La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2024 | FRANCE | N°24DA00377

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 30 mai 2024, 24DA00377


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 27 novembre 2023 portant transfert aux autorités belges en vue de l'examen de sa demande d'asile.



Par un jugement n° 2310859 du 24 janvier 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté, enjoint au préfet d'enregistrer et de transmettre la demande d'asile de M. B... à l'Office français de protection des réfugiés et

apatrides et condamné l'Etat à verser une somme de 800 euros au titre des frais de justice.



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 27 novembre 2023 portant transfert aux autorités belges en vue de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2310859 du 24 janvier 2024, le magistrat désigné du tribunal administratif de Lille a annulé cet arrêté, enjoint au préfet d'enregistrer et de transmettre la demande d'asile de M. B... à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et condamné l'Etat à verser une somme de 800 euros au titre des frais de justice.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 24DA00377 le 24 février 2024, le préfet du Nord, représenté par Me Nicolas Rannou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. B... devant le tribunal administratif.

Il soutient que l'article 17 du règlement du 26 juin 2013 n'a pas pour objet de pallier une défaillance systémique d'un autre Etat, qu'une défaillance de la Belgique n'est pas démontrée et que l'arrêté n'est pas entaché d'incompétence, d'insuffisance de motivation, de défaut d'examen, de défaut d'information quant au règlement Eurodac, d'erreur de fait, d'erreur d'appréciation et de violation des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 4 et 5 du règlement du 26 juin 2013.

Par une requête enregistrée sous le n° 24DA00441 le 1er mars 2024, le préfet du Nord demande à la cour de surseoir à l'exécution de ce jugement.

Les requêtes ont été communiquées à M. B... qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, dit " règlement Dublin III " ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Il y a lieu de joindre les requêtes susvisées pour y statuer par une seule décision.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

2. M. B... a déclaré, lors de l'entretien individuel conduit le 5 octobre 2023 avec un interprète en langue pachtou, qu'il avait demandé l'asile en Belgique le 22 juin 2021 et que sa demande avait été " rejetée " le 1er septembre 2023. Il a également fait état de ce rejet dans sa demande devant le tribunal.

3. Compte tenu de ces indications précises et réitérées, eu égard au délai de recours de trente jours, à caractère suspensif, ouvert en Belgique devant le conseil du contentieux des étrangers à l'encontre d'un refus de l'asile et en l'absence d'autre élément, la circonstance que la réponse des autorités belges à la demande de reprise en charge de M. B..., le 17 novembre 2023, se soit référée non pas au d) mais au b) du 1 de l'article 18 du règlement du 26 juin 2013 ne suffit pas à établir que la demande d'asile de M. B... n'avait toujours pas été examinée à la date de l'arrêté du 27 novembre 2023.

4. Dans ces conditions, l'arrêté n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, compte tenu de l'objectif de célérité visé au considérant 5 du règlement du 26 juin 2013, au regard de l'article 17 de ce règlement.

Sur les autres moyens invoqués par M. B... :

5. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. B....

6. Il ressort des pièces du dossier que, conformément à l'article 4 du règlement du 26 juin 2013, les brochures " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - Quel pays sera responsable de ma demande ' " et " Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce que cela signifie ' " en langue pachtou ont été remises et expliquées à M. B... par le truchement d'un interprète lors de l'entretien individuel du 5 octobre 2023.

7. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a bénéficié d'un entretien individuel dans les conditions prévues par l'article 5 du règlement du 26 juin 2013.

8. La circonstance, à la supposer établie, qu'à la suite du rejet de sa demande d'asile par les autorités belges, M. B... serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement vers l'Afghanistan ne saurait caractériser la méconnaissance par la Belgique de ses obligations.

9. Les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la violation des articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 17 du règlement du 26 juin 2013 doivent donc être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné du tribunal administratif a annulé son arrêté.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

11. Il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.

Sur l'application des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative :

12. La présente décision n'implique aucune mesure d'exécution.

Sur l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

13. La demande présentée par M. B... et son conseil, partie perdante, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 24 janvier 2024 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Lille est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du préfet du Nord à fin de sursis à exécution.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Nord, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....

Copie en sera transmise à Me Nicolas Rannou.

Délibéré après l'audience publique du 15 mai 2024 à laquelle siégeaient :

M. Marc Heinis, président de chambre,

M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 mai 2024.

Le président-rapporteur,

Signé : M. Heinis

L'assesseur le plus ancien,

Signé : B. Baillard

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth Héléniak

2

N°24DA00377, 24DA00441


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24DA00377
Date de la décision : 30/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Marc Heinis
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-30;24da00377 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award