La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/10/2024 | FRANCE | N°23DA01354

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 17 octobre 2024, 23DA01354


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société à responsabilité limitée (SARL) El Amen a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015, d'autre part, de prononcer la décharge de l'amende fiscale qui lui a été infligée en application des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts au titre des an

nées 2014 et 2015, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) El Amen a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015, d'autre part, de prononcer la décharge de l'amende fiscale qui lui a été infligée en application des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts au titre des années 2014 et 2015, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2101539 du 8 juin 2023, le tribunal administratif d'Amiens, d'une part, a rejeté les conclusions de la demande à fin de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL El Amen a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015 et des pénalités correspondantes, à l'exception de celles concernant la réintégration dans son résultat imposable des avances sans intérêts consenties à hauteur de 23 377 euros et 38 873 euros au titre des exercices clos en 2014 et 2015, d'autre part, a prescrit, avant dire-droit, un supplément d'instruction aux fins, pour l'administration, de préciser, pour chacun des exercices clos en 2014 et 2015, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, le taux d'intérêt que la SARL El Amen aurait pu obtenir d'un établissement financier ou d'un organisme assimilé auprès duquel elle aurait placé, dans des conditions analogues, des sommes d'un montant équivalent à celui des avances consenties, par ailleurs, a rejeté les conclusions de cette demande tendant à la décharge de l'amende et, enfin, a réservé jusqu'en fin d'instance tous droits et moyens sur lesquels il n'a pas expressément statué.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 11 juillet 2023, le 20 septembre 2023 et le 12 décembre 2023, la SARL El Amen, représentée par la SCP Dixit Causa, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette une partie des conclusions de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés correspondants, ainsi que des amendes en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le service vérificateur ne lui a pas restitué, avant la clôture des opérations de contrôle, les fichiers informatiques contenant sa comptabilité, de même que de très nombreux documents comptables, qui avaient été remis à la vérificatrice, ce qui l'a privée de la garantie tenant à pouvoir bénéficier d'un débat oral et contradictoire sincère ; contrairement à ce qu'affirme le ministre, une consultation sur place de l'ensemble de ces documents n'a pu raisonnablement être opérée, en une seule journée, par la vérificatrice, qui les a nécessairement emportés, sans lui délivrer l'état détaillé préconisé par la doctrine administrative ;

- le rehaussement afférent aux avances consenties sans intérêts à deux sociétés n'est pas fondé, dès lors que le taux d'intérêts retenu par l'administration pour reconstituer le montant des produits non comptabilisés à ce titre est excessif ; il serait, à son sens, plus logique de retenir les taux Euribor moyens en vigueur en 2014 et en 2015, à savoir, respectivement, 0,475 % et 0,168 % ;

- le chef de rectification se rapportant à un achat de marchandises regardé, à partir de simples suppositions et non sur des constats, comme non justifié n'est pas fondé, la vérificatrice ayant elle-même constaté la présence des marchandises en cause dans son entrepôt, ce que l'administration a expressément reconnu ; en outre, ce rehaussement n'est pas cohérent avec l'amende qui lui avait été infligée à raison de paiements en espèces portant précisément sur l'intégralité du prix facturé pour cette commande, comme l'a constaté le service vérificateur ;

- contrairement à ce qu'a estimé l'administration, la prise à bail d'un local commercial situé à Beauvais, puis sa sous-location à une autre société, à l'origine de la créance liée à des impayés de loyer répondait bien à un intérêt pour son exploitation ; dès lors que l'irrécouvrabilité de cette créance a été suffisamment établie, l'administration n'était pas fondée à remettre en cause la déductibilité de la somme correspondante en tant que perte sur créance irrécouvrable ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif et retenu l'administration, elle a produit des éléments de nature à justifier dans son principe et son montant la provision pour créances douteuses qu'elle a enregistrée dans sa comptabilité ;

- la mise à la disposition de trois de ses salariés de véhicules pour un usage exclusivement professionnel a été regardée à tort par l'administration, dont la position n'est d'ailleurs pas étayée par des constatations précises, comme constituant un avantage en nature devant être réintégré à ses résultats imposables des exercices en cause ;

- la majoration de 40 % prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts, appliquée aux droits supplémentaires d'impôt sur les sociétés résultant de la remise en cause de la déduction d'une perte sur créance irrecouvrable et de la réintégration de remboursements de frais de déplacements, n'est pas fondée, faute pour l'administration de rapporter la preuve, qui lui incombe, de l'intention d'éluder l'impôt qu'elle lui prête ; la documentation de base n° 13 N 1223, dans sa version à jour au 1er novembre 1990 conforte son analyse ;

- les amendes qui lui ont été infligées sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, pour absence de désignation des bénéficiaires de revenus regardés comme distribués, ont été prononcée à l'issue d'une procédure irrégulière, faute pour l'administration de lui avoir notifié une demande de désignation des bénéficiaires lui exposant, dans des termes non ambigus, les conséquences susceptibles d'être tirées d'un défaut ou d'une insuffisance de réponse, ce qui l'a induite en erreur, et faute pour l'administration de lui avoir préalablement imparti un délai de 30 jours pour présenter des observations ;

- ces amendes ne sont pas fondées, dès lors qu'elle a apporté, dans le délai qui lui avait été imparti par la mise en demeure, une réponse suffisamment précise ; les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'autorisaient d'ailleurs à garder le silence, sans s'exposer au prononcé de ces amendes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 août 2023, et par des mémoires, enregistrés le 1er décembre 2023 et le 2 janvier 2024, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut à ce que la cour constate qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête à concurrence du dégrèvement de 446 euros prononcé en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de cette requête.

