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07/11/2024 | FRANCE | N°23DA00768

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 07 novembre 2024, 23DA00768


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) SDL BAT a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, d'une part, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant l'année 2015 et de la période du 1er janvier 2016 au 31 août 2018, ainsi que des pénalités correspondantes et, d'au

tre part, de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1737 du code général ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) SDL BAT a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, d'une part, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période couvrant l'année 2015 et de la période du 1er janvier 2016 au 31 août 2018, ainsi que des pénalités correspondantes et, d'autre part, de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts.

Par un jugement n° 2008003 du 2 mars 2023, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge de l'amende fiscale prévue à l'article 1737 du code général des impôts et a rejeté le surplus de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 27 avril 2023, la SARL SDL BAT, représentée par Me Delattre, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses prétentions ;

2°) de prononcer la décharge totale des impositions et des pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a été privée de la garantie du débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

- c'est à tort que, pour déterminer les insuffisances de chiffre d'affaires de la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017, le service a procédé à une reconstitution des encaissements en prenant en compte des soldes des comptes clients en début et en fin d'exercice, sans tenir compte des encaissements réellement enregistrés sur ses comptes bancaires ;

- il en va de même pour la période du 1er janvier 2018 au 31 août 2018, alors même que la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du livre des procédures fiscales a été mise en œuvre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 octobre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL SDL BAT ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 12 mars 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. La SARL SDL BAT, qui exerce une activité de travaux de bâtiment, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés sur les exercices clos entre 2015 et 2017, et en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er janvier 2015 au 31 août 2018. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration a notifié à la société, outre une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2015 résultant de la remise en cause, sur le fondement du 1 de l'article 39 du code général des impôts, de la déduction de charges supposées fictives, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée établis selon la procédure contradictoire au titre de la période 1er janvier 2015 au 31 décembre 2017 et selon la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions des articles L. 66 et L. 68 du livre des procédures fiscales au titre de la période du 1er août 2018 au 31 août 2018, la société n'ayant pas déposé ses déclarations en matière de taxe sur la valeur ajoutée malgré la réception d'une mise en demeure d'avoir à les produire. En outre, la société s'est vue infliger une amende sur le fondement de l'article 1737 du code général des impôts. Après avoir contesté ces rectifications et l'amende, la société a saisi le tribunal administratif de Lille qui a prononcé la décharge de cette amende et a rejeté le surplus de sa demande. La SARL SDL BAT relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas intégralement fait droit à sa demande de décharge.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables (...) ".

3. Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, soit, comme il est de règle, dans ses propres locaux, soit, si son dirigeant ou représentant l'a expressément demandé, dans les locaux du comptable auprès duquel sont déposés les documents comptables, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.

4. Il résulte de l'instruction qu'au cours des opérations de contrôle, qui se sont déroulées au siège de la société du 16 octobre 2018 au 20 mai 2019, le vérificateur a eu sept entretiens avec le dirigeant de la société et son représentant et la comptable de la société, trois d'entre eux étant consacrés à la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015 et les quatre autres à la période du 1er janvier 2016 au 31 août 2018. Les représentants de la SARL SDL BAT ont eu la possibilité, lors des entretiens des 16 octobre 2018, 23 octobre 2018 et 10 décembre 2018 avec le vérificateur, de s'entretenir de la période allant du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2015 en litige, en se référant notamment aux documents comptables se rapportant à cette période qui ont été remis au cours du premier de ces entretiens.

5. La société n'établit pas que le vérificateur lui aurait refusé le débat oral et contradictoire auquel elle avait droit au cours des opérations sur place et, notamment, qu'il se serait refusé à un échange de vues avec elle au sujet de la nature des prestations résultant d'une facture émise le 15 décembre 2015 par la société NJR Services dont le ministre soutient, sans être contredit, qu'elle a donné lieu à des échanges lors des entretiens du 23 octobre 2018 et du 10 décembre 2018. En outre, si la SARL SDL BAT soutient que ses représentants n'ont rencontré le vérificateur qu'à deux reprises au siège de la société pour évoquer la période du 1er janvier 2016 au 31 août 2018, l'administration a indiqué, dans sa réponse aux observations du contribuable du 19 septembre 2019, les dates de deux autres réunions sur place que le vérificateur a tenues au cours des opérations.

