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02/05/2024 | FRANCE | N°22DA01556

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 4ème chambre, 02 mai 2024, 22DA01556


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La société en nom collectif (SNC) Hôtelière de Loon-Plage a demandé au tribunal administratif de Lille, par deux demandes distinctes, de prononcer une réduction, d'une part, des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des locaux qu'elle exploite en tant qu'hôtel-restaurant à Loon-Plage, d'autre part, des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés

bâties et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à rai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Hôtelière de Loon-Plage a demandé au tribunal administratif de Lille, par deux demandes distinctes, de prononcer une réduction, d'une part, des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des locaux qu'elle exploite en tant qu'hôtel-restaurant à Loon-Plage, d'autre part, des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxes annexes auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des mêmes locaux. La SNC Hôtelière de Loon-Plage demandait aussi au tribunal administratif de mettre à la charge de l'Etat une somme totale de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement nos 1905034, 1908037 du 21 avril 2022, le tribunal administratif de Lille a prononcé les réductions demandées et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2022, et par un mémoire enregistré le 26 juillet 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de la SNC Hôtelière de Loon-Plage les fractions de cotisation foncière des entreprises, de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxes annexes dont la décharge a été prononcée par ce jugement.

Il soutient que, pour prononcer une réduction de la base imposable à la cotisation foncière des entreprises assignée à la SNC Hôtelière de Loon-Plage au titre de l'année 2018, ainsi que la réduction correspondante de la cotisation foncière des entreprises à laquelle ce contribuable a été assujetti, c'est à tort que le tribunal administratif de Lille, d'une part, a estimé que la production, par la SNC Hôtelière de Loon-Plage, telle que suggérée par l'administration dans ses écritures, de pièces complémentaires était sans intérêt pour la solution du litige et, d'autre part, a écarté la valeur locative établie, avant la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, par comparaison, alors même que cette évaluation ne fondait pas directement les impositions en litige et qu'elle avait été régulièrement déterminée, l'administration n'ayant indiqué que par erreur aux premiers juges renoncer au terme de comparaison utilisé pour ce faire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2023, la SNC Hôtelière de Loon-Plage, représentée par Me Zapf, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que, dès lors qu'elle avait démontré que, pour déterminer la valeur locative initiale de son établissement, le service avait eu recours à un terme de comparaison ayant lui-même fait l'objet d'une évaluation irrégulière et que l'administration a expressément abandonné en cours d'instance, c'est à bon droit que le tribunal administratif a accepté d'y substituer le local-type qu'elle proposait, après avoir constaté que sa pertinence n'était pas contestée.

Par une ordonnance du 21 décembre 2022, la présidente de la cour administrative d'appel de Douai a transmis au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, les conclusions de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique tendant à l'annulation du jugement du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Lille en ce qu'il a prononcé une réduction des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties et des taxes annexes auxquelles la SNC Hôtelière de Loon-Plage a été assujettie au titre de l'année 2018 dans les rôles de la commune de Loon-Plage à raison de ses locaux à usage d'hôtel-restaurant et en ce qu'il a mis à la charge de l'Etat, dans le cadre de ce litige, une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un arrêt n°22DA01556 du 12 octobre 2023, la cour a, d'une part, prescrit, avant dire-droit, un supplément d'instruction aux fins, pour la SNC Hôtelière de Loon-Plage, de produire, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de cet arrêt, des déclarations modèle CBD établies séparément pour ce qui concerne la partie hôtelière et la partie affectée à usage de restaurant de son établissement de Loon-Plage et présentant notamment le détail des surfaces affectées à l'une et l'autre de ces activités et, d'autre part, réservé jusqu'en fin d'instance tous droits et moyens sur lesquels elle n'a pas statué par cet arrêt.

Des pièces ont, dans le cadre de ce supplément d'instruction, été produites par Me Zapf, pour la SNC Hôtelière de Loon-Plage et enregistrées au greffe de la cour le 17 octobre 2023.

Par un mémoire, enregistré le 31 octobre 2023, dans le cadre de ce supplément d'instruction, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut aux mêmes fins que sa requête.