Il soutient que :

- dès lors que la vérificatrice n'a emporté aucun des documents qui lui ont été présentés durant le contrôle, lors de sa dernière intervention, mais qu'elle les a seulement consultés sur place, comme en attestent les termes de la proposition de rectification adressée à la SARL El Amen, le moyen tiré, par cette dernière, qui n'apporte aucun élément tangible au soutien de son allégation, de l'absence de restitution de documents par le service en temps utile pour qu'elle puisse bénéficier d'un véritable débat oral et contradictoire, situation dont elle n'a d'ailleurs aucunement fait état dans ses observations, ne peut qu'être écarté ;

- suite au prononcé du jugement attaqué, l'administration a indiqué au tribunal administratif abandonner, dans le cadre de la contestation du chef de rectification afférent aux avances consenties sans intérêts, les taux d'intérêts initialement retenus par le service et admettre qu'il leur soit substitué les taux proposés par l'appelante ; le dégrèvement correspondant ayant été prononcé, ce chef de rectification n'est plus en litige ;

- dès lors que les factures produites au cours du contrôle en ce qui concerne cette opération ne mentionnent pas la taxe sur la valeur ajoutée y afférente, ni l'application du régime d'auto-liquidation de la taxe, qu'elles ont manifestement été transmises par fax et qu'elles ont donné lieu à des paiements en espèces, l'administration était fondée à retenir qu'aucune justification probante ne permettait de retenir que ces factures se rapportaient à un achat effectif de marchandises, à savoir de polos pour homme, ni que la dépense correspondante, portée en charges, avait été exposée dans l'intérêt de l'exploitation de la SARL El Amen, alors que l'examen des tickets de caisse délivrés par cette société révèlent que les articles concernés par ces factures, qu'aucun bon de livraison ne vient appuyer, ont été très peu vendus durant la période vérifiée, que le magasin exploité par cette société ne comporte d'ailleurs pas de rayon affecté aux vêtements et que le montant des factures en cause excède celui des marchandises stockés dans la catégorie " bazar " ;

- c'est à bon droit que l'administration a estimé que les créances de loyers comptablement constatées comme irrécouvrables ne pouvaient être admises en déduction au titre de l'exercice clos en 2014 ;

- comme l'ont retenu à juste titre les premiers juges, alors que la SARL El Amen ne produit pas de bail de sous-location ayant date certaine pour justifier de la créance de loyers ayant donné lieu à l'enregistrement de la provision pour créances douteuses dont la déduction a été remise en cause, ainsi que de l'intérêt pour son exploitation qu'a pu revêtir la prise en location d'un local commercial à Beauvais, l'administration doit être regardée comme ayant rapporté la preuve de ce que cette opération correspondait à un acte anormal de gestion ;

- l'administration a suffisamment établi que les quatre véhicules de tourisme affectés par la SARL El Amen à son personnel de direction et à ses commerciaux n'avaient pu être mis, à temps plein, à la disposition des autres membres du personnel de l'entreprise, dont les fonctions d'employés de magasin ne rendaient pas nécessaire l'utilisation d'un véhicule de tourisme, et que ces véhicules devaient, dès lors, être regardés comme utilisés par les intéressés pour des besoins d'ordre privé, laquelle utilisation constituait la distribution d'avantages en nature occultes ;

- en retenant que la SARL El Amen, d'une part, ne pouvait raisonnablement ignorer qu'elle déduisait de son résultat imposables des pertes étrangères à sa gestion commerciale normale et, d'autre part, avait pris en charge, de façon répétée et à hauteur de montants importants, le versement d'indemnités de déplacement pour lesquels elle n'était pas en mesure de justifier d'un engagement réel et à titre professionnel, par ses salariés, l'administration a suffisamment établi l'intention d'éluder l'impôt qui a animé cette société et, par suite, le bien-fondé de la majoration de 40% prévue au a de l'article 1729 du code général des impôts appliquée à ces deux chefs de rectification ;

- alors que la demande de désignation adressée à la SARL El Amen sur le fondement des dispositions de l'article 117 du code général des impôts ne comportait aucune ambiguïté quant à son objet, quelle mentionnait le délai imparti pour y apporter réponse et qu'elle précisait la sanction encourue à défaut de réponse vraisemblable et précise, la procédure prévue par ces dispositions a été régulièrement mise en œuvre ;

- dès lors que la SARL El Amen n'a pas apporté de réponse à cette demande dans le délai imparti, les observations formulées par elle sur la proposition de rectification concernant seulement les droits supplémentaires mis à sa charge et ne comportant pas d'élément d'information permettant d'identifier précisément les bénéficiaires des avantages occultes consistant en la mise à disposition de véhicules de tourisme, l'administration était fondée à prononcer l'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts, qui est légalement fondée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. La société à responsabilité limitée (SARL) El Amen, dont le siège est situé à Creil (Oise), a pour objet social " la vente de produits manufacturés, vêtements, chaussures, bijoux de fantaisie, articles de décoration, de peinture, de voilages, d'alimentation générale, de bazar, de rideaux, tissus d'ameublement " ainsi que " la vente sédentaire et ambulante de produits alimentaires et non alimentaires ". Cette société exploite, à Creil, un supermarché d'alimentation générale sous l'enseigne " Europrimeurs ". Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période s'étendant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. A l'issue de ce contrôle, l'administration a estimé qu'il y avait lieu de rectifier les résultats imposables réalisés par la SARL El Amen au titre des exercices clos les 31 décembre 2014 et 2015 en ce qui concerne, notamment, des avances sans intérêts accordées à d'autres sociétés, des charges et des provisions pour créances douteuses regardées comme non justifiées, ainsi que des avantages en nature accordés à des salariés. L'administration a fait connaître à la SARL El Amen son analyse sur ces différents points par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 19 décembre 2017.

