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18/09/2024 | FRANCE | N°23DA01665

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 18 septembre 2024, 23DA01665


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... D... C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2023 par lequel la préfète de l'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français avant l'expiration d'un délai d'un an, et d'autre part, l'arrêté du même jour de la même autorité l'assignant à résidence pour une durée de quaran

te-cinq jours.



Par un jugement n°s 2302516, 2302517 du 3 août 2023, la magistrate dé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... C... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens, d'une part, d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2023 par lequel la préfète de l'Oise l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français avant l'expiration d'un délai d'un an, et d'autre part, l'arrêté du même jour de la même autorité l'assignant à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n°s 2302516, 2302517 du 3 août 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté portant assignation à résidence et a rejeté le surplus de ses conclusions d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 août 2023 et un mémoire en réplique enregistré le 25 janvier 2024, qui n'a pas été communiqué, M. C... B..., représenté par Me Lemos, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français sans délai et de l'interdiction de retour ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2023 par lequel la préfète de l'Oise l'a obligé de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et l'a interdit de retour sur le territoire pour une durée d'un an ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 décembre 2023, la préfète de l'Oise conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. C... B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 9 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 26 janvier 2024 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- et les observations de M. C... B....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... B..., ressortissant brésilien né le 3 septembre 1988 à Caiaponiago (Brésil), déclare être entré en France le 28 mars 2019. A la suite d'un contrôle d'identité et de son placement en retenue pour vérification du droit au séjour, la préfète de l'Oise, par un arrêté du 24 juillet 2023, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français avant l'expiration d'un délai d'un an. Par un arrêté du même jour, la préfète de l'Oise l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par un jugement du 3 août 2023, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a annulé l'arrêté d'assignation à résidence et rejeté le surplus de ses conclusions d'annulation. M. C... B... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai et lui interdisant tout retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai :

2. En premier lieu, M. C... B... soutient qu'il réside en France depuis plus de quatre ans, qu'il s'est continuellement maintenu sur le territoire français depuis cette date et qu'il est inséré professionnellement. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé, non soumis à l'obligation de visa, s'est maintenu sur le territoire français à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire français et n'a entamé des démarches visant à régulariser sa situation administrative qu'en mars 2023. S'il justifie de l'exercice continu d'une activité professionnelle sous couvert de deux contrats à durée indéterminée depuis avril 2019, cette circonstance n'est pas, à elle seule, de nature à justifier de l'intensité et de la stabilité de son insertion sociale ni à établir qu'il aurait transféré le centre de ses intérêts privés et familiaux en France, d'autant plus qu'il est constant qu'il a été embauché sous couvert d'un faux document d'identité portugais. L'intéressé a également indiqué à la fin de son audition par les services de police vivre en concubinage avec une personne de même nationalité que lui qui a un enfant dont il s'occupe. Ces éléments, bien que réitérés à l'audience, sont insuffisants pour établir l'existence de liens familiaux qui feraient obstacle à son éloignement. En outre, il ressort également de son audition qu'il conserve de fortes attaches familiales au Brésil où réside son père et où il a vécu jusqu'à l'âge de trente ans et il n'établit ni même n'allègue être dans l'impossibilité de s'y réinsérer professionnellement. Dans ces conditions, M. C... B... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La détention d'un document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour, d'une attestation de demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour. (...) ". Aux termes de l'article R. 431-12 du même code : " L'étranger admis à souscrire une demande de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour se voit remettre un récépissé qui autorise sa présence sur le territoire pour la durée qu'il précise. Ce document est revêtu de la signature de l'agent compétent ainsi que du timbre du service chargé, en vertu de l'article R. 431-20, de l'instruction de la demande ".

4. Pour soutenir que sa présence en France est régulièrement autorisée, M. C... B... fait valoir que la préfecture des Yvelines aurait enregistré, en mars 2023, sa demande d'admission exceptionnelle au séjour. Néanmoins, le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative décide de prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger qui se trouve dans l'un des cas mentionnés au 2° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ne saurait en aller autrement que lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé, cette circonstance faisant alors obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière. Par suite, la circonstance que l'appelant aurait déposé en mars 2023 une première demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle n'a au demeurant donné lieu à la délivrance d'aucun récépissé compte tenu du caractère incomplet de son dossier ainsi que le confirme un courriel de la préfecture des Yvelines du 31 juillet 2023, n'est pas de nature à faire obstacle à l'adoption d'une obligation de quitter le territoire français par la préfète de l'Oise au motif que l'intéressé s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français.

Sur la décision portant interdiction de retour d'une durée d'un an :

5. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. (...) ". En outre, aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

6. En se bornant à faire valoir que l'interdiction de retour dont il fait l'objet entrave son parcours d'intégration, M. C... B... ne démontre pas l'existence de circonstances humanitaires, seules à même de justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. En dépit de l'absence de menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français et d'une précédente mesure d'éloignement, eu égard à la durée de son séjour et de ses liens avec la France, tels qu'ils ressortent du motif énoncé au point 2, la préfète de l'Oise n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... D... C... B....

Copie en sera adressée à la préfète de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 3 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 septembre 2024.

Le président-assesseur,

Signé : J.-M. Guérin-Lebacq

La présidente de chambre,

présidente-rapporteure,

Signé : M.-P. Viard

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

C. Huls-Carlier

N° 23DA01665 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01665
Date de la décision : 18/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre Viard
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : LEMOS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-18;23da01665 ?
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