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04/06/2024 | FRANCE | N°22DA01059

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 3ème chambre, 04 juin 2024, 22DA01059


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Les sociétés Eiffage Travaux Publics Nord, Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eiffage TP ont demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le syndicat intercommunal pour les transports urbains de la région de Valenciennes (SITURV) à leur verser, pour le règlement du marché passé en 2011 pour la construction d'un réseau de transport collectif de tramway reliant la ville de Valenciennes à celle de Vieux-Condé, les sommes de 656 115,48 euros au titre des intérêts mora

toires, 150 968,78 euros au titre de la révision des prix, 180 150 euros, majorée de la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Les sociétés Eiffage Travaux Publics Nord, Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eiffage TP ont demandé au tribunal administratif de Lille de condamner le syndicat intercommunal pour les transports urbains de la région de Valenciennes (SITURV) à leur verser, pour le règlement du marché passé en 2011 pour la construction d'un réseau de transport collectif de tramway reliant la ville de Valenciennes à celle de Vieux-Condé, les sommes de 656 115,48 euros au titre des intérêts moratoires, 150 968,78 euros au titre de la révision des prix, 180 150 euros, majorée de la taxe sur la valeur ajoutée applicable, au titre d'un règlement complémentaire, 81 901,03 euros au titre des intérêts moratoires sur le compte prorata et 4 504,24 euros au titre des intérêts moratoires sur le compte " collège interentreprises de sécurité, de santé et des conditions de travail (CISSCT) ".

Par un jugement n° 1505737 du 19 mars 2019, le tribunal administratif de Lille a condamné le syndicat intercommunal de mobilité et d'organisation urbaine de Valenciennes (SIMOUV), venant aux droits du SITURV, à verser à la société Eiffage Travaux Publics Nord, en sa qualité de mandataire du groupement, la somme de 441 483,45 euros, assortie des intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 10 janvier 2015 et de leur capitalisation.

Par un arrêt n° 19DA01163 du 1er juin 2021, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel du SIMOUV, annulé ce jugement, rejeté la demande présentée par les sociétés Eiffage Route Nord Est, anciennement Eiffage Travaux Publics Nord, Eiffage Génie civil, venant aux droits de la société Eiffage TP, et Entreprise Jean Lefebvre Nord devant le tribunal administratif de Lille, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur l'appel en garantie présenté par le SIMOUV et rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par une décision n° 455134 du 19 mai 2022, le Conseil d'Etat a annulé les articles 1er, 2, 4 et 5 de cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Douai, dans la mesure de la cassation prononcée.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mai 2019, des mémoires complémentaires enregistrés les 27 novembre 2020, 19 février 2021, 12 avril 2021 et 3 mai 2021, et un mémoire enregistré après cassation le 27 décembre 2022, le syndicat intercommunal de mobilité et d'organisation urbaine du Valenciennois (SIMOUV), représenté par Me Boutignon, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille n° 1505737 du 19 mars 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par les sociétés Eiffage Travaux Publics Nord, Eiffage Travaux Publics et Entreprise Jean Lefebvre Nord devant le tribunal administratif de Lille ;

3°) d'écarter des débats la pièces adverse n° 55 ;

4°) à titre subsidiaire, de rejeter les demandes présentées au titre du compte prorata et du collège interentreprises de sécurité, de santé et des conditions de travail (CISSCT) comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître, de réduire le montant des intérêts moratoires à la somme de 199 666,22 euros et de condamner le groupement d'ingénierie du Valenciennois (GIVAL), représenté par la société Ingerop Conseil et Ingénierie, à le garantir des condamnations prononcées à son encontre au titre des intérêts moratoires, pour un montant de 35 195,11 euros ;

5°) de mettre à la charge solidaire des sociétés Eiffage Travaux Publics Nord, Eiffage Travaux Publics et Entreprise Jean Lefebvre Nord la somme de 32 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- seuls les intérêts moratoires se rapportant au solde du marché peuvent être discutés devant la cour dès lors que le décompte général a été signé ;

- alors que le point de départ du paiement du solde du marché est le 10 novembre 2014, le paiement d'une somme de 3 783 261,60 euros a été effectué le 26 novembre 2014, dans le délai de trente jours prévu par les stipulations du marché et le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ; le solde, à savoir la somme de 380 753,74 euros, correspond à la retenue de garantie de 5 % prévue par le marché et portant sur les avenants n° 1 et 2 ; cette somme a été payée le 6 mars 2015 dans le délai de paiement intervenu après la levée de la dernière réserve ; les garanties à première demande souscrites le 19 novembre 2014 auprès d'un établissement bancaire, à hauteur de ce montant, n'ont jamais été notifiées au maître de l'ouvrage qui en a pris connaissance au cours de l'instance devant la cour ;

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation et d'une erreur de droit en tant qu'il met la preuve à sa charge, alors que les éléments produits par les sociétés intimées ne justifient pas de leurs demandes ; la pièce n° 55 produite par les sociétés intimées doit être écartée des débats dès lors qu'elle constitue une preuve déloyale compte tenu des nombreuses erreurs et approximations qu'elles contiennent ;

- le récapitulatif des intérêts moratoires relatifs aux acomptes intermédiaires, produit par le titulaire du marché, n'est pas probant et est entaché d'erreurs de fait, notamment en raison du caractère incomplet des décomptes adressés au maître d'œuvre et en ce qui concerne les dates effectives de paiement ; le tribunal a mis à tort à la charge du maître d'ouvrage la preuve de la réception du paiement des acomptes mensuels et de l'irrégularité et de l'imprécision des demandes du titulaire du marché ;

- les demandes de versement des intérêts moratoires réclamés au titre des acomptes mensuels n° 9 et 10 sont irrecevables, en l'absence de réserves sur les ordres de service n° 14 et 15 de notification de ces décomptes mensuels ;

- aucun intérêt moratoire n'est dû dès lors que les entreprises requérantes n'établissent ni les dates de transmission des états d'acompte avant le 25 de chaque mois, ainsi qu'il est prévu par le cahier des clauses administratives particulières (CCAP), ni les dates auxquelles les paiements sont intervenus ; les états d'acompte transmis étaient incomplets, notamment les acomptes n° 8, 10, 11, 13 et 17, de telle sorte que le montant des intérêts moratoires ne saurait en tout état de cause excéder la somme de 199 666,22 euros ; les sociétés reconnaissent l'absence de retard de paiement des acomptes n° 8 et 9 ;

- les sociétés se fondent sur des pièces dépourvues de cachet ou de signature pour déterminer les dates de réception des situations par le maître d'œuvre ;

- elles ne justifient pas de la transmission de copies des factures au maître d'ouvrage, en méconnaissance de l'article 2.2.1 du CCAP, de telle sorte que le délai de paiement n'a pas couru ;

- une part de l'avance initialement versée doit être déduite du montant des acomptes, en application de l'article 1.5 du CCAP ;

- le taux des intérêts moratoires à retenir est le taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne, majoré de sept points, sans y ajouter deux points supplémentaires ;

- à titre subsidiaire, il faut tenir compte de ses pièces n° 53 et 54 pour déterminer les dates de réception des projets de décomptes mensuels complets ;