2. La SARL El Amen a présenté des observations qui n'ont convaincu l'administration qu'à reconsidérer très partiellement son appréciation et la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, consultée à la demande de la société, a émis un avis favorable au maintien de l'essentiel des rehaussements. Dans ces conditions, l'administration, qui a décidé de suivre l'avis de la commission, a mis en recouvrement, le 14 juin 2019, les suppléments d'impôt sur les sociétés qu'elle a entendu maintenir à la charge de la SARL El Amen et qui s'élèvent à la somme de 128 732 euros en droits et pénalités. Ont également été mises en recouvrement à la même date des amendes prononcées sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, à hauteur d'une somme de 23 419 euros, pour absence de désignation des bénéficiaires de distributions occultes, ainsi qu'une amende pour paiements en espèces non autorisés, s'élevant à 4 550 euros. La SARL El Amen a présenté deux réclamations, au vu desquelles l'administration a décidé d'abandonner le recouvrement de la seule amende relative aux paiements en espèces. La société a alors porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens en lui demandant, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015, d'autre part, de prononcer la décharge de l'amende fiscale qui lui a été infligée en application des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts au titre des années 2014 et 2015, enfin, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

3. Par un jugement du 8 juin 2023, le tribunal administratif d'Amiens, d'une part, a rejeté les conclusions de la demande à fin de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL El Amen a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015 et des pénalités correspondantes, à l'exception de celles concernant la réintégration dans son résultat imposable des avances sans intérêts consenties à hauteur de 23 377 euros et 38 873 euros au titre des exercices clos en 2014 et 2015, d'autre part, a prescrit, avant dire-droit, un supplément d'instruction aux fins, pour l'administration, de préciser, pour chacun des exercices clos en 2014 et 2015, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, le taux d'intérêt que la SARL El Amen aurait pu obtenir d'un établissement financier ou d'un organisme assimilé auprès duquel elle aurait placé, dans des conditions analogues, des sommes d'un montant équivalent à celui des avances consenties, par ailleurs, a rejeté les conclusions de cette demande tendant à la décharge de l'amende et, enfin, a réservé jusqu'en fin d'instance tous droits et moyens sur lesquels il n'a pas expressément statué. La SARL El Amen relève appel de ce jugement en tant qu'il rejette une partie des conclusions de sa demande.

Sur l'étendue du litige :

4. Par une décision prise le 9 août 2024, après l'introduction de la requête, l'administratrice de l'Etat chargée de la direction de contrôle fiscal Nord a prononcé le dégrèvement, à concurrence des sommes de 408 euros en droits et 38 euros en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la SARL El Amen a été assujettie au titre des exercices clos en 2014 et 2015. Or, d'une part, par un jugement du 16 novembre 2023, le tribunal administratif d'Amiens, à l'issue du supplément d'instruction qu'il avait prescrit par le jugement du 8 juin 2023 attaqué, a constaté qu'il n'y avait pas lieu, à concurrence de ces montants, de statuer sur les conclusions de la demande de la SARL El Amen tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces suppléments d'impôt. D'autre part, la requête de la SARL El Amen doit être regardée comme exclusivement dirigée contre le jugement du 8 juin 2023 en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de sa demande. Dans ces conditions, le dégrèvement prononcé par la directrice de contrôle fiscal Nord, bien qu'intervenu après l'introduction de la requête, ne concerne pas les conclusions dont la cour est saisie. Par suite, l'exception de non-lieu à statuer avancée par le ministre doit être écartée.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

5. En vertu du I de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable qui fait l'objet d'une vérification de comptabilité satisfait à l'obligation de représentation des documents comptables en remettant au début des opérations de contrôle, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables. En vertu du même I, l'administration détruit, avant la mise en recouvrement, les copies des fichiers transmis. Par ailleurs, si, en vertu des dispositions de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, les opérations de vérification de la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables se tiennent sur place, le vérificateur peut cependant, avec l'accord écrit du contribuable et moyennant l'établissement d'un reçu détaillé, emporter certains documents dans les bureaux de l'administration, qui en devient ainsi dépositaire, à condition de ne pas priver le contribuable de la garantie tenant à pouvoir bénéficier d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur.

6. Il ressort des mentions de la proposition de rectification qui a été adressée le 19 décembre 2017 à la SARL El Amen que les représentants de celle-ci ont remis à la vérificatrice, à l'occasion de sa première intervention sur place, le 4 mai 2017, une copie, ce qui n'a pu vicier la vérification, des fichiers contenant les écritures comptables se rapportant aux exercices compris dans la période vérifiée. En revanche, si la même proposition de rectification indique, par ailleurs, que divers documents comptables, à savoir les pièces justificatives appuyant l'écriture de provision dont la déductibilité a été remise en cause à l'issue du contrôle, ainsi que des avis de taxes annexes, des documents se rapportant à des versements libératoires, le contrat d'un apprenti, de même que divers autres documents, ont été présentés à la vérificatrice, aucune des mentions de la proposition de rectification ne révèle que tout ou partie de ces documents aurait été emporté dans les locaux de l'administration, ce que le ministre conteste expressément. Or, la SARL El Amen n'apporte aucune précision factuelle à l'appui de son allégation relative à l'emport irrégulier dont elle fait état, sauf à soutenir que le volume des documents présentés s'opposait à une consultation sur place, ni ne précise celui ou ceux des documents présentés à la vérificatrice dont elle aurait pu être privée pour présenter son argumentation dans le cadre du débat oral et contradictoire avec celle-ci. D'ailleurs, il est constant que la SARL El Amen n'a aucunement fait état, dans les observations qu'elle a formulées sur la proposition de rectification qui lui a été notifiée, d'une difficulté liée à la privation d'un document utile à son analyse, mais qu'elle a pu y critiquer, au moyen d'une motivation argumentée, le bien-fondé des rehaussements envisagés, n'étant ainsi privée d'aucune garantie. Dans ces conditions, alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne faisait obstacle à ce que la vérificatrice prenne des photographies des pages utiles des documents qui lui ont été présentés et alors que les dispositions de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales n'imposent pas à l'administration de restituer au contribuable vérifié la copie des fichiers contenant ses écritures comptables, mais seulement de les détruire avant la date de mise en recouvrement des impositions, et que la SARL El Amen n'allègue pas que l'administration serait demeurée en possession de ses fichiers après cette date, le moyen tiré de l'absence de restitution, en temps utile pour permettre la tenue d'un réel débat oral et contradictoire, de fichiers et documents comptables emportés par la vérificatrice ne peut qu'être écarté.

