des prescriptions qu'il critique ou au respect des exigences procédurales propres à leur édiction. Toutefois, le juge ne peut annuler ces prescriptions, lorsqu'elles sont illégales, que s'il résulte de l'instruction qu'une telle annulation n'est pas susceptible de remettre en cause la légalité de l'autorisation d'urbanisme et qu'ainsi ces prescriptions ne forment pas avec elle un ensemble indivisible. Il s'en déduit que si les prescriptions forment un tout indivisible avec l'autorisation d'urbanisme, leur illégalité, si elles ne sont pas régularisables, doit conduire à l'annulation de l'autorisation, soit partiellement, si elle n'affecte qu'une partie du projet, soit totalement, dans le cas contraire.
31. En l'espèce, la prescription contenue à l'article 2 de l'arrêté attaqué, qui définit l'aménagement de l'accès au chemin n° 5 depuis et vers la RD80 pour améliorer la sécurité routière, doit être regardée comme constituant un des éléments du permis et comme formant un tout indivisible avec l'autorisation accordée. La commune peut, cependant, critiquer la légalité de cette prescription.
32. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée ZB 24, située au nord du chemin rural n°5 et au nord-ouest de l'intersection entre ce chemin et la RD80, est classée en zone naturelle et supporte un espace boisé classé repéré par une trame spécifique au plan de zonage du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard. Il se déduit du plan des travaux, annexé à l'arrêté litigieux et complétant la prescription contenue à son article 2, que les travaux à envisager à l'intersection des deux voies nécessiteront, notamment, l'acquisition de 275 m2 de boisements protégés - 125 m² auprès de la commune pour élargir l'angle nord-ouest du croisement et 150 m² auprès du département pour élargir le tronçon situé au nord du croisement - et entraîneront la coupe ou l'abattage des arbres qui y sont implantés.
33. Par ses impacts et alors même qu'il ne porte que sur une surface réduite à l'échelle de l'ensemble du boisement protégé, l'aménagement prescrit constitue un changement d'affectation de nature à compromettre la conservation et la protection de ce boisement. Il s'ensuit que la commune est fondée à soutenir que les travaux prescrits à l'article 2 de l'arrêté méconnaissent les dispositions des articles N13 du règlement du PLU de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard et de l'article L. 113-2 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article A3 du règlement du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard et de l'article L.421-6 du code de l'urbanisme :
34. D'une part, aux termes de l'article A3 " accès et voirie " du règlement du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard : " Aucun accès n'est autorisé sur la RD80. En cas de pose d'un portail, il est exigé un retrait d'au moins 5 mètres de la limite de chaussée pour les constructions à usage d'habitation. (...) / Tout projet doit permettre par l'implantation de voiries internes l'accès aux terrains qui, par le fait de cette opération, ne présenteraient plus d'accès automobile direct sur les voies publiques. La destination et l'importance des constructions ou installations doivent être compatibles avec la capacité de la voirie qui les dessert. Les voies nouvelles créées doivent présenter les caractéristiques permettant de satisfaire aux exigences de la sécurité, de la défense contre l'incendie, de la protection civile et de la collecte des ordures ménagères. Le permis de construire peut être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès, en particulier lorsque les conditions de visibilité ne sont pas suffisantes (exemples : sortie de garage ne présentant pas de condition de visibilité suffisante, pose d'un portail selon un retrait insuffisant pour permettre l'arrêt ou le stationnement en dehors des voies et espaces publics, etc.) ".
35. D'autre part, aux termes de l'article L.421-6 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique. ".
S'agissant de la prescription contenue à l'article 2 de l'arrêté :
36. Dès lors que la prescription contenue à l'article 2 de l'arrêté attaqué forme un tout indivisible avec l'autorisation accordée et s'impose à la société pétitionnaire, la commune n'est pas fondée à remettre en cause la légalité de l'accès à la parcelle d'assiette du projet en faisant état de la dangerosité que présenterait actuellement l'intersection, du fait du manque de visibilité et de la différence altimétrique entre le chemin rural n° 5 et la RD80, et en se prévalant des avis défavorables rendus par les personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, consultés en vertu de l'article R.423-50 du code de l'urbanisme sur le seul dossier de permis déposé par la société pétitionnaire, avant l'édiction de la prescription. En tout état de cause, il y a lieu de constater qu'après avoir rendu un avis défavorable le 22 mars 2023, la direction de la mobilité du conseil départemental de l'Eure, propriétaire de la RD80, a rendu un avis favorable au projet le 29 mars 2023, sous réserve de prescriptions qui ont été strictement reprises dans l'arrêté.