- à ce titre, il convient d'écarter : les états d'acompte n° 22 et 23 qui ont été directement réglés aux sous-traitants et ne peuvent donner lieu à aucun intérêt moratoire ; l'état d'acompte n° 24 qui porte sur des révisions de prix et non sur des travaux et n'a pas d'existence comptable ;

- il ressort des pièces n° 42 et 54 que le décompte mensuel n° 3 a été reçu et approuvé de façon complète le 30 mars 2012 et non le 19 mars 2012 ; le décompte mensuel n° 4 a été reçu et approuvé le 23 mai 2012 et non le 12 avril 2012 ; le décompte mensuel n° 6 a été reçu et approuvé le 24 juillet 2012 et non le 2 avril 2012 ; la somme de 207 946,69 euros reprise dans l'état d'acompte n° 22 correspond à des révisions de prix erronées, les sommes restantes se rapportant aux seuls sous-traitants ; le décompte mensuel n° 11 a été reçu le 27 novembre 2012 et non le 31 octobre 2012 ; le décompte mensuel n° 21 a été reçu le 18 décembre 2013 et non le 2 décembre 2013 ;

- les dates précitées révèlent un retard fautif imputable au maître d'œuvre dans la transmission des états d'acompte n° 15, n° 18 et n° 19, et qu'il est fondé à appeler en garantie à due proportion d'un montant de 35 191,11 euros ;

- il justifie, notamment par sa pièce n° 42, des dates de paiement, contrairement aux sociétés intimées, permettant d'arrêter le montant des intérêts moratoires, à supposer qu'il soit condamné, à la somme de 199 666,22 euros ;

- les justificatifs des dates de paiement des acomptes figurent dans sa pièce n° 42 ;

- le jugement est irrégulier en ce que le tribunal administratif n'a pas relevé d'office son incompétence pour connaître des contestations relatives au compte prorata ;

- la convention de compte prorata n'est pas opposable au maître d'ouvrage, qui n'en est pas signataire ; cette convention ne fixe aucun délai de règlement des situations et les demandes incomplètes du titulaire du marché n'ont pas permis au maître d'ouvrage d'en assurer le règlement ;

- il n'avait qu'un rôle de collecte et de reversement des sommes portant sur le compte du collège interentreprises de sécurité, de santé et des conditions de travail (CISSCT) et le

bien-fondé des demandes de paiement pour le compte CISSCT n'est pas établi par le titulaire du marché ;

- la demande de paiement de travaux supplémentaires, présentée dans le cadre de l'appel incident, doit être rejetée dès lors que : s'agissant des travaux antérieurs à l'avenant n° 2 du 6 décembre 2013, le titulaire du marché a renoncé au paiement des prestations qui n'étaient pas définies dans cet avenant et que ces travaux n'ont jamais été validés par le maître d'ouvrage ; s'agissant des travaux postérieurs à l'avenant, la réception des travaux fixée au 29 novembre 2013 fait obstacle à tout règlement ;

- les sociétés intimées n'établissent pas qu'il aurait commis une faute dans la réalisation des travaux supplémentaires litigieux ; il conteste le quantum des réclamations présentées à ce titre ;

- la demande d'actualisation des intérêts moratoires, présentée à l'occasion de la reprise d'instance, doit être rejetée dès lors que la cour se trouve de nouveau saisie dans les limites de ce qui a été jugé par le tribunal administratif ; il a exécuté de bonne foi ce jugement ; la capitalisation ne peut produire d'effet à une date antérieure à celle de la demande faite au juge ;

- la demande de paiement d'intérêts moratoires complémentaires, présentée dans le cadre de l'appel incident, doit être rejetée dès lors qu'il n'est pas possible de demander à la fois la capitalisation des intérêts et des intérêts sur les intérêts moratoires, en méconnaissance du principe non bis in idem ; cette demande de paiement, présentée au-delà du délai de prescription de quatre ans fixé par la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968, est prescrite s'agissant des sommes antérieures au 1er janvier 2016 ; les demandes principales sont elles-mêmes irrégulières.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2020, des mémoires enregistrés les 7 janvier 2021, 25 mars 2021, 19 avril 2021 et 12 mai 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, et des mémoires enregistrés après cassation les 8 août 2022, 8 décembre 2022 et 14 février 2023, les sociétés Eiffage Route Nord Est, anciennement Eiffage Travaux Publics Nord, Eiffage Génie civil, venant aux droits de la société Eiffage TP, et Entreprise Jean Lefebvre Nord, représentées par Me Le Briquir, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) de rejeter la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, de condamner le SIMOUV ou à défaut toute partie succombante à leur verser, au-delà de la condamnation déjà prononcée par le tribunal administratif, les sommes de 678 142,57 euros au titre des intérêts moratoires dus en raison de retards dans le versement des acomptes mensuels, de 652 392,01 euros au titre d'intérêts moratoires complémentaires eux-mêmes dus sur les intérêts moratoires précités, de 226 056,87 euros au titre des intérêts moratoires dus sur le solde du marché, de 182 340,74 euros au titre des intérêts moratoires complémentaires dus sur ces mêmes intérêts moratoires, de 140 351,41 euros au titre des intérêts moratoires se rapportant au compte prorata, et de 111 776,21 euros au titre des intérêts moratoires complémentaires se rapportant à ces mêmes intérêts moratoires ;

3°) par la voie de l'appel incident, de condamner le SIMOUV ou à défaut toute partie succombante à leur verser, au-delà de la condamnation déjà prononcée par le tribunal administratif, la somme de 180 150 euros hors taxes au titre des postes de règlement complémentaire, cette somme étant majorée de la taxe sur la valeur ajoutée, des intérêts moratoires pour un montant de 170 228,23 euros et des intérêts moratoires complémentaires sur ces mêmes intérêts moratoires, pour un montant de 275 741,34 euros ;

4°) par la voie de l'appel incident, de condamner le SIMOUV ou à défaut toute partie succombante à leur verser, au-delà de la condamnation déjà prononcée par le tribunal administratif, la somme de 10 250,44 euros correspondant aux intérêts moratoires dus au titre du collège interentreprises de sécurité, de santé et des conditions de travail (CISSCT), cette somme étant majorée des intérêts moratoires complémentaires pour un montant de 10 931,76 euros ;

5°) d'assortir ces sommes des intérêts à compter de la date à laquelle leur règlement aurait dû intervenir et d'ordonner la capitalisation de ces intérêts ;

6°) de mettre à la charge du SIMOUV ou de toute partie perdante la somme de 25 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent, dans le dernier état de leurs écritures, que :

- les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- le débat entre les parties ne saurait se limiter aux intérêts moratoires se rapportant au solde du marché dès lors qu'elles conservent le droit de former une réclamation sur le décompte général quand bien même cette réclamation porterait sur un poste de rémunération ou d'indemnisation qui n'a pas été mentionné dans le décompte final établi d'office par le maître d'œuvre ; la décision du Conseil d'Etat n'a pas pour effet de restreindre la portée du litige aux intérêts moratoires sur le solde ;

- la somme allouée par le tribunal au titre des intérêts moratoires dus en raison du retard de versement des acomptes mensuels doit être portée à 360 499,05 euros - non compris le montant résultant de l'anatocisme - dès lors que la situation n° 6 a été payée le 5 septembre 2012 et que la situation n° 20 a été payée le 22 octobre 2013 ;

