Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Rouen :
- avant dire droit, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) de produire le dossier médical en sa possession et de saisir le Conseil d'Etat pour avis ;
- d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
- d'enjoindre sous astreinte au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour temporaire, ou, à titre subsidiaire, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;
- de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'État en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ou à titre subsidiaire de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2300237 du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2023, M. A... B..., représenté par Me Solenn Leprince, demande à la cour :
1°) avant dire droit, d'enjoindre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) de produire l'ensemble de ses dossiers et notamment la motivation des deux avis concernant la question de l'offre de soins ;
2°) à titre préjudiciel, de saisir le Conseil d'Etat pour avis sur la question de la production des éléments servant de fondement à l'administration pour déterminer la réponse à la question de l'offre de soins ;
3°) d'annuler ce jugement du 13 juin 2023 ;
4°) d'annuler l'arrêté du 18 octobre 2022 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
5°) d'enjoindre sous astreinte au préfet territorialement compétent, en cas de reconnaissance du bien-fondé de sa requête, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou, à titre subsidiaire, au cas où seul un moyen d'illégalité externe serait retenu, de réexaminer sa situation, et, dans tous les cas, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour ;
6°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ou à titre subsidiaire de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie pour établir la réalité de la transmission au collège de médecins de l'OFII du rapport du médecin instructeur ;
- la décision portant refus de séjour est illégale :
- elle n'est pas suffisamment motivée, notamment au regard de l'offre de soins au Maroc ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, faute de justification de la régularité de l'avis rendu par le collège de médecins de l'OFII, notamment au regard des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2014, et de la transmission au collège du rapport du médecin instructeur ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle, notamment au regard de l'offre de soins au Maroc et de ses gages d'insertion professionnelle ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice du pouvoir de régularisation.
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle a été prise sans que le collège médical de l'OFII ne se prononce sur sa capacité à voyager ;
- elle a été prise sans examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
- la décision fixant le pays de destination est illégale :
- elle n'est pas suffisamment motivée au regard des risques de traitements inhumains et dégradants ;
- elle est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision refus de séjour ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2024, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
L'office français de l'immigration et de l'intégration a déposé le 27 mars 2024 un mémoire de production de pièces.
Par une ordonnance du 18 mars 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 19 avril 2024.
M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 55% par une décision du 7 septembre 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2014 ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., né le 17 juin 1970 à Souk Arba Ghard (Maroc), de nationalité marocaine, a demandé un titre de séjour en raison de son état de santé. Après l'avis favorable de l'office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), il a obtenu un récépissé valide jusqu'au 2 novembre 2021, mais à la suite d'un second avis, cette fois défavorable, de l'office, le préfet de la Seine-Maritime a pris le 18 octobre 2022 un arrêté refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination. M. B... demande l'annulation du jugement n° 2300237 du 13 juin 2023 du tribunal administratif de Rouen qui a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
2. Si M. B... reproche au tribunal de ne pas avoir statué sur le moyen tiré du vice de procédure affectant la transmission du rapport du médecin instructeur au collège des médecins de l'OFII, il ressort du jugement attaqué que le tribunal a répondu à ce moyen au point 3 en considérant que ce rapport avait effectivement été transmis au collège de médecins et que les dispositions de l'ordonnance du 6 novembre 2014 ne s'appliquaient pas, de sorte que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie devait être écarté dans toutes ses branches. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le tribunal a omis de statuer sur un moyen opérant et que le jugement est entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
S'agissant des moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen particulier de la situation de M. B... :
3. Aux termes des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, les mesures de police doivent être " motivées " et " comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui [en] constituent le fondement ".
4. En l'espèce, la décision attaquée mentionne avec une précision suffisante les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée. Le préfet de la Seine-Maritime a notamment examiné la régularité et la durée de la présence en France de l'intéressé, son statut de célibataire sans charge de famille ainsi que son état de santé. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette motivation serait lacunaire au regard de ses prétendus gages d'insertion professionnelle et de l'état de l'offre de soins au Maroc, ni qu'elle serait entachée d'un défaut d'examen de la situation personnelle de M. B.... Par suite, les moyens tirés d'un défaut d'examen particulier de sa situation et d'un défaut de motivation doivent être écartés.
