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26/06/2024 | FRANCE | N°23DA00980

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 26 juin 2024, 23DA00980


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016.



Par un jugement n° 2100783 du 30 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, réduit de la somme de 2 045 euros la base d'impôt sur le revenu assignée, dans la cat

gorie des revenus fonciers, à M. et Mme B... au titre de l'année 2014, d'autre part, prononcé, dans l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016.

Par un jugement n° 2100783 du 30 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, réduit de la somme de 2 045 euros la base d'impôt sur le revenu assignée, dans la catégorie des revenus fonciers, à M. et Mme B... au titre de l'année 2014, d'autre part, prononcé, dans la mesure de cette réduction de base, la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle les intéressés ont été assujettis au titre de l'année 2014, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 mai 2023, M. et Mme B..., représentés par Me Dedinger, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Amiens, en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction ;

2°) de prononcer, en droits et pénalités, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- en retenant qu'ils n'étaient pas autorisés à imputer un déficit foncier correspondant à des dépenses de travaux exposées avant la date d'établissement, le 9 août 2012, de l'acte notarié constatant l'acquisition, par leurs soins, de l'immeuble sur lequel ces travaux ont été réalisés, l'administration leur a opposé une condition non prévue par la loi, alors que le transfert de propriété était acquis dès la conclusion de la promesse synallagmatique de vente ; la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-RFPI-BASE-20-30-30 prend d'ailleurs en considération, pour regarder une dépense comme déductible, la date de son acquittement et non celle à laquelle les travaux correspondants ont été réalisés ;

- c'est à tort que l'administration a écarté la déduction, en tant que charges de la propriété, des montants de trois factures de travaux de peinture, au motif que ces factures avaient été établies à l'adresse d'un bien immobilier donné par eux en location pour partie et dans lequel ils ont fixé, dans l'autre partie, leur résidence principale et qu'il était impossible de déterminer le lieu exact de réalisation de ces travaux, alors qu'il appartenait à l'administration d'admettre partiellement la déduction de ces dépenses au prorata des surfaces de ces deux parties d'immeuble ;

- les travaux de raccordement au réseau collectif d'assainissement étaient, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, dissociables de l'opération de création de quatre logements dans l'immeuble concerné, dès lors qu'il s'agissait d'une mise aux normes, incluant la mise hors service d'une fosse septique, qui devait, en toute hypothèse, être réalisée ;

- la majoration de 40 % prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, qui a été appliquée aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige au titre des années 2015 et 2016, n'est pas fondée, faute pour l'administration d'apporter la preuve, qui lui incombe, de l'intention délibérée d'éluder l'impôt qu'elle leur prête, dans une situation dans laquelle ils ont bénéficié de dégrèvements importants avant la saisine du tribunal administratif et dans laquelle ils pouvaient, de bonne foi, avoir un doute sur la déductibilité, en tant que charges, des dépenses ayant donné lieu aux rehaussements contestés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- comme l'a retenu à bon droit le tribunal administratif, le déficit foncier correspondant à des travaux réalisés par M. et Mme B..., et dont ils ont d'ailleurs acquitté le prix avant même la date d'établissement, le 9 août 2012, de l'acte notarié constatant l'acquisition, par les intéressés, de l'immeuble concerné, ne pouvait être imputé sur leurs revenus catégoriels des années suivantes ; les intéressés ne sont pas fondés à invoquer les mentions d'un compromis de vente établi sous seing privé le 14 janvier 2012 et qu'ils n'ont, au demeurant, pas produit ; au surplus, les travaux en cause ayant contribué à créer quatre nouveaux logements dans un immeuble principalement affecté à un usage de dépendance et à accroître ainsi la surface habitable de celui-ci, ce qui rend ces travaux assimilables à une construction, à une reconstruction ou à un agrandissement, les dépenses correspondantes ne sont pas déductibles par nature ;

- M. et Mme B... n'apportent aucun élément de nature à établir que les achats de pots de peinture qui leur ont été facturés à l'adresse de leur habitation principale ont été exposés pour la réalisation de travaux dans les appartements qui font l'objet d'une location à la même adresse, ni même dans l'ensemble de l'immeuble ; dès lors que le lieu précis de réalisation des travaux dont il est fait état n'est pas établi, la déduction des dépenses correspondantes a été à bon droit remise en cause par l'administration ;

- M. et Mme B... n'établissent pas que les travaux de raccordement au réseau collectif d'assainissement dont ils font état et qui, au demeurant, leur ont été facturés par une entreprise dont l'activité ne concerne pas ce type de travaux, sont dissociables des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement, consistant en la création de quatre logements, réalisés, en outre, dans l'immeuble concerné, qui était précédemment affecté à un usage principal de dépendance ;

