La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/04/2023 | FRANCE | N°22DA00490

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 06 avril 2023, 22DA00490


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2022, la société Marck-en-Calaisis, représentée par Me Philippe Gras, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2022 par lequel le maire de Marck-en-Calaisis a refusé de lui délivrer un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'un ensemble commercial de 3 172 m² de vente situé zone d'aménagement concerté (ZAC) des pins ;

2°) d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de statuer à nouveau sur sa demande

dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) d'enjoindre à la ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2022, la société Marck-en-Calaisis, représentée par Me Philippe Gras, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 14 janvier 2022 par lequel le maire de Marck-en-Calaisis a refusé de lui délivrer un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'un ensemble commercial de 3 172 m² de vente situé zone d'aménagement concerté (ZAC) des pins ;

2°) d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de statuer à nouveau sur sa demande dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

3°) d'enjoindre à la commune de Marck-en-Calaisis de réexaminer sa demande de permis de construire.

Elle soutient que :

- la société Lidl n'a pas notifié son recours préalable obligatoire au représentant de la société en méconnaissance de l'article R. 752-32 du code de commerce ;

- la société Lidl n'a pas intérêt à agir ;

- la société Auchan Hypermarché n'a pas intérêt à agir ;

- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) est entaché d'une contradiction de motifs ;

- il est insuffisamment motivé ;

- la CNAC a commis une erreur de droit dès lors qu'elle ne peut se fonder sur une seule orientation du schéma de cohérence territoriale et en ce qu'elle n'a pas recherché si la création de locaux commerciaux de plus de 500 m² pourrait se faire dans la tache urbaine ;

- le projet n'est pas incompatible avec le schéma de cohérence territoriale du Pays du Calaisis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2022, la commune de Marck-en-Calaisis, représentée par Me Marc Zimmer, conclut à l'annulation de l'arrêté du 14 janvier 2022 en tant qu'il porte sur l'exploitation commerciale, à ce qu'il soit enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial de statuer à nouveau sur les demandes dans un délai de quatre mois à compter de l'arrêt à intervenir et à la mise à la charge de la Commission nationale d'aménagement commerciale d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle est recevable à demander l'annulation de son arrêté du 14 janvier 2022 ;

- l'avis rendu par la Commission nationale d'aménagement commercial est illégal.

Par une lettre, enregistrée le 19 septembre 2021, la société Lidl, représentée par la SCP Gros, Hicter, d'Halluin et associés, indique qu'elle ne produira pas d'observations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2022, la Commission nationale d'aménagement commercial conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- les conclusions de la commune de Marck-en-Calaisis sont irrecevables car tardives ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 février 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

La requête a été communiquée à la société Auchan Hypermarché qui n'a pas produit de mémoire.

Un mémoire en réplique a été produit par la société Marck-en-Calaisis le 7 février 2023, après la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Rémy Demaret, représentant la société Marck-en-Calaisis, et de Me Marc Zimmer, représentant la commune de Marck-en-Calaisis.

Considérant ce qui suit :

1. La société Marck-en-Calaisis a sollicité un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la création d'un ensemble commercial de 3 172 m² de surface de vente comprenant un supermarché à l'enseigne " Carrefour Market " de 2 200 m², trois magasins non alimentaires d'une surface de 324 m² chacun et un point de retrait de marchandises de 36 m², situé dans la ZAC des pins. La Commission départementale d'aménagement commercial du Pas-de-Calais a émis un avis favorable le 15 juillet 2021. Saisie d'un recours préalable obligatoire par les sociétés Lidl et Auchan Hypermarché, la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a émis un avis défavorable au projet le 9 décembre 2021. Par un arrêté du 14 janvier 2022, le maire de Marck-en-Calaisis a refusé d'accorder le permis de construire sollicité.

Sur la recevabilité des conclusions de la commune de Marck-en-Calaisis :

2. Par un mémoire, enregistré le 8 septembre 2022, la commune de Marck-en-Calaisis, qui se présente comme une intervenante volontaire, conclut à l'annulation de la décision de refus du permis de construire en tant qu'il porte sur la demande d'autorisation d'exploitation commerciale. La commune est cependant partie à l'instance et ses conclusions doivent donc être regardées comme des conclusions à fin d'appel principal. Présentées après l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois, ces conclusions sont tardives et par suite irrecevables.

