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10/11/2022 | FRANCE | N°21DA00837

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 10 novembre 2022, 21DA00837


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers à lui verser une indemnité d'un montant correspondant à la retenue sur traitement de 100,27 euros par mois depuis le 1er mars 2019 jusqu'au prononcé du jugement à intervenir, ainsi qu'une indemnité de 1 500 euros au titre de son préjudice moral et 1 500 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence.

Par un jugement n° 1909989 du 19 février 2021, le tribuna

l administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par u...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille de condamner la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers à lui verser une indemnité d'un montant correspondant à la retenue sur traitement de 100,27 euros par mois depuis le 1er mars 2019 jusqu'au prononcé du jugement à intervenir, ainsi qu'une indemnité de 1 500 euros au titre de son préjudice moral et 1 500 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence.

Par un jugement n° 1909989 du 19 février 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 avril, 18 mai, 14 octobre et 30 novembre 2021, M. A... B..., représenté par Me Christine Laffargue, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement a été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire ;

- il est insuffisamment motivé ;

- le tribunal administratif a rejeté à tort ses conclusions indemnitaires comme irrecevables ; son action indemnitaire n'est pas fondée sur l'illégalité fautive de l'arrêté du 12 juillet 2018 le plaçant en congé de maladie ordinaire à compter du 11 mai 2016 mais sur la faute de la commune à avoir opéré des retenues de traitement en méconnaissance de son droit au maintien de l'intégralité de son traitement, cet arrêté du 12 juillet 2018 n'est pas une décision à objet purement pécuniaire ;

- la seule consolidation de son inaptitude physique ne pouvait faire échec à son droit à être maintenu en congé spécial pour maladie professionnelle ;

- il avait droit à un plein traitement jusqu'à sa reprise sur un emploi adapté qui a eu lieu le 2 mai 2017 et le versement du plein traitement dans l'attente de la décision de la communauté d'agglomération prise après l'avis de la commission de réforme est créateur de droit ; il ne présentait pas un caractère provisoire ; il y a droit en application de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 ;

- contrairement à ce que soutient la communauté d'agglomération, aucune décision verbale n'est née en août 2018 du fait de la mise en place d'un échéancier lors d'un entretien ;

- il n'a pas illégitimement refusé la proposition de poste formulée le 30 mai 2016 ; son aptitude n'a été définitivement reconnue qu'à la suite de l'avis de la médecine du travail du 23 mars 2017 ;

- aucun titre exécutoire n'a été émis ;

- à supposer que la communauté d'agglomération puisse récupérer les sommes en litige, la créance est partiellement atteinte par la prescription biennale ; les sommes perçues avant le 1er mars 2017 sont prescrites ;

- sa perte de revenus s'élève à la somme de 100,27 euros par mois depuis le mois de mars 2019 et jusqu'à l'arrêt à intervenir ;

- il a subi un préjudice moral, ces prélèvements lui ayant causé un sentiment d'anxiété ; il devra lui être alloué une somme de 1 500 euros ;

- confronté à un contexte financier déjà fragile, ces prélèvements arbitraires l'ont placé dans une situation financière périlleuse ; une somme de 1 500 euros lui sera allouée en réparation de ses troubles dans les conditions d'existence.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 août et 8 novembre 2021, la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers, représentée par Me Eric Landot, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. B... de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'exception de prescription biennale n'est pas fondée dès lors que la collectivité n'a eu connaissance de l'existence de la créance à réclamer qu'à compter de l'avis de la commission de réforme du 23 mars 2018 ;

- les autres moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 9 novembre 2011, l'instruction a été rouverte et la clôture a été reportée au 1er décembre 2021, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente-rapporteure,

- les conclusions de M. Nil Carpentier-Daubresse, rapporteur public,

- et les observations de Me Fouace, représentant la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est éducateur territorial des activités physiques et sportives au sein de la communauté d'agglomération du Calaisis, devenue Grand Calais Terres et Mers. Il exerçait les fonctions de maître-nageur sauveteur et a demandé que sa rhino-sinusite soit reconnue comme imputable au service. Par un avis du 8 janvier 2016, la commission de réforme a rendu un avis favorable à la reconnaissance de cette affection comme maladie professionnelle et préconisé une expertise pour déterminer notamment la date de consolidation. Par un avis du 23 mars 2018, elle a confirmé la reconnaissance de l'imputabilité au service de cette pathologie et a fixé la date de consolidation au 10 mai 2016. Par un arrêté du 12 juillet 2018, la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers a reconnu le congé au titre de sa maladie professionnelle du 5 juin 2013 au 10 mai 2016, et rétroactivement placé M. B... en congé de maladie ordinaire pour la période du 11 mai 2016 au 1er mai 2017. Un trop perçu d'un montant de 6 128 euros correspondant au traitement dû pour la période de congé maladie ordinaire a été prélevé, par échéances mensuelles de 100,27 euros, sur le traitement de M. B... à compter du mois de mars 2019. Par lettre du 31 juillet 2019, reçue le 2 août 2019, M. B... a demandé à la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers une indemnité correspondant à la perte de revenus de 100,27 euros mensuels prélevés sur son traitement ainsi qu'une indemnité globale de 3 000 euros au titre de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence résultant de ces prélèvements. La communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers a rejeté sa demande par un courrier du 26 septembre 2019. M. B... relève appel du jugement du 19 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers à lui verser ces sommes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'expiration du délai permettant d'introduire un recours en annulation contre une décision expresse dont l'objet est purement pécuniaire fait obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée.

