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21/11/2024 | FRANCE | N°24DA00341

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 21 novembre 2024, 24DA00341


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 18 novembre 2020 par laquelle la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille a rejeté le recours administratif préalable qu'il avait formé contre la sanction de vingt jours de placement en cellule disciplinaire prononcée à son encontre le 28 octobre 2020 par la commission de discipline du centre pénitentiaire de Lille-Annœullin.



Par un jugement n° 210

3654 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision et a mis à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 18 novembre 2020 par laquelle la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille a rejeté le recours administratif préalable qu'il avait formé contre la sanction de vingt jours de placement en cellule disciplinaire prononcée à son encontre le 28 octobre 2020 par la commission de discipline du centre pénitentiaire de Lille-Annœullin.

Par un jugement n° 2103654 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille a annulé cette décision et a mis à la charge de l'Etat le versement, au conseil de M. E..., de la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 février 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Lille.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la commission de discipline était régulièrement composée ;

- les droits de la défense ainsi que le principe du contradictoire ont été respectés ;

- M. E... ne peut utilement se prévaloir des paragraphes 2.4.3 et 2.5.3 de la circulaire du 9 juin 2011 ;

- la matérialité des faits est établie ;

- la sanction infligée n'est pas disproportionnée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2024, M. E..., représenté par Me Gauché, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable dès lors que la délégation de signature consentie à son signataire est trop imprécise ;

- le rapport d'enquête est insuffisant au regard des dispositions de l'article R. 57-7-14 du code de procédure pénale dès lors qu'il n'a pas été procédé au visionnage des enregistrements de vidéosurveillance ;

- l'absence d'indication des antécédents disciplinaires, en méconnaissance du paragraphe 2.5.3 de la circulaire du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures, l'a privé de la possibilité de de préparer utilement sa défense ;

- la matérialité des faits reprochés n'est pas établie dès lors qu'il n'a été procédé ni au visionnage des enregistrements de vidéosurveillance ni à l'analyse de la substance présente dans le sachet afin de confirmer son caractère illicite, alors que ces vérifications incombaient à l'administration ;

- eu égard à son profil, la sanction est disproportionnée.

Par une ordonnance du 1er juillet 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 22 juillet 2024.

Par une décision du 4 juillet 2024, M. E... a été maintenu de plein droit au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de procédure pénale ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. M. E..., incarcéré au centre pénitentiaire de Lille-Annœullin depuis le 16 juin 2020, a fait l'objet, par deux décisions du 28 octobre 2020 de la commission de discipline de cet établissement, d'une sanction de vingt jours de cellule disciplinaire pour avoir transmis à un codétenu un sachet contenant des produits stupéfiants et d'une sanction de quatorze jours de cellule disciplinaire après la découverte, lors de la fouille de sa cellule, d'un chargeur de téléphone. Les deux sanctions ont été confondues pour leur exécution. Par une décision du 18 novembre 2020, qui s'est substituée à celles du 28 octobre 2020, la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille a rejeté le recours administratif préalable formé par l'intéressé contre ces sanctions. Le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel du jugement du 22 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lille a, à la demande de M. E..., annulé la décision de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille.

Sur la fin de non-recevoir opposée en défense par M. E... :

2. Aux termes de l'article R. 811-10 du code de justice administrative : " Devant la cour administrative d'appel, l'État est dispensé de ministère d'avocat soit en demande, soit en défense, soit en intervention. Sauf dispositions contraires, les ministres intéressés présentent devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'État. / Les ministres peuvent déléguer leur signature dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur ".

3. Par une décision du 30 janvier 2024, publiée au Journal officiel électronique authentifié n° 0025 du 31 janvier 2024, le garde des sceaux, ministre de la justice, a donné, sur le fondement de l'article 2 du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement, délégation à M. A... B..., adjoint au sous-directeur des affaires juridiques générales et du contentieux, chef du bureau du contentieux administratif et du conseil, à l'effet de signer, à l'exclusion des décrets, tous actes, arrêtés et décisions relevant du service de l'expertise et de la modernisation du secrétariat général, dans la limite des attributions de la sous-direction des affaires juridiques générales et du contentieux. Contrairement à ce qui est soutenu, cette décision définit, avec une précision suffisante, les limites de la délégation donnée à M. B..., signataire de la requête d'appel. Dès lors, la fin de non-recevoir tirée de ce que la requête a été irrégulièrement signée par M. B... doit être écartée.