37. Si la commune ne peut critiquer la légalité de l'accès à la parcelle, sans tenir compte de la prescription spéciale figurant dans l'arrêté attaqué, elle peut en revanche critiquer la légalité de cette prescription et son caractère réalisable.
Quant à la légalité de la prescription figurant à l'article 2 :
38. D'une part, la disposition contenue à l'article A3 du règlement du PLU selon laquelle " aucun accès n'est autorisé sur la RD80 " doit s'entendre comme interdisant la création de tout nouvel accès sur cette route, mais comme n'excluant pas l'aménagement d'un accès déjà existant. Il ressort des pièces du dossier que le projet envisage son accès depuis la RD80 via le chemin rural n°5 déjà existant. Certes, l'arrêté attaqué impose en son article 2 l'aménagement de la voirie routière au droit de la RD80 et du chemin rural n° 5. Cependant, cette prescription n'a pas pour objet ni pour effet de créer un nouvel accès sur la RD. Elle consiste seulement en l'aménagement de l'accès préexistant sur la RD80, en vue de sa sécurisation vers et depuis le chemin rural n° 5. La commune n'établit donc pas que la prescription méconnaîtrait l'article A3 du règlement du PLU.
39. D'autre part, contrairement à ce que prétend la commune, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intersection, une fois aménagée en application de la prescription spéciale portée à l'article 2 de l'arrêté attaqué, ne sera pas suffisamment sécurisée pour assurer la desserte du projet, alors que les conditions actuelles du trafic routier ne présentent pas de risque avéré d'accidents et que l'élargissement des rayons de virage améliorera la visibilité des deux voies à l'intersection.
40. Enfin, la commune ne peut utilement soutenir que la prescription renvoie à des pièces qui ne figurent pas au dossier alors que, précisément, c'est au vu des pièces qui s'y trouvaient et de l'insuffisance de garantie pour la sécurité routière qu'elles ont révélée que la prescription spéciale a été énoncée à l'article 2 de l'arrêté attaqué.
Quant au caractère réalisable de la prescription figurant à l'article 2 :
41. La commune soutient que l'aménagement de l'intersection entre la RD80 et le chemin rural n° 5 est irréalisable en raison, d'une part, du refus du tiers propriétaire et de la commune de céder une partie de leurs terrains à cette fin, d'autre part, de la présence de l'espace boisé classé et de la zone de protections des lisières forestières, enfin, de la nécessité d'obtenir une décision de non-opposition à déclaration préalable pour les travaux de busage du fossé.
42. D'une part, le permis de construire a été délivré sous réserve du droit des tiers et ne préjuge donc pas des autorisations qui devront être obtenues pour l'exécution des travaux de voirie auprès de particuliers ou d'autres autorités publiques. Or, à la date à laquelle le permis a été délivré, les propriétaires de l'espace boisé n'avaient pas fait connaître leur refus d'en céder une partie pour permettre l'aménagement du carrefour. La commune ne peut pas ainsi utilement se prévaloir d'un courrier en ce sens des propriétaires de la parcelle ZB24 qui, daté du 27 avril 2023, est postérieur à l'arrêté attaqué. Elle ne peut pas davantage se prévaloir des deux délibérations des 21 décembre 2021 et 15 novembre 2022 par lesquelles son conseil municipal se borne à manifester de manière générale son opposition au projet. Enfin, elle ne peut utilement soutenir que le maire refusera d'autoriser les travaux de busage du fossé bordant le chemin rural n° 5 alors qu'il n'a pas encore été saisi d'une demande en ce sens.