Sur le bien-fondé des suppléments d'impôt sur les sociétés en litige :

En ce qui concerne les avances consenties sans intérêts :

7. Il résulte de l'instruction et notamment des éléments, non contestés, avancés par le ministre qu'à la suite du supplément d'instruction prescrit par les premiers juges, l'administration a, en définitive, accepté d'utiliser, pour déterminer les sommes qu'il convenait de réintégrer aux résultats imposables de la SARL El Amen au titre des avances consenties sans intérêts, les taux d'intérêts proposés par la société en lieu et place de ceux initialement mis en œuvre par le service et qu'elle a, en conséquence, prononcé le dégrèvement mentionné au point 4. Dès lors que la SARL El Amen n'avait pas, devant les premiers juges, contesté ce chef de rectification dans son principe, mais seulement dans son montant, au motif que les taux d'intérêts utilisés par le service étaient excessifs, il n'existe plus de litige concernant ce chef de rectification et le moyen tenant à la critique de la pertinence des taux d'intérêts initialement retenus par l'administration pour asseoir les impositions en litige est inopérant.

En ce qui concerne la remise en cause de la déductibilité, en tant que charge, d'un achat de marchandises :

8. En vertu du 1° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, qui comprennent notamment les frais généraux de toute nature. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application de ces dispositions du 1° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 de ce code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité.

9. La SARL El Amen a porté, dans la comptabilité se rapportant à son exercice clos en 2015, en tant que charge de cet exercice, une somme de 65 000 euros. Pour justifier cette écriture, la société a produit à la vérificatrice des factures se rapportant à l'achat de 26 000 polos pour homme au prix unitaire de 2,5 euros, auprès d'une société exerçant son activité au Portugal. Après avoir constaté que ces factures avaient été manifestement adressées à la SARL El Amen par télécopie, qu'elles ne faisaient aucunement mention de la taxe sur la valeur ajoutée, ni de l'application du régime d'auto-liquidation de la taxe, mais qu'elles comportaient, en revanche, une mention selon laquelle leur paiement avait été effectué en espèces, ce qui ne permettait pas d'établir la traçabilité de ces paiements, la vérificatrice a estimé que les factures ainsi produites, qui n'étaient appuyées par aucun élément, tel un bon de livraison, permettant de tenir pour établie la livraison des marchandises désignées, ne pouvaient suffire à admettre la déduction, en tant que charge, de cette dépense. En outre, la vérificatrice a relevé, après avoir examiné les tickets de caisse présentés par la SARL El Amen au cours du contrôle, que cette société avait vendu une quantité très faible de ces articles au cours de l'année 2015, à savoir 3 unités, et que le magasin exploité par cette société ne comportait pas de rayon réservé aux vêtements, alors d'ailleurs que l'activité de ce magasin portait essentiellement sur la vente de produits alimentaires. Enfin, le service a relevé que, si la SARL El Amen avait indiqué, au cours du contrôle, que les polos achetés figuraient, dans ses stocks, dans la sous-famille " Bazar ", il ressortait de la comptabilité présentée que la valeur du stock de cette sous-famille s'élevait à 50 761 euros, ce qui s'avérait incompatible avec l'entrée, dans ce stock, des achats en cause, pour un prix supérieur à la valeur de ce stock.

10. Les éléments ainsi relevés par la vérificatrice, tels qu'exposés au point précédent, ne résultent pas de simples suppositions, mais, comme il vient d'être dit, de constats réalisés, sur place et lors de l'examen des documents comptables, au cours du contrôle dont la SARL El Amen a fait l'objet. Ainsi, eu égard à l'absence, dans les stocks de la société, des articles mentionnés par les factures en cause, quand bien même la vérificatrice aurait pu constater la présence de quelques cartons de polos dans le magasin, au très faible volume de ventes de cet article au cours de l'exercice concerné, ainsi qu'à l'absence de production de tout élément de nature à justifier de la livraison effective des marchandises, l'administration était fondée à remettre en cause la déductibilité, en tant que charge, de la dépense ainsi facturée à la SARL El Amen. Contrairement à ce qu'allègue cette dernière, ce chef de rectification n'est aucunement incompatible avec l'infliction, par l'administration, d'une amende à cette société à raison de paiements en espèces non autorisés, alors que le service n'a relevé l'absence de traçabilité des paiements en espèces qu'à titre surabondant, sans mettre en doute l'existence même de ces paiements, et alors d'ailleurs que cette amende n'a, en définitive, pas été mise en recouvrement.

En ce qui concerne la remise en cause de la déductibilité de pertes sur créances irrécouvrables :

11. En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale. Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. Il appartient, en règle générale, à l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, d'établir les faits sur lesquels elle se fonde pour invoquer ce caractère anormal.