Sur le moyen d'annulation accueilli par le tribunal administratif :

4. D'une part, aux termes de l'article R. 57-7-6 du code de procédure pénale, dans sa rédaction alors applicable : " La commission de discipline comprend, outre le chef d'établissement ou son délégataire, président, deux membres assesseurs ". L'article R. 57-7-8 du même code dispose, dans sa rédaction applicable au litige : " Le président de la commission de discipline désigne les membres assesseurs. / Le premier assesseur est choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement. / Le second assesseur est choisi parmi des personnes extérieures à l'administration pénitentiaire qui manifestent un intérêt pour les questions relatives au fonctionnement des établissements pénitentiaires, habilitées à cette fin par le président du tribunal de grande instance territorialement compétent. La liste de ces personnes est tenue au greffe du tribunal de grande instance ". Aux termes de l'article R. 57-7-13 de ce code, dans sa rédaction applicable : " En cas de manquement à la discipline de nature à justifier une sanction disciplinaire, un compte rendu est établi dans les plus brefs délais par l'agent présent lors de l'incident ou informé de ce dernier. L'auteur de ce compte rendu ne peut siéger en commission de discipline ". Aux termes du premier alinéa de l'article R. 57-7-14 du même code, dans sa rédaction applicable : " A la suite de ce compte rendu d'incident, un rapport est établi par un membre du personnel de commandement du personnel de surveillance, un major pénitentiaire ou un premier surveillant et adressé au chef d'établissement. Ce rapport comporte tout élément d'information utile sur les circonstances des faits reprochés à la personne détenue et sur la personnalité de celle-ci. L'auteur de ce rapport ne peut siéger en commission de discipline ".

5. Il résulte de ces dispositions que la présence dans la commission de discipline d'un assesseur choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement, qui ne peut être ni l'auteur du compte rendu établi à la suite d'un incident, ni l'auteur du rapport établi à la suite de ce compte rendu, constitue une garantie reconnue au détenu, dont la privation est de nature à vicier la procédure, alors même que la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires, prise sur le recours administratif préalable obligatoire exercé par le détenu, se substitue à celle du président de la commission de discipline.

6. D'autre part, aux termes de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne (...). Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté ". Si la méconnaissance de ces dispositions est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision prise, au terme de la procédure, par l'autorité administrative compétente, il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, le cas échéant en ordonnant la production par l'administration des informations nécessaires et sans que communication en soit alors donnée au requérant, que le premier assesseur a bien été choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement et qu'il n'était l'auteur ni du compte rendu d'incident ni du rapport d'enquête, comme l'exigeaient les articles R. 57-7-8, R. 57-7-13 et R. 57-7-14 du code de procédure pénale alors en vigueur.

7. Il ressort des pièces du dossier, et, en particulier, de l'extrait du registre de la commission de discipline, produit pour la première fois en appel, que cette commission comprenait, lors de sa séance du 28 octobre 2020, un premier assesseur, surveillant pénitentiaire choisi conformément aux dispositions de l'article R. 57-7-8 du code de procédure pénale alors applicable, désigné par les premières lettres de son prénom et de son nom de famille, qui n'était ni l'auteur des comptes rendus d'incident des 6 août 2020 et 18 septembre 2020 ni des rapports d'enquête des 11 août 2020 et 18 septembre 2020.

8. Dans ces conditions, le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu un vice de procédure tiré de l'irrégulière composition de la commission de discipline pour annuler la décision de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille du 18 novembre 2020.

9. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. E... devant le tribunal administratif de Lille et devant la cour.