- en retenant qu'une comparaison entre, d'une part, les déclarations de revenus souscrites par M. et Mme B... au titre des années 2015 et 2016 et, d'autre part, les relevés de leurs comptes bancaires se rapportant aux mêmes années avait permis de mettre en évidence une minoration du montant des loyers déclarés par eux au cours de ces années et que l'importance de la minoration constatée, qui portait sur 89% des loyers perçus par eux, permettait d'écarter l'omission involontaire, enfin, que M. et Mme B... n'avaient pas déclaré la quote-part, représentant les montants respectifs de 25 710 euros et 26 135 euros, perçue, les mêmes années, par M. B... des résultats d'une société civile immobilière dont il détenait des parts, l'administration a suffisamment établi l'intention d'éluder l'impôt qui a animé les intéressés et, par voie de conséquence, le bien-fondé de la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, par le a. de l'article 1729 du code général des impôts, qui a été appliquée aux suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige au titre de ces mêmes années.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. M. et Mme B... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur la période s'étendant du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016. Dans le cadre de ce contrôle, le service vérificateur a notamment examiné les revenus fonciers portés par les intéressés sur leurs déclarations de revenus des années vérifiées et a estimé qu'il y avait lieu de remettre en cause, d'une part, le déficit foncier que M. et Mme B... avaient entendu reporter sur les années en cause et, d'autre part, la déduction, en tant que charges, de dépenses regardées comme non justifiées et, enfin, qu'il convenait aussi de rectifier le montant des recettes déclarées. L'administration a fait connaître cette analyse à M. et Mme B... par deux propositions de rectification qu'elle leur a adressées le 22 décembre 2017, pour ce qui concerne l'année 2014, et le 12 septembre 2018, pour ce qui concerne les années 2015 et 2016.

2. M. et Mme B... ont présenté des observations qui n'ont pas convaincu l'administration de revoir son analyse en matière de revenus fonciers. Dans ces conditions, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant, pour ce qui concerne les années 2014, 2015 et 2016, des rectifications notifiées ont été mis en recouvrement le 31 décembre 2019 à hauteur d'un montant total de 69 154 euros, en droits et pénalités. Les réclamations formées par M. et Mme B... n'ayant fait l'objet que d'une admission partielle, les intéressés ont porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens en lui demandant de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils demeuraient assujettis au titre des années 2014, 2015 et 2016.

3. Par un jugement du 30 mars 2023, le tribunal administratif d'Amiens a, d'une part, réduit de la somme de 2 045 euros la base d'impôt sur le revenu assignée, dans la catégorie des revenus fonciers, à M. et Mme B... au titre de l'année 2014, d'autre part, prononcé, dans la mesure de cette réduction de base, la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle les intéressés ont été assujettis au titre de l'année 2014, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande. M. et Mme B... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction.

Sur le bien-fondé des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux demeurant en litige :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

4. En vertu de l'article 28 du code général des impôts, le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété. Aux termes de l'article 31 de ce code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; / (...) / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...). ". Enfin, en vertu du 3° du I de l'article 156 du même code, le revenu net foncier est établi sous déduction des déficits fonciers constatés pour une année, lesquels peuvent s'imputer sur les revenus fonciers des dix années suivantes.

5. Au sens des dispositions précitées du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d'habitation, ou qui ont pour effet d'apporter une modification importante au gros œuvre, ainsi que les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à des travaux de reconstruction, et, comme des travaux d'agrandissement, ceux qui ont pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable des locaux existants. Des travaux d'aménagement interne, quelle que soit leur importance, ne peuvent être regardés comme des travaux de reconstruction ou d'agrandissement que s'ils affectent le gros œuvre ou s'il en résulte une augmentation du volume ou de la surface habitable. Il appartient au contribuable qui entend déduire de son revenu brut les dépenses constituant, selon lui, des charges de la propriété de justifier du caractère déductible de ces dépenses.

S'agissant de l'imputation d'un déficit antérieur :

6. Pour remettre en cause l'imputation, par M. et Mme B..., sur leurs revenus fonciers des années 2014, 2015 et 2016, de déficits générés par des travaux qu'ils ont fait réaliser dans un immeuble dont ils ont acquis la propriété à Compiègne, l'administration a retenu, d'une part, que les travaux en cause avaient été effectués avant même l'établissement, le 9 août 2012, de l'acte notarié constatant l'acquisition de l'immeuble et, d'autre part, que, par leur nature et leur importance, ces travaux étaient assimilables à des travaux de reconstruction ou d'agrandissement.