- le retard de paiement du solde du marché entraîne le versement d'intérêts moratoires, pour un montant de 93 947,03 euros, non compris le montant résultant de l'anatocisme, calculé sur la totalité du montant de ce solde, soit 4 164 015,34 euros ; la somme réglée au principal pour un montant de 380 753,74 euros ne correspond pas à la retenue de garantie contractuelle de 5 % sur le montant des avenants n° 1 et 2, dès lors qu'elles ont expressément souscrit une garantie à première demande en remplacement de cette retenue ;

- elles ont droit au versement d'intérêts moratoires complémentaires sur les intérêts moratoires versés postérieurement au jugement attaqué en application du III de l'article 5 du décret du 21 février 2002 ; cette demande n'est pas prescrite dès lors que les intérêts moratoires dus au titre des retards de paiement relatifs aux situations, au solde et au compte prorata ne leur ont été versés que le 20 mai 2019 ;

- les frais d'immobilisation de personnels et de matériels issus de retards et de modifications de chantier résultent de fautes du maître d'ouvrage et engagent sa responsabilité à hauteur de la somme de 180 150 euros hors taxes ; ces frais correspondent à des prestations qui ont été demandées par le maître d'œuvre et ont été réalisées avant la réception des travaux le 16 mai 2014 ;

- les intérêts moratoires dus au titre du retard de paiement de dépenses du compte du CISSCT sont dus à hauteur de 4 504,24 euros en application de l'article 98 du code des marchés publics ;

- le taux des intérêts moratoires à retenir est celui du taux de refinancement de la Banque centrale européenne majoré de sept points puis à nouveau majoré de deux points, en application de l'article 2.2.1 du CCAP du marché.

Par un mémoire, enregistré le 19 novembre 2020, et un mémoire enregistré après cassation le 4 août 2022, la société Ingerop Conseil et Ingénierie, représentée par Me Rochard, conclut au rejet de la requête, au rejet des conclusions d'appel incident formulées par les sociétés Eiffage Route Nord Est, Entreprise Jean Lefebvre Nord et Eiffage Génie Civil, au rejet de l'appel en garantie formé à son encontre par le SIMOUV et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge du syndicat intercommunal sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a commis aucune faute lors de l'examen des projets de décomptes mensuels dès lors que les retards allégués par le maître de l'ouvrage résultent de la communication tardive, par l'entreprise, de son projet de décompte accompagné de la totalité de ses annexes ; elle a donc respecté le délai de quinze jours imparti pour vérifier les états d'acompte mensuel n° 9 et 10, qui doit être décompté à partir de la date à laquelle elle a disposé de l'ensemble des éléments techniques lui permettant d'opérer leur vérification ; le SIMOUV ne justifie pas d'un retard dans le traitement des autres états d'acompte ;

- elle n'a commis aucune faute permettant de lui imputer la responsabilité d'une partie des demandes de règlement complémentaire présentées par le titulaire du marché pour les travaux qui ont été exécutés entre le 29 novembre 2013 et le 30 avril 2014 ; il n'est pas établi qu'elle a validé et accepté ces travaux ; en l'absence de leur validation par le maître de l'ouvrage, le titulaire du marché doit être réputé les avoirs acceptés et pris à sa charge.

Par une ordonnance du 14 février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 6 mars 2023, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la commande publique ;

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 94-679 du 8 août 1994 ;

- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;

- le décret n° 2013-269 du 29 mars 2013 ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- les conclusions de M. Carpentier-Daubresse, rapporteur public,

- et les observations de Me Boutignon, représentant le SIMOUV, et de Me Pallec, représentant les sociétés Eiffage Route Nord Est, Eiffage Génie civil et Entreprise Jean Lefebvre Nord.

Considérant ce qui suit :

1. Par un acte d'engagement signé le 8 juillet 2011, le syndicat intercommunal pour les transports urbains de la région de Valenciennes (SITURV), aux droits duquel est venu le syndicat intercommunal de mobilité et d'organisation urbaine de Valenciennes (SIMOUV), a chargé un groupement solidaire d'entreprises composé de la société Eiffage Travaux Publics Nord, mandataire, de la société Eiffage TP et de la société Entreprise Jean Lefebvre Nord, de l'exécution du lot n° 1 " voirie et réseaux divers - ouvrages d'art (secteurs extérieurs) " du marché de construction de la seconde ligne du tramway de Valenciennes. A la suite de la réception des travaux intervenue le 29 novembre 2013, le maître d'ouvrage a, en application de l'article 13.3.2 du cahier des clauses administratives générales (CCAG), mis en demeure le groupement, par courrier du 18 juillet 2014, de produire son projet de décompte final. Ce dernier lui ayant fait savoir qu'il n'était pas en mesure de lui adresser ce projet de décompte final, le SIMOUV lui a notifié le 27 octobre 2014 le décompte général du marché. Par lettre du 8 décembre 2014, le groupement titulaire du lot n° 1 a transmis au pouvoir adjudicateur un mémoire en réclamation portant sur une somme totale de 3 161 087,68 euros toutes taxes comprises en sollicitant, notamment, le règlement d'intérêts moratoires, de révisions de prix et de travaux supplémentaires. Après rejet de sa réclamation, il a porté le litige devant le tribunal administratif de Lille qui, par un jugement du 19 mars 2019, a condamné le SIMOUV à verser à la société Eiffage Travaux Publics Nord, en sa qualité de mandataire du groupement, la somme de 441 483,45 euros, assortie des intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 10 janvier 2015, et de la capitalisation des intérêts. Par un arrêt du 1er juin 2021, la cour administrative d'appel de Douai a, sur appel du SIMOUV, annulé ce jugement, rejeté la demande présentée devant le tribunal administratif de Lille par la société Eiffage Travaux Publics Nord, devenue société Eiffage Route Nord Est, la société Eiffage Génie civil, venant aux droits de la société Eiffage TP, et la société Entreprise Jean Lefebvre Nord, jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur l'appel en garantie présenté par le SIMOUV à l'encontre de la société Ingerop Conseil et Ingénierie, maître d'œuvre de l'opération, et rejeté le surplus des conclusions des parties. Par une décision n° 455134 du 19 mai 2022, le Conseil d'Etat a annulé les articles 1er, 2, 4 et 5 de cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Douai, dans la mesure de la cassation prononcée.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Le fait, pour le juge de première instance, d'écarter à tort un moyen comme inopérant ou non fondé, ou au contraire de le retenir à tort comme opérant et fondé, en s'estimant suffisamment éclairé par les éléments versés au dossier par les parties et après avoir retenu ou écarté ces éléments selon qu'il les a regardés comme probants ou non, ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement par le juge d'appel, saisi d'un moyen en ce sens. Il appartient seulement à ce dernier, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel résultant de l'introduction de la requête, et après avoir, en répondant à l'argumentation dont il est saisi, relevé cette erreur, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen écarté ou retenu à tort, au vu des pièces versées au dossier et, le cas échéant, après avoir procédé aux mesures d'instruction complémentaires qu'il estime nécessaires. Dans ces conditions, l'erreur de droit reprochée par le SIMOUV au tribunal administratif, qui au demeurant n'a pas mis la preuve à sa charge mais s'est prononcé au vu de l'ensemble des pièces produites par les parties dans le cadre du débat contradictoire, est sans incidence sur la régularité du jugement attaqué. A cet égard, il n'y a pas lieu d'écarter des débats les pièces produites par les sociétés intimées, qui ne revêtent aucun caractère déloyal et qu'il appartient seulement au SIMOUV de contredire.