S'agissant du moyen tiré du vice de procédure entachant la consultation du collège des médecins de l'OFII :
5. D'une part, aux termes de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. /L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...). ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 425-11 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes de l'article R. 425-13 de ce code : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. (...) ".
6. D'autre part, aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 [nouveaux articles R. 425-11, R. 425-12, R. 425-1, R. 611-1 et R. 611-2] du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport (...) ". Aux termes de l'article 6 de cet arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté (...). / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
7. Il résulte de ces dispositions que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration prévu par les dispositions précitées est rendu par trois médecins, au vu du rapport établi par un quatrième médecin, le cas échéant après examen du demandeur. Il constitue donc une garantie pour l'étranger. Les médecins signataires de l'avis ne sont pas tenus, pour répondre aux questions posées, de procéder à des échanges entre eux, l'avis résultant de la réponse apportée par chacun à des questions auxquelles la réponse ne peut être qu'affirmative ou négative. Par suite, la circonstance que, dans certains cas, ces réponses n'aient pas fait l'objet de tels échanges, oraux ou écrits, est sans incidence sur la légalité de la décision prise par le préfet au vu de cet avis.
8. Enfin, aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 6 novembre 2014 relative aux délibérations à distance des instances administratives à caractère collégial : " Sous réserve de la préservation, le cas échéant, du secret du vote, le président du collège d'une autorité mentionnée à l'article 1er peut décider qu'une délibération sera organisée par tout procédé assurant l'échange d'écrits transmis par voie électronique permettant un dialogue en ligne ou par messagerie. Les observations émises par chacun des membres sont immédiatement communiquées à l'ensemble des autres membres participants ou leur sont accessibles, de façon qu'ils puissent y répondre pendant le délai prévu pour la délibération, afin d'assurer le caractère collégial de celle-ci. / Les modalités d'application de cet article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. ".
9. M. B... ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance du 6 novembre 2014, dès lors que les délibérations du collège de médecins de l'OFII sont régies par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté du 27 décembre 2016.
10. Il ressort des pièces du dossier que l'OFII a versé au dossier la copie de l'avis rendu le 26 septembre 2022 par le collège de médecins sur la situation de M. B..., justifiant ainsi de la réalité de sa consultation. Il en ressort que sa situation a été examinée par trois médecins qui se sont prononcés sur l'état de santé de M. B... et que le médecin rapporteur a transmis son rapport au collège et n'a pas siégé en son sein. L'avis produit comporte un fac-similé numérisé des signatures manuscrites des trois médecins membres du collège et indique qu'il a été rendu après délibération des membres du collège. La circonstance que leurs signatures aient été apposées sous la forme de fac-similés n'est pas de nature à établir que les intéressés, dont l'identité est clairement précisée, n'en seraient pas les auteurs. Il est constant, en tout état de cause, que l'application informatique dénommée Thémis, qui permet l'apposition des signatures électroniques, n'est accessible aux médecins signataires qu'au moyen de deux identifiants et de deux mots de passe qui leur sont propres et qu'elle présente ainsi les garanties de sécurité de nature à assurer l'authenticité des signatures ainsi que le lien entre elles et leurs auteurs. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que cet avis, qui comporte la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'OFII émet l'avis suivant : ", n'aurait pas eu un caractère collégial, alors au demeurant que de tels avis résultent de la réponse apportée par chacun des médecins membres du collège à des questions auxquelles la réponse ne peut être qu'affirmative ou négative et que les signataires ne sont pas tenus, pour répondre aux questions posées, de procéder à des échanges entre eux. Dès lors, le moyen tiré de ce que la procédure de consultation du collège de médecins de l'OFII est entachée d'irrégularité au regard des dispositions de l'article 3 de l'ordonnance n° 2014-1329 du 6 novembre 2014 doit être écarté.
