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16/05/2023 | FRANCE | N°22DA02137

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 16 mai 2023, 22DA02137


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée d'un mois.

Par un jugement n° 2200165 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
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Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2022, M. A......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée d'un mois.

Par un jugement n° 2200165 du 16 juin 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Vincent Souty, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 octobre 2021 du préfet de la Seine-Maritime ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", et à défaut de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans tous les cas, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de dix jours à compter de cet arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son avocat au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ladite condamnation valant renonciation au versement de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché d'erreurs de fait sur sa situation personnelle qui révèlent un défaut d'examen personnalisé de sa situation ;

- l'arrêté est contraire aux dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté est contraire aux dispositions de l'article L. 435-1 du même code ;

- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision d'interdiction de retour est contraire aux dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette interdiction de retour est entachée de disproportion manifeste.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2022, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 20 septembre 2022.

Par ordonnance du 1er février 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 17 février 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant sénégalais né le 10 décembre 1996, est entré en France le 16 décembre 2013. Il a sollicité un titre de séjour en qualité d'enfant de ressortissant français. Le 14 novembre 2016, l'intéressé a fait l'objet d'un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire, dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Rouen n° 1700506 du 16 mai 2017. Le 21 février 2018, M. A... a sollicité son admission au séjour sur le fondement des articles L. 311-11 et L. 313-14, devenus L. 423-23 et L. 435-1, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 26 février 2019, il a fait l'objet d'un refus implicite de lui délivrer un titre de séjour ainsi que d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire français, annulés par la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Rouen par un jugement n° 1900657 du 5 mars 2019. Par une ordonnance n° 2002092 du 3 juillet 2020, le juge des référés du même tribunal a suspendu l'exécution de la décision du 13 février 2020 par laquelle le préfet a refusé d'instruire sa demande de titre de séjour et lui a enjoint de procéder à cette instruction. Par une ordonnance n° 2103506 du 29 septembre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Rouen a assorti cette injonction d'une astreinte journalière de 300 euros en cas d'inexécution à se prononcer sur la demande de titre de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de cette ordonnance. Par l'arrêté du 10 octobre 2021, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de délivrer à M. A... un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé son pays de destination et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un mois. Il relève appel du jugement du 16 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 10 octobre 2021 serait entaché d'erreurs de fait révélant un défaut d'examen personnalisé de sa situation en raison de la mention d'une adresse erronée, de l'absence de référence aux précédentes décisions juridictionnelles rendues par le tribunal administratif de Rouen, et de mentions inexactes quant à sa situation familiale et sentimentale doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., présent sur le territoire national depuis sept années à la date de l'arrêté attaqué, a suivi une scolarité dans un lycée professionnel au cours des années 2014 à 2017, puis quelques formations dans le secteur du bâtiment et des travaux publics. Il a effectué deux missions de travail temporaire au cours du mois d'avril 2021. Ses attaches familiales en France sont constituées par deux sœurs et un frère, alors qu'il est sans nouvelle de son père qui l'a fait venir en France et n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Sénégal où vit sa mère. S'il fait part de sa relation sentimentale avec une ressortissante française qu'il a connue au lycée et qui vit en région parisienne, il n'apporte aucun élément de nature à justifier d'une intensité suffisante de cette relation à distance. Il en résulte que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Maritime, en édictant l'arrêté du 10 octobre 2021, aurait méconnu son droit au respect de la vie privée et familiale, ni que cet arrêté serait contraire aux dispositions et stipulations citées au point 3.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". Lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Il peut, en outre, exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, pour régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant le titre qu'il demande ou un autre titre, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait.

6. La situation personnelle et familiale de M. A..., décrite au point 4, ne permet pas de considérer que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Par ailleurs, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Maritime aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté contesté sur sa situation personnelle.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., bien que ne représentant pas une menace pour l'ordre public et comptant sept années de présence en France à la date de l'arrêté attaqué, a déjà fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dont la légalité a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Rouen et à laquelle il n'a pas déféré. Dans ces conditions, et alors même qu'une partie des membres de la famille de M. A... résident en France, le préfet n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prononçant une interdiction de retourner sur le territoire français d'une durée d'un mois, dont la faible durée n'est pas manifestement disproportionnée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2021. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'annulation, d'injonction ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Vincent Souty.

Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 2 mai 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Baronnet, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Guillaume Vandenberghe, premier conseiller,

- Mme Sylvie Stefanczyk, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.

Le rapporteur,

Signé : G. VandenbergheLe président de la formation

de jugement,

Signé : M. B...

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Anne-Sophie Villette

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N°22DA02137


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA02137
Date de la décision : 16/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Baronnet
Rapporteur ?: M. Guillaume Vandenberghe
Rapporteur public ?: M. Toutias
Avocat(s) : SOUTY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-05-16;22da02137 ?
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