Sur la fin de non-recevoir opposée par le SIMOUV à la demande présentée devant le tribunal administratif de Lille :

3. Aux termes de l'article 13.4.4 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicable aux marchés publics de travaux, dans sa version issue de l'arrêté du 8 septembre 2009, applicable au marché en litige en vertu de l'article 1.3.3 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) : " Dans un délai de quarante-cinq jours compté à partir de la notification du décompte général, le titulaire renvoie au représentant du pouvoir adjudicateur, avec copie au maître d'œuvre, le décompte général revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou fait connaître les motifs pour lesquels il refuse de le signer. / Si la signature du décompte général est donnée sans réserve par le titulaire, il devient le décompte général et définitif du marché. / Ce décompte lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires afférents au solde ".

4. Il résulte de l'instruction que, à la suite de la notification le 27 octobre 2014 du décompte général établi d'office par le SIMOUV, le mandataire du groupement constitué des sociétés Eiffage Route Nord Est, Eiffage Génie civil et Entreprise Jean Lefebvre Nord a fait état de ses réserves dans un courrier du 7 novembre 2014 puis a présenté le 8 décembre 2014, dans le délai de quarante-cinq jours prévu par l'article 50.1.1 du CCAG, un mémoire en réclamation incluant des demandes portant sur les intérêts moratoires afférents aux acomptes inclus dans le décompte général, lequel n'était pas devenu définitif à cette date. Le SIMOUV n'est donc pas fondé à soutenir que seuls pourraient être demandés les intérêts moratoires relatifs au règlement du solde du marché, à l'exclusion des intérêts moratoires se rapportant aux acomptes inclus dans le décompte.

Sur les intérêts moratoires en raison de retards dans le règlement des états d'acompte mensuels :

5. Aux termes de l'article 13 du CCAG : " 13.1. Demandes de paiement mensuelles : / 13.1.1. Avant la fin de chaque mois, le titulaire remet sa demande de paiement mensuelle au maître d'œuvre, sous la forme d'un projet de décompte. / (...) / 13.1.8. Le projet de décompte mensuel établi par le titulaire constitue la demande de paiement ; cette demande est datée et mentionne les références du marché. / Le titulaire envoie cette demande de paiement mensuelle au maître d'œuvre par tout moyen permettant de donner une date certaine. / 13.1.9. Le maître d'œuvre accepte ou rectifie le projet de décompte mensuel établi par le titulaire. Le projet accepté ou rectifié devient alors le décompte mensuel. / (...) / 13.2.1. A partir du décompte mensuel, le maître d'œuvre détermine le montant de l'acompte mensuel à régler au titulaire. / (...) / 13.2.2. Le maître d'œuvre notifie par ordre de service au titulaire l'état d'acompte mensuel et propose au représentant du pouvoir adjudicateur de régler les sommes qu'il admet. Cette notification intervient dans les sept jours à compter de la date de réception de la demande de paiement mensuelle du titulaire. / (...) / Le délai global de paiement court à compter de la réception de la demande de paiement mensuelle du titulaire par le maître d'œuvre, en application du décret n° 2002-232 du 21 février 2002 modifié. / (...) ". Aux termes de l'article 2.2.1 du cahier des clauses administratives particulières (CCAP) applicable au marché : " Le règlement des acomptes sera confirmé à l'article 13 du CCAG-Travaux avec comme seule dérogation à l'article 13.1.1 la date de remise du projet de décompte par l'entrepreneur au maître d'œuvre au 25 du mois considéré. /Les factures devront être établies par le titulaire en trois exemplaires et doivent être transmises au maître d'œuvre. /Une copie pour information sera adressée au maître d'ouvrage. Les délais de paiement des acomptes sont fixés à 30 jours. /En cas de demande de pièces justificatives, le délai de paiement sera suspendu. /Le défaut de paiement au titulaire ou à ses sous-traitants payés directement dans le délai prévu ci-dessus fait courir de plein droit des intérêts moratoires augmenté de deux points ".

6. Le groupement de sociétés a saisi le tribunal administratif en vue d'obtenir la condamnation du SIMOUV à lui verser des intérêts moratoires en raison de retards dans le paiement des états d'acompte n° 2 à 24 correspondant à des situations de travaux relatifs aux mois d'octobre 2011 à août 2014. Le tribunal a retenu que des intérêts moratoires étaient dus au titre de ces états d'acompte, pour un montant total de 359 582,42 euros, à l'exception de l'état n° 8 pour lequel il a constaté l'absence de retard de paiement. En appel, le SIMOUV conteste ces intérêts moratoires et soutient, à titre subsidiaire et dans le dernier état de ses écritures, qu'ils ne sauraient excéder la somme de 199 666,22 euros. Par la voie de l'appel incident, le groupement de sociétés demande que la condamnation du SIMOUV soit portée à la somme de 678 142,57 euros.

7. En premier lieu, il résulte des stipulations précitées du CCAG-Travaux et du CCAP applicable au marché litigieux que le paiement de l'acompte mensuel doit intervenir dans le délai de trente jours à compter de la réception de la demande de paiement mensuelle du titulaire par le maître d'œuvre, quelle que soit la date de cette réception, et que le défaut de paiement dans ce délai fait courir de plein droit des intérêts moratoires. Ces mêmes stipulations n'ont ni pour objet, ni pour effet de subordonner le déclenchement du délai de paiement des acomptes ou le droit de bénéficier des intérêts moratoires en cas de retard à la remise au maître d'œuvre, par le titulaire, du projet de décompte le 25 du mois considéré ou à la transmission d'une copie de ses factures au maître d'ouvrage.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3.8.2 du CCAG-travaux : " Lorsque le titulaire estime que les prescriptions d'un ordre de service appellent des réserves de sa part, il doit, sous peine de forclusion, les notifier au maître d'œuvre, dans un délai de quinze jours, décompté ainsi qu'il est précisé à l'article 3.2. ". Le défaut de paiement au titulaire dans le délai requis fait courir de plein droit des intérêts moratoires à son profit. Dans ces conditions, la circonstance qu'il n'a pas formulé de réserves sur les ordres de services n° 14 et 15 notifiant les états d'acomptes mensuels n° 9 et 10 ne saurait le priver du bénéfice de ces intérêts moratoires.

9. En troisième lieu, le SIMOUV soutient que l'état d'acompte n° 22, retenu par les premiers juges pour un montant de 207 946,69 euros, n'a donné lieu à aucun paiement au profit du titulaire du marché, seule une somme de 121 401,76 euros ayant été versée à ses sous-traitants. Toutefois, si l'administration produit à l'instance la situation de travaux rectifiée par le maître d'ouvrage ne mentionnant plus qu'une somme de 121 401,76 euros destinée aux sous-traitants, les sociétés intimées justifient que le maître d'œuvre a admis, au titre de cette situation, le versement d'une somme de 207 946,69 euros au titulaire et en a fait la proposition au maître d'ouvrage qui, selon l'article 13.2.2 du CCAG doit régler les sommes admises par le maître d'œuvre en cas de contestation sur le montant de l'acompte. Les sociétés intimées indiquent avoir reçu le règlement de la somme litigieuse le 26 novembre 2014. Dans ces conditions, le SIMOUV n'est pas fondé à soutenir qu'aucun intérêt moratoire n'est dû au titre de l'état d'acompte n° 22.

