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29/02/2024 | FRANCE | N°23DA01688

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 29 février 2024, 23DA01688


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... et Mme B... F... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler le permis de construire six maisons d'habitation délivré par le maire de Rouen le 5 mai 2022 à l'office public de l'habitat de Rouen sur un ensemble de terrains situés 29-30-31 rue sœur Marie Ernestine à Rouen, cadastrés DL 617, DL 618, DL 619, DL 620, DL 621 et DL 622, ainsi que la décision du 1er septembre 2021 portant rejet de leur recours gracieux.



Par un jugemen

t n° 2203585 du 6 juillet 2023, le tribunal administratif de Rouen a fait partiellement droit à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... et Mme B... F... ont demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler le permis de construire six maisons d'habitation délivré par le maire de Rouen le 5 mai 2022 à l'office public de l'habitat de Rouen sur un ensemble de terrains situés 29-30-31 rue sœur Marie Ernestine à Rouen, cadastrés DL 617, DL 618, DL 619, DL 620, DL 621 et DL 622, ainsi que la décision du 1er septembre 2021 portant rejet de leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2203585 du 6 juillet 2023, le tribunal administratif de Rouen a fait partiellement droit à leur demande, annulé l'arrêté du 5 mai 2022 en tant qu'il autorise la construction à une distance insuffisante de la limite séparative d'un garage accolé au bâtiment n° 2, d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol excédant 15 m2, et mis à la charge de la commune de Rouen la somme de 1 500 euros à leur verser en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I - Par une requête et des mémoires enregistrés les 24 août 2023, 4 et 8 janvier 2024 sous le n° 23DA01688, l'office public de l'habitat (OPH) de Rouen, représenté par Me Xavier Boyer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2023 ;

2°) de rejeter les demandes de Mme C... et Mme F... ;

3°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et de l'inviter à formuler la demande de permis modificatif jugée nécessaire ;

4°) de condamner toute partie perdante à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le moyen d'annulation retenu par le tribunal n'est pas fondé : si la distance de retrait de 3 mètres minimum par rapport à la limite séparative posée par l'article 3.2 du règlement du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de la métropole de Rouen Normandie dans le secteur UCO de la commune de Rouen doit s'appliquer au garage accolé au bâtiment n° 2, elle apparaît bien respectée sur le plan de masse ;

- les autres moyens invoqués par les demanderesses en première instance ne sont pas fondés ;

- le moyen tiré de l'incompétence de la signataire du permis de construire manque en fait, dans la mesure où le maire lui avait accordé une délégation à cette fin ;

- le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis manque en fait ; en tout état de cause, le caractère insuffisant du dossier de permis n'est de nature à entacher le permis de construire d'illégalité que si les approximations du dossier ont été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ;

- l'implantation des containers de poubelles et l'installation des murets techniques intégrant des boîtes aux lettres et des coffrets en bordure de la rue sœur Marie Ernestine est conforme aux dispositions de l'article UCO 3.1 du PLUi ;

- les deux locaux à destination de stationnement pour les cycles respectent les règles de retrait posées par l'article UCO 3.2 du PLUi ;

- l'article UCO 3.3 n'est pas applicable aux constructions contiguës ou jumelées sur un même terrain ; en tout état de cause, la distance qui sépare les maisons situées au sud et celles situées à l'est est de 5 mètres, conformément à l'article UCO 3.3 du PLUi ;

- l'implantation de la cuve de récupération des eaux pluviales est conforme à l'article UCO 5.2 du PLUi ;

- le projet ne porte pas atteinte au caractère des lieux avoisinants, conformément aux dispositions de l'article UCO 4 du PLUi ;

- si la cour estime fondé l'un des moyens des demanderesses de première instance, elle devrait l'inviter à régulariser les vices en cause par l'obtention d'un permis modificatif en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par un appel incident, enregistré le 9 octobre 2023, Mme C... et Mme F..., représentées par Me Hélène Colliou, demandent à la cour :

- de rejeter la requête d'appel ;

- de confirmer le jugement du 6 juillet 2023 en tant qu'il a annulé partiellement le permis de construire du 5 mai 2022 ;

- d'infirmer le jugement en tant qu'il n'a pas annulé totalement ce permis ;

- de mettre à la charge de la commune de Rouen une somme globale de 1 800 euros à leur verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- le moyen d'annulation tiré de la méconnaissance par le garage du bâtiment 2 de la règle de retrait de 3 mètres est fondé ;

- le permis méconnaît les dispositions des articles UCO 3.1, UCO 3.3, UCO 5.2 et UCO 4 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 décembre 2023, la commune de Rouen, représentée par Me Marie Verilhac, demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 6 juillet 2023 ;

- de rejeter les demandes de Mme C... et Mme F... ;

- de condamner solidairement Mme C... et Mme F... à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen d'annulation tiré de la méconnaissance par le garage du bâtiment 2 de la règle de retrait de 3 mètres n'est pas fondé ;

- le permis ne méconnaît pas les dispositions des articles UCO 3.1, UCO 3.3, UCO 5.2 et UCO 4 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie.