Sur les autres moyens soulevés par M. E... :

En ce qui concerne l'irrégularité de la procédure en ce qu'elle ne résulte pas de la consultation des enregistrements de vidéoprotection :

10. Il résulte des dispositions de l'article 726 du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable au litige, relatives à la procédure disciplinaire applicable aux personnes détenues que si une procédure disciplinaire a été engagée à l'encontre d'un détenu à partir notamment d'enregistrements de vidéoprotection, ceux-ci font partie du dossier de cette procédure, lequel doit être mis à disposition de la personne détenue ou de son avocat. Dans le cas où la procédure n'a pas été engagée à partir de ces enregistrements ou en y faisant appel, il appartient à la personne détenue ou à son avocat, s'ils le jugent utiles au besoin de la défense et si ces enregistrements existent, de demander à y accéder. Un refus ne saurait être opposé à de telles demandes au motif de principe que le visionnage de ces enregistrements serait susceptible en toute circonstance de porter atteinte à la sécurité publique ou à celle des personnes.

11. Il ressort des pièces du dossier que la sanction litigieuse n'est pas fondée sur des faits révélés par le visionnage des enregistrements de vidéoprotection. En outre, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. E... ou son conseil auraient formulé, au cours de la procédure disciplinaire, une demande de communication des images issues des dispositifs de vidéoprotection.

12. Contrairement à ce que soutient M. E..., aucune disposition législative ou réglementaire, notamment pas celles de l'article R. 57-7-14 du code de procédure pénale cité précédemment, n'impose que le rapport d'enquête s'appuie, pour établir les faits reprochés au détenu, sur les enregistrements de vidéoprotection de l'établissement pénitentiaire.

13. Dès lors, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le rapport d'enquête du 11 août 2020, qui se fonde sur le témoignage d'un surveillant pénitentiaire et sur le résultat d'une fouille de l'un de ses codétenus, révèlerait que la sanction disciplinaire prononcée à son encontre est entachée d'un vice de procédure de nature à l'avoir privé d'une garantie.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

14. D'une part, eu égard à la nature et au degré de gravité des sanctions disciplinaires encourues par les personnes détenues, qui n'ont, par elles-mêmes, pas d'incidence sur la durée des peines initialement prononcées, les poursuites disciplinaires engagées à leur encontre ne sauraient être regardées comme une accusation en matière pénale au sens de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

15. D'autre part, si les sanctions disciplinaires encourues par les personnes détenues peuvent entraîner des limitations de leurs droits et doivent être regardées de ce fait comme portant sur des contestations sur des droits à caractère civil au sens des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la nature administrative de l'autorité prononçant les sanctions disciplinaires fait obstacle à ce que les stipulations de cet article 6 soient applicables à la procédure disciplinaire dans les établissements pénitentiaires.

16. Par suite, la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne saurait être utilement invoquée à l'encontre d'une sanction disciplinaire prononcée par le président de la commission de discipline d'un établissement pénitentiaire ou de la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires qui s'y substitue. Le moyen ainsi invoqué ne peut, dès lors, qu'être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance des droits de la défense :

17. Selon le paragraphe 2.5.3 de la circulaire du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures : " A réception du compte rendu d'incident, l'enquêteur doit instruire en vue de clarifier les circonstances de l'espèce et d'examiner si les faits sont établis ou non (...). / L'enquêteur consulte, au greffe de l'établissement, le dossier individuel de la personne détenue et vérifie l'existence éventuelle d'antécédents disciplinaires, faisant apparaître notamment l'existence de sursis antérieurs révocables. Il dresse la liste de ces antécédents dans son rapport d'enquête (...) ".

18. Il ressort des pièces du dossier que le rapport d'enquête du 18 septembre 2020 mentionne que M. E... a fait l'objet de cent vingt passages en commission de discipline depuis le début de son incarcération. Si le rapport d'enquête du 11 août 2020 ne comporte pas une telle indication, les faits relatés dans ces deux rapports d'enquête ont été examinés lors de la même séance de la commission de discipline. Dès lors, et en tout état de cause, M. E... n'est pas fondé à soutenir que l'absence d'information sur sa situation disciplinaire dans le rapport d'enquête l'aurait privé de la garantie reconnue au détenu par la circulaire du 9 juin 2011 relative au régime disciplinaire des personnes détenues majeures et que cette omission aurait vicié la procédure. Au surplus, les antécédents disciplinaires de M. E... ne sont pas au nombre des motifs de la sanction contestée.