10. En quatrième lieu, il ressort de l'état d'acompte n° 23, d'un montant de 212 963,30 euros, que cette somme a été réglée à un sous-traitant du titulaire. Il résulte en outre de l'instruction que l'état d'acompte n° 24, d'un montant de 175 031,83, a été rejeté par un courrier du 6 octobre 2014 en raison d'anomalies concernant la révision des prix et que la mise en cause de cette révision a eu pour effet de réduire cet état d'acompte à un montant nul. Par suite, le SIMOUV est fondé à soutenir qu'en l'absence de droit au paiement au titre de ces états d'acompte, le titulaire ne démontre pas avoir subi de retard lui ouvrant droit à des intérêts moratoires.

11. En cinquième lieu, d'une part, il résulte de l'instruction, notamment des derniers tableaux produits par les parties pour justifier de leurs demandes, que celles-ci sont d'accord pour considérer que les états d'acompte n° 2, 9, 10 et 12 ont été réceptionnés par le maître d'œuvre les 13 mars 2012, 2 octobre 2012, 13 novembre 2012 et 29 novembre 2012. Pour les états d'acompte n° 3 à 7, 11 et 13 à 22, les premiers juges ont retenu les dates de réception figurant sur les accusés de réception produits par le groupement de société. La circonstance que ces accusés de réception ne mentionnent pas le nom et le cachet du maître d'œuvre n'est pas de nature à leur retirer leur valeur probante, alors au demeurant que la société Ingerop Conseil et Ingénierie, mise en cause dans l'instance, n'en conteste pas le caractère authentique. Si le SIMOUV entend se référer à des documents de travail du maître d'œuvre mentionnant des dates correspondant à la rédaction du décompte mensuel, ainsi qu'à des fiches de contrôle des situations de travaux indiquant les dates de transmission des acomptes au maître d'ouvrage, il ne ressort pas de ces éléments que les états d'acompte réceptionnés aux dates indiquées dans les accusés de réception étaient incomplets. D'autre part, le SIMOUV produit en appel des extraits informatiques de ses opérations de mandatement et de paiement justifiant du règlement des acomptes n° 2 à 7 et 9 à 21, intervenues à des dates qu'il prend en compte dans son tableau récapitulatif, et qui ne sont pas contestées en réplique par le groupement de sociétés qui les reprend à son tour dans son propre tableau. Par ailleurs, il n'est pas sérieusement contesté que l'état d'acompte n° 22 a fait l'objet d'un règlement le 26 novembre 2014, ainsi que le soutient le groupement de sociétés. Enfin, il ressort des tableaux de synthèse produits par les parties que le montant des acomptes n° 2 à 7, 9, 10 et 12 à 21, repris par le tribunal administratif au point 15 de son jugement, ne sont pas contestés. Si le SIMOUV fait état d'un montant de 2 149 632,84 euros pour l'état d'acompte n° 11, l'extrait informatique se rapportant à cette opération indique le versement au titulaire d'un montant de 2 121 879,99 euros, somme d'ailleurs reprise dans son tableau par le groupement de sociétés et prise en compte par les premiers juges. Il résulte de l'instruction que l'état d'acompte n° 22 s'établit au montant de 207 946,69 euros. Il n'est pas sérieusement contesté que les montants des états d'acompte litigieux intègrent dans leur calcul les sommes réglées directement aux

sous-traitants et la déduction des sommes versées à titre d'avance.

12. Il résulte de ce qui précède, eu égard en outre au délai de paiement de trente jours prévu par les stipulations citées au point 5, que : l'état d'acompte n° 2 a été reçu par le maître d'œuvre le 13 mars 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 24 avril 2012, pour un montant de 1 040 521,51 euros, avec un retard de douze jours ; l'état d'acompte n° 3 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 19 mars 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 21 juin 2012, pour un montant de 796 441,64 euros, avec soixante-quatre jours de retard ; l'état d'acompte n° 4 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 12 avril 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 21 juin 2012, pour un montant de 237 008,83 euros, avec quarante jours de retard ; l'état d'acompte n° 5 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 26 mars 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 28 août 2012, pour un montant de 233 981,55 euros, avec cent vingt-cinq jours de retard ; l'état d'acompte n° 6 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 2 avril 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 5 septembre 2012, pour un montant de 1 356 627,40 euros, avec cent vingt-six jours de retard ; l'état d'acompte n° 7 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 16 mai 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 14 septembre 2012, pour un montant de 1 009 858,67 euros,

avec quatre-vingt-onze jours de retard ; l'état d'acompte n° 8 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 6 septembre 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 20 septembre suivant, pour un montant de 5 173 062,70 euros, sans aucun jour de retard ; l'état d'acompte n° 9 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 2 octobre 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 30 octobre suivant, pour un montant de 2 006 522,42 euros, sans aucun jour de retard ; l'état d'acompte n° 10 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 13 novembre 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 27 décembre 2012, pour un montant de 1 829 995,13 euros, avec quatorze jours de retard ; l'état d'acompte n° 11 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 31 octobre 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 27 décembre 2012, pour un montant de 2 121 879,99 euros, avec vingt-sept jours de retard ; l'état d'acompte n° 12 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 29 novembre 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 10 janvier 2013, pour un montant de 2 543 869,30 euros, avec douze jours de retard ; l'état d'acompte n° 13 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 30 novembre 2012 et a fait l'objet d'un règlement le 10 janvier 2013, pour un montant de 2 184 535,70 euros, avec onze jours de retard ; l'état d'acompte n° 14 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 14 janvier 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 4 avril 2013, pour un montant de 2 449 054,28 euros, avec cinquante jours de retard ; l'état d'acompte n° 15 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 5 février 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 22 avril 2013, pour un montant de 487 934,36 euros, avec quarante-six jours de retard ; l'état d'acompte n° 16 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 5 mars 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 29 avril 2013, pour un montant de 1 539 683,20 euros, avec vingt-cinq jours de retard ; l'état d'acompte n° 17 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 3 avril 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 5 juillet 2013, pour un montant de 2 449 863,20 euros, avec soixante-trois jours de retard ; l'état d'acompte n° 18 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 11 juin 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 30 août 2013, pour un montant de 2 912 792,74 euros, avec cinquante jours de retard ; l'état d'acompte n° 19 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 25 juin 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 30 septembre 2013, pour un montant de 2 119 189,70 euros, avec soixante-sept jours de retard ; l'état d'acompte n° 20 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 2 août 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 22 octobre 2013, pour un montant de 2 711 183,38 euros,

avec cinquante-et-un jours de retard ; l'état d'acompte n° 21 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 2 décembre 2013 et a fait l'objet d'un règlement le 18 février 2014, pour un montant de 914 061,15 euros, avec quarante-huit jours de retard ; l'état d'acompte n° 22 a été réceptionné par le maître d'œuvre le 25 juillet 2014 et a fait l'objet d'un règlement le 26 novembre 2014, pour un montant de 207 946,69 euros, avec quatre-vingt-quatorze jours de retard.