Par un mémoire enregistré le 18 janvier 2024, la métropole de Rouen Normandie, représentée par Me Rouhaud, demande à la cour :

- d'infirmer le jugement du 6 juillet 2023 en ce qu'il annule l'arrêté du 5 mai 2022 en tant qu'il autorise la construction à une distance insuffisante de la limite séparative d'un garage accolé au bâtiment n° 2 d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol excédant 15 m2 ;

- à titre subsidiaire, de surseoir à statuer en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et d'inviter l'OPH de Rouen à régulariser le permis en tant que la construction du garage à une distance insuffisante de la limite séparative méconnaîtrait les dispositions de l'article 3.2 du règlement de la zone UCO du PLUi de la métropole de Rouen Normandie ;

- de confirmer le jugement du 6 juillet 2023 en tant qu'il a rejeté le reste de la demande d'annulation de Mmes C... et F... ;

- de rejeter la demande présentée par Mmes C... et F... en première instance.

Elle soutient que :

- le moyen d'annulation retenu par le tribunal n'est pas fondé : si la distance de retrait de 3 mètres minimum par rapport à la limite séparative posée par l'article 3.2 du règlement du PLUi de la métropole de Rouen Normandie dans le secteur UCO doit s'appliquer au garage accolé au bâtiment 2, elle apparaît bien respectée sur le plan de masse ;

- elle s'en rapporte à la défense en première instance de la commune de Rouen et de l'OPH de Rouen pour justifier de la légalité du permis de construire délivré.

Par une lettre du 22 janvier 2024 et en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la cour a informé les parties de ce qu'elle était susceptible, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête pendant un délai de six mois afin de permettre la régularisation des vices de l'arrêté du 5 mai 2022 tenant à ce qu'il autorise la construction d'un garage accolé au bâtiment n° 2 à une distance de la limite séparative inférieure à 3 mètres et la construction des bâtiments nord et sud à une distance entre eux inférieure à 5 mètres.

L'OPH de Rouen a présenté ses observations le 26 janvier 2024 et conclut au respect par le projet des articles UCO 3.2 et UCO 3.3 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie.

Par une ordonnance du 1er février 2024, la clôture d'instruction a été fixée avec effet immédiat en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

II - Par une requête et des mémoires enregistrés les 1er septembre 2023, 11 septembre 2023, 18 décembre 2023 et 26 janvier 2024, sous le n° 23DA01722, la commune de Rouen, représentée par Me Marie Verilhac, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 6 juillet 2023 ;

2°) de rejeter les demandes de Mme C... et Mme F... ;

3°) de condamner solidairement Mmes C... et F... à lui verser la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- si la distance de retrait de 3 mètres minimum par rapport à la limite séparative posée par l'article 3.2 du règlement du PLUi de la métropole de Rouen Normandie dans le secteur UCO doit s'appliquer au garage accolé au bâtiment n° 2, elle apparaît bien respectée sur le plan de masse, sur le plan de raccordement aux réseaux existants ou sur le plan des rez-de-chaussée, alors qu'elle est confusément représentée sur le plan des étages ; le tribunal administratif a commis une erreur de fait ou une erreur manifeste d'appréciation en retenant la méconnaissance de la règle de retrait ;

- le caractère insuffisant du dossier de permis n'est de nature à entacher le permis de construire d'illégalité que si les approximations du dossier ont été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ;

- l'implantation des containers de poubelles et l'installation des murets techniques intégrant boîtes aux lettres et coffrets en bordure de la rue sœur Marie Ernestine est conforme aux dispositions de l'article UCO 3.1 du PLUi ;

- le PLUi n'interdit pas le jumelage des maisons ; la distance qui sépare les maisons situées au sud et celles situées à l'est est de 5 mètres, conformément à l'article UCO 3.3 du PLUi ;

- l'implantation de la cuve de récupération des eaux pluviales est conforme à l'article UCO 5.2 du PLUi ;

- le projet ne porte pas atteinte au caractère des lieux avoisinants, conformément aux dispositions de l'article UCO 4 du PLUi.

Par un appel incident, enregistré le 7 novembre 2023, Mme C... et Mme F..., représentées par Me Hélène Colliou, demandent à la cour :

- de rejeter la requête d'appel ;

- de confirmer le jugement du 6 juillet 2023 en tant qu'il a annulé partiellement le permis de construire du 5 mai 2022 ;

- d'infirmer le jugement en tant qu'il n'a pas annulé totalement ce permis ;

- de mettre à la charge de la commune de Rouen une somme globale de 1 800 euros à leur verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- le moyen d'annulation tiré de la méconnaissance par le garage du bâtiment n°2 de la règle de retrait de 3 mètres est fondé ;

- le permis méconnaît les dispositions des articles UCO 3.1, UCO 3.3, UCO 5.2 et UCO 4 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie.

