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30/01/2024 | FRANCE | N°23DA01251

France | France, Cour administrative d'appel, 3ème chambre, 30 janvier 2024, 23DA01251


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit tout retour en France durant un an, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer, pour raisons médicales, un titre de séjour portant

la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notificati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 par lequel le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit tout retour en France durant un an, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer, pour raisons médicales, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de procéder à un nouvel examen de sa demande. Enfin, il a demandé au tribunal de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2206248 du 7 avril 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2023, M. A... B..., représenté par Me Danset-Vergoten, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, contre renonciation de celui-ci au bénéfice de l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'un refus de séjour sur sa situation personnelle ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français doit être annulée par voie d'exception d'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;

- elle a été prise en violation des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'une mesure d'éloignement sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant interdiction de retour est dépourvue de base légale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle a été prise en violation des dispositions des articles L. 612-8 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2023, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 12 septembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 2 octobre 2023 à 12 heures.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant guinéen né le 1er janvier 1997, déclare être entré sur le territoire français le 11 novembre 2016, afin de solliciter son admission au séjour au titre de l'asile. Par une décision du 31 janvier 2019, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande puis, par une décision du 15 décembre 2020, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a rejeté le recours formé par l'intéressé. Le 4 mars 2021, M. B... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", en invoquant son état de santé. Par un arrêté du 3 mai 2022, le préfet du Nord a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit tout retour en France durant un an. M. B... relève appel du jugement du 7 avril 2023, par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2022.

Sur la décision refusant un titre de séjour :

2. En premier lieu, la décision portant refus de séjour vise les textes dont elle fait application et, s'agissant d'une demande fondée sur l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) selon lequel l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Si le préfet du Nord s'est fondé sur cet avis, il ne ressort pas de la décision qu'il se serait cru lié par celui-ci dès lors qu'il a par ailleurs indiqué, dans son arrêté, qu'au regard de cet avis et des éléments médicaux que l'intéressé a bien voulu lui communiquer, les conditions posées par l'article L. 425-9 du code précité n'étaient pas remplies. Ce faisant, il a suffisamment motivé sa décision en droit et en fait.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...) ".

4. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 425-9, de vérifier, au vu de l'avis médical du collège de médecins de l'OFII, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

5. Par son avis du 29 juillet 2021, le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité.

6. Afin de contester le sens de l'avis du collège de médecins de l'OFII, M. B... a produit, en première instance, des éléments médicaux relatifs à la pathologie dont il souffre et qui ont motivé sa demande de délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé. Il ressort de ces certificats médicaux et pièces médicales, qu'il est atteint de troubles de la marche, d'une pathologie algique d'allure neuropathique avec myélopathie cervicale et d'une arthropathie tarsométatarsienne. Ces éléments relatifs à sa pathologie ont été soumis à l'avis d'un médecin du service médical de l'OFII, qui a réalisé un examen médical de M. B... le 27 mai 2021 lui permettant de confirmer la situation médicale de l'intéressé, dans un rapport destiné au collège de médecins de l'OFII, rédigé le 5 juillet 2021. Selon les termes de ce rapport, si l'intéressé fait l'objet d'un suivi neurochirurgical au centre hospitalier universitaire de Lille nécessitant un traitement d'une durée de douze mois, le médecin de l'OFII retient le pronostic d'une rémission. Si ce médecin mentionne un courrier du 2 juillet 2020 dans lequel est évoquée une intervention neurochirurgicale, il précise que ce courrier ne donne aucune précision sur ce point. Devant le tribunal comme devant la cour, M. B... soutient qu'il souffre de troubles neurologiques pour lesquels il doit subir une opération chirurgicale " d'ici peu " sans toutefois apporter la moindre justification quant à la gravité de ces troubles et la nécessité et l'urgence de cette intervention. Ces seules affirmations évasives ne sont pas de nature à contredire l'appréciation portée par le collège de médecins de l'OFII sur la gravité de la pathologie dont il souffre et sur les éventuelles conséquences d'une absence de prise en charge. Par ailleurs, l'appelant ne saurait utilement soutenir qu'en s'abstenant d'apprécier la possibilité d'accéder à un traitement approprié en Guinée, le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur de droit au regard des dispositions de l'article L. 425-9, rappelées au point 3, dès lors qu'une telle appréciation n'est requise que lorsque l'état de santé de l'étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, et comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges, le préfet du Nord n'a pas fait une inexacte application, à sa situation, des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant un droit au séjour sur ce fondement.

7. En troisième lieu, pour ces mêmes motifs, les moyens tirés de ce que la décision refusant un titre de séjour à M. B... est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences d'un refus de séjour sur sa situation personnelle et d'un défaut d'examen sérieux doivent être écartés.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Et aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

9. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., qui déclare être entré en France en novembre 2016, est célibataire, sans enfants à charge, et ne produit aucun élément pertinent permettant d'établir l'existence d'une vie privée et familiale en France, ou une insertion sociale ou professionnelle. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... se trouverait isolé en cas de retour dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf ans. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

10. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été dit aux points 2 à 9, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision refusant un titre de séjour doit être écarté.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

12. Il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

13. En troisième lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas pour objet de fixer le pays d'éloignement. Par suite, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, l'appelant ne peut utilement soutenir qu'en cas de retour, il serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

14. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 6 à 9, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de ce que l'obligation faite à M. B... de quitter le territoire français porterait une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ainsi que d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

15. En premier lieu, il résulte des points 10 à 14 que le moyen tiré de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire, base légale de la décision fixant le pays de renvoi, ne peut qu'être écarté.

16. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

17. M. B... dont la demande d'asile a été définitivement rejetée par la CNDA, se borne à invoquer des violences dont il aurait été victime en Guinée sans apporter aucun élément de nature à établir le bien-fondé de celles-ci, ni des risques auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

18. En dernier lieu, pour ces mêmes motifs, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la décision contestée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait omis de procéder à un examen sérieux et particulier de sa situation avant de fixer la Guinée comme pays de renvoi.

Sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an :

19. En premier lieu, compte tenu de ce qui précède, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

20. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. /(...)". Et aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11. ".

21. D'une part, l'interdiction de retour sur le territoire français contestée, qui cite les articles L. 612-8 et L.612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait état de l'entrée de M. B... en France le 11 novembre 2016, de l'absence d'attaches familiales en France, de ce qu'il ne représente pas de menace pour l'ordre public et n'a fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement précédente. Par suite, le préfet du Nord a motivé sa décision au regard de l'ensemble des critères énoncés à l'article L. 612-10 cité au point 20.

22. D'autre part, en l'absence de toute circonstance humanitaire qui serait liée à sa situation médicale et familiale, le préfet du Nord n'a pas fait une inexacte application des dispositions citées au point précédent en lui interdisant le retour sur le territoire français pendant une durée d'un an.

23. En dernier lieu, pour ces mêmes motifs, l'interdiction de retour prononcée n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation, ni d'un défaut d'examen sérieux et particulier de la situation de M. B....

24. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Danset-Vergoten.

Copie en sera délivrée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 16 janvier 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur, assurant la présidence de la formation du jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Dominique Bureau, première conseillère,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2024.

Le rapporteur,

Signé : F. Malfoy

Le président de la formation de jugement,

Signé : J-M. Guérin-Lebacq

Le greffier,

Signé : F. Cheppe

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

Le greffier,

F. Cheppe

N°23DA01251 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01251
Date de la décision : 30/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Guerin-Lebacq
Rapporteur ?: M. Frédéric Malfoy
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : DANSET-VERGOTEN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-01-30;23da01251 ?
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