12. Au cours de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL El Amen, la vérificatrice a constaté que cette société avait comptabilisé en déduction du résultat imposable de son exercice clos le 31 décembre 2014, en tant que perte sur créances irrécouvrables, la somme totale de 99 463 euros, le libellé de cette opération faisant état d'une défaillance de la SARL O Dépôt des Affaires (ODA). Il a alors été porté à la connaissance de la vérificatrice que cette dernière société avait pris en location gérance, à compter du 1er juillet 2011 et moyennant un loyer mensuel de 7 500 euros, un fonds de commerce appartenant à la SARL El Amen et exploité dans un immeuble que celle-ci prenait en location auprès de la société Drye. La vérificatrice a constaté que la SARL El Amen avait refacturé, au cours de l'exercice clos en 2014, à la SARL ODA le loyer mensuel de 856,80 euros dont elle était redevable auprès de la société Drye.

13. Pour justifier l'inscription en perte, comme irrécouvrables, des créances de loyers qu'elle détenait sur la SARL ODA, après reprise de la provision pour créance douteuse antérieurement constituée, la SARL El Amen a fait état du placement de sa débitrice en liquidation judiciaire à compter du 11 juin 2014, ainsi que le révélait la publication effectuée au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC) intervenue le 26 juin 2014.

14. Pour regarder cette écriture comptable comme procédant d'un acte anormal de gestion et la réintégrer au résultat imposable de l'exercice clos en 2014, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification adressée le 19 décembre 2017 à la SARL El Amen et de la réponse apportée, le 23 mars 2018, à ses observations, qu'aucune facture n'avait été produite au cours du contrôle pour justifier de la réalité de la créance de loyers revendiquée et que la SARL El Amen n'avait pas suffisamment justifié, par la production de la copie de cinq lettres de relance adressées, à l'exception d'une seule, en courrier simple sur une période couvrant les années 2012 et 2013, de ses diligences à l'égard de la SARL ODA, afin d'obtenir le paiement de la somme qu'elle lui estimait due à ce titre, ni à l'égard du liquidateur judiciaire de cette société pour déclarer sa créance, qu'elle détenait, en réalité, sur cette société depuis 2011, puisqu'il est apparu qu'aucun paiement des loyers en cause n'a pu être identifié dans la comptabilité de la SARL El Amen. L'administration a retenu, dans ces conditions, qu'à lui seul, le placement en liquidation judiciaire de la SARL ODA, dont les parts sociales étaient d'ailleurs détenues par les associés de la SARL El Amen, ne pouvait justifier l'inscription comptable en perte, comme irrécouvrable, de la somme en cause, de sorte que la SARL El Amen devait être regardée comme s'étant appauvrie à des fins étrangères à son intérêt en consentant un abandon de créance injustifié à la SARL ODA.

15. Si la SARL El Amen soutient que le placement de la SARL ODA en procédure de liquidation judiciaire justifiait, par lui-même, la constitution d'une provision pour créance douteuse et si elle fait observer que la provision constituée, à ce titre, en 2012 concernant la même créance de loyer n'a pas été remise en cause à l'issue d'un précédent contrôle, d'une part, l'écriture comptable remise en cause par l'administration consiste en une inscription en perte de la créance, dont le caractère irrécouvrable ne peut être déduit du seul placement de la débitrice en liquidation judiciaire et, d'autre part, l'absence de remise en cause de la provision constituée, en ce qui concerne la même créance, à la clôture d'un exercice antérieur demeure sans incidence sur le bien-fondé de la rectification contestée. En outre, contrairement à ce que soutient la SARL El Amen, il lui incombait, en vertu de l'article L. 641-3 du code de commerce, même dans sa rédaction issue de l'ordonnance n°2014-326 du 12 mars 2014, de déclarer sa créance auprès du liquidateur, dans les conditions prévues aux articles L. 622-24 et suivants de ce code, ce qu'elle n'établit par aucun élément avoir fait et, si elle allègue que le liquidateur avait, indépendamment de toute diligence de sa part, connaissance de sa créance, elle ne l'établit par aucune pièce, alors que l'exercice, par l'administration, de son droit de communication auprès du greffe du tribunal de commerce de Compiègne n'a pas permis de confirmer cette assertion. Enfin, si la SARL El Amen soutient qu'elle avait intérêt à ce que la SARL ODA puisse poursuivre, en dépit de ses difficultés, l'exploitation du fonds de commerce pris par elle en location gérance, à telle enseigne qu'elle a obtenu, le 16 mai 2014 le versement, par cette société, d'une " indemnité d'expropriation " de 149 860 euros, elle n'apporte aucune précision, ni aucun élément probant au soutien de son allégation sur ce dernier point. Et, dans une situation dans laquelle la SARL ODA ne lui avait adressé aucun paiement au titre de ses échéances de loyer depuis son entrée en possession du fonds de commerce donné en location gérance en 2011, ces éléments, à les supposer même établis, ne peuvent suffire à justifier qu'elle ait purement et simplement abandonné, à la clôture de son exercice comptable 2014, le recouvrement de sa créance de loyers, sans pouvoir justifier d'aucune diligence de sa part au cours de cet exercice afin d'obtenir le paiement de son dû, ni d'aucune recherche d'une issue négociée permettant de préserver une partie de sa créance moyennant un aménagement de ses modalités de règlement.

16. Dans ces conditions, en faisant valoir les éléments exposés au point 14, le ministre doit être regardé comme rapportant la preuve, qui lui incombe, de ce que l'abandon, par la SARL El Amen, de sa créance de loyers procède d'un acte anormal de gestion. Par suite, l'administration était fondée à réintégrer la somme correspondante dans le résultat imposable réalisé par cette société au titre de son exercice clos en 2014.

En ce qui concerne la remise en cause de la déductibilité d'une provision pour créances douteuses :

17. En vertu du 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, le bénéfice net est établi, notamment, sous déduction des provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice.

18. Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provisions et déduire des bénéfices imposables des sommes correspondant à des pertes ou charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par l'entreprise, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent en outre comme probables eu égard aux circonstances de fait constatées à la date de clôture de l'exercice, et qu'enfin, elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise. Il appartient au contribuable, pour l'application de ces dispositions de l'article 39 du code général des impôts et quelle que soit la procédure de rectification mise en œuvre à son égard, de justifier tant du montant des provisions qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 de ce code, que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que les pertes ou charges en cause ne sont pas déductibles par nature, qu'elles sont dépourvues de contrepartie, qu'elles ont une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

19. La SARL El Amen a pris en location, au cours de l'année 2013, un immeuble affecté à usage commercial offrant une surface totale de 1 200 m² et situé à Beauvais, moyennant le paiement d'un loyer annuel de 96 000 euros hors taxes. Cette société a mis ce local à la disposition de la SARL New Décor, à laquelle elle a refacturé, jusqu'à la fin de l'année 2015, ce loyer, moyennant une marge symbolique, pour un montant annuel de 97 200 euros hors taxes, afin que cette société puisse y exploiter un fonds de commerce de bazar. Au cours de l'année 2014, la SARL New Décor a cessé le paiement de ce loyer, en faisant état de difficultés de trésorerie. Cette société a ensuite été placée en procédure de redressement judiciaire à compter du 29 septembre 2015, puis en liquidation judiciaire, à compter du 3 novembre 2015.

20. Dans ce contexte, au cours de la vérification dont la SARL El Amen a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que cette société avait constitué, à la clôture de son exercice comptable 2014, une provision pour créances douteuses d'un montant total de 139 054,07 euros dont la majeure partie concernait ses créances de loyers à l'égard de la SARL New Décor, le montant de la provision ayant été fixé à hauteur de 80 % du montant de ces créances. Il est apparu, en outre, que cette provision avait été portée, à la clôture de l'exercice comptable 2015, à 260 011,18 euros, les créances de loyers détenues à l'égard de la SARL New Décor demeurant celles concernées pour l'essentiel par cette provision, dont le montant a été fixé à hauteur de 100 % du montant de ces créances.

21. Pour remettre en cause la déductibilité de cette provision du résultat de chacun des deux exercices en cause, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification adressée à la SARL El Amen le 19 décembre 2017, que la réalité même de la perte dont la probabilité avait été invoquée pour justifier cette écriture comptable ne pouvait être tenue pour établie, en l'absence de production du bail liant cette société à la SARL New Décor et en l'absence de justification, par la SARL El Amen, qui s'était limitée à produire la copie de lettres de relance expédiées en courrier simple, de l'accomplissement de diligences destinées à obtenir le paiement de son dû. L'administration a tiré de cette analyse la conclusion que les conditions auxquelles le 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts subordonne l'admission de telles provisions en déduction du résultat des deux exercices en cause n'étaient pas satisfaites. L'administration a retenu, en outre, que la déduction pratiquée ne procédait pas, pour la SARL El Amen d'un acte relevant de sa gestion normale, dès lors que l'intérêt, pour l'exploitation de cette société, entièrement conduite dans le cadre d'un commerce à dominante alimentaire et dans le bassin creillois, qu'était susceptible de revêtir la prise en charge d'un loyer afférent à un local situé à Beauvais et exploité, pour les besoins d'une activité de commerce de bazar, par une société avec laquelle elle n'avait pas de lien capitalistique ni de relations d'affaires, mais seulement un associé en commun, ne pouvait être tenu pour établi.

22. A l'appui des observations qu'elle a formulées sur cette proposition de rectification, la SARL El Amen a produit un bail, conclu par elle avec les propriétaires du local exploité par la SARL New Décor, et a exposé que cet acte, ainsi que le bail de sous-location conclu par elle avec cette dernière, qu'elle a également produit, s'inscrivait dans le contexte d'un projet, étudié de longue date par elle et consistant à ouvrir un magasin à dominante alimentaire à Beauvais et, dans le même temps, conformément à son objet social, à développer une activité de commerce de bazar à Creil, dans les locaux accueillant actuellement son entrepôt. La SARL El Amen ajoutait que son gérant et associé avait estimé préférable, pour des raisons de prudence, d'implanter l'activité de bazar à Beauvais par le moyen d'une autre société, la SARL New Décor, qu'il avait créée dans ce but. La SARL El Amen ajoute enfin, au soutien de sa requête, que l'administration n'est pas fondée à faire valoir que le bail de sous-location conclu par elle avec la SARL New Décor n'aurait pas date certaine, puisqu'un tel bail aurait pu être verbal, et elle précise que le bail conclu avec les propriétaires des locaux le 31 mai 2013, et soumis le 4 juin 2013 à la formalité d'enregistrement, versé à l'instruction, a d'ailleurs stipulé, au titre XVII, que " le preneur informe le bailleur qu'il va sous-louer les locaux à la société New Décor en formation dont l'objet est le négoce de produits non alimentaires et accessoirement alimentaires ".

23. Dans ces conditions, alors que la SARL El Amen a produit à l'administration, fût-ce à l'appui de ses observations, un bail la liant à la SARL New Décor et alors qu'il n'est pas contesté que cette dernière a honoré ses dettes de loyer jusqu'en 2014, l'existence même de ce lien contractuel doit être tenue pour établie, sans qu'ait d'incidence la circonstance que ce bail de sous-location n'a pas été soumis à une formalité permettant de lui donner date certaine. En outre, si la SARL El Amen, qui a seulement produit à l'administration quelques lettres de relance adressées en courrier simple et qui n'a pas versé, à ce titre, d'autre justification à l'instruction, ne peut être regardée comme établissant avoir accompli, au cours de l'exercice 2014, des diligences suffisantes pour obtenir de la SARL New Décor le paiement de ses dettes de loyer, ni comme ayant suffisamment justifié de la réalité, au 31 décembre 2014, des difficultés de trésorerie auxquelles était confrontée cette société, de sorte que les conditions de déduction prévues au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ne peuvent être regardées comme satisfaites pour ce qui concerne la provision en cause à la clôture de cet exercice, le placement de la SARL New Décor en liquidation judiciaire à compter du 3 novembre 2015 suffisait, dans les conditions qui viennent d'être rappelées, dans lesquelles la réalité de la créance de loyers détenue par la SARL El Amen sur la SARL New Décor doit être tenue pour établie, à justifier la déduction, au 31 décembre 2015, de la provision en cause, qui doit, au titre de cet exercice clos en 2015, être regardée comme justifiée, dans son principe comme dans son montant, à concurrence de 100 % des créances cumulées de loyers détenues sur la SARL New Décor depuis la date de cessation de ses paiements.