Par un mémoire enregistré le 4 janvier 2024, l'office public de l'habitat (OPH) de Rouen, représenté par Me Xavier Boyer, demande à la cour :

- d'annuler le jugement du 6 juillet 2023 ;

- de rejeter les demandes de Mme C... et Mme F... ;

- à titre subsidiaire, de surseoir à statuer et de l'inviter à formuler la demande de permis modificatif jugée nécessaire ;

- de condamner toute partie perdante à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le moyen d'annulation retenu par le tribunal n'est pas fondé : si la distance de retrait de 3 mètres minimum par rapport à la limite séparative posée par l'article 3.2 du règlement du PLUi de la métropole de Rouen Normandie dans le secteur UCO-1 doit s'appliquer au garage accolé au bâtiment 2, elle apparaît bien respectée sur le plan de masse ;

- les autres moyens invoqués par les requérantes en première instance ne sont pas fondés :

- le moyen tiré de l'incompétence de la signataire du permis manque en fait, dans la mesure où le maire lui avait accordé une délégation à cette fin ;

- le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis manque en fait ; en tout état de cause, le caractère insuffisant du dossier de permis n'est de nature à entacher le permis de construire d'illégalité que si les approximations du dossier ont été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ;

- l'implantation des containers de poubelles et l'installation des murets techniques intégrant des boîtes aux lettres et des coffrets en bordure de la rue sœur Marie Ernestine est conforme aux dispositions de l'article UCO 3.1 du PLUi ;

- les deux locaux à destination de stationnement pour les cycles respectent les règles de retrait posées par l'article UCO 3.2 du PLUi ;

- l'article UCO 3.3 n'est pas applicable aux constructions contiguës ou jumelées sur un même terrain ; en tout état de cause, la distance qui sépare les maisons situées au sud et celles situées à l'est est de 5 mètres, conformément à l'article UCO 3.3 du PLUi ;

- l'implantation de la cuve de récupération des eaux pluviales est conforme à l'article UCO 5.2 du PLUi ;

- le projet ne porte pas atteinte au caractère des lieux avoisinants, conformément aux dispositions de l'article UCO 4 du PLUi ;

- si la cour estime fondé l'un des moyens des requérantes, elle devrait l'inviter à régulariser par l'obtention d'un permis modificatif en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Par une ordonnance du 19 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée avec effet immédiat en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Par une lettre du 22 janvier 2024 et en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la cour a informé les parties de ce qu'elle était susceptible, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête pendant un délai de six mois afin de permettre la régularisation des vices de l'arrêté du 5 mai 2022 tenant à ce qu'il autorise la construction d'un garage accolé au bâtiment n° 2 à une distance de la limite séparative inférieure à 3 mètres et la construction des bâtiments nord et sud à une distance entre eux inférieure à 5 mètres.

L'OPH de Rouen a présenté ses observations le 26 janvier 2024 et conclut au respect par le projet des articles UCO 3.2 et UCO 3.3 du PLUi de la métropole Rouen Normandie.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Hélène Colliou, représentant Mme C... et Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. L'office public de l'habitat (OPH) de Rouen, après avoir obtenu un permis de démolir sur un ensemble de terrains situés 29-30-31 rue sœur Marie Ernestine à Rouen cadastrés DL 617, DL 618, DL 619, DL 620, DL 621 et DL 622, a déposé, le 23 décembre 2021, une demande de permis de construire six maisons individuelles jumelées en trois bâtiments distincts sur les mêmes terrains, qu'il a complétée le 7 avril 2022. Par un arrêté du 5 mai 2022, le maire de Rouen a accordé le permis de construire sollicité, en l'assortissant de prescriptions. Mme C... et Mme F... ont présenté un recours gracieux contre cet arrêté, qui a été rejeté le 1er septembre 2022. Elles ont alors saisi le tribunal administratif de Rouen qui, par un jugement du 6 juillet 2023, a fait partiellement droit à leur demande d'annulation de l'arrêté du 5 mai 2022 confirmé sur recours gracieux, en annulant cet arrêté en tant qu'il autorise la construction à une distance insuffisante par rapport à la limite séparative d'un garage accolé au bâtiment n° 2, d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol excédant 15 m2, et en mettant à la charge de la commune de Rouen la somme de 1 500 euros à leur verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par les requêtes visées ci-dessus, l'OPH de Rouen et la commune de Rouen font appel de ce jugement et demandent le rejet de la demande d'annulation de l'arrêté du 5 mai 2022, confirmé sur recours gracieux, présentée par Mmes C... et F.... Par des appels incidents, ces dernières demandent à la cour d'infirmer le jugement en tant qu'il n'a pas annulé totalement le permis.

Sur les conclusions présentées par les observateurs dans le cadre des deux requêtes :

2. L'OPH de Rouen, qui était partie dans l'instance ouverte devant le tribunal administratif de Rouen, a qualité pour interjeter appel contre le jugement rendu au terme de cette instance, par sa requête enregistrée sous le n° 23DA01688. Cependant, le mémoire qu'il a produit dans l'instance n° 23DA01722, après l'expiration du délai pour interjeter appel, à la suite de la communication de la requête d'appel introduite par la commune de Rouen, doit être regardé comme de simples observations, par lesquelles il ne peut soulever ni conclusions, ni moyens propres.