Il soutient, en outre, que :

- les mentions portées sur les déclarations produites par la SNC Hôtelière de Loon-Plage dans le cadre du supplément d'instruction prescrit par la cour sont discordantes, tant en ce qui concerne la surface des bâtiments que celle des parcs de stationnement, avec, d'une part, les éléments portés sur des déclarations de surface antérieurement souscrites en ce qui concerne les établissements en cause et, d'autre part, les informations que l'administration a pu collecter sur le site internet Géoportail, lesquels éléments et informations permettent de penser que ces bâtiments et parcs de stationnement représentent des surfaces supérieures à celles déclarées en dernier lieu ;

- il serait souhaitable que la SNC Hôtelière de Loon-Plage produise de nouvelles déclarations rectificatives, accompagnées de plans cotés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt avant dire-droit du 12 octobre 2023, la cour, avant de statuer sur les conclusions de la requête par laquelle le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique a relevé appel du jugement du 21 avril 2022 du tribunal administratif de Lille prononçant la réduction des cotisations primitives de cotisation foncière des entreprises et de taxes annexes auxquelles la société en nom collectif (SNC) Hôtelière de Loon-Plage a été assujettie au titre de l'année 2018 à raison des locaux qu'elle exploite en tant qu'hôtel-restaurant à Loon-Plage et mettant à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, a prescrit un supplément d'instruction aux fins, pour la SNC Hôtelière de Loon-Plage, de produire, dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de cet arrêt, des déclarations modèle CBD établies séparément pour ce qui concerne la partie hôtelière et la partie affectée à usage de restaurant de son établissement de Loon-Plage et présentant notamment le détail des surfaces affectées à l'une et l'autre de ces activités.

2. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision (...) ". Il incombe, en principe, au juge de statuer au vu des pièces du dossier, le cas échéant après avoir demandé aux parties les éléments complémentaires qu'il juge nécessaires à son appréciation. Il ne lui revient d'ordonner une expertise que lorsqu'il n'est pas en mesure de se prononcer au vu des pièces et éléments qu'il a recueillis et que l'expertise présente ainsi un caractère utile.

3. A la suite du supplément d'instruction, la SNC Hôtelière de Loon-Plage a versé deux déclarations modèle CBD, l'une concernant la partie hôtelière et l'autre afférente à la partie exploitée en tant que restaurant de son établissement de Loon-Plage. La déclaration concernant le restaurant attribue à cet établissement une surface de 59 m², à laquelle est ajoutée une surface de 36 m² correspondant au parc de stationnement qui le dessert, soit une surface totale de 95 m² pour le restaurant. La déclaration se rapportant à l'établissement hôtelier attribue, à l'hôtel, une surface de 623 m² et y ajoute une surface de 297 m² correspondant à des annexes et dépendances, ainsi qu'une superficie de 344 m² correspondant au parc de stationnement qui est affecté à l'établissement, soit une surface totale de 1 264 m² pour l'hôtel et une surface cumulée de 1 359 m² pour le restaurant et l'hôtel.

4. Toutefois, le ministre, à qui ces documents ont été communiqués, fait valoir, sans être contredit, que les surfaces portées sur ces déclarations sont incohérentes avec celles portées sur une précédente déclaration modèle CBD souscrite, en 2013, par la SNC Hôtelière de Loon-Plage, laquelle faisait mention de surfaces de 847,35 m² pour les chambres de l'hôtel, de 176 m² pour le restaurant, de 90 m² pour le bar, de 108 m² pour la cuisine, de 204,15 m² pour les dégagements, de 16,90 m² pour les sanitaires, de 4,90 m² pour les réserves, de 21,60 m² pour la lingerie, de 21,60 m² pour le local du personnel et de 1 000 m² pour les parcs de stationnement, soit d'une surface totale de 2 490,50 m², supérieure de 1 131,50 m² à la surface cumulée résultant des dernières déclarations établies par la SNC Hôtelière de Loon-Plage et produites à la suite du supplément d'instruction prescrit par la cour. Or, il ne résulte d'aucun élément de l'instruction, ni même n'est allégué, que l'immeuble dans lequel sont exploités ces établissements aurait connu, depuis 2013, des changements notables dans ses caractéristiques physiques. En outre, le ministre fait valoir que les surfaces portées sur les déclarations produites à la suite du supplément d'instruction sont également incohérentes avec les données accessibles sur le site internet Géoportail, desquelles il ressort que l'établissement hôtelier exploité à Loon-Plage par la SNC Hôtelière de Loon-Plage, dans un immeuble qui comporte un étage, couvre une superficie au sol, hors parc de stationnement, de 1 140 m², tandis que la surface du parc de stationnement est évaluée à 1 010 m² voies de circulation non comprises.

