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17/10/2023 | FRANCE | N°22DA01141

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 17 octobre 2023, 22DA01141


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2021 par lequel la préfète de l'Oise a refusé le renouvellement de son certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2104068 du 17 février 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête, enregistrée le 1er juin 2022, Mme B..., représentée par Me Cécile Madeline, demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2021 par lequel la préfète de l'Oise a refusé le renouvellement de son certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2104068 du 17 février 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2022, Mme B..., représentée par Me Cécile Madeline, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2021 de la préfète de l'Oise ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Oise, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " étudiant " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de huit jours à compter de cet arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 31 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour :

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de fait ;

- elle méconnaît le premier alinéa du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'illégalité par la voie de l'exception d'illégalité de la décision portant refus d'un titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée à la préfète de l'Oise qui n'a pas produit de mémoire.

Par une ordonnance du 3 mai 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 mai 2023.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Jean-Pierre Bouchut, premier conseiller honoraire, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... relève appel du jugement du 17 février 2022 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2021 par lequel la préfète de l'Oise a refusé le renouvellement de son certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la préfète en première instance :

2. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des pièces produites par la préfète de l'Oise, que la décision du 1er octobre 2021 a été remise à Mme B... le 7 octobre suivant et que les services de la préfecture ont reçu, le lundi 11 octobre suivant, l'accusé de réception de la notification de cette décision. La demande d'aide juridictionnelle formée le 5 novembre 2021 a interrompu le délai de recours contentieux. La décision d'aide juridictionnelle a été prise le 10 novembre suivant et n'a pu être notifiée au plus tôt à l'intéressée qu'à compter du 12 novembre 2021. La requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif le 9 décembre 2021, ne pouvait donc pas être tardive. La fin de non-recevoir opposée par la préfète, tirée de la tardiveté de la requête, doit, par suite, être écartée.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Aux termes du titre III du protocole annexé à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de préinscription ou d'inscription dans un établissement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou "stagiaire". / (...). ". Ces dispositions permettent à l'administration d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies en tenant compte de l'assiduité, de la progression et de la cohérence du cursus suivi.

4. Il ressort des pièces du dossier, notamment des certificats de scolarité produits, que Mme B... a été inscrite, au titre de l'année universitaire 2019-2020, en première année de licence de langues et en licence de lettres-humanités. Au titre de l'année 2020-2021 puis au titre de l'année 2021-2022, elle s'est inscrite en deuxième année de la licence lettres-humanités après y avoir été admise. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'elle a été inscrite en licence de développement commercial au titre de l'année 2021-2022, malgré la circonstance qu'elle ait eu l'intention de le faire. Elle produit une attestation, postérieure à la décision attaquée, mentionnant qu'elle suit avec assiduité les cours de première et deuxième année de la licence lettres humanités. Dans ces conditions, alors que son cursus en France ne démontre aucune incohérence dans son parcours de formation, la circonstance qu'elle n'a de ce fait pu valider qu'une seule année au cours des deux années précédant sa demande de certificat de résidence ne suffit pas à remettre en cause le caractère réel et sérieux des études poursuivies. Par suite, Mme B... est fondée à soutenir qu'en refusant de lui renouveler son certificat de résidence en qualité d'étudiante, la préfète de l'Oise a commis une erreur d'appréciation. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, elle est donc fondée à demander l'annulation de la décision de refus de titre de séjour du 1er octobre 2021.

5. Compte tenu de l'annulation de la décision par laquelle la préfète de l'Oise a refusé de renouveler le certificat de résidence de Mme B... en qualité d'étudiante, la décision portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination, privées de base légale, doivent, par voie de conséquence, être annulées.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 17 février 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2021 par lequel la préfète de l'Oise a refusé le renouvellement de son certificat de résidence, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné l'Algérie comme pays de destination de la mesure d'éloignement.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

7. En raison du motif qui la fonde, l'annulation de l'arrêté attaqué implique nécessairement, sous réserve d'un changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, que l'autorisation de séjour sollicitée soit délivrée à la requérante sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative. Il y a dès lors lieu d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer, sous ces mêmes réserves, une carte de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sans qu'il soit nécessaire, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 000 euros au profit de Me Madeline, son conseil, sous réserve de la renonciation de celui-ci à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 17 février 2022 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 1er octobre 2021 de la préfète de l'Oise est annulé.

Article 3 : Il est enjoint à la préfète de l'Oise de délivrer à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", sous réserve d'un changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera 1 000 euros à Me Madeline, conseil de Mme B..., en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à Me Madeline et à la préfète de l'Oise.

Délibéré après l'audience publique du 3 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Viard, présidente de chambre,

- M. Jean-Marc Guérin-Lebacq, président-assesseur ;

- M. Jean-Pierre Bouchut, magistrat honoraire.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-P. Bouchut

La présidente de chambre,

Signé : M-P. Viard

La greffière,

Signé : C. Marécalle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Marécalle

N°22DA01141

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01141
Date de la décision : 17/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Viard
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre Bouchut
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-10-17;22da01141 ?
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