13. En dernier lieu, aux termes du II de l'article 5 du décret du 21 février 2002 relatif à la mise en œuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics, applicable au marché litigieux : " 1° Le taux des intérêts moratoires est référencé dans le marché. / 2° Pour les organismes soumis aux délais de paiement mentionnés au 1° de l'article 98 du code des marchés publics, qu'il soit ou non indiqué dans le marché, le taux des intérêts moratoires est égal au taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points (...) ". Le SIMOUV est soumis aux délais de paiement mentionnés au 1° de l'article 98 du code des marchés publics en sa qualité d'établissement public local.

14. En l'absence de référence à un taux des intérêts moratoires dans le marché litigieux, il convient de déterminer ce taux en se référant aux taux d'intérêt de la Banque centrale européenne qui, eu égard aux périodes au cours desquelles les intérêts moratoires ont commencé à courir, correspondent à 1 % pour le calcul du taux relatif aux états d'acompte n° 2 à 7 et 10 à 13, à 0,75 % pour le calcul du taux relatif aux états d'acompte n° 14 à 17, à 0,50 % pour le calcul du taux relatif aux états d'acompte n° 18 à 20, à 0,25 % pour le calcul du taux relatif à l'état d'acompte n° 21 et à 0,15 % pour le calcul du taux relatif à l'état d'acompte n° 22. Ces taux doivent être majorés de sept points en application des dispositions précitées du II de l'article 5 du décret du 21 février 2002, et encore augmentés de deux points en application des stipulations de l'article 2.2.1 du CCAP applicable au marché, citées au point 5. Il s'en déduit que le taux des intérêts moratoires applicable s'établit à 10 % pour les états d'acompte n° 2 à 7 et 10 à 13, 9,75 % pour les états d'acompte n° 14 à 17, 9,50 % pour les états d'acompte n° 18 à 20, 9,25 % pour l'état d'acompte n° 21 et 9,15 % pour l'état d'acompte n° 22.

15. Eu égard aux montants des acomptes réglés avec retard, au nombre de jours de retard pour chacun d'entre eux et au taux des intérêts moratoires tels que définis au point précédent, les intérêts moratoires s'établissent aux montants de : 3 420,89 euros pour l'acompte n° 2 ; 13 965 euros pour l'acompte n° 3 ; 2 597,36 euros pour l'acompte n° 4 ; 8 013,07 euros pour l'acompte n° 5 ; 46 831,52 euros pour l'acompte n° 6 ; 25 177,30 euros pour l'acompte n° 7 ; 7 019,16 euros pour l'acompte n° 10 ; 15 696,10 euros pour l'acompte n° 11 ; 8 363,41 euros pour l'acompte n° 12 ; 6 583,53 euros pour l'acompte n° 13 ; 32 709,97 euros pour l'acompte n° 14 ; 5 995,58 euros pour l'acompte n° 15 ; 10 282,13 euros pour l'acompte n° 16 ; 41 228,18 euros pour l'acompte n° 17 ; 37 906,21 euros pour l'acompte n° 18 ; 36 955,18 euros pour l'acompte n° 19 ; 35 988,17 euros pour l'acompte n° 20 ; 11 118,99 euros pour l'acompte n° 21 ; et 4 900,14 euros pour l'acompte n° 22.

16. Il résulte de ce qui précède que le montant total des intérêts moratoires dus en raison des retards de paiement des acomptes mensuels s'établit à la somme de 354 751,88 euros.

Sur les intérêts moratoires en raison d'un retard dans le règlement du solde du marché :

17. Aux termes de l'article 98 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable au litige : " Le délai global de paiement d'un marché public ne peut excéder : / 1° 30 jours (...) pour les collectivités territoriales et les établissements publics locaux ; (...) Le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché ou le sous-traitant, le bénéfice d'intérêts moratoires, à compter du jour suivant l'expiration du délai. (...) ". Il résulte du I de l'article 1er du décret du 21 février 2002 alors applicable que " pour les marchés de travaux, le point de départ du délai global de paiement du solde est la date de réception du décompte général et définitif par le maître d'ouvrage ". Pour l'application de cette disposition reprise à l'article 2 du décret du 29 mars 2013, lorsqu'un décompte général fait l'objet d'une réclamation par le cocontractant, le délai de paiement du solde doit être regardé comme ne commençant à courir qu'à compter de la réception de cette réclamation par le maître d'ouvrage.

18. En premier lieu, il résulte de l'instruction que, rendu destinataire du décompte général établi d'office par le maître de l'ouvrage, le mandataire du groupement a présenté un mémoire en réclamation, daté du 8 décembre 2014 et reçu par le SIMOUV le 10 décembre 2014. Par suite, le point de départ du délai de paiement du solde du marché, d'un montant de 4 164 015,34 euros, doit être fixé à la date du 10 décembre 2014.

19. En deuxième lieu, la société Eiffage Route Nord Est produit à l'instance un extrait de son compte bancaire montrant qu'elle a reçu le 26 novembre 2014, en règlement du solde du marché, une première somme de 3 783 261,60 euros par un virement de la trésorerie de Valenciennes. Il suit de ce qui précède qu'aucun intérêt moratoire n'est dû pour la somme de 3 783 261,60 euros, réglée sans retard.

20. En troisième lieu, aux termes de l'article 101 du code des marchés publics : " Le marché peut prévoir, à la charge du titulaire, une retenue de garantie qui est prélevée par fractions sur chacun des versements autres qu'une avance. Le montant de la retenue de garantie ne peut être supérieur à 5 % du montant initial augmenté, le cas échéant, du montant des avenants. La retenue de garantie a pour seul objet de couvrir les réserves à la réception des travaux, fournitures ou services ainsi que celles formulées, le cas échéant, pendant le délai de garantie ". Aux termes de l'article 1.4 du CCAP applicable au marché : " Une retenue de garantie d'un montant de 5 % sera prélevée sur chaque acompte. La retenue de garantie peut être remplacée par une garantie à première demande dont le montant est fixé à 5 % du montant initial des travaux, augmenté des avenants éventuels ". Il résulte de l'instruction que si le titulaire du marché a souscrit auprès d'une banque, le 19 novembre 2014, une garantie d'un montant total de 380 753,74 euros correspondant à 5 % du montant des deux avenants signés les 16 août 2012 et 5 décembre 2013, il n'est pas établi que cette garantie a été transmise en temps utile au maître d'ouvrage ou au comptable public. Par conséquent, le comptable public, qui n'a pas été rendu destinataire en temps utile de la garantie à première demande apportée par un organisme bancaire, a pu légalement retenir le montant de 380 753,74 euros sur la somme due au titulaire du marché au titre du solde du marché.

21. En dernier lieu, l'article 6.3 de l'acte d'engagement du marché, qui stipule que " La retenue de garantie est restituée, ou la garantie à première demande libérée, au plus tard un an et un mois à compter de la levée de la dernière réserve ", prévaut, en application de l'article 1.3 du CCAP, sur l'article 1.4 du même cahier qui indique que " La retenue de garantie est restituée, ou la garantie à première demande libérée, au plus tard un an et un mois à compter de la réception ". La décision de levée des réserves a été signée le 12 janvier 2015 et notifiée au titulaire du marché le 13 janvier 2015. Le paiement de la somme correspondant à la retenue de garantie est intervenu le 10 mars 2015, moins d'un an et un mois à compter de la levée de la dernière réserve. Par suite, aucun intérêt moratoire n'est dû sur la somme de 380 753,74 euros.