3. La commune de Rouen, qui était partie dans l'instance ouverte devant le tribunal administratif de Rouen, a qualité pour interjeter appel contre le jugement rendu au terme de cette instance, par sa requête enregistrée sous le n° 23DA01722. Cependant, le mémoire qu'elle a produit dans l'instance n° 23DA01688, après l'expiration du délai pour interjeter appel, à la suite de la communication de la requête d'appel introduite par l'OPH de Rouen, doit être regardé comme de simples observations, par lesquelles elle ne peut soulever ni conclusions, ni moyens propres.

4. La métropole de Rouen Normandie, qui n'était pas partie dans l'instance ouverte devant le tribunal administratif de Rouen, a été appelée en la cause par la cour dans l'affaire n° 23DA01688. Le mémoire qu'elle a produit dans cette instance doit être regardé comme de simples observations, par lesquelles elle ne peut soulever ni conclusions, ni moyens propres.

Sur les appels principaux de la commune de Rouen et de l'OPH de Rouen :

En ce qui concerne le moyen d'annulation accueilli par le tribunal administratif de Rouen :

5. L'article 3.2 " Implantation des constructions par rapport aux limites séparatives " du règlement alors applicable en zone UCO du plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) de la métropole de Rouen Normandie dispose que : " Les constructions peuvent s'implanter sur les limites séparatives (...) / En cas de retrait les constructions doivent s'implanter à une distance au moins égale à la moitié de la hauteur de la construction, avec au minimum 3 m vis-à-vis de la limite séparative (soit L = H/2 et = 3 m) (..) / Des implantations différentes sont autorisées dans les cas suivants : Les annexes (d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol inférieure ou égale à 15 m² et d'une hauteur au point le plus haut inférieure ou égale à 3,5 m) seront implantées en limite séparative ou avec un retrait d'une distance au moins égale à la moitié de la hauteur de la construction (..) ".

6. En outre, le lexique du règlement du PLUi définit " l'annexe " comme " une construction secondaire, de dimensions réduites et inférieures à la construction principale, qui apporte un complément aux fonctionnalités de la construction principale. (...) Elle peut être accolée ou non à la construction principale avec qui elle entretient un lien fonctionnel, sans disposer d'accès direct depuis la construction principale (Exemples : abris vélo (...), garage (...). ". Il définit " le retrait " comme " la distance séparant la construction d'une limite séparative. Il se mesure horizontalement et perpendiculairement à la limite séparative en tout point de la construction sauf mention spécifique au sein du règlement de zone (livre 2 du règlement écrit). En cas d'implantation sur la limite séparative, les modalités de calcul du retrait ne s'appliquent pas pour les loggias et les attiques " et précise que la " limite séparative " " correspond à la limite entre le terrain d'assiette de la construction, constitué d'une ou plusieurs unités foncières, et le ou les terrains contigus. Il existe deux types de limites séparatives : les limites latérales et les limites de fond de terrain. En sont exclues les limites de l'unité foncière par rapport aux voies et emprises publiques. ".

7. La commune de Rouen et l'OPH de Rouen soutiennent que le plan de masse établit que le garage accolé au bâtiment n° 2 respecte la règle de la distance minimale de trois mètres par rapport à la limite séparative énoncée à l'article UCO 3.2 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie.

8. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier du plan de masse et des plans de coupe joints au dossier de permis de construire, que les parties des constructions dont Mmes C... et F... affirment qu'elles ne respectent pas les règles de retrait précitées sont trois locaux annexes, au sens du lexique du règlement du PLUi, situés en rez-de-chaussée, accolés, sans liaison, à chacun des trois bâtiments principaux et servant de stationnement de bicyclettes pour deux d'entre elles et de garage pour la troisième. Si chaque local à vélo dispose d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol inférieure à 15 m2, lui permettant de ne pas être soumis au respect de la règle de distance minimale de trois mètres par rapport à la limite séparative, le garage accolé au bâtiment n° 2 a une surface ou une emprise au sol qui excède 15 m2, qui le soumet à cette règle. Il ressort des mentions réitérées du nombre " 300 " portées sur le plan de masse entre la ligne rouge pointillée figurant la " limite de propriété sur limites séparatives " et une autre ligne rouge pointillée figurant à l'intérieur des parcelles que la règle de la distance minimale de trois mètres par rapport à la limite séparative énoncée à l'article UCO 3.2 du PLUi doit être regardée comme respectée en ce qui concerne le garage accolé au bâtiment n° 2. La circonstance que la distance mesurée sur le plan avec une règle entre ces deux traits ne correspond pas parfaitement à la distance ainsi déclarée n'est pas de nature à entacher d'illégalité le permis de construire dans la mesure où celui-ci n'a d'autre objet que d'autoriser la construction conformément aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. En outre, Mmes C... et F... n'établissent ni même n'allèguent que la configuration du terrain ne permettrait pas de respecter la règle de distance de trois mètres.