11. Si M. B... fait grief à l'administration d'avoir produit deux bordereaux de transmission de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à la préfecture de Rouen signés le 26 septembre 2022 par deux personnes différentes, dont l'une n'aurait pas disposé d'une délégation régulière pour ce faire, ces éléments ne suffisent pas à remettre en cause la réalité de la transmission de l'avis au préfet et sont donc sans incidence sur la décision de refus de titre prise au vu de cet avis.
S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
12. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. /La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".
13. Il ressort de l'avis émis le 26 septembre 2022 que le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont la privation pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'un traitement approprié lui était effectivement accessible dans son pays d'origine. Il ressort des pièces du dossier que la dépression dont souffre le requérant est traitée au moyen de deux médicaments hypnotiques et de deux antidépresseurs. Si un docteur en pharmacie marocain atteste que l'un de ces antidépresseurs, de structure tétracyclique, n'est pas disponible au Maroc, comme aucun de ses génériques, il ne ressort pas des pièces du dossier que le médecin prescripteur aurait indiqué qu'aucun autre type d'antidépresseur ne pouvait traiter utilement M. B... et ne serait pas substituable au traitement actuellement prescrit à M. B.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme non fondé.
S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :
14. Aux termes de l'article L.423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".
15. M. B... ne peut utilement se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il n'a pas demandé la délivrance d'un titre de séjour sur ce fondement.
S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
16. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
17. Il ressort des pièces du dossier que si M. B... allègue séjourner en France depuis juillet 2018, sa présence sur le territoire français, au demeurant irrégulière, n'est établie que depuis septembre 2020, date à laquelle il a entamé des démarches d'admission au séjour. Il ne justifie ainsi pas de manière probante de l'ancienneté et de la continuité de sa présence en France à la date de l'arrêté attaqué. En outre, en faisant état du décès de son père au Maroc et de la nécessité dans laquelle il s'est trouvé d'aider sa mère et sa sœur restées au pays, il ne justifie pas de la réalité, de la stabilité et de l'intensité de ses attaches personnelles et familiales sur le territoire français mais démontre au contraire ne pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 50 ans. La circonstance qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche ne suffit pas à établir son intégration dans la société française. Dès lors, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet, en refusant de l'admettre au séjour, a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
S'agissant du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :
18. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle dans l'exercice de son pouvoir de régularisation.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
19. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. (...) ".
20. La décision portant obligation de quitter le territoire français fait suite à une décision de refus de titre de séjour elle-même suffisamment motivée, comme il a été dit précédemment. Le moyen tiré de son insuffisance de motivation doit donc être écarté.
21. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé, avant l'édiction de la décision en litige, à l'examen particulier de la situation personnelle de M. B.... Par suite, le moyen tiré d'un défaut d'examen particulier de sa situation doit être écarté.
22. En troisième lieu, il ressort de l'avis du collège des médecins de l'OFII du 26 septembre 2022 que celui-ci s'est prononcé sur la capacité de M. B... à voyager sans risque vers son pays d'origine et a estimé qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé lui permettait de voyager sans risque. Le moyen tiré du vice de procédure manque donc en fait.
23. En quatrième lieu, dès lors que la décision portant refus de titre de séjour opposé à M. B... n'est pas entachée d'illégalité, le moyen tiré du défaut de base légale de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
24. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".
25. Pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté comme non fondé.
26. En sixième lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés précédemment.
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
27. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Seine-Maritime, se référant à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a examiné si l'intéressé serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation doit être écarté.
28. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que les décisions refusant à M. B... la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité. Le moyen tiré du défaut de base légale de la décision fixant le pays de son éloignement doit donc être écarté.
29. En troisième lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux indiqués précédemment.
30. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de saisir à titre préjudiciel le Conseil d'Etat de la demande d'avis sollicité par le requérant, qui au demeurant relève d'un pouvoir propre du juge, ni d'enjoindre à l'OFII de produire l'ensemble de ses dossiers et notamment la motivation de ses deux avis concernant la question de l'offre de soins au Maroc, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 13 juin 2023, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 18 octobre 2022 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.
31. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et au titre des frais d'instance doivent être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Solenn Leprince et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 31 octobre 2024 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 novembre 2024.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°23DA01849 2