43. En revanche et d'autre part, dans les cas particuliers où, pour accorder l'autorisation de construire, l'administration se fonde sur la circonstance que, en raison de travaux en cours ou futurs, la desserte du terrain répondra à brève échéance et de manière certaine aux exigences légales, les motifs de légalité susceptibles de faire obstacle à la réalisation de ces travaux peuvent être utilement invoqués devant le juge de l'excès de pouvoir, au soutien de conclusions dirigées contre la décision d'autorisation. Ainsi qu'il a été dit précédemment, les prescriptions de travaux posées à l'article 2 de l'arrêté attaqué, qui assurent le respect de l'article A3, méconnaissent les dispositions des articles A1, A2 et N13 du règlement du PLU relatives à la protection des lisières forestières et des espaces boisés classés. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article A3 du règlement du PLU est fondé seulement en raison de l'illégalité des prescriptions fixées à l'article 2 de l'arrêté attaqué.
S'agissant de l'adaptation du tronçon du chemin rural n° 5 situé entre le projet et l'intersection avec la RD80 :
44. Il ressort des pièces du dossier que l'accès à l'unité de méthanisation prévu dans le permis de construire se fait par le chemin rural n°5 d'une largeur de 3 à 4 mètres. Si la prescription n°2 évoque un élargissement du chemin d'accès, elle ne précise pas si cet élargissement concerne toute la longueur du chemin rural n° 5 comprise entre l'intersection avec la RD80 et l'entrée de la parcelle d'assiette du projet ou seulement les quelques mètres situés au débouché de l'intersection. Les autres éléments du dossier de permis de construire ne sont pas plus précis sur ce point. L'adaptation du chemin d'accès doit donc être appréciée sur la base de sa largeur alléguée de 3 à 4 mètres. Il ressort des photographies jointes, que le chemin est bitumé, recouvert de graviers et praticable pour les engins agricoles, poids lourds et véhicules utilitaires qui l'empruntent déjà pour se rendre à la station de détente GRTgaz. Certes, le croisement de deux véhicules sur le chemin est difficile et le trafic routier existant généré par les exploitations, actuellement de l'ordre de 400 véhicules par an, sera plus que doublé puisque 640 rotations annuelles supplémentaires sont induites par le projet. Toutefois, eu égard à la faible circulation quotidienne sur ce chemin, de l'ordre d'environ 3 véhicules, à sa configuration plate et en quasi ligne droite, à son absence d'accident répertorié, à sa bonne visibilité, à l'avis favorable du service départemental d'incendie et de secours de l'Eure, notamment pour l'accessibilité des engins de secours, il n'est pas démontré que le chemin rural n° 5 ne serait pas adapté et présenterait un risque pour les véhicules et les promeneurs. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article A3 du règlement du PLU n'est donc pas fondé en ce qui concerne le tronçon du chemin rural n° 5 situé entre le projet et l'intersection avec la RD80.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article A11 du règlement du plan local d'urbanisme :
45. Aux termes de l'article A2 " types d'occupation ou d'utilisation du sol soumis à conditions spéciales " du règlement du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard : " (...) Dans l'ensemble de la zone A, à l'exception du secteur Aa : (...) / les installations classées et leurs extensions dans la mesure où les conditions cumulatives suivantes sont remplies : elles satisfont [à] la législation en vigueur les concernant, elles sont liées à l'activité agricoles et il ne subsiste pas pour le voisinage de nuisance ou gêne de nature à rendre indésirable de telles installations dans les zones alentour (...) ". Aux termes de l'article A11 " aspect extérieur des constructions " du règlement du PLU : " Les constructions de quelque nature qu'elles soient doivent respecter l'harmonie créée par les bâtiments environnants et par le site. (...) / Les matériaux de couverture autorisés sont l'ardoise, la tuile plate et les matériaux similaires. / Les matériaux destinés à être recouverts d'un enduit ou d'un parement (briques creuses, parpaings...) doivent être recouverts d'un enduit ou d'un parement sur leur face extérieure. Pour les extensions et les annexes vitrées des habitations et sous réserve d'intégration aux bâtiments existants, les matériaux transparents ou translucides seront autorisés comme matériaux de construction et de couverture. / Le choix des couleurs : - se rapprochera des couleurs et matériaux extraits localement ; / -s'inscrira dans le paysage ; / - les couleurs claires et " criardes " sont proscrites, notamment le blanc pur. / Les matériaux et couleurs de façade et de toiture d'un bâtiment devront présenter une harmonie générale. (...) / PROMOTION DES ENERGIES RENOUVELABLES : Les constructions ou ouvrages qui ne respectent pas le caractère général des règles de cet article, lorsque le recours à des techniques nouvelles ou à des matériaux nouveaux (constructions Haute qualité Environnementale, constructions écologiques et bioclimatiques, à basse ou très basse énergie, à énergie passive, à énergie positive, ou à énergie renouvelable) le justifie, pourront être autorisées sous réserve de leur bonne intégration architecturale et paysagère. ". Aux termes de l'article 2 du règlement : " Les dispositions du présent règlement se substituent aux articles R. 111 et suivants du code de l'urbanisme. En revanche, sont et demeurent applicables au territoire communal les articles R. 111-2, (...) R. 111-21 " devenu depuis le 1er janvier 2016 l'article R. 111-27 qui dispose que : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. " .