9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Rouen et l'OPH de Rouen sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 5 mai 2022 en tant qu'il autorise la construction à une distance insuffisante par rapport à la limite séparative du garage accolé au bâtiment n° 2, d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol excédant 15 m2.

10. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mmes C... et F... tant devant le tribunal administratif de Rouen que devant la cour.

En ce qui concerne les autres moyens :

S'agissant du moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté du 5 mai 2022 :

11. Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme (...) ". Aux termes de l'article L. 2122-18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et à des membres du conseil municipal. (...) ".

12. L'arrêté du 5 mai 2022 a été signé par Mme D... E..., septième adjointe au maire de Rouen, chargée de l'urbanisme et du patrimoine bâti municipal. Il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 21 juillet 2020 régulièrement affiché en mairie le lendemain, le maire lui a donné délégation notamment pour " la délivrance des autorisations d'urbanisme ". Le moyen tiré de l'incompétence de la signataire du permis de construire doit donc être écarté comme manquant en fait.

S'agissant du moyen tiré de l'incomplétude du dossier de demande de permis de construire :

13. Aux termes de l'article R. 431-4 du code de l'urbanisme : " La demande de permis de construire comprend : / a) Les informations mentionnées aux articles R. 431-5 à R. 431-12 ; / b) Les pièces complémentaires mentionnées aux articles R. 431-13 à R. 431-33-1 ; / c) Les informations prévues aux articles R. 431-34 et R. 431-34-1. (...) ". Aux termes de l'article R. 431-8 du même code : " Le projet architectural comprend une notice précisant : / 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages (...) ". La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

14. Dès lors que Mmes C... et F... ne font état d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Rouen, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter comme non fondé le moyen tiré de ce que le dossier de permis de construire est incomplet en raison de l'absence de description par la notice architecturale du bâti avoisinant et de la végétation existante.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UCO 3.2 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie :

15. Il résulte de ce qui a été dit au point 8 du présent arrêt que les locaux à vélo disposent d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol inférieure à 15 m2, leur permettant de ne pas être soumis au respect de la règle de distance minimale de trois mètres par rapport à la limite séparative posée par l'article UCO 3.2 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie. Par suite, le moyen tiré de ce que l'implantation des locaux à vélos méconnaît les dispositions de l'article UCO 3.2 du règlement de la zone UCO du PLUi de la métropole de Rouen Normandie doit être écarté comme non fondé.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UCO 3.1 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie :

16. Aux termes de l'article 3.1 " Implantation des constructions par rapport aux emprises publique et aux voies " du règlement alors applicable en zone UCO du PLUi : " Pour l'implantation le long des voies publiques ou privées, existantes ou projetées ouvertes à la circulation publique et le long des emprises publiques : toute construction, installation ou aménagement nouveau doit respecter les indications graphiques figurant au règlement graphique - Planche 2. / En l'absence de celles-ci : - Pour les constructions de premier rang, la façade du volume principal de la construction doit s'implanter : / Soit à l'alignement de fait, pour tenir compte des caractéristiques dominantes du bâti environnant et assurer la continuité ou le rythme du front bâti. / Soit en cas d'absence d'alignement de fait, en fonction de l'implantation dominante des constructions existantes du même côté de la voie pour favoriser une meilleure continuité des volumes. / S'il n'existe ni alignement de fait ni implantation dominante des constructions du même côté de la voie, les constructions seront implantées à une distance minimale de 5 m d'alignement. / - Pour les constructions de second rang, les constructions seront implantées à une distance minimale de 5 m de l'alignement. (...) / Dispositions alternatives sur l'ensemble de la zone (...) / Des implantations différentes sont autorisées dans les cas suivants : (...) / - Pour la construction d'équipements d'intérêt collectif et services publics et pour les ouvrages techniques nécessaires au fonctionnement des services publics, à condition que leur fonction suppose une implantation différente pour répondre à des besoins de fonctionnalité ou de sécurité et que l'implantation projetée ne porte pas atteinte au cadre bâti ou à l'environnement (...) ".

17. En outre, le lexique du règlement du PLUi définit la " construction " comme " un édifice ou ouvrage fixe et pérenne, comportant ou non des fondations et générant un espace utilisable en sous-sol ou en surface ", une " construction de premier rang " comme " une construction principale implantée au plus près des voies et emprises publiques ou privées, généralement composée du bâtiment principal à usage d'habitat et de ses annexes " et " une construction de second rang " comme " une construction implantée à l'arrière d'une construction de premier rang pouvant être contiguë ou séparée de cette dernière et n'étant pas implantée à l'alignement des voies et emprises publiques ou privées ".