Sur la recevabilité des recours présentés devant la Commission nationale d'aménagement commercial :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 752-32 du code de commerce : " A peine d'irrecevabilité de son recours, dans les cinq jours suivant sa présentation à la commission nationale, le requérant, s'il est distinct du demandeur de l'autorisation d'exploitation commerciale, communique son recours à ce dernier soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit par tout moyen sécurisé. / (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... était présenté, dans la demande d'autorisation, comme l'un des interlocuteurs du projet déposé par la société Marck-en-Calaisis. Dans ces conditions, la société Lidl n'a pas méconnu son obligation de notification de recours posée par les dispositions précitées en envoyant son recours préalable obligatoire à l'adresse de

M. B....

5. En second lieu, aux termes de l'article R. 752-32 du code de commerce :

" I. - Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, (...) tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial. / (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que les sociétés Lidl et Auchan exploitent respectivement un commerce à dominante alimentaire et un drive, tous deux situés dans la zone de chalandise du projet. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut d'intérêt de ces sociétés à contester l'avis émis par la CNAC sur le projet de la société Marck-en-Calaisis, doit être écarté.

Sur la légalité de la décision attaquée :

7. Il résulte du chapitre 1 du document d'orientation et d'objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale du pays (SCoT) du Calaisis, intitulé " structurer le potentiel de développement économique ", que les enjeux du commerce du Pays du Calaisis sont la qualification des lieux de commerce, la gestion du risque de friches commerciales importantes et la qualité des services de proximité apportés aux habitants de l'ensemble du territoire. Au titre des prescriptions du SCoT, il est indiqué qu'" au sein des centralités urbaines, la localisation préférentielle de nouveaux locaux commerciaux (de plus de 500 m² de surface de plancher) se fera au sein de la tâche urbaine existante ou en continuité directe de l'urbanisation existante ". Par ailleurs, toujours au titre des prescriptions, le SCoT prévoit que " la reconversion des friches économiques et l'utilisation des dents creuses présentes au sein des zones d'activités existantes doivent être privilégiées à la création de nouvelles zones de développement économique ".

8. En l'espèce, le motif de l'avis défavorable émis par la CNAC est tiré de ce que le projet est incompatible avec le SCoT dès lors que, situé de l'autre côté de la voie ferrée par rapport aux principaux quartiers d'habitation du centre-ville, il sera implanté en dehors d'une continuité urbaine existante.

9. Toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier que le magasin existant, situé au cœur d'une zone d'habitat, sera déplacé et agrandi sur un site situé au sein de la ZAC des Pins, au sud de l'avenue de Calais, axe structurant de la commune. Si ce site est séparé de l'agglomération par une voie ferrée, il est à proximité directe des zones d'habitat. Alors qu'il est déjà desservi par un bus dont l'arrêt est situé à moins de 500 mètres, il sera également desservi plus directement par un nouvel arrêt, tandis qu'un arrêt TER sera créé à proximité. Le projet est également accessible aux piétons et aux deux roues.

10. D'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'il existe un projet de construction d'habitations sur le site du magasin existant, et que ce site n'aurait pas pu supporter l'extension du magasin envisagée par la société requérante.

11. Dans ces conditions, la société Marck-en Calaisis est fondée à soutenir que c'est à tort que la Commission nationale d'aménagement commercial s'est fondée sur l'incompatibilité du projet avec les orientations du schéma de cohérence territoriale du Pays du Calaisis pour émettre un avis défavorable.

12. Il résulte de ce qui précède que la société Marck-en-Calaisis est fondée à soutenir que l'avis du 9 décembre 2021 de la CNAC est illégal et que par suite, l'arrêté de refus du permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale du 14 janvier 2022 du maire de Marck-en-Calaisis doit être annulé en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. D'une part, il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de se prononcer à nouveau sur la demande, dans le délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

14. D'autre part, il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre à la commune de

Marck-en-Calaisis de se prononcer à nouveau sur la demande, dans le délai de deux mois à compter de l'intervention de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 14 janvier 2022 par lequel le maire de la commune de

Marck-en-Calaisis a refusé de délivrer un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale à la société Marck-en-Calaisis est annulé.

Article 2 : Il est enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial de se prononcer à nouveau sur la demande de la société Marck-en-Calaisis, dans le délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint à la commune de Marck-en-Calaisis de se prononcer à nouveau sur la demande de la société Marck-en-Calaisis, dans le délai de deux mois à compter de la notification du nouvel avis de la Commission nationale d'aménagement commercial.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Marck-en-Calais, à la commune de Marck-en-Calaisis, à la société Lidl, à la société Auchan Hypermarché et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience publique du 23 mars 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 avril 2023.

La présidente-rapporteure,

Signé : C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au préfet du Pas-de-Calais et au ministre de l'économie et des finances, chacun en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière en chef adjointe,

Sylviane Dupuis

N°22DA00490 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00490
Date de la décision : 06/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Corinne Baes Honoré
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SCP GROS - HICTER - D'HALLUIN ET ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-04-06;22da00490 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award