7. M. et Mme B... se prévalent du compromis de vente qu'ils ont conclu, le 14 janvier 2012 avec le vendeur du bien, en faisant observer que cet acte, qui constitue une promesse synallagmatique, constate l'accord intervenu, dès cette date, entre les parties sur la chose et sur le prix. Ils ajoutent que, de la lettre même des dispositions du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts, les charges de la propriété déductibles comprennent les dépenses éligibles effectivement acquittées par le propriétaire, peu important la date de réalisation de travaux correspondants.

8. Toutefois, d'une part, M. et Mme B... ne peuvent utilement se prévaloir du compromis qu'ils indiquent avoir conclu, le 14 janvier 2012, avec le vendeur du bien en cause, dès lors, en tout état de cause, que cet acte, conclu sous seing privé, n'est pas opposable à l'administration, seul l'établissement, le 9 août 2012, de l'acte notarié ayant eu pour effet de rendre cette transaction immobilière opposable aux tiers. D'autre part, M. et Mme B... ne contestent pas avoir acquitté les factures correspondantes à une date antérieure au 9 août 2012, qui est celle de l'établissement de l'acte notarié, de sorte que, pour l'application de la loi fiscale, ces dépenses doivent être regardées comme ayant été supportées par M. et Mme B... à une date à laquelle ils n'étaient pas les propriétaires du bien concerné au sens de l'article 31 du code général des impôts. En outre, alors qu'une déclaration modèle H1 souscrite en 1999 par l'ancien propriétaire de l'immeuble indique que celui-ci était alors affecté à un usage de dépendance et qu'il comportait un garage, une cave, un cellier, une buanderie, ainsi qu'un grenier, il n'est pas sérieusement contesté que l'ensemble des travaux qu'ont fait effectuer M. et Mme B... sur ce bien a abouti à la création de quatre logements et, par suite, à augmenter la surface habitable offerte par l'immeuble, même en tenant pour établi que l'étage de celui-ci avait antérieurement été affecté à un usage d'habitation. Il suit de là que l'administration a pu à bon droit remettre en cause l'imputation, sur les revenus fonciers des années d'imposition en litige, du déficit généré par ces dépenses.

S'agissant de la déductibilité des dépenses de peinture :

9. M. et Mme B... ont porté en déduction de leurs revenus fonciers des années 2014, 2015 et 2016, des dépenses d'achat de peinture qui leur ont été facturées le 6 septembre 2014, pour un montant de 1 320 euros, le 27 novembre 2015, pour un montant de 499 euros, et le 8 octobre 2016, pour un montant de 896 euros. Après avoir constaté que ces factures étaient libellées à l'adresse du même immeuble, situé à Compiègne, dans lequel M. et Mme B... ont fixé leur résidence principale et dans lequel ils donnent aussi en location des logements, l'administration a remis en cause le caractère de charges de la propriété de ces dépenses, au motif que le lieu de réalisation des travaux de peinture pour les besoins desquels ces achats avaient été effectués ne pouvait être déterminé et que ces travaux étaient susceptibles d'avoir exclusivement concerné la résidence principale de M. et Mme B..., laquelle n'était pas productive de revenus.

10. Les appelants soutiennent que le motif opposé par l'administration ne pouvait légalement la conduire à remettre purement et simplement en cause la déduction de ces dépenses d'achats, mais qu'il lui appartenait, faute de pouvoir se livrer à une affectation plus précise, de répartir ces dépenses au prorata des surfaces respectives de leur résidence principale et des logements locatifs, ce qui aurait dû la conduire à admettre en déduction, en tant que charges de la propriété, une partie de ces dépenses.

11. Toutefois, alors que M. et Mme B... n'allèguent pas que les travaux de peinture qu'ils soutiennent avoir réalisé concernaient l'immeuble en son entier et qu'ils ne donnent aucune précision quant à l'objet exact et au lieu de réalisation de ces travaux, c'est à bon droit que l'administration, à qui il n'incombait pas, dans ces conditions, de se livrer à une répartition du montant des dépenses d'achat de peinture exposées par M. et Mme B..., à due proportion des surfaces des deux parties de l'immeuble, a regardé comme non déductibles, en tant que charges de la propriété, l'ensemble de ces dépenses.

S'agissant de la déductibilité des dépenses de raccordement :

12. L'administration a remis en cause la déduction par M. et Mme B... de leurs revenus fonciers, en tant que charges de la propriété, d'une dépense de raccordement au réseau public d'assainissement collectif, qui a donné lieu à une facture, établie le 10 décembre 2014 et libellée à l'adresse de l'immeuble dans lequel ils ont aménagé quatre logements locatifs à Compiègne.