46. En premier lieu, dès lors que les dispositions du règlement d'un plan local d'urbanisme invoquées par le requérant ont le même objet que celles, également invoquées, d'un article du code de l'urbanisme posant les règles nationales d'urbanisme et prévoient des exigences qui ne sont pas moindres, c'est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d'urbanisme que doit être appréciée la légalité de la décision attaquée. En conséquence, le juge exerce un contrôle normal sur la conformité à ces dispositions de la décision attaquée.
47. Certes l'article A11 du règlement du PLU ne mentionne pas les paysages naturels et urbains et les perspectives monumentales. Cependant, il vise de manière générale l'harmonie des constructions avec les " bâtiments environnants " et le " site ", ce qui couvre matériellement les mêmes objets et assure ainsi une protection équivalente à celle prévue à l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article A11 du règlement du PLU est donc opérant, même si l'article A2 du règlement du PLU prévoit que l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme trouve toujours à s'appliquer.
48. Il résulte de ces dispositions que, si les constructions projetées portent atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ou encore à la conservation des perspectives monumentales, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer le permis de construire sollicité ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site. Les dispositions de cet article excluent qu'il soit procédé, dans le second temps du raisonnement, à une balance d'intérêts divers en présence, autres que ceux mentionnés par cet article et, le cas échéant, par le plan local d'urbanisme de la commune. Pour apprécier aussi bien la qualité du site que l'impact de la construction projetée sur ce site, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, de prendre en compte l'ensemble des éléments pertinents et notamment, le cas échéant, la covisibilité du projet avec des bâtiments remarquables, quelle que soit la protection dont ils bénéficient par ailleurs au titre d'autres législations.
49. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle d'assiette du projet consiste en des terres agricoles cultivées et non bâties, qu'elle est implantée à proximité immédiate d'une station d'épuration et d'un espace boisé classé, qu'elle est entourée d'autres parcelles agricoles et qu'elle s'inscrit dans le périmètre de protection du château classé de la Mésangère. La commune ne conteste cependant pas le peu de visibilité des bâtiments et installations projetés depuis le château du fait des végétations existantes et des plantations paysagères prévues par la pétitionnaire.
50. Elle conteste, en revanche, le choix des matériaux et des teintes de couverture, qui varient selon les ouvrages : le " digesteur " sera recouvert d'une " double membrane gazomètre " de teinte " gris poussière ", la fosse de stockage des digestats liquides d'une " couverture simple de type chapiteau " de couleur " gris poussière " et les bâtiments de stockage d'un " bac acier teinte ardoise " surmonté en grande partie par des " panneaux photovoltaïques cristallins assombris ". D'une part, les matériaux choisis pour les bâtiments techniques apparaissent adaptés aux conditions de sécurité, alors que, de par leur configuration et leur fonctionnalité, ils ne peuvent recevoir sur leur couverture des ardoises ou des tuiles plates. D'autre part, si les bâtiments agricoles pourraient recevoir une couverture traditionnelle en ardoises ou en tuiles, le choix de recourir à un " bac acier " apparaît conforme aux prescriptions de l'article A11 dès lors que les matériaux choisis ont une couleur similaire à l'ardoise et que les couvertures seront surmontées de panneaux solaires, soumis à une exigence paysagère allégée et que ces bâtiments s'inscrivent dans un contexte agricole dépourvu à proximité de constructions à toiture en ardoise ou en tuiles, à l'instar de la station d'épuration.
