Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la réduction à hauteur de 130 787 euros des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 ainsi que des intérêts de retard correspondants.
Par un jugement n° 2101166 du 25 mai 2023, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 juin 2023 et un mémoire, enregistré le 29 janvier 2024, M. et Mme B..., représentés par la Selarl Vauban, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la réduction de ces impositions à hauteur de 130 787 euros et des intérêts de retard correspondants ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- les conditions posées à l'article 151 septies A du code général des impôts ont été respectées ;
- ils sont fondés à se prévaloir des énonciations du paragraphe 520 de la documentation administrative référencée BOI-BIC-PVMV-40-10-10-20.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 31 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 20 mars 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pin, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
Sur l'objet du litige :
1. Après l'avoir personnellement exploité à titre individuel, M. B... a donné en location-gérance, à compter du 1er mars 2008, un fonds de commerce d'un camping à l'EURL Camping la Faloise, dont il était le gérant et l'unique associé, et à laquelle il a également loué des biens immobiliers nécessaires à l'exploitation de l'entreprise.
2. Le 17 novembre 2014, M. B... a, en sa qualité de loueur du fonds et d'unique associé de l'EURL Camping la Faloise, résilié le contrat de location-gérance, et cédé ce fonds de commerce à la SAS Gestion plein air.
3. A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause l'exonération de la plus-value d'un montant de 509 130 euros dont M. B... s'était prévalu sur le fondement de l'article 151 septies A du code général des impôts et a, en conséquence, assujetti le foyer fiscal de l'intéressé au titre de l'année 2014 à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu.
4. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 25 mai 2023 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires.
Sur l'application de la loi fiscale :
5. Aux termes de l'article 151 septies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- Les plus-values soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies, autres que celles mentionnées au III, réalisées dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, sont exonérées lorsque les conditions suivantes sont réunies : / 1° L'activité doit avoir été exercée pendant au moins cinq ans ; / 2° La cession est réalisée à titre onéreux et porte sur une entreprise individuelle ou sur l'intégralité des droits ou parts détenus par un contribuable qui exerce son activité professionnelle dans le cadre d'une société ou d'un groupement dont les bénéfices sont, en application des articles 8 et 8 ter, soumis en son nom à l'impôt sur le revenu et qui sont considérés comme des éléments d'actif affectés à l'exercice de la profession au sens du I de l'article 151 nonies ; / 3° Le cédant cesse toute fonction dans l'entreprise individuelle cédée ou dans la société ou le groupement dont les droits ou parts sont cédés et fait valoir ses droits à la retraite, dans les deux années suivant ou précédant la cession ; / 4° Le cédant ne doit pas détenir, directement ou indirectement, plus de 50 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de l'entreprise cessionnaire ; / 5° L'entreprise individuelle cédée ou la société ou le groupement dont les droits ou parts sont cédés emploie moins de deux cent cinquante salariés et soit a réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros au cours de l'exercice, soit a un total de bilan inférieur à 43 millions d'euros ; / 6° Le capital ou les droits de vote de la société ou du groupement dont les droits ou parts sont cédés ne sont pas détenus à hauteur de 25 % ou plus par une entreprise ou par plusieurs entreprises ne répondant pas aux conditions du 5°, de manière continue au cours de l'exercice. / IV.- Par dérogation au 2° du I, la cession à titre onéreux d'une activité qui fait l'objet d'un contrat de location-gérance ou d'un contrat comparable peut bénéficier du régime mentionné au I si les conditions suivantes sont simultanément satisfaites : / 1° L'activité est exercée depuis au moins cinq ans au moment de la mise en location ; / 2° La cession est réalisée au profit du locataire. (...) ".
6. Pour remettre en cause le bénéfice de l'exonération prévue à l'article 151 septies A du code général des impôts, le service a notamment relevé que la cession du fonds de commerce, qui faisait l'objet d'un contrat de location-gérance, n'a pas été réalisée au profit du locataire, en méconnaissance du 2° du IV de l'article 151 septies A du code général des impôts.
7. Il résulte de l'instruction que la résiliation, par M. B..., du contrat de location-gérance qu'il avait conclu le 1er mars 2008 avec l'EURL Camping la Faloise et la cession à la SAS Gestion plein air du fonds de commerce du terrain de camping lui appartenant, ont été réalisées par le même acte notarié du 17 novembre 2014, s'inscrivent dans le cadre d'une même opération, et doivent, dès lors, être regardées comme concomitantes l'une de l'autre.
8. Dans ces conditions, au regard de la loi fiscale, et quelle qu'ait été l'intention des parties, M. B... ne saurait être regardé, ainsi qu'il le soutient, comme ayant effectivement et personnellement repris, un instant de raison, l'exploitation du terrain de camping préalablement à la cession du fonds de commerce.
9. Par voie de conséquence, puisqu'à la date du 17 novembre 2014, le fonds de commerce de M. B... était exploité depuis 2008 par l'EURL Camping la Faloise en vertu d'un contrat de location-gérance, M. B... ne peut pas être regardé comme ayant cédé ce fonds de commerce au profit du locataire de celui-ci, conformément au 2° du IV de l'article 151 septies A du code général des impôts.
10. Il suit de là que l'administration n'a pas méconnu la loi fiscale en remettant en cause l'exonération dont M. B... avait entendu bénéficier.
Sur l'interprétation administrative de la loi fiscale :
11. M. et Mme B... invoquent, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le paragraphe 520 de la documentation administrative référencée BOI-BIC-PVMV-40-10-10-20, selon lequel " Il est admis que le délai de cinq ans s'apprécie en cumulant les périodes d'exercice à titre professionnel cf. n°40). Ainsi, une personne qui reprend en direct l'exploitation d'un fonds de commerce qu'elle donnait en location gérance peut cumuler, en se plaçant dans le cadre de cette tolérance et pour le décompte du délai de cinq ans, la période d'exploitation en direct antérieure à la mise en location gérance avec celle écoulée depuis la reprise de l'exploitation en direct ".
12. Toutefois, ces énonciations se rapportent à l'interprétation du seul article 151 septies du code général des impôts et ne sont pas opposables à l'administration dans le présent litige qui est relatif au bénéfice de l'exonération prévue à l'article 151 septies A du même code.
13. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B... et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.
Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience du 7 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Marc Heinis, président de chambre,
- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,
- Mme Alice Minet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2024.
Le président-rapporteur,
Signé : F.-X. Pin
Le président de chambre,
Signé : M. A...La greffière,
Signé : E. Héléniak
La République mande et ordonne au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Elisabeth Héléniak
2
N°23DA01189