18. Par ailleurs, le même lexique précise que " l'alignement " " correspond à la limite commune d'une parcelle privée et du domaine public ou d'une parcelle privée et d'une voie privée ouverte à la circulation ". Aux termes de l'article 3.1 de la section 5 " les autres dispositions du règlement écrit " du livre 1 du règlement du PLUi : " Assimilable à la notion de front bâti, l'alignement de fait est un alignement continu de façades implantées de façon homogène. Il peut être à l'alignement de la voie ou en recul de celle-ci. / Les constructions à implanter doivent s'intégrer au sein de cet alignement, la façade du volume principal de la construction doit ainsi s'implanter selon cet alignement afin de tenir compte des caractéristiques dominantes du bâti environnant et assurer la continuité ou le rythme du front bâti. ". Aux termes du même article : " L'implantation dominante des constructions existantes du même côté de la voie " : " Elle se définit comme une implantation prépondérante des façades sur rue par rapport à la voie, générant un effet visuel d'ensemble cohérent. / Les constructions doivent s'implanter au regard de l'implantation des façades avant des constructions existantes sur les parcelles construites contiguës. / Le volume principal de la nouvelle construction peut alors s'implanter : / - soit en continuité des façades avant existantes sur les parcelles contiguës / - soit dans la marge, c'est-à-dire de part et d'autre des façades avant des parcelles contiguës ".

19. Mmes C... et F... soutiennent que les murets techniques intégrant des boîtes aux lettres et abritant des containers à poubelles ne peuvent être implantés en limite de propriété mais doivent l'être à 5 mètres de l'alignement.

20. Il est constant, d'une part, que les parcelles d'assiette ne sont pas concernées par les indications figurant au règlement graphique en matière d'implantation des constructions par rapport aux emprises publiques et aux voies, d'autre part, que les murets créés pour abriter des containers à poubelles et des boîtes aux lettres sont implantés à l'alignement et en première ligne par rapport aux façades des constructions principales qui sont en retrait. Il ressort clairement des pièces du dossier et notamment des plans cadastraux et des photographies jointes qu'il n'existe aucun alignement de fait, ni implantation dominante des constructions des deux côtés de la rue sœur Marie Ernestine. Il se déduit de cet état de fait que les constructions doivent être implantées à une distance minimale de cinq mètres de l'alignement.

21. Toutefois, la commune de Rouen et l'OPH de Rouen font valoir, d'une part, que les murets techniques intégrant des boîtes aux lettres et abritant des containers à poubelles ne sont pas des " constructions " au sens du PLUi, qu'ils ne sont, en tout état de cause, pas concernés par des dispositions du PLUi qui s'appliquent aux seules constructions dotées de façades et qu'enfin, ils relèvent des dispositions dérogatoires applicables pour la construction d'équipements d'intérêt collectif et services publics et pour les ouvrages techniques nécessaires au fonctionnement des services publics.

22. Il ressort des pièces du dossier et notamment des photographies jointes que les murets en cause doivent être regardés comme consistant en des ouvrages fixes et pérennes générant un espace utilisable en surface et qu'ils constituent, dès lors, des constructions au sens des dispositions précitées du règlement du PLUi. Compte tenu de leur emplacement en avant des constructions principales, ces murets doivent être assimilés à des constructions de premier rang. Si l'article UCO 3.1 évoque l'implantation de " la façade du volume principal " des constructions de premier rang, soit à l'alignement de fait, soit en fonction de l'implantation dominante des constructions existantes, il pose, si aucune de ces deux hypothèses n'est remplie, une règle générale, non limitée à la façade du volume principal mais concernant toutes les constructions, en faveur d'une implantation à une distance minimale de cinq mètres de l'alignement.

23. Cependant, ces murets forment des ouvrages techniques nécessaires au fonctionnement des services publics de distribution postale et de collecte des ordures ménagères. Leur implantation, dérogatoire, à l'alignement, en limite de propriété, répond incontestablement à des besoins de fonctionnalité ou de sécurité. Il n'apparaît pas que cette implantation porterait atteinte au cadre bâti ou à l'environnement, alors qu'ils sont recouverts du même enduit de couleur pierre que les façades des bâtiments principaux.

24. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UCO 3.1 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie doit être écarté comme non fondé.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UCO 3.3 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie :

25. Aux termes de l'article 3.3 " Implantation des constructions par rapport aux autres constructions sur une même propriété " du règlement alors applicable en zone UCO du PLUi : " Les constructions, hors annexe, doivent observer une distance au moins égale à la moitié de la hauteur de la construction, avec un minimum de 5 m vis-à-vis de la construction opposée (soit L = H/2 et = 5 m) ". Ces dispositions spécifiques figurent dans le livre 2 du règlement du PLUi. Aux termes de l'article 3.3 de la section 5 du livre 1, applicable à toutes les zones, " Implantation des constructions par rapport aux autres constructions sur une même propriété " : " pour l'ensemble des zones, les constructions non jointives, hors annexe, devront respecter un éloignement suffisant pour assurer les circulations sur le terrain et ménager l'éclairement des bâtiments ". Ces dispositions communes sont définies dans le livre 1 du règlement du PLUi. L'articulation des dispositions communes et des dispositions réglementaires de chaque zone concernant l'article 3 relatif aux implantations et à la volumétrie des constructions est définie comme suit : " En cas de contradiction apparente entre les dispositions communes du Livre 1 et les dispositions réglementaires de chaque zone, ce sont les dispositions du Livre 1 qui l'emportent sur les dispositions du Livre 2 ".

