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09/03/2023 | FRANCE | N°21DA02905

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 09 mars 2023, 21DA02905


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... C... et Mme E... D... ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 10 avril 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Saulve a accordé à M. F... et à Mme I... un permis pour la construction d'un carport et d'un local technique, la décision du 17 mai 2019 par laquelle le maire a rejeté leur recours gracieux ainsi que l'arrêté du 27 mai 2019 ayant modifié ce permis de construire.

Par un jugement n° 1906031 du 15 novembre 2021, le tribunal administratif de Li

lle a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... C... et Mme E... D... ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 10 avril 2019 par lequel le maire de la commune de Saint-Saulve a accordé à M. F... et à Mme I... un permis pour la construction d'un carport et d'un local technique, la décision du 17 mai 2019 par laquelle le maire a rejeté leur recours gracieux ainsi que l'arrêté du 27 mai 2019 ayant modifié ce permis de construire.

Par un jugement n° 1906031 du 15 novembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2021, et un mémoire enregistré le 31 août 2022, M. H... C... et Mme E... D..., représentés par Me Yannic Flynn, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les arrêtés du maire de la commune de Saint-Saulve du 10 avril 2019 et du 27 mai 2019, ainsi que la décision de rejet du recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Saulve la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé et entaché d'une contradiction de motifs ;

- la notice architecturale et le document graphique joints au dossier de demande de permis de construire sont insuffisants au regard des dispositions des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- les décisions méconnaissent les dispositions de l'article 1AU3 du plan local d'urbanisme dès lors que le permis de construire ne respecte pas les distances relatives à la voie de desserte et à l'accès du terrain ; en outre, les travaux d'extension ne sont pas étrangers aux règles relatives à l'accès et à la voirie ;

- les décisions méconnaissent les dispositions de l'article 1AU7 du plan local d'urbanisme dès lors que la limite séparative jouxtant le projet ne touche aucune voie alors que le projet se trouve dans la bande des 20 mètres ; en tout état de cause, à supposer même que le projet ne se trouve pas dans la bande des 20 mètres, la hauteur du bâtiment est supérieure à 2,60 mètres.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2022, la commune de Saint-Saulve, représentée par Me Laurie Freger, conclut au rejet de la requête à la mise à la charge de M. C... et de Mme D... de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 22 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Laurie Freger, représentant la commune de Saint-Saulve.

Considérant ce qui suit :

1. M. F... et Mme I... ont sollicité auprès de la commune de Saint-Saulve un permis de construire un carport et un local technique sur leur terrain situé 56 rue de la Calèche et portant au cadastre le numéro 224. Par un arrêté du 10 avril 2019, le maire de la commune de Saint-Saulve a délivré le permis de construire demandé. Par une décision du 17 mai 2019, le maire a rejeté le recours gracieux présenté par M. C... et Mme D... contre le permis ainsi délivré. Par un arrêté du 27 mai 2019, le maire de la commune de Saint-Saulve a délivré un permis modificatif à M. F... et à Mme I.... M. C... et Mme D... demandent à la cour d'annuler le jugement du 15 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté leur requête tendant à l'annulation de ces trois décisions.

Sur la régularité du jugement :

2. Après avoir jugé, au point 6, que le passage privé permettant l'accès à la construction en litige n'était pas une voie au sens des dispositions de l'article 1AU3 du règlement du plan local d'urbanisme, le tribunal administratif de Lille a jugé au point 7 qu'il s'agissait d'un accès au terrain. Alors même que cet accès méconnaît les dispositions de l'article 1AU3, les premiers juges ont fait application de la jurisprudence dite " Sekler ", ainsi que le soulignent d'ailleurs les requérants. Par cette motivation, les premiers juges ont suffisamment motivé leur jugement, qui ne comporte, en tout état de cause, aucune contrariété entre ses motifs.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la composition du dossier de demande :

3. Aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; / 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; / b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; / c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; /d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; / e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; / f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement ". Aux termes de l'article R. 431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; / d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ".

4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

5. En premier lieu, si les requérants soutiennent que la notice architecturale ne précise pas les choix opérés pour assurer l'insertion du projet dans son environnement, il résulte de la notice descriptive des travaux contenue dans le dossier de demande de permis de construire que la couverture toit plat du projet sera invisible depuis l'extérieur et que la maçonnerie de briques du carport se rapproche au mieux de l'existant. Dans ces conditions, et alors que cette notice ne présente aucun caractère succinct, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme doit être écarté.