13. Les appelants soutiennent que la dépense correspondant à ces travaux de raccordement, qui consistaient en une mise aux normes de l'installation d'assainissement de l'immeuble et qui comportaient notamment la neutralisation d'une ancienne fosse septique, était déductible par nature.

14. Toutefois, alors, au demeurant, que la facture en cause, versée au dossier par le ministre, inclut des postes, concernant la remise en état, sur une surface de 440 m², de murs intérieurs du bâtiment, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'ils se rattacheraient aux travaux de raccordement en cause, ces travaux s'inscrivent, en l'absence d'élément de preuve du contraire, dans le cadre de l'opération de restructuration complète de l'immeuble, qui a abouti à la création, au sein de celui-ci, jusqu'alors affecté à un usage de dépendance, de quatre logements locatifs. Ne pouvant ainsi être regardés comme dissociables de cette opération de reconstruction de l'immeuble et d'agrandissement de la surface habitable offerte par celui-ci, ces travaux ne constituaient pas une intervention ponctuelle d'amélioration. Par suite, la déductibilité, en tant que charge de la propriété, de la dépense correspondante a été à bon droit remise en cause par l'administration.

En ce qui concerne l'invocation de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

15. M. et Mme B... appuient leur argumentation, concernant l'imputabilité du déficit foncier généré par les travaux réalisés avant l'établissement de l'acte notarié constatant l'acquisition de leur immeuble, sur les énonciations des paragraphes n°30, n°40 et n°100 de la documentation administrative publiée le 30 juillet 2013 sous la référence BOI-RFPI-BASE-20-30-30, en ce qu'elles se réfèrent à la date de paiement des dépenses et non à la date de réalisation des travaux correspondants, pour apprécier si ces dépenses constituent des charges de la propriété déductibles des revenus fonciers d'une année considérée.

16. Toutefois, ces extraits de la doctrine administrative ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle dont le présent arrêt fait application. A supposer qu'ils aient entendu invoquer ces extraits de doctrine administrative sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, M. et Mme B... ne sont, par suite, pas fondés à se prévaloir de ceux-ci.

Sur les pénalités :

17. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". En outre, aux termes de l'article L. 195 A du même livre : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manœuvres frauduleuses incombe à l'administration. ".

18. Pour justifier, comme la charge lui incombe, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, l'application, aux cotisations d'impôt sur les revenu et de prélèvements sociaux en litige en ce qui concerne les années 2015 et 2016, de la majoration de 40% prévue, en cas de manquement délibéré, par les dispositions précitées du a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration a retenu, selon les termes de la proposition de rectification adressée le 12 septembre 2018 à M. et Mme B..., repris par le ministre dans ses écritures, qu'une comparaison entre, d'une part, les déclarations de revenus souscrites par M. et Mme B... au titre des années 2015 et 2016 et, d'autre part, les relevés de leurs comptes bancaires se rapportant aux mêmes années avait permis de mettre en évidence une minoration du montant des loyers déclarés par eux, au cours de ces années, par rapport aux règlements qu'ils avaient reçus par chèques de leurs locataires et que l'importance de la minoration constatée, qui portait sur 89% des loyers perçus par eux, permettait d'écarter l'omission involontaire. En outre, l'administration a retenu que M. et Mme B... n'avaient pas déclaré la quote-part, représentant les montants respectifs de 25 710 euros et 26 135 euros, perçue, les mêmes années, par M. B... des résultats d'une société civile immobilière dont il détenait la moitié des parts depuis 2008, alors qu'ils ne pouvaient ignorer qu'il s'agissait de revenus imposables.

19. Ces motifs, qui sont sans lien avec la remise en cause de la déduction, en tant que charges de la propriété, des dépenses faisant par ailleurs l'objet du présent litige, de même qu'avec les dégrèvements prononcés par l'administration avant la saisine du juge de l'impôt, sont de nature à établir l'intention délibérée qui a animé M. et Mme B... au cours des deux années d'imposition en cause, ainsi que le bien-fondé de la majoration de 40% prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts dont il a été fait application au titre des années 2015 et 2016.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens n'a fait que partiellement droit à leur demande.

Sur les frais liés au litige :

21. Par voie de conséquence de l'ensemble de ce qui précède, les conclusions que M. et Mme B... présentent sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administratrice générale des finances publiques chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 13 juin 2024 à laquelle siégeaient :

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur, assurant la présidence de

la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller ;

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 juin 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de la formation de jugement,

Signé : F.-X. Pin

La greffière,

Signé : S. CardotM

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Sophie Cardot

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N°23DA00980

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA00980
Date de la décision : 26/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Pin
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : SELARL VAUBAN

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-26;23da00980 ?
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