5. Dans ces conditions, à l'issue du supplément d'instruction qu'elle a prescrit par son arrêt du 12 octobre 2023, la cour n'est pas davantage en mesure de se prononcer, au vu des seuls éléments versés à l'instruction, sur l'ensemble des paramètres permettant de déterminer l'étendue de la réduction des bases imposables à laquelle la SNC Hôtelière de Loon-Plage pourra, le cas échéant, prétendre à l'issue du processus de détermination des valeurs locatives cadastrales susceptibles d'être assignées, d'une part, à la partie affectée au restaurant et, d'autre part, à la partie exploitée en tant qu'hôtel de l'établissement dont elle dispose, pour les besoins de ces activités, à Loon-Plage.

6. La cour n'est, en particulier, pas à même de déterminer avec un niveau de précision et d'exactitude suffisant, en distinguant les parties affectées à l'établissement hôtelier de celles affectées au restaurant, les surfaces de chacune des parties composant l'immeuble exploité par la SNC Hôtelière de Loon-Plage et ses dépendances, notamment les parcs de stationnement.

7. Il y a lieu, dès lors, avant de statuer sur la requête d'appel du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, de faire application des dispositions de l'article R. 621-1 du code de justice administrative et d'ordonner une expertise contradictoire sur ce point.

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la requête du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, procédé à une expertise. L'expert unique aura pour mission :

1°) de se faire communiquer l'entier dossier administratif et contentieux, les déclarations souscrites par la SNC Hôtelière de Loon-Plage en ce qui concerne les surfaces imposables de l'immeuble qu'elle exploite sur le territoire de la commune de Loon-Plage, ainsi que des plans détaillés et cotés de cet immeuble, de même que tous les documents nécessaires à l'accomplissement de sa mission et d'entendre les parties et tous sachants ;

2°) de déterminer les surfaces de chacune des parties composant l'immeuble exploité par la SNC Hôtelière de Loon-Plage et ses dépendances, notamment les parcs de stationnement, en distinguant les parties affectées à l'établissement hôtelier de celles affectées au restaurant ;

3°) de donner à la cour tout autre élément d'information qu'il estimera utile ;

4°) le cas échéant, de procéder à une médiation entre les parties à charge d'en avertir la cour.

Article 2 : Les opérations d'expertise auront lieu contradictoirement entre, d'une part, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et, d'autre part, la SNC Hôtelière de Loon-Plage.

Article 3 : L'expert sera désigné par la présidente de la cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Préalablement à toute opération, l'expert prêtera serment dans les formes prévues à l'article R. 621-3 du code de justice administrative. L'expert déposera son rapport au greffe de la cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par la présidente de la cour dans sa décision le désignant.

Article 4 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 5 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, ainsi qu'à la SNC Hôtelière de Loon-Plage.

Copie en sera transmise à l'administratrice de l'Etat chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 11 avril 2024 à laquelle siégeaient :

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative ;

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller ;

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 mai 2024.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de la formation

de jugement,

signé : F.-X. Pin

La greffière,

Signé : E. Héléniak

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Elisabeth Héléniak

1

2

N°22DA01556


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01556
Date de la décision : 02/05/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Pin
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : TZA TOULEMONT ZAPF AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-02;22da01556 ?
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