Sur les intérêts moratoires relatifs aux dépenses engagées au titre des comptes prorata :

22. Aux termes de l'article 1.7.7 du CCAP applicable au marché : " Les modalités de fonctionnement des deux comptes prorata seront définies à l'issue de la première réunion de mise au point du marché. Ces dernières feront l'objet d'un compte rendu notifié par ordre de service sous la responsabilité du maître d'œuvre ". L'article 2.1.2. du même cahier, relatif au contenu des prix, prévoit que " les prix du marché sont établis en euros et réputés tenir compte : (...) - de la participation à 0,15 % du montant final du marché aux dépenses de fonctionnement du " collège interentreprises de sécurité, de santé et des conditions de travail " (CISSCT), ainsi qu'à toutes celles résultant de cette organisation collective ; / - de la participation à 1,5 % du montant des travaux au compte interentreprises concernant les dépenses communes à l'ensemble des entreprises intervenant dans la construction de la phase 3 du tramway de Valenciennes. Seules les dépenses identifiées comme " communes " seront présentées lors des CISSCT, pour acceptation et prise en compte au titre du compte prorata ". L'article 2.2.1 du même cahier prévoit qu' " une retenue sera effectuée directement par le maître d'ouvrage par application d'un taux prévisionnel à l'assiette obtenue après révision de prix sur le montant initial de chaque acompte ou du solde (...) pour être reversée sur le compte ouvert au nom du CISSCT. (...) Cette retenue étant prévisionnelle n'est pas libératoire des sommes dues effectivement par l'entrepreneur à ce titre, somme que l'entrepreneur accepte de voir réglées par compensation qui lui resteront dues dans le cadre d'un reversement. / Une retenue de 1,5 % sera également effectuée pour participation aux comptes interentreprises ". Enfin, aux termes de l'article 2.2.2 : " Le maître d'ouvrage assurant l'avance des dépenses de fonctionnement du CISSCT, il sera procédé à leur remboursement dans le cadre des décomptes mensuels. Le montant prévisionnel de la participation à cette prise en charge est fixé forfaitairement à zéro virgule quinze pour cent (0,15 %) du montant final du marché TVA comprise ".

23. En premier lieu, si le syndicat intercommunal conteste la compétence de la juridiction administrative pour connaître du litige relatif au compte prorata des dépenses communes et au compte prorata des dépenses de fonctionnement du collège interentreprises de sécurité, de santé et des conditions de travail (CISSCT), il résulte des stipulations précitées que ces dépenses sont incluses dans les prix unitaires et forfaitaires du marché conclu avec le groupement dont est mandataire la société Eiffage Route Nord Est. Par suite, la contestation de leur règlement relève nécessairement de la compétence du juge du contrat c'est-à-dire, s'agissant d'un contrat administratif, du juge administratif.

24. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'il soutient, le SIMOUV a signé la convention de gestion du compte prorata des dépenses communes et n'est donc pas fondé à soutenir que ce document ne lui serait pas opposable. Au demeurant, il résulte des stipulations précitées que le maître d'ouvrage procède à une retenue de 1,5 % sur le montant des sommes versées aux entreprises en exécution de leurs marchés de travaux, afin d'alimenter un compte interentreprises permettant d'acquitter les factures présentées par les sociétés intimées, chargées de la gestion de ce compte.

25. En troisième lieu, il n'est pas contesté par le SIMOUV que le groupement représenté par la société Eiffage Route Nord Est devait prendre à sa charge les factures se rapportant aux dépenses communes et les présentait au maître d'ouvrage afin d'en obtenir le remboursement au titre du compte prorata. S'étant vu confier la gestion du compte prorata des dépenses communes dans le cadre de son marché de travaux, le groupement de sociétés est en droit d'obtenir les intérêts moratoires dans les conditions prévues par le contrat.

26. En quatrième lieu, les sociétés intimées ont produit au dossier les éléments justifiant de l'existence de factures adressées au maître d'ouvrage en vue d'en obtenir le remboursement, du montant de ces factures, des dates auxquelles elles ont été reçues et des dates de leur règlement. Le SIMOUV se borne à soutenir que les demandes de remboursement étaient incomplètes, sans en justifier. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que la somme de 81 901,03 euros, dont il ne conteste pas le calcul, ne pouvait être mise à sa charge au titre des intérêts moratoires dus sur le remboursement des dépenses engagées dans le cadre du compte prorata des dépenses communes.

27. En dernier lieu, il résulte des stipulations précitées de l'article 2.2.2 du CCAP que les dépenses de fonctionnement du CISSCT sont avancées par le maître d'ouvrage et remboursées dans le cadre des décomptes mensuels. Si le groupement de sociétés fait valoir qu'il assurait la gestion du compte prorata des dépenses de fonctionnement du CISSCT, un retard dans le remboursement de ces dépenses ne pourrait résulter que d'un règlement lui-même tardif des acomptes mensuels. Dans ces conditions, il n'est pas démontré que les intérêts moratoires dont le groupement de sociétés demande le versement à ce titre se distingueraient de ceux qui lui sont dus au titre de ces acomptes. Par suite, il n'est pas fondé, par la voie de l'appel incident, à solliciter une réformation du jugement attaqué sur ce point.

Sur les intérêts moratoires complémentaires :

28. Aux termes du III de l'article 5 du décret du 21 février 2002, applicable au litige : " Le défaut d'ordonnancement ou de mandatement de tout ou partie des intérêts moratoires dans un délai de 30 jours à compter du jour suivant la date de mise en paiement du principal entraîne le versement d'intérêts moratoires complémentaires. / Le taux applicable à ces intérêts moratoires complémentaires est le taux des intérêts moratoires d'origine, majoré de deux points. Ces intérêts moratoires sont calculés sur le montant des intérêts moratoires d'origine et ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée. / Ces intérêts moratoires complémentaires s'appliquent à compter du jour suivant la date de paiement du principal jusqu'à la date d'ordonnancement ou de mandatement de l'ensemble des intérêts moratoires ". Aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Aux termes de l'article 7 de la même loi : " L'Administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond ".

29. Le tribunal administratif a condamné le SIMOUV à verser au groupement constitué des sociétés Eiffage Route Nord Est, Eiffage Génie civil et Entreprise Jean Lefebvre les intérêts moratoires dus sur les états d'acompte et les frais engagés au titre du compte prorata de dépenses communes, en les assortissant à nouveau d'intérêts moratoires et de leur capitalisation en application de l'article 1343-2 du code civil. Par la voie de l'appel incident, le groupement de sociétés demande à la cour les intérêts moratoires complémentaires prévus par les dispositions précitées du III de l'article 5 du décret du 21 février 2002.

