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20/11/2024 | FRANCE | N°24DA00659

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 20 novembre 2024, 24DA00659


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 décembre 2022 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du

jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 8 décembre 2022 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de renouvellement d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande et dans l'attente de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler dans le même délai et sous la même astreinte.

Par un jugement n° 2303150 du 19 décembre 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2 avril 2024, Mme C..., représentée par Me Rivière, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 décembre 2022 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 155 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans le cadre de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet du Nord de procéder à un nouvel examen de sa demande, et dans l'attente de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, la somme de 1 800 euros en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision lui refusant un titre de séjour a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée au regard des stipulations de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien mais aussi de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît l'autorité de chose jugée par un précédent jugement du tribunal administratif de Lille du 18 septembre 2020 annulant un arrêté du 29 novembre 2019 refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard des stipulations de l'article 6-7° de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 612-1 et L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2024, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient, en renvoyant à ses écritures de première instance, que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 février 2024.

Par une ordonnance du 2 septembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 23 septembre 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., ressortissante algérienne née le 2 mai 1948, est entrée en France le 12 octobre 2016 sous couvert d'un visa de court séjour. Elle a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour valable du 24 janvier 2017 au 23 juillet 2017, renouvelée jusqu'au 23 janvier 2018, puis d'un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " pour raison de santé, valable du 18 septembre 2020 au 17 septembre 2021 en exécution d'un jugement n° 2002414 du 18 septembre 2020 du tribunal administratif de Lille. Le 13 août 2021, elle a sollicité le renouvellement de son certificat de résidence. Le préfet du Nord, par un arrêté du 8 décembre 2022, a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 19 décembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le moyen commun à l'ensemble des décisions :

2. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 13 octobre 2022 publié le même jour au recueil n° 245 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Nord a donné délégation à M. B... D..., adjoint à la cheffe du bureau du contentieux et du droit des étrangers, à l'effet, notamment, de signer les décisions de refus de titre de séjour, les décisions portant obligation de quitter le territoire français avec ou sans délai de départ volontaire ainsi que les décisions fixant le pays à destination duquel les ressortissants étrangers faisant l'objet d'une telle mesure pourront être éloignés. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions contenues dans l'arrêté contesté doit être écarté.

Sur les autres moyens dirigés contre la décision refusant un titre de séjour :

3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...) ".

4. En premier lieu, la décision vise les textes dont elle fait application et, s'agissant en particulier d'une demande de certificat de résident algérien fondée sur les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, l'avis daté du 23 mars 2022 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) selon lequel si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle pourra y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Le préfet du Nord, qui s'est fondé sur cet avis pour retenir que l'état de santé de Mme C... ne nécessitait pas son maintien en France, a indiqué, dans son arrêté, qu'en l'absence de tout élément médical nouveau apporté par l'intéressée rien ne permet de conclure qu'elle ne peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié pour sa prise en charge médicale en Algérie. Ce faisant, il a suffisamment motivé sa décision.

5. En deuxième lieu, afin de contester le refus de certificat de résidence qui s'appuie sur l'avis du collège de médecins de l'OFII ayant estimé qu'elle pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, Mme C... fait valoir qu'elle est suivie pour une pseudarthrose douloureuse et invalidante avec l'apparition récente d'une gonarthrose bilatérale, venant aggraver son état d'invalidité, le tout sur un terrain amplement fragilisé par le diabète et l'hypertension artérielle. Elle expose que de nombreuses complications ont fait suite aux soins inadaptés à son état, reçus dans son pays d'origine, en conséquence desquels elle a dû se faire poser une prothèse au niveau du genou et doit envisager une nouvelle opération chirurgicale avec reconstruction proximale de son fémur, laquelle serait inenvisageable en Algérie. Pour en attester, elle se prévaut, d'une part, de certificats médicaux de son médecin généraliste datés des 21 janvier et 4 février 2020 faisant respectivement état de ce que son cas ne peut être pris en charge dans son pays d'origine et nécessite une prise en charge orthopédique qui ne peut y être réalisée compte tenu des moyens et des conditions d'asepsie rigoureuses nécessaires à ce geste, d'autre part, de certificats médicaux datés des 12 et 15 mars 2023, établis par un praticien d'un cabinet de médecine générale d'Annaba en Algérie et par un praticien du CHU de cette même ville, attestant de l'impossibilité technique et matérielle de prendre en charge une telle pathologie sans risque pour la patiente. Toutefois, ces certificats médicaux, qui ne délivrent aucune précision sur l'état réel de l'offre de soins en chirurgie orthopédique et des difficultés de prise en charge et de suivi à l'échelle du territoire algérien, des patients souffrant de pathologies de la nature de celle dont Mme C... est atteinte, ne comportent aucune mention susceptible de contredire l'appréciation portée par le collège de médecins de l'OFII sur les conditions d'accès effectif à un traitement approprié en Algérie. Dans ces conditions, en estimant que Mme C... ne remplissait pas les conditions pour bénéficier, en raison de son état de santé, d'un certificat de résidence portant la mention vie privée et familiale, le préfet du Nord n'a pas fait une inexacte application des stipulations précitées du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

6. En troisième lieu, Mme C... ne peut utilement invoquer l'autorité de chose jugée attachée au jugement du 18 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a annulé un précédent arrêté du 29 novembre 2019 refusant de lui délivrer un certificat de résidence en raison de son état de santé dès lors que ce jugement impliquait seulement que lui soit délivré un titre de séjour d'une validité d'un an, conformément aux stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Dans la mesure où il ressort des pièces du dossier que le certificat de résidence dont l'intéressée a été mise en possession à la suite de l'annulation prononcée par le tribunal, expirait le 17 septembre 2021, ce moyen doit être écarté.