51. Il suit de là que la commune n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaît l'article A11 du règlement du PLU, d'autant moins que l'architecte des bâtiments de France n'a pas émis de réserve ou de désaccord sur ce point.
Sur l'application des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
52. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé ". Aux termes de l'article L. 600-5-1 de ce code : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".
53. Il résulte de ces dispositions que lorsque le ou les vices affectant la légalité de l'autorisation d'urbanisme dont l'annulation est demandée sont susceptibles d'être régularisés, le juge doit surseoir à statuer sur les conclusions dont il est saisi contre cette autorisation, sauf à ce qu'il fasse le choix de recourir à l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme si les conditions posées par cet article sont réunies ou que le bénéficiaire de l'autorisation lui ait indiqué qu'il ne souhaitait pas bénéficier d'une mesure de régularisation. Lorsqu'il décide de recourir à l'article L. 600-5-1, il lui appartient, avant de surseoir à statuer sur le fondement de ces dispositions, de constater préalablement qu'aucun des autres moyens n'est fondé et n'est susceptible d'être régularisé et d'indiquer dans sa décision de sursis pour quels motifs ces moyens doivent être écartés.
54. Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même. Le juge ne peut pas fonder son appréciation sur le seul projet existant, sans tenir compte de la possibilité pour le pétitionnaire de faire évoluer celui-ci et d'en revoir, le cas échéant, l'économie générale sans en changer la nature.
55. Aux termes de l'article R. 311-6 du code de justice administrative : " (...) III. (...) Devant le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel, lorsque le juge, dans le délai de dix mois mentionné aux alinéas précédents, met en œuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 181-18 du code de l'environnement ou de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, il dispose, à compter de l'enregistrement du mémoire transmettant la mesure de régularisation qu'il a ordonnée, d'un délai de six mois pour statuer sur la suite à donner au litige. A défaut de statuer dans ce délai, le litige est porté, selon le cas, devant la cour administrative d'appel ou le Conseil d'Etat (...) ".
56. En l'état de l'instruction, les vices tirés de la méconnaissance des articles A1, A2, A3, N13 du règlement du PLU de Saint-Pierre-du-Bosguérard et L.113-2 du code de l'urbanisme apparaissent susceptibles de régularisation par la délivrance d'un arrêté portant permis de construire modificatif. Cette régularisation n'implique pas d'apporter au projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.
57. A l'initiative de la cour, les parties ont présenté leurs observations sur ce point et la société pétitionnaire a notamment proposé de modifier l'accès et la desserte du projet, en prévoyant la création d'un chemin privé qui éviterait les zones naturelles protégées et le centre urbain, sans créer un nouvel accès sur la RD 80. Si la commune soutient que ce nouveau chemin consommerait des terres agricoles et que la chambre d'agriculture s'y était précédemment opposée, d'une part, elle ne produit aucun avis émis par cette instance et, d'autre part, la consommation de terres agricoles apparaît comme un moindre mal par rapport à la destruction d'une zone naturelle boisée protégée et de sa lisière. Si la commune soutient en outre que ce nouveau chemin traverserait le site d'une ancienne carrière souterraine, d'une part, rien n'indique que le tracé définitif ne pourra pas éviter l'emprise de cette carrière, d'autre part, elle ne fournit aucun élément technique sur l'impossibilité de créer dans cette emprise une route empruntée par des poids lourds.
58. Par suite, la régularisation envisagée ne paraît pas, en l'état du dossier, se heurter à des obstacles qui la rendraient impossible. Il y a donc lieu, en l'espèce, d'impartir à la SAS NJ Energie un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, aux fins d'obtenir la régularisation de l'arrêté du 30 mars 2023.
DÉCIDE :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la légalité de l'arrêté du 30 mars 2023 par lequel le préfet de l'Eure a délivré à la SAS NJ Energie le permis de construire une unité de méthanisation sur le territoire de la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard, jusqu'à l'expiration d'un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, dans lequel la régularisation de ce permis doit être notifiée à la cour par le préfet de l'Eure et la SAS NJ Energie.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin des instances d'appel.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la commune de Saint-Pierre-du-Bosguérard, au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques et à la SAS NJ Energie.
Copie en sera adressée pour information au préfet de l'Eure.
Délibéré après l'audience publique du 14 novembre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2024.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°24DA00546 2