26. Mmes C... et F... soutiennent que les constructions jumelées ne sont pas autorisées et que la distance minimale de cinq mètres n'a pas été respectée entre les constructions envisagées.

27. Tout d'abord, les articles précités du PLUi, pas plus qu'aucune autre disposition du plan et notamment pas la définition de la " construction " donnée par le lexique du PLUi et mentionnée au point 17 du présent arrêt, n'interdisent la construction de maisons jumelées.

28. Ensuite, les règles de distance posées entre plusieurs constructions implantées sur une même propriété s'appliquent nécessairement aux seules constructions qui ne sont pas jointives. Il s'en déduit qu'elles s'imposent, en l'espèce, entre les trois bâtiments abritant chacun deux maisons individuelles jumelées, sous l'empire du PLUi en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, sans que l'OPH de Rouen puisse valablement faire état de la modification ultérieure du PLUi précisant que la règle posée à l'article UCO 3.3 concerne les constructions " non jointives ".

29. Par ailleurs, contrairement à ce que prétend l'OPH de Rouen, il n'existe pas de " contradiction apparente " entre les dispositions communes du livre 1 qui prévoient entre les constructions, hors annexe, implantées sur une même propriété un " éloignement suffisant pour assurer les circulations sur le terrain et ménager l'éclairement des bâtiments " et les dispositions spécifiques de l'article UCO 3.3 qui précisent cette règle en indiquant que la distance minimum est de cinq mètres.

30. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier du plan de masse, que les bâtiments dont Mmes C... et F... affirment qu'ils ne respectent pas la règle de distance de cinq mètres sont les bâtiments situés au nord et au sud de la propriété. Il ressort de la mention du nombre " 500 " portée sur le plan de masse entre le point situé à l'extrémité nord du bâtiment sud et le point légèrement décalé par rapport au point saillant au sud du bâtiment nord que la règle de la distance minimale de cinq mètres entre les constructions énoncée à l'article UCO 3.3 du PLUi doit être regardée comme respectée. La circonstance que la distance mesurée sur le plan avec une règle entre le point situé à l'extrémité nord du bâtiment sud et le point situé à l'extrémité sud du bâtiment nord ne correspond pas parfaitement à la distance ainsi déclarée n'est pas de nature à entacher d'illégalité le permis de construire, dans la mesure où celui-ci n'a d'autre objet que d'autoriser la construction conformément aux plans et indications fournis par le pétitionnaire. En outre, Mmes C... et F... n'établissent ni même n'allèguent que la configuration du terrain ne permettrait pas de respecter la règle de distance de cinq mètres.

31. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UCO 3.3 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie doit être écarté.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UCO 5.2 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie :

32. Mmes C... et F... soutiennent que l'emplacement et les dimensions de la cuve de récupération des eaux pluviales ne sont pas précisés dans le dossier de demande de permis de construire, ce qui empêche ainsi de s'assurer du respect des dispositions de l'article UCO 5.2 du PLUi.

33. Aux termes de l'article 5.2 " Part minimale de surfaces non imperméabilisées " du règlement alors applicable en zone UCO du PLUi : " Au moins 40% de la surface du terrain doit être traitée en espaces verts ".

34. En outre, le lexique du règlement du PLUi définit " l'espace vert " comme " un espace non construit, de pleine terre, répondant aux conditions cumulatives suivantes : * sa surface est perméable et est constituée de 70% minimum de pleine terre non recouverte par des graviers, les 30% maximum restants peuvent être recouverts par des graviers ; * sa profondeur est de 2,30 mères minimum à compter de sa surface, il ne comporte que le passage éventuel des réseaux (électricité, téléphone, internet, eau potable, eaux usées ou pluviales) ; * il peut recevoir des plantations de type arbre tige ou de haute tige notamment. (...). Les aires de stationnement et leurs accès sont exclus des espaces verts de pleine terre. ".

35. Il ressort de la fiche de calcul de rétention des eaux pluviales que le volume de rétention prévu pour la cuve de récupération des eaux de pluie est de 45,18 m3. Il ressort, par ailleurs, du plan de raccordement aux réseaux existants que la cuve de récupération des eaux de pluie est destinée à être implantée sous la voirie interne du projet, à l'endroit où le stationnement extérieur d'un véhicule est prévu. Dès lors, elle n'empiète pas sur les espaces verts prévus pour représenter 748 m2, soit 40,41 % de la surface du terrain estimée à 1 851 m2, comme indiqué sur le plan de masse. Il n'est pas établi ni même allégué que la surface d'emprise en sous-sol de la cuve aurait été incluse dans le calcul des espaces verts ainsi comptabilisés. Il n'apparaît donc pas que l'implantation et les dimensions de la cuve de récupération des eaux de pluie en sous-sol méconnaîtraient les règles relatives à la part minimale de surfaces non imperméabilisées.

36. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UCO 3.3 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie doit être écarté.

S'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UCO 4.1.1 du PLUi de la métropole de Rouen Normandie :

37. Mmes C... et F... soutiennent que le projet de construction ne s'intègre pas dans son environnement et dépare le quartier constitué de constructions qui forment un " ensemble bâti homogène " sur le règlement graphique du PLUi.

38. Aux termes de l'article 4.1.1 " Caractéristiques des façades, des toitures et des clôtures " du règlement alors applicable en zone UCO du PLUi : " Les constructions, installations ou aménagements, tant du point de vue de leur situation, de leur volume que de leur aspect, ne doivent porter atteinte ni au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, ni aux perspectives monumentales et doivent s'insérer harmonieusement au bâti et au paysage environnants en tenant compte de leur caractère dominant. Les bâtiments présentant un long linéaire sur voie doivent présenter une division en séquences de la façade voire de la toiture afin de prolonger le rythme du bâti environnant. / La conception du projet limitera fortement la création de mur pignon aveugle important, visible dans la perspective des voies, et notamment aux abords des angles de rue afin d'en réduire l'impact et également vis-à-vis de la limite séparative latérale. ".

39. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage urbain de nature à fonder le refus de permis de construire ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de ce permis, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.

40. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la notice de présentation, que le projet de construction se situe dans un quartier résidentiel vallonné qui présente un esprit " village ". A proximité du terrain d'assiette, et comme le font justement valoir Mmes C... et F..., certaines constructions ont été identifiées par le règlement graphique du PLUi comme un ensemble bâti homogène. Cependant, il ressort de ce règlement et des photographies qu'elles ont jointes que l'homogénéité visuelle des maisons individuelles en pierre, avec ou sans colombage, disposant de toitures bi pentes en tuiles orangées concerne des maisons situées de part et d'autre de la rue Henri Wallon. Or les constructions envisagées ne sont pas situées dans cette rue mais dans une rue adjacente, la rue sœur Marie Ernestine, aux abords de laquelle dominent de longs bâtiments collectifs d'aspect bétonné recouverts d'ardoises et où existent déjà des constructions d'aspect moderne disposant de terrasses extérieures. Il ressort de la notice de présentation du projet qu'est envisagée la construction de six maisons individuelles disposant d'un étage, surmontées de toits en double pente, jumelées par deux en trois bâtiments ; leur volumétrie et le choix des matériaux et des couleurs ne dépareront pas cet environnement. Ainsi, le projet litigieux pour lequel l'architecte des bâtiments de France a donné son accord assorti de prescriptions, ne peut être regardé comme portant atteinte au site urbain dans lequel il s'inscrit.

41. Il résulte de tout ce qui précède que l'OPH de Rouen et la commune de Rouen sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 5 mai 2022 en tant qu'il autorise la construction à une distance insuffisante de la limite séparative d'un garage accolé au bâtiment n° 2, d'une surface de plancher ou d'une emprise au sol excédant 15 m2.

Sur les appels incidents de Mmes C... et F... :

42. Compte tenu de ce qui a été dit précédemment, Mmes C... et F... ne sont pas fondées à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté le surplus de leur demande d'annulation de l'arrêté du 5 mai 2022 confirmé sur recours gracieux.

Sur les frais liés aux litiges :

43. Parties perdantes dans les deux instances, Mmes C... et F... ne peuvent voir accueillies leurs conclusions présentées contre la commune de Rouen tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

44. Il y a lieu, en revanche, de mettre à leur charge solidaire la somme de 1 000 euros à verser à la commune de Rouen sur le même fondement. Il y a également lieu de mettre à leur charge la somme de 1 000 euros à verser à l'OPH de Rouen au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen du 6 juillet 2023 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mmes C... et F... devant le tribunal administratif de Rouen et leur appel incident devant la cour sont rejetés.

Article 3 : Mmes C... et F... verseront solidairement à la commune de Rouen la somme de 1 000 euros et à l'OPH de Rouen la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par Mmes C... et F... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Rouen, à l'office public de l'habitat (OPH) de Rouen, à Mme A... C..., à Mme B... F... et à la métropole de Rouen Normandie.

Délibéré après l'audience publique du 15 février 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Nathalie Massias, présidente de la cour,

- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 février 2024.

La présidente-rapporteure,

Signé : I. LegrandLa présidente de la cour,

Signé : N. Massias

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-Maritime en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°23DA01688, 23DA01722 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01688
Date de la décision : 29/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Massias
Rapporteur ?: Mme Isabelle Legrand
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SELARL LEXCAP

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-29;23da01688 ?
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