6. En second lieu, les requérants soutiennent que le document graphique produit au dossier de demande de permis de construire se limite à représenter la construction projetée sans présenter l'environnement du projet. Si les photographies du terrain et de son environnement ne matérialisent pas le projet, elles permettaient néanmoins au service instructeur, qui disposait également de différents plans, d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement et dans le paysage, ainsi que son impact visuel y compris par rapport aux constructions voisines. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 1AU3 du règlement du plan local d'urbanisme :

7. Aux termes de l'article 1AU-3 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Saint-Saulve : " Le permis de construire peut être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies ou pour celle des personnes utilisant cet accès. / Accès / Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise une servitude de passage suffisante, établie par acte authentique ou par voie judiciaire, en application de l'article 682 du code civil. (...) / Les accès doivent présenter des caractéristiques permettant de satisfaire aux règles minimales de desserte à savoir 5 mètres. / Voirie / Les terrains doivent être desservis par des voies publiques ou privées répondant à l'importance et à la destination de la construction, ou de l'ensemble des constructions qui y sont édifiées. (...). Aucune voie privée ouverte à la circulation générale ne doit avoir une largeur inférieure à 5 mètres. (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que le terrain de M. F... et de Mme I..., composé d'une allée et d'un terrain supportant leur maison, est desservi par une voie publique, la rue de la Calèche. Il ressort également des pièces du dossier que cette allée ainsi que celle des propriétaires voisins ont été réunies, permettant ainsi aux propriétaires d'accéder à leurs propriétés respectives par un passage élargi, dont l'entrée est marquée par la présence de leurs boîtes aux lettres. Toutefois, ce passage, qui constitue un accès au sens des dispositions précitées de l'article 1AU-3, ne présente pas la largeur minimale de 5 mètres requise par ces dispositions.

9. La circonstance qu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un plan local d'urbanisme régulièrement approuvé ne s'oppose pas, en l'absence de dispositions de ce plan spécialement applicables à la modification des immeubles existants, à la délivrance ultérieure d'un permis de construire s'il s'agit de travaux qui, ou bien doivent rendre l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues, ou bien sont étrangers à ces dispositions.

10. Pour l'application des règles d'accès prévues par les dispositions précitées de l'article 1AU3 du plan local d'urbanisme, des travaux entraînant une augmentation de la surface de plancher de 26,29 m2 pour la construction d'un atelier/local technique et la construction d'un carport permettant d'abriter les véhicules, doivent être regardés comme étrangers à ces dispositions. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le maire de la commune aurait dû s'opposer aux travaux de construction en litige.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 1AU-7 du règlement du plan local d'urbanisme :

11. Aux termes de l'article 1AU-7 du règlement du plan local d'urbanisme : " La distance horizontale de tout point d'un bâtiment au point le plus proche des limites séparatives du terrain, doit être au moins égale à la moitié de sa hauteur et jamais inférieure à 4 mètres. Toutefois : a) A l'intérieur d'une bande de 20 mètres de profondeur mesurée à partir de la limite de voie : la construction jouxtant les limites séparatives qui touchent une voie est autorisée. / b) A l'extérieur de la bande de 20 mètres : la construction en limite séparative peut être autorisée lorsque la hauteur des bâtiments n'excède pas 2,60 mètres avec une tolérance de 1,50 mètres pour murs pignons, cheminées, saillies et autres éléments de la construction reconnus indispensables. (...) ".

12. Eu égard à l'objet et à la finalité de ces dispositions ainsi qu'à la configuration particulière des lieux rappelée au point 8, la seule voie à prendre en compte pour l'application de l'article 1AU-7 du règlement du plan local d'urbanisme est la rue de la Calèche. Il ressort des pièces du dossier que la construction projetée se situe au-delà d'une distance de 20 mètres à compter de cette rue. Ainsi, en autorisant une construction jouxtant la limite séparative avec la propriété des requérants, d'une hauteur de 2,60 mètres avec un acrotère de toit et des costières de 60 centimètres, éléments indispensables à la construction, le maire n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article 1AU-7. Le moyen invoqué à ce titre doit ainsi être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... et M. C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 15 novembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur requête.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Saulve, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme D... et M. C... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

15. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... et de M. C..., la somme demandée par la commune de Saint-Saulve au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... et de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Saulve présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... C... et Mme E... D..., à M. G... F... et Mme A... I... et à la commune de Saint-Saulve.

Délibéré après l'audience publique du 16 février 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2023.

La présidente- rapporteure,

Signé : C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre,

Signé : M. B...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

N° 21DA02905 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21DA02905
Date de la décision : 09/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Corinne Baes Honoré
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : CADRAJURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2023-03-09;21da02905 ?
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