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12/10/2023 | FRANCE | N°22DA01500

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 12 octobre 2023, 22DA01500


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Cornilleau a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation foncière des entreprises supplémentaire à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2016 pour un montant total de 89 371 euros.

Par un jugement no 1901453 du 12 mai 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés l

es 12 juillet 2022 et 6 janvier 2023, la SAS Cornilleau, représentée par Me Le Faou, demande à la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Cornilleau a demandé au tribunal administratif d'Amiens de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation foncière des entreprises supplémentaire à laquelle elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2016 pour un montant total de 89 371 euros.

Par un jugement no 1901453 du 12 mai 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 juillet 2022 et 6 janvier 2023, la SAS Cornilleau, représentée par Me Le Faou, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle ne peut pas être regardée comme ayant un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts compte-tenu de la faiblesse des moyens techniques qu'elle emploie pour son activité de fabrication, et de l'absence de leur caractère prépondérant dans le processus global d'exploitation ;

- elle est fondée à se prévaloir, sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la position formelle de l'administration prise à l'occasion de sa décision du 2 octobre 2009 et du courrier du 27 octobre 2016.

Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés les 7 décembre 2022 et 20 septembre 2023, de dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bertrand Baillard, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me Le Faou, représentant la SAS Cornilleau.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'une vérification de la comptabilité de la société par action simplifiée (SAS) Cornilleau, qui exerce une activité de conception, fabrication et commercialisation de tables de tennis de table, l'administration l'a informée, par un courrier du 27 octobre 2016, de la réévaluation de la valeur locative cadastrale du site qu'elle exploite à Bonneuil-les-Eaux selon la seule méthode comptable prévue à l'article 1499 du code général des impôts pour l'ensemble des bâtiments. En conséquence, la SAS Cornilleau s'est vu notifier des rappels de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2013 à 2016. A la suite du rejet de sa réclamation, la SAS Cornilleau a porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens. Toutefois, par un jugement du 12 mai 2022 dont la société demande l'annulation, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière situés en France (...) ". Aux termes de l'article 1494 du même code : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte ". Aux termes de l'article 1499 de ce code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'État. (...) ". Revêtent un caractère industriel, au sens de l'article 1499 du code général des impôts, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.

3. A l'exception des cas, dont ne relève pas l'espèce, où, eu égard à la procédure d'imposition mise en œuvre, la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si les immobilisations d'une entreprise entrent dans le champ de l'assujettissement à la cotisation foncière des entreprises.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la SAS Cornilleau fabrique sur le site de Bonneuil-les-Eaux des tables de tennis de table à partir de panneaux de bois qui sont découpés, assemblés et peints, ces équipements sportifs étant ensuite conditionnés pour être expédiés, l'ensemble de ce processus étant constitutif d'une activité de fabrication de biens corporels mobiliers, ce que ne conteste d'ailleurs pas la société requérante.

5. En deuxième lieu, dans le cadre de ce processus de fabrication, la société Cornilleau a recours à des moyens techniques dont la valeur comptable brute était de 3 700 000 euros en 2015 et supérieure à 3 500 000 euros en 2016, ce qui représentait plus de 40 % de la valeur brute de l'actif immobilisé de l'entreprise. Si la part de la valeur nette comptable de ces moyens techniques ne représentait que 27 % de la valeur nette de l'actif immobilisé, cette valeur nette restait supérieure à un million d'euros. Il résulte également de l'instruction que si le processus de fabrication des tables de tennis de table mis en œuvre par la SAS Cornilleau mobilise une quarantaine de salariés, des moyens et équipements techniques sont mobilisés aux différentes étapes de la fabrication des tables, à des degrés plus ou moins importants, ainsi que l'admet elle-même la société. A ce titre, si cette dernière minimise le rôle de ces moyens techniques, elle n'apporte aucun élément concret de nature à démontrer que l'activité de la société serait la même sans y recourir. Dès lors, c'est à bon droit que l'administration a estimé que l'activité de fabrication de tables de tennis de table nécessitait des moyens techniques importants.

6. En troisième lieu, s'il résulte de l'instruction que l'activité de fabrication ne concerne qu'une surface de 3 457 m2 alors que le site exploité par la SAS Cornilleau est d'une surface totale de 10 465 m2 et si la société requérante invoque à ce titre le fait qu'elle exerce d'autres activités, à savoir des activités de conception, de logistique, de transport, de vente et de conseils aux clients ainsi que des services administratifs, toutes ces activités ne sont que les accessoires de l'activité principale de la SAS Cornilleau de fabrication de tables de tennis de tables, laquelle, ainsi qu'il a été dit, requiert des moyens techniques importants. Au demeurant, il résulte des éléments produits que l'activité de production mobilise près de la moitié du personnel employé et plus de 30 % des frais de fonctionnement de la société. Enfin, la vente de biens produits par la société a généré en 2017 des recettes d'un montant supérieur à 22 500 000 euros, soit près de 80 % de son chiffre d'affaires net. Dès lors et en tout état de cause, contrairement à ce que la SAS Cornilleau soutient, les installations techniques, matériels et outillages doivent être regardés comme ayant un caractère prépondérant dans l'ensemble de son activité.

7. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a évalué l'ensemble des locaux selon la méthode comptable prévue pour l'activité industrielle par l'article 1499 du code général des impôts et non selon la méthode par comparaison de l'article 1498 du même code.

Sur le bénéfice d'une prise de position formelle de l'administration :

8. Si, sur la demande de la SAS Cornilleau tendant à ce que l'évaluation de la valeur locative de son site soit réduite, l'administration lui a accordé un dégrèvement le 2 octobre 2009, cette décision n'était pas motivée. Il résulte de l'instruction que la décision d'appliquer à l'ensemble des bâtiments exploités par la société Cornilleau les règles d'évaluation prévues à l'article 1499 du code général des impôts fait suite aux constats opérés sur place par l'administration à l'occasion de la vérification de la comptabilité de la société. Dès lors, en appliquant antérieurement à l'un des bâtiments les règles d'évaluation prévues par l'article 1498 du code général des impôts pour les locaux commerciaux, l'administration n'a pas, contrairement à ce que soutient la SAS Cornilleau, pris formellement position sur l'appréciation, au regard de la loi fiscale, d'une situation de fait dont elle ne connaissait pas, alors, tous les éléments. Par suite, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la garantie qu'instituent les dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.

9. Il résulte de ce qui précède que la SAS Cornilleau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle présente sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être également rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Cornilleau est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Cornilleau et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera transmise à l'administratrice générale des finances publiques chargée de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 28 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- M. François-Xavier Pin, président-assesseur,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 octobre 2023.

Le rapporteur,

Signé : B. BaillardLe président de chambre,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°22DA01500

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA01500
Date de la décision : 12/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Bertrand Baillard
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : LE FAOU

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-10-12;22da01500 ?
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