19. M. E..., qui a ainsi été mis à même d'évoquer ses éventuels antécédents disciplinaires, dont il avait nécessairement connaissance, devant la commission de discipline afin que la sanction susceptible d'être adoptée soit proportionnée à la gravité des faits et adaptée à sa personnalité, n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance des droits de la défense.

En ce qui concerne la matérialité des faits reprochés :

20. D'une part, il ressort des pièces du dossier, notamment du compte rendu d'incident du 6 août 2020 et du rapport d'enquête du 11 août 2020, que, lors d'une promenade, un surveillant a vu M. E... remettre un objet à un codétenu, lequel, à l'occasion d'une fouille effectuée cinq minutes après cet échange, a été retrouvé en possession d'un sachet contenant 24 grammes d'herbe de cannabis. Alors que la décision contestée de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille précise expressément que le sachet remis par M. E... à son codétenu contenait de l'herbe de cannabis, l'intéressé n'apporte aucun élément au soutien de son allégation selon laquelle le caractère illicite de cette substance ne serait pas établi.

21. La matérialité des faits reprochés à M. E... est ainsi suffisamment établie par les pièces du dossier, alors même que l'administration pénitentiaire, qui n'y était d'ailleurs nullement tenue, n'a pas eu recours à des enregistrements de vidéoprotection, à supposer même qu'ils existent, pour en corroborer l'exactitude matérielle.

22. D'autre part, M. E..., qui a admis être en possession d'un chargeur de téléphone portable, ne conteste pas la matérialité de ces faits.

En ce qui concerne la proportionnalité de la sanction :

23. Aux termes de l'article R. 57-7-1 du code de procédure pénale, alors en vigueur : " Constitue une faute disciplinaire du premier degré le fait, pour une personne détenue : (...) 10° D'introduire ou tenter d'introduire au sein de l'établissement tous objets, données stockées sur un support quelconque ou substances de nature à compromettre la sécurité des personnes ou de l'établissement, de les détenir ou d'en faire l'échange contre tout bien, produit ou service ; 11° D'introduire ou tenter d'introduire au sein de l'établissement des produits stupéfiants, ou sans autorisation médicale, des produits de substitution aux stupéfiants aux stupéfiants ou des substances psychotropes, de les détenir ou d'en faire l'échange contre tout bien, produit ou service ; (...) 16° D'inciter une personne détenue à commettre l'un des manquements énumérés par le présent article ou de lui prêter assistance à cette fin ".

24. Aux termes de l'article R. 57-7-47 du même code, alors en vigueur : " Pour les personnes majeures, la durée de la mise en cellule disciplinaire ne peut excéder vingt jours pour une faute disciplinaire du premier degré, quatorze jours pour une faute disciplinaire du deuxième degré et sept jours pour une faute disciplinaire du troisième degré ".

25. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un détenu ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

26. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, le 6 août 2020, M. E... a remis à un codétenu un sachet contenant 24 grammes d'herbe de cannabis et que, le 18 septembre 2020, à l'occasion d'une fouille de sa cellule, l'intéressé a été retrouvé en possession d'un chargeur de téléphone. Ces faits étaient de nature à justifier une sanction.

27. D'autre part, eu égard à la nature et à la gravité des faits commis par M. E..., la sanction de confinement en cellule disciplinaire pendant vingt jours confirmée par la directrice interrégionale des services pénitentiaires était proportionnée à la gravité des fautes commises.

28. Il résulte de tout ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a annulé la décision du 18 novembre 2020 par laquelle la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lille a confirmé la décision de la commission de discipline du 28 octobre 2020 plaçant M. E... en cellule disciplinaire pour une durée de vingt jours. Le jugement du 22 décembre 2023 doit ainsi être annulé et la demande présentée par M. E... devant le tribunal doit être rejetée.

29. Par voie de conséquence, les conclusions de M. E... présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2103654 du 22 décembre 2023 du tribunal administratif de Lille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif de Lille et ses conclusions d'appel présentées au titre des frais du litige sont rejetées sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice, à M. D... E... et à Me Gauché.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : F.-X. Pin

Le président de chambre,

Signé : M. C...La greffière,

Signé : E. Héléniak

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth Héléniak

2

N°24DA00341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00341
Date de la décision : 21/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. François-Xavier Pin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : AD'VOCARE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-21;24da00341 ?
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