30. Une telle demande, qui vise à obtenir l'indemnisation du versement tardif des intérêts moratoires, ne soulève pas un litige distinct de celui qui fait l'objet de l'appel principal portant sur ces mêmes intérêts moratoires et est donc recevable devant la cour. Il ne résulte pas de l'instruction que les intérêts moratoires relatifs au règlement tardif des états d'acompte et des frais engagés au titre des comptes prorata ont été mandatés dans un délai de trente jours à compter du jour suivant la date de mise en paiement du principal. Le SIMOUV, qui n'a pas invoqué la prescription quadriennale prévue par l'article 1er de la loi précitée du 31 décembre 1968 avant que le tribunal administratif se soit prononcé sur le fond, ne peut pas invoquer cette prescription en appel. Contrairement à ce que soutient le SIMOUV le III de l'article 5 du décret du 21 février 2002 ne fait pas obstacle à la capitalisation décidée par les premiers juges. Le groupement de sociétés a donc droit à des intérêts moratoires complémentaires calculés, pour chacun de ces règlements tardifs, sur la base du taux des intérêts moratoires d'origine majoré de deux points, appliqué sur le montant de ces intérêts d'origine à compter du jour suivant la date de paiement du principal jusqu'à la date de mandatement des intérêts moratoires d'origine. Par suite, il y a lieu de substituer ces intérêts moratoires complémentaires prévus au III de l'article 5 du décret du 21 février 2002 aux intérêts moratoires dont le tribunal administratif a assorti les intérêts moratoires d'origine.

Sur les travaux supplémentaires :

31. Les sociétés Eiffage Route Nord Est, Eiffage Génie civil et Entreprise Jean Lefebvre Nord demandent, par la voie de l'appel incident, le règlement de prestations supplémentaires pour un montant de 180 150 euros hors taxes et correspondant à des frais d'immobilisation de personnel et de matériels consécutifs à divers retards dans le dévoiement de réseaux, la programmation des travaux sur les territoires des communes d'Anzin et

de Condé-sur-Escaut et la réception d'éléments de base sur la signalisation et le mobilier urbain.

32. Les sociétés défenderesses ne contestent pas que les frais dont elles réclament le paiement sont sans rapport avec des difficultés exceptionnelles et imprévisibles rencontrées sur le chantier, ainsi que l'ont relevé les premiers juges. Il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est pas démontré, que les retards auxquels sont imputés les frais litigieux résultent de défaillances du maître d'ouvrage dans le contrôle et la direction du marché. Par suite, les conclusions des sociétés tendant à obtenir l'indemnisation de travaux supplémentaires pour un montant de 180 150 euros hors taxes doivent être rejetées.

Sur l'appel en garantie :

33. Le SIMOUV fait valoir en appel que la société Ingerop Conseil et Ingénierie, mandataire du groupement d'ingénierie du Valenciennois désigné comme maître d'œuvre de l'opération de travaux, n'a pas respecté le délai de quinze jours prescrit pour la validation des projets de décompte mensuels par les stipulations de l'article 6.2.1 du CCAP applicable au marché de maîtrise d'œuvre de telle sorte que les retards de paiement des états d'acomptes mensuels n° 15, 18 et 19 lui sont imputables.

34. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'état d'acompte n° 15 a été reçu par le maître d'œuvre le 5 février 2013 et non le 29 janvier 2013 comme le soutient le SIMOUV, puis a été communiqué à ce dernier pour paiement le 27 février 2013. L'état d'acompte n° 18, reçu par le maître d'œuvre le 11 juin 2013, a été transmis au maître d'ouvrage pour règlement le 9 juillet 2013. Si ces deux acomptes ne lui ont pas été communiqués par la société Ingerop Conseil et Ingénierie dans le délai précité de quinze jours, le SIMOUV n'établit pas s'être trouvé dans l'impossibilité de procéder à leur règlement dans le délai global de paiement de trente jours, qui n'était pas arrivé à son échéance à la date de réception effective des états d'acompte par le maître d'ouvrage. Dans ces conditions, le SIMOUV ne démontre pas que les intérêts moratoires dus sur ces deux acomptes seraient imputables, même partiellement, au maître d'œuvre.

35. En second lieu, il résulte de l'instruction que le maître d'œuvre a reçu l'état d'acompte n° 19 le 25 juin 2013 et l'a transmis au maître d'ouvrage le 10 septembre 2013, soixante-dix-sept jours plus tard, mettant ainsi le SIMOUV dans l'impossibilité de respecter le délai global de paiement de trente jours. Eu égard à la circonstance que le SIMOUV a réglé l'état d'acompte le 30 septembre 2013, vingt jours après sa réception effective, les intérêts moratoires y afférents auraient été calculés sur la base de cinq jours de retard seulement si le maître d'œuvre avait respecté le délai de quinze jours imparti par son contrat pour en assurer la communication au maître d'ouvrage. Ainsi qu'il a été dit aux points 12 et 15, les intérêts moratoires relatifs à l'état d'acompte n° 19, calculés sur la base de soixante-sept jours de retard, s'établissent à la somme de 36 955,18 euros. Ces intérêts moratoires sont donc imputables à la société Ingerop Conseil et Ingénierie à raison de soixante-deux jours de retard correspondant à un montant de 34 198,33 euros.

36. Le SIMOUV est donc fondé à appeler la société Ingerop Conseil et Ingénierie à le garantir des condamnations prononcées contre lui dans la limite d'une somme de 34 198,33 euros.

37. Il résulte de tout ce qui précède, notamment des points 16 et 26, que le SIMOUV est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille l'a condamné à verser à la société Eiffage Route Nord Est, prise en sa qualité de mandataire du groupement d'entreprises comprenant également les sociétés Eiffage Génie civil et Entreprise Jean Lefebvre Nord, la somme de 441 483,45 euros, qu'il y a lieu de ramener à la somme de 436 652,91 euros et pour laquelle il doit être garanti par la société Ingerop Conseil et Ingénierie pour un montant de 34 198,33 euros. Les sociétés précitées sont seulement fondées à demander, par la voie de l'appel incident, que les intérêts moratoires soient assortis des intérêts moratoires complémentaires calculés dans les conditions rappelées au point 30, qu'il y a lieu de substituer aux intérêts moratoires dont le tribunal administratif a assorti les intérêts moratoires d'origine.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

38. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 441 483,45 euros que le SIMOUV a été condamné à verser à la société Eiffage Route Nord Est, prise en sa qualité de mandataire du groupement d'entreprises comprenant également les sociétés Eiffage Génie civil et Entreprise Jean Lefebvre Nord, par le jugement du tribunal administratif de Lille n° 1505737 du 19 mars 2019 est ramenée à 436 652,91 euros. Cette somme est assortie des intérêts moratoires complémentaires calculés dans les conditions rappelées au point 30, et qui viennent se substituer aux intérêts moratoires dont le tribunal administratif a assorti les intérêts moratoires d'origine.

Article 2 : La société Ingerop Conseil et Ingénierie est condamnée à garantir le SIMOUV pour un montant de 34 198,33 euros.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Lille n° 1505737 du 19 mars 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat intercommunal de mobilité et d'organisation urbaine de Valenciennes, à la société Eiffage Route Nord Est, première société dénommée dans le mémoire en défense, et à la société Ingerop Conseil et Ingénierie.

Délibéré après l'audience publique du 21 mai 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 juin 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : J.-M. Guérin-LebacqLa présidente de chambre,

Signé : M.-P. ViardLa greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

C. Huls-Carlier

2

N° 22DA01059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01059
Date de la décision : 04/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Guerin-Lebacq
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : ADEKWA LILLE METROPOLE

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-04;22da01059 ?
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