24. Enfin, la SARL El Amen ayant, ainsi qu'il vient d'être dit au point précédent, rapporté la preuve, qui lui incombe, de la déductibilité et de l'exacte imputation comptable de la provision inscrite par elle au 31 décembre 2015, le ministre n'établit pas que cette écriture comptable avait une contrepartie dépourvue d'intérêt pour cette société en faisant valoir que la sous-location d'un local commercial n'entrait pas dans son objet social, ni que l'exploitation d'un bazar à Beauvais était sans intérêt pour son exploitation, jusqu'alors limitée à une activité de commerce à dominante alimentaire à Creil, dès lors, d'une part, qu'un commerçant a la liberté de choix des modalités d'exploitation d'un local commercial et qu'il n'incombe pas à l'administration de s'immiscer dans ce choix de gestion en tant que tel et, d'autre part, que les raisons avancées par la SARL El Amen, exposées au point 22, tenant à sa volonté de diversifier, à la fois la nature, dans le cadre de son objet social qui prévoit l'activité de bazar, et la localisation de ses activités commerciales, en ayant temporairement recours à une autre société, créée par son dirigeant, pour ne pas en assumer initialement les risques, révèlent que ce choix de gestion répondait à un intérêt pour son exploitation.

25. Il résulte de ce qui vient d'être dit aux deux points précédents que la SARL El Amen est fondée à demander la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015 et résultant de la réintégration, dans le résultat imposable de cet exercice, de la provision pour créance douteuse se rapportant à sa créance de loyers sur la SARL New Décor.

En ce qui concerne les avantages occultes consentis au personnel :

26. En vertu du c de l'article 111, les rémunérations et avantages occultes, notamment, sont considérés comme des revenus distribués. Il en va ainsi des avantages en nature accordés à des membres de son personnel par une société qui ne les a pas inscrits en comptabilité sous une forme explicite en méconnaissance de l'article 54 bis du code général des impôts et qu'elle n'est ainsi pas autorisée à déduire de ses résultats imposables.

27. A l'issue de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL El Amen, l'administration a estimé que les quatre véhicules de tourisme affectés, par cette société, à son personnel de direction et à ses commerciaux ne pouvaient être regardés comme utilisés à temps plein pour des motifs professionnels, eu égard à la nature des fonctions de leurs attributaires, de sorte que ces véhicules étaient nécessairement utilisés pour des motifs d'ordre privé et qu'une partie de la mise à disposition de ces véhicules devait être regardée comme correspondant à un avantage en nature. Après avoir constaté que la SARL El Amen n'avait pas comptabilisé cet avantage sous une forme explicite, conformément à l'article 54 bis du code général des impôts, l'administration a regardé celui-ci comme ayant un caractère occulte et, par suite, comme constituant un revenu distribué insusceptible d'être admis en déduction, en tant que charges, du résultat imposable des exercices concernés. Afin de déterminer les sommes qu'il convenait de réintégrer à ces résultats, l'administration a évalué l'avantage en cause en utilisant le forfait de la sécurité sociale. Sur cette base et au vu des observations formulées par la SARL El Amen, l'administration a réintégré, à ce titre, la somme de 12 072 euros au résultat de l'exercice clos en 2014 et la somme de 11 347 euros au résultat de l'exercice clos en 2015.

28. En se bornant à alléguer que, pour retenir que les véhicules mis à la disposition de ses salariés étaient utilisés pour partie à des fins privées, l'administration n'a procédé à aucune constatation sur place des modalités concrètes d'utilisation de ces véhicules, qu'elle avait indiqué, au cours de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet, que cette utilisation était exclusivement professionnelle et que les trois salariés concernés disposaient chacun d'un véhicule personnel, la SARL El Amen ne critique pas sérieusement les éléments, exposés au point précédent, sur lesquels l'administration a fondé la rectification en cause et qui sont confortés par le fait, avancé par le ministre devant la cour, que les renseignements portés par la société sur ses déclarations annuelles des salaires révèlent que les membres de son personnel assumaient les fonctions d'employé polyvalent ou de boucherie, de caissier, de caissier polyvalent - magasinier, de boucher, de secrétaire comptable et de responsable de magasin, dont l'exercice ne rendait pas nécessaire l'utilisation, à temps complet, d'un véhicule de tourisme. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a réintégré aux résultats des deux exercices en cause la fraction de l'utilisation de ces véhicules regardée comme constituant un avantage occulte non déductible.

Sur les pénalités :

29. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ".

30. L'administration a assorti de la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts, les suppléments d'impôt sur les sociétés résultant, au titre du seul exercice clos en 2014, des chefs de rectification relatifs à la réintégration, dans le résultat imposable de cet exercice, de la perte sur créance irrécouvrable et d'indemnités kilométriques versées à certains de ses salariés par la SARL El Amen.

