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24/11/2022 | FRANCE | N°21DA01202

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 24 novembre 2022, 21DA01202


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 1706945, la société Plaza Marcq Marne a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 16 juin 2017 par lequel le maire de la commune de Marcq-en-Barœul a refusé de lui délivrer le permis de construire sollicité en vue de la construction d'un ensemble immobilier de 16 logements individuels et d'un local professionnel.

Par une requête enregistrée sous le n° 1710510, la société Plaza Immobilier a demandé au tribunal administratif de

Lille de condamner la commune de Marcq-en-Barœul à lui verser la somme de 323 793,95 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée sous le n° 1706945, la société Plaza Marcq Marne a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 16 juin 2017 par lequel le maire de la commune de Marcq-en-Barœul a refusé de lui délivrer le permis de construire sollicité en vue de la construction d'un ensemble immobilier de 16 logements individuels et d'un local professionnel.

Par une requête enregistrée sous le n° 1710510, la société Plaza Immobilier a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la commune de Marcq-en-Barœul à lui verser la somme de 323 793,95 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable, en réparation des préjudices ayant résulté de l'illégalité de l'arrêté du 16 juin 2017 par lequel le maire a refusé de délivrer le permis de construire qu'elle sollicitait pour la société civile de construction vente Plaza Marcq Marne.

Par une requête enregistrée sous le n° 1710511, la société Plaza Marcq Marne a demandé au tribunal de condamner la commune de Marcq-en-Barœul à lui verser la somme de 515 347,11 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable, en réparation des préjudices ayant résulté de l'illégalité de l'arrêté du 16 juin 2017 par lequel le maire a refusé de lui délivrer le permis de construire qu'elle sollicitait.

Par un jugement n° 1706945, 1710510 et 1710511 du 31 mars 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté ces trois requêtes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 mai 2021, la société Plaza Immo et la société Plaza Marcq Marne, représentées par Me Gabriel Benesty, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 juin 2017 du maire de la commune de Marcq-en-Baroeul ;

3°) de condamner la commune de Marcq-en-Baroeul à verser à la SCCV Plaza Marcq Marne la somme de 515 347,11 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2017 et capitalisation des intérêts à compter du 10 août 2018 ;

4°) de condamner la commune de Marcq-en-Baroeul à verser à la société Plaza immobilier la somme de 323 793,95 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 9 août 2017 et capitalisation des intérêts à compter du 10 août 2018 ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Marcq-en-Baroeul, au profit de chacune des requérantes, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'obligation de motivation des décisions prévue par les dispositions législatives de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme s'oppose à la substitution de motif effectuée par les premiers juges ;

- la substitution de motif est illégale dès lors qu'à la date de la décision contestée, la commune ne disposait pas d'informations relatives aux surfaces affectées aux stationnements des vélos ;

- l'ensemble des éléments produits dans le cadre de l'instruction fait obstacle à la substitution de motif demandée ;

- les demandes indemnitaires sont fondées en raison de l'illégalité de la décision contestée ;

- la commune a commis une illégalité fautive en s'abstenant de motiver la décision ayant refusé la délivrance d'un permis de construire ;

- elles ont pu croire qu'il existait un motif de droit susceptible de justifier un refus de permis de construire, insusceptible de corrections mineures et ont donc été privées de la possibilité d'apporter à leur projet les adaptations nécessaires afin d'obtenir l'autorisation sollicitée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2021, la commune de Marcq-en-Barœul, représentée par Me Paul Guillaume Balaÿ, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge solidaire des sociétés requérantes de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 mars 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- les observations de Me Gabriel Benesty, représentant la société Plaza Immobilier et la société Plaza Marcq Immobilier, et les observations de Me Justine Roels, représentant la commune de Marcq-en-Baroeul.

Considérant ce qui suit :

1. Le 9 septembre 2016, la société par actions simplifiée (SAS) Plaza Immobilier a bénéficié, de la part des époux B..., d'une promesse unilatérale de vente d'un bien immobilier situé avenue de la Marne à Marcq-en-Barœul, cadastré en section AX sous le n° 109, en vue de la construction d'un ensemble immobilier de 16 logements et d'un local professionnel en lieu et place du bâti existant. Pour la mise en œuvre du projet, la société Plaza Immobilier a constitué une société civile de construction vente (SCCV), dénommée " Plaza Marcq Marne ", qui a procédé à l'élaboration du dossier de permis de construire. La demande d'autorisation de construire a été déposée le 26 décembre 2016, au nom de la SCCV Plaza Marcq Marne. Par un arrêté du 16 juin 2017, le maire de Marcq-en-Barœul a refusé de délivrer à la société Plaza Marcq Marne le permis de construire sollicité. Par un jugement du 31 mars 2021, le tribunal administratif de Lille, d'une part, a rejeté la demande de la société Plaza Marcq Marne tendant à l'annulation de cet arrêté ainsi que sa requête indemnitaire présentée afin d'obtenir la réparation des préjudices subis, d'autre part, a rejeté la demande indemnitaire présentée par la société Plazza Immobilier. Ces deux sociétés relèvent appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, devant le tribunal, la commune de Marcq-en-Baroeul a soutenu que, si les motifs indiqués sur la décision n'emportaient pas sa conviction, il y aurait lieu pour le tribunal de procéder à une substitution de motif tiré de la méconnaissance de l'article UC 12, II, A, 5°, b du règlement du plan local d'urbanisme, le projet ne respectant pas les dimensions minimales pour le stationnement des vélos.

