Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Gabrielle a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la restitution de la somme de 3 348 euros au titre d'un crédit d'impôt pour dépenses de recherche de l'exercice clos en 2019.
Par un jugement n° 2007748 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 5 juin 2023, la SARL Gabrielle, représentée par Me Michael Brindel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la restitution de la somme de 3 348 euros au titre d'un crédit d'impôt pour dépenses de recherche de l'exercice clos en 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle doit être regardée comme une entreprise industrielle du secteur du textile, de l'habillement et du cuir, au sens des dispositions du h) du II de l'article 244 quater B du code général des impôts dès lors que son activité consiste en la conception, l'édition, la production et la distribution de linge de maison et que, si la production est confiée à des sous-traitants, elle conserve la propriété de la matière première et des éléments de création ;
- la doctrine administrative publiée au bulletin officiel des finances publiques sous la référence BOI-BIC-RICI-10-10-40 conforte son analyse.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que la société requérante ne constitue pas une entreprise industrielle au motif qu'elle se borne à acheter la matière première destinée à la fabrication de sa collection et sous-traite l'ensemble de la production et qu'elle ne dispose par conséquent d'aucune installation technique ni aucun matériel ou outillage industriel.
Par une ordonnance du 3 avril 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 29 avril 2024 à 12 H 00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Alice Minet, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) Gabrielle, dont le siège est situé à Villeneuve d'Ascq, exerce une activité de commerce de linge de maison. Le 29 juin 2020, elle a sollicité le bénéfice d'un crédit d'impôt en faveur de la recherche sur le fondement de l'article 244 quater B du code général des impôts. Par une décision du 25 août 2020, le service des impôts des entreprises de Roubaix-Sud a rejeté sa demande.
2. La SARL Gabrielle a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille en lui demandant de prononcer la restitution de la somme de 3 348 euros au titre d'un crédit d'impôt pour dépenses de recherche au titre de l'exercice clos en 2019 sur le fondement des dispositions du h) du II de l'article 244 quater B du code général des impôts. La SARL Gabrielle relève appel du jugement du 30 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.
Sur l'application de la loi fiscale :
3. Aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en 2019 : " I. - Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées en application des articles 44 sexies, 44 sexies A, 44 septies, 44 octies, 44 octies A, 44 duodecies, 44 terdecies à 44 septdecies peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année. (...) / ' II. Les dépenses de recherche ouvrant droit au crédit d'impôt sont : (...) / h) Les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections exposées par les entreprises industrielles du secteur textile-habillement-cuir (...) ". En adoptant ces dispositions, le législateur a entendu, par l'octroi d'un avantage fiscal, soutenir l'industrie manufacturière en favorisant les systèmes économiques intégrés qui allient la conception et la fabrication de nouvelles collections. Il en résulte que le bénéfice du crédit d'impôt recherche est ouvert sur le fondement de ces dispositions aux entreprises qui exercent une activité industrielle dans le secteur du textile, de l'habillement et du cuir lorsque les dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections sont exposées en vue d'une production dans le cadre de cette activité. Revêtent un caractère industriel, au sens de ces dispositions, les entreprises du secteur textile-habillement-cuir exerçant une activité de fabrication ou de transformation de biens corporels mobiliers qui nécessite d'importants moyens techniques.
4. Il est constant que la SARL Gabrielle assure la conception d'articles de linge de maison, procède à l'acquisition des matières premières et assure la distribution des produits finis, la fabrication étant entièrement confiée à des sous-traitants. Il en résulte que la société requérante, alors même qu'elle conserve la propriété de la matière première qu'elle confie à ses sous-traitants et des éléments de création, ne dispose d'aucun matériel ou outillage nécessaire à la fabrication ou la transformation des produits qu'elle vend. Dans ces conditions, son activité ne revêt pas un caractère industriel au sens des dispositions ci-dessus rappelées. Par suite, elle n'est pas fondée, sur le terrain de la loi fiscale, à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale lui a refusé le bénéfice du crédit d'impôt recherche prévu en faveur des entreprises du secteur du textile, de l'habillement et du cuir qui exposent des dépenses liées à l'élaboration de nouvelles collections.
Sur le bénéfice de la doctrine administrative :
5. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. (...) ".
6. Si la SARL Gabrielle se prévaut des commentaires administratifs publiés au BOFiP le 13 février 2019 sous la référence BOI-BIC-RICI-10-10-40, la garantie prévue par le premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ne peut être invoquée que pour contester les rehaussements d'impositions auxquels procède l'administration. Le rejet par le service d'une demande de remboursement d'un crédit d'impôt ne constitue pas un rehaussement d'impositions permettant à un contribuable de se prévaloir, sur le fondement de ces dispositions, de l'interprétation administrative de la loi fiscale. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de cet article, de l'interprétation administrative de la loi fiscale mentionnée au BOI-BIC-RICI-10-10-40.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Gabrielle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Gabrielle est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Gabrielle et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Copie en sera adressée à l'administratrice générale des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 19 septembre 2024 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Heinis, président de chambre,
- M. François-Xavier Pin, président assesseur,
- Mme Alice Minet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 octobre 2024.
La rapporteure,
Signé : A. Minet Le président de chambre,
Signé : M. A...
La greffière,
Signé : E Héléniak
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Elisabeth Héléniak
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N°23DA01040