7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, Mme C..., qui déclare être séparée de son époux, résidait depuis un peu plus de six ans sur le territoire français. Elle se prévaut de la présence en France, d'un fils de nationalité française et de deux autres de ses fils de nationalité algérienne, dont l'un est titulaire d'un certificat de résidence expirant le 6 février 2028 et au domicile duquel elle est hébergée. Elle produit par ailleurs, au titre des liens familiaux existants sur le territoire français, des témoignages de petits enfants, belles-filles, neveux ou nièces. Si ces éléments font état de ses relations et contacts réguliers avec sa famille installée en France, elle a toutefois passé l'essentiel de sa vie en Algérie où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de soixante-huit ans et il ressort de sa demande de titre de séjour, que quatre autres de ses fils ainsi que sa fille vivent toujours en Algérie de sorte qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, le préfet du Nord n'a pas porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'il a poursuivis et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en lui refusant la délivrance d'un certificat de résidence.

9. En dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points qui précèdent, qu'en refusant de délivrer à Mme C... un certificat de résidence, le préfet du Nord n'a entaché sa décision ni d'un défaut d'examen particulier de sa situation, ni d'une erreur d'appréciation.

Sur les autres moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme C..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision refusant de renouveler son titre de séjour.

11. En deuxième lieu, si, en vertu des dispositions de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision faisant obligation à un étranger de quitter le territoire français doit être motivée, ces dispositions n'imposent pas qu'elle le soit de façon spécifique lorsqu'elle est adossée à un refus de titre de séjour. Or, il ressort des motifs de l'arrêté contesté que ceux-ci comportent, comme il a été dit, l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet du Nord s'est fondé pour refuser de délivrer un titre de séjour à Mme C.... La décision de refus de titre de séjour étant suffisamment motivée, la décision portant obligation de quitter le territoire français doit également être tenue comme telle.

12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 qu'il n'est pas établi que Mme C... ne puisse pas effectivement bénéficier, dans son pays d'origine, d'un traitement approprié à son état de santé. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français qui lui est faite méconnaît les dispositions précitées du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

14. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux déjà exposés, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de ce que la décision obligeant Mme C... à quitter le territoire français serait contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation et d'une erreur d'appréciation.

Sur les autres moyens dirigés contre la décision fixant le délai de départ volontaire :

15. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que Mme C... n'est pas fondée à invoquer l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, pour demander, par voie de conséquence, l'annulation de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.

16. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / (...) ".

17. D'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier, ni n'est d'ailleurs allégué par Mme C..., qu'elle aurait fait état, auprès des services préfectoraux, de circonstances tirées de sa situation particulière justifiant que le préfet du Nord lui accorde, pour satisfaire volontairement à l'obligation de quitter le territoire français prise à son égard, un délai supérieur au délai de droit commun de trente jours. Dans ces conditions, le préfet du Nord n'avait pas à exposer, dans les motifs de son arrêté, les raisons pour lesquelles il a fixé à trente jours le délai de départ volontaire. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision au regard de l'exigence posée par les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ne peut qu'être écarté.

18. D'autre part, alors que Mme C... n'avait fait état d'aucune circonstance particulière justifiant que lui soit accordé un délai supérieur à trente jours, le délai imparti à cette dernière pour quitter volontairement le territoire français, n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions citées au point 16.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

19. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit plus haut que Mme C..., à l'appui de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

20. En second lieu, aux termes de l'article L. 721-4 de ce code : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité (...) ; 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de cette convention stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

21. D'une part, il ressort des énonciations de l'arrêté attaqué que le préfet a estimé que l'intéressée n'allègue ni n'établit que sa vie ou sa liberté sont menacées dans son pays d'origine ou qu'elle y est exposée à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Alors qu'elle ne répond à aucune des situations prévues par les dispositions de l'article L. 721-4 précitées, Mme C... ne fait valoir aucun élément précis et personnel susceptible d'établir le bien-fondé de craintes pour sa sécurité en cas de retour en Algérie. Par suite, le préfet a suffisamment motivé sa décision.

22. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été dit au point 5, que Mme C... serait exposée, en cas de retour en Algérie, à une situation de privation de soins et de suivi médical et il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, ni n'est d'ailleurs allégué, que l'intéressée risquerait d'y encourir d'autres traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté.

23. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 2303150 du 19 décembre 2023 attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à Me Rivière et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 5 novembre 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 novembre 2024.

Le rapporteur,

Signé : F. Malfoy

La présidente de chambre,

Signé : M.-P. Viard

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière,

C. Huls-Carlier

N° 24DA00659 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00659
Date de la décision : 20/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Frédéric Malfoy
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : RIVIERE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-20;24da00659 ?
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