31. Pour justifier, ainsi que la charge lui en incombe, l'application de cette majoration à ces suppléments d'impôt sur les sociétés, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification qu'elle a adressée le 19 décembre 2017 à la SARL El Amen, d'une part, que cette société avait porté en déduction de son résultat imposable de l'exercice 2014, en tant que perte sur créance irrécouvrable, une somme d'un montant important, soit 99 463 euros, qu'elle savait correspondre, en réalité, à un abandon de créance insusceptible de se rattacher à sa gestion commerciale normale, mais profitant à une société appartenant à ses associés, et ne pouvoir appuyer par aucune justification. Le même document retient, d'autre part, qu'en comptabilisant, d'une manière répétée, des dépenses comme correspondant à des remboursements de frais dont elle n'était pas en mesure de justifier ni de la réalité, ni de l'engagement à titre professionnel par ses salariés, la SARL Al Amen a délibérément créé une situation donnant l'apparence de sincérité à des débours ne satisfaisant pas aux conditions de déductibilité des charges, contraires à l'intérêt de son exploitation et dont elle n'ignorait ni l'importance, puisqu'elles représentaient près de huit fois le montant de son résultat imposable déclaré, ni l'absence de réalité. Par ces considérations, que le ministre s'approprie en appel, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée qui a animé, s'agissant de ces deux chefs de rectification, la SARL El Amen et, par suite, du bien-fondé de la majoration pour manquement délibéré dont ont été assortis, en application des dispositions précitées du a de l'article 1729 du code général des impôts, les suppléments d'impôt sur les sociétés correspondants. La SARL EL Amen n'est pas fondée à invoquer, à cet égard, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les énonciations de la documentation de base n°13 N 1223, dans sa version à jour au 1er novembre 1990, qui, en tout état de cause, ne comportent pas d'interprétation de la loi fiscale qui soit différente de celle dont le présent arrêt fait application.

Sur l'amende :

32. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale (...), celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759. ". En vertu des dispositions de l'article 1759 du code général des impôts, les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions de l'article 117 du même code, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées.

33. Il résulte de l'instruction que l'administration a, comme il a été dit, regardé comme des revenus distribués, au cours des exercices clos en 2014 et en 2015, en tant qu'avantages occultes, les dépenses portées en charge dans la comptabilité de la SARL El Amen et correspondant à la mise à disposition de quatre véhicules de tourisme à ses salariés. Par la proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 19 décembre 2017, l'administration a invité la SARL El Amen à lui indiquer dans un délai de trente jours, en application de l'article 117 du code général des impôts, l'identité des bénéficiaires des sommes réputées distribuées. L'administration précisait, dans cette proposition de rectification, qu'une absence de réponse de la part de la société ou une réponse tardive, évasive ou inexacte, entraînerait l'application de l'amende de 100 % des sommes irrégulièrement distribuées, qui est prévue par l'article 1759 du code général des impôts. Cette formulation était suffisamment précise pour donner à la SARL El Amen, qui ne conteste pas avoir reçu cette proposition de rectification dans le délai normal d'acheminement du courrier, l'ensemble des éléments d'information utiles pour apporter au service la réponse attendue dans le délai imparti et le fait que cette demande, et non la décision prononçant l'amende prévue à l'article 1759 du code général des impôts seulement envisagée à ce stade, ait été contenue dans la proposition de rectification n'a pas été de nature, par lui-même, à induire cette société en erreur sur l'étendue de ses droits, sur le délai imparti pour répondre à cette demande, ni sur les conséquences susceptibles de résulter d'une absence de réponse ou d'une réponse insuffisante. Il suit de là que le moyen tiré de ce que l'amende contestée a été établie à l'issue d'une procédure irrégulière doit être écarté.

34. La SARL El Amen ne peut utilement, pour critiquer la régularité de la procédure ainsi mise en œuvre par l'administration, invoquer les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour soutenir que cette procédure aurait méconnu son droit à garder le silence.

35. Il n'est pas sérieusement contesté que la SARL El Amen n'a apporté aucune réponse à la demande de désignation, mentionnée au point 33, dans le délai de trente jours qui lui avait été imparti pour ce faire et que les observations qu'elle a présentées, le 15 février 2018, sur la proposition de rectification qui lui avait été adressée le 19 décembre 2017 concernent seulement le bien-fondé du chef de rectification relatif à la réintégration dans ses résultats imposables, en tant qu'avantages occultes, des dépenses liées à la mise à disposition des véhicules en cause, observations par lesquelles elle s'est bornée à rappeler que ces véhicules étaient mis " à la disposition du service ", sans attribution à " une personne unique ", ces assertions ne pouvant être regardées comme constituant une réponse à la demande de désignation qui lui a été faite. Par suite, l'administration était fondée à prononcer, à l'encontre de la SARL El Amen, l'amende égale à 100 % du montant des rectifications effectuées au titre de ce chef de rehaussement, telle que prévue à l'article 1759 du code général des impôts.

36. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL El Amen est seulement fondée, dans la mesure de ce qui a été dit au point 25 à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens n'a fait que partiellement droit à sa demande et à demander la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015 et résultant de la réintégration, dans le résultat imposable de cet exercice, de la provision pour créance douteuse se rapportant à sa créance de loyers sur la SARL New Décor.

Sur les frais de procédure :

37. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme au titre des frais exposés par la SARL El Amen et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La SARL El Amen est déchargée, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2015 et résultant de la réintégration, dans le résultat imposable de cet exercice, de la provision pour créance douteuse se rapportant à sa créance de loyers sur la SARL New Décor.

Article 2 : Le jugement n° 2101539 du 8 juin 2023 du tribunal administratif d'Amiens est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par la SARL El Amen est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL El Amen et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 3 octobre 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : M. HeinisLe président de la formation de jugement,

F.-X. Pin

La greffière,

Signé : S. Cardot

La greffière,

E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Sophie Cardot

1

2

N°23DA01354


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01354
Date de la décision : 17/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SCP DIXIT CAUSA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-17;23da01354 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award