3. D'une part, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, (...) ".

4. D'autre part, l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

5. Les dispositions de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, qui posent une règle de forme des décisions administratives, ne font pas, par elles-mêmes, obstacle à ce que l'administration qui a refusé un permis de construire invoque devant le juge un motif autre que ceux qu'elle a opposés dans la décision de refus. Par suite, ainsi que l'a relevé le tribunal, le moyen tiré de ce que la commune ne pouvait, sans méconnaître l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme, solliciter une substitution de motif à l'encontre du refus de permis de construire en litige doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article UC 12, II ,A ,5°, b du règlement du plan local d'urbanisme : " Il doit être créé dans les immeubles collectifs de logements et foyers-résidences, un ou des locaux aménagés pour le stationnement des vélos des résidents, des visiteurs et du personnel, à raison de 1,5 m2 par logement ".

7. Il ressort des pièces du dossier et notamment du plan du rez-de-chaussée daté du 22 décembre 2016 et établi par l'agence d'architecte chargée de concevoir le projet, que la superficie du local dédié au stationnement des vélos est de 23,36 m², alors que la superficie exigée par le règlement et non contestée est de 24 m². En outre, si les requérantes soutiennent que d'autres emplacements étaient disponibles, il ne ressort pas des pièces versées au dossier que des emplacements supplémentaires pour le stationnement des vélos étaient effectivement prévus dans le projet lorsque le maire de la commune a pris sa décision. Ainsi, le motif tiré de la contrariété du projet aux dispositions de l'article UC 12, II, A, 5°, b du règlement du plan local d'urbanisme est de nature à fonder légalement la décision de refus.

8. Contrairement à ce qui est soutenu par les requérantes, les circonstances que le maire ne disposait alors pas du plan du rez-de-chaussée, lequel ne fait pas lui-même partie des documents dont la production est rendue obligatoire par le code de l'urbanisme, et n'a pas sollicité de la pétitionnaire d'information sur les surfaces affectées au stationnement des vélos lorsqu'il a pris la décision contestée, ne faisaient pas obstacle à ce que le juge constate que le maire aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que le seul motif mentionné au point précédent pour refuser la délivrance du permis de construire sollicité par la société Plaza Marcq Marne, dès lors que la superficie du local en litige était insuffisante à la date de la décision contestée. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal a procédé à la substitution de motif demandée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté leur demande d'annulation de l'arrêté du 17 juin 2017.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne l'illégalité fautive de la décision de refus :

10. Il résulte de ce qui a été dit au point 8, que la responsabilité de la commune de Marcq-en-Baroeul ne peut pas être engagée sur le fondement de l'illégalité fautive.

En ce qui concerne les fautes tenant aux motifs de la décision :

11. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 5 qu'il ne peut être reproché au maire de la commune de ne pas avoir fondé son refus sur un motif qui a été substitué aux motifs initiaux, dans le cadre de la procédure contentieuse. En tout état de cause, le maire de la commune ne disposait pas, à la date de la décision contestée, du plan lui permettant de constater que la superficie du local de stationnement pour vélos était inférieure à celle exigée par l'application des dispositions du plan local d'urbanisme et n'était pas tenu de le réclamer. Il ne peut ainsi être reproché à la commune de ne pas avoir retenu ce motif de refus dans la décision contestée.

12. En second lieu, les requérantes soutiennent qu'elles ont été privées de la possibilité d'apporter à leur projet les adaptations nécessaires, l'arrêté ayant énoncé plusieurs motifs de refus, pour l'essentiel tirés de la violation de l'article UC11 du plan local d'urbanisme, faisant croire à l'impossibilité de reprendre le projet alors que le seul motif légal, que l'arrêté ne mentionnait pas, n'exigeait qu'une correction minime.

13. Toutefois, d'une part, il n'est pas démontré que le projet ne pouvait pas être régularisé, notamment au regard de cet article UC11, par la modification du projet initialement déposé, d'autre part, il était loisible à la pétitionnaire d'apporter tous éléments justifiant de la régularité de son projet. Or elle s'est abstenue de le faire en tardant à produire le plan du rez-de-chaussée révélant l'insuffisance de la superficie du local pour vélos et c'est ce fait de la victime, même s'il n'avait aucun caractère fautif en l'absence de méconnaissance d'une obligation, qui est en réalité à l'origine de la tardiveté de la substitution de motif opposée par le maire. Ainsi, le lien de causalité entre les préjudices subis du fait de l'abandon du projet et la faute dont les requérantes se prévalent, n'est en tout état de cause pas établi.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la société Plaza Marcq Marne et la société Plaza Immobilier ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 31 mars 2021, le tribunal administratif de de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 juin 2017 du maire de la commune de Marcq-en-Baroeul, ainsi que leurs conclusions indemnitaires.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions des requérantes, parties perdantes dans la présente instance, tendant à leur application. Enfin, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'accueillir la demande présentée par la commune de Marcq-en-Baroeul présentée sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Plaza Marcq Marne et de la société Plaza Immobilier est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Marcq-en-Baroeul tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Plaza Immobilier, à la société Plaza Marcq Immobilier et à la commune de Marcq-en-Baroeul.

Délibéré après l'audience publique du 10 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente-assesseure,

- M. Stéphane Eustache, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2022.

La présidente-rapporteure,

Signé : C. Baes-HonoréLe président de la 1ère chambre,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

N° 21DA01202 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21DA01202
Date de la décision : 24/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Corinne Baes Honoré
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : EDIFICES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-11-24;21da01202 ?
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