6. Dans ces conditions, la société n'apporte aucun élément de nature à établir qu'elle aurait été privée de la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur.

Sur le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

En ce qui concerne la période couvrant l'année 2017 :

7. Aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée (...) les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ". Selon le a du 1 de l'article 269 du code général des impôts, le fait générateur de la taxe se produit au moment où la prestation de services est effectuée et, aux termes du 2 de ce même article, la taxe devient exigible " pour les prestations de services (...) lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits " et, pour les travaux immobiliers, sur option du redevable et selon les conditions fixées par décret, à la date des livraisons.

8. Il n'est pas allégué que la SARL SDL BAT, qui a pour seule activité la réalisation de prestations de services relatives à des travaux de bâtiment, aurait opté pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée au moment de la livraison des biens. Par suite, la taxe était exigible lors de l'encaissement des différentes factures.

9. Il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 24 mai 2019, qu'à partir de la comptabilité présentée par la société, le service a établi le chiffre d'affaires hors taxes en se fondant sur les produits comptabilisés par la société dans les différents comptes 706 " prestations de services ", corrigés de la variation des comptes clients entre le début et la fin de la période vérifiée et en ne retenant que les seuls encaissements effectifs figurant dans ces comptes, et qu'il a constaté, au vu des déclarations souscrites par la société, que la taxe sur la valeur ajoutée collectée due par la SARL SDL BAT excédait de 5 772 euros la taxe qu'elle avait déclarée au titre de la période couvrant l'année 2017.

10. La société fait valoir que le montant des encaissements, tels qu'ils figurent dans ses propres écritures et ont été retenus par le service sur la période en cause, soit 445 011,43 euros, est supérieur au montant du chiffre d'affaires réellement encaissé sur ses comptes bancaires et qui s'est élevé à 383 970,73 euros.

11. Toutefois, il appartient à la société, dès lors qu'elle remet en cause ses propres écritures et quelle qu'ait été la procédure d'imposition suivie, de justifier que les encaissements qu'elle a comptabilisés ont été surestimés par erreur.

12. Or la requérante n'a fourni aucun élément de nature à permettre d'apprécier la raison de cette discordance alors que le ministre a fait valoir, sans être contredit, que cette différence pouvait s'expliquer par le fait que certains règlements comptabilisés avaient pu être encaissés sur des comptes bancaires externes à l'entreprise.

13. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve du bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée mis à la charge de la SARL SDL BAT.

En ce qui concerne la période du 1er janvier 2018 au 31 août 2018 :

14. La SARL SDL BAT n'ayant pas souscrit, malgré une mise en demeure de le faire, ses déclarations de taxes sur le chiffre d'affaires au titre de la période en cause, elle se trouvait, dès lors, en situation de taxation d'office par application du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. Puisque les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ont ainsi été établis d'office, la preuve de l'exagération des bases d'imposition incombe à la société en vertu de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales.

15. Il résulte de l'instruction que l'administration a déterminé le montant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée par la SARL SDL BAT à partir de la comptabilité de celle-ci, selon les mêmes modalités que celles énoncées au point 9.

16. En se bornant à soutenir que le montant des encaissements retenus par le service à hauteur de 364 418,68 euros, à partir de ses propres écritures comptables, est supérieur au montant des sommes encaissées sur ses comptes bancaires, soit 359 265,74 euros, au cours de la période en litige, la société n'apporte pas la preuve qui lui incombe, de l'exagération de l'évaluation faite par l'administration de ses bases d'imposition.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL SDL BAT n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL SDL BAT est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée SDL BAT et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience du 17 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- Mme Alice Minet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : F.-X. Pin

Le président de chambre,

Signé : M. A...La greffière,

Signé : N. Diyas

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth HELENIAK

2

N°23DA00768


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA00768
Date de la décision : 07/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. François-Xavier Pin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : DELATTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-07;23da00768 ?
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