3. Pour rejeter les conclusions indemnitaires présentées par M. B... comme irrecevables, le tribunal administratif de Lille a retenu que l'intéressé n'avait exercé aucun recours juridictionnel contre l'arrêté du 12 juillet 2018, notifié le 24 août 2018 avec mention des voie et délais de recours, portant, d'une part, reconnaissance de sa pathologie comme imputable au service du 5 juin 2013 au 10 mai 2016 et, d'autre part, le plaçant en congé de maladie ordinaire du 11 mai 2016 au 1er mai 2017, lequel était devenu définitif et avait un objet exclusivement pécuniaire. Contrairement à ce que soutient M. B..., il ressort des écritures de première instance, et ainsi que l'ont estimé à juste titre les premiers juges, qu'il remettait nécessairement en cause la légalité de cet arrêté en soutenant qu'il devait bénéficier du 11 mai 2016 au 1er mai 2017 d'un congé de maladie professionnelle et partant d'un plein traitement. Néanmoins, cet arrêté, en tant qu'il le place en congé de maladie ordinaire, emporte des effets juridiques sur sa situation individuelle qui ne sont pas exclusivement financiers, de sorte qu'il ne saurait être regardé comme ayant un objet purement pécuniaire. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens d'irrégularité soulevés, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté, comme irrecevables, ses conclusions indemnitaires et à demander l'annulation de ce jugement entaché d'irrégularité.

4. Il y a ainsi lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par M. B... devant le tribunal administratif de Lille.

Sur les retenues sur traitement opérées à compter du mois de mars 2019 :

5. Il résulte de l'instruction qu'en conséquence de l'arrêté du 12 juillet 2018 plaçant rétroactivement M. B... en congé de maladie ordinaire, du 11 mai 2016 au 1er mai 2017, la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers a procédé à compter du mois de mars 2019 à une retenue sur traitement en raison de l'indu de rémunération perçu par M. B... au cours de cette période. En demandant le versement d'une somme correspondant à la retenue sur traitement opérée à compter du mois de mars 2019, M. B... conteste ainsi qu'il a été dit au point 3, nécessairement l'illégalité de cet arrêté, qui fonde ces retenues sur traitement.

En ce qui concerne la prescription biennale :

6. Aux termes de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. / Toutefois, la répétition des sommes versées n'est pas soumise à ce délai dans le cas de paiements indus résultant soit de l'absence d'information de l'administration par un agent de modifications de sa situation personnelle ou familiale susceptibles d'avoir une incidence sur le montant de sa rémunération, soit de la transmission par un agent d'informations inexactes sur sa situation personnelle ou familiale ".

7. Il résulte de ces dispositions qu'une somme indûment versée par une personne publique à l'un de ses agents au titre de sa rémunération peut, en principe, être répétée dans un délai de deux ans à compter du premier jour du mois suivant celui de sa date de mise en paiement sans que puisse y faire obstacle la circonstance que la décision créatrice de droits qui en constitue le fondement ne peut plus être retirée. Dans les deux hypothèses mentionnées au deuxième alinéa de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000, la somme peut être répétée dans le délai de droit commun prévu à l'article 2224 du code civil.

8. Sauf dispositions spéciales, les règles fixées par l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont applicables à l'ensemble des sommes indûment versées par des personnes publiques à leurs agents à titre de rémunération, y compris les avances et, faute d'avoir été précomptées sur la rémunération, les contributions ou cotisations sociales.

9. En l'absence de toute autre disposition applicable, les causes d'interruption et de suspension de la prescription biennale instituée par les dispositions de l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 sont régies par les principes dont s'inspirent les dispositions du titre XX du livre III du code civil.

10. Il en résulte que tant la lettre par laquelle l'administration informe un agent public de son intention de répéter une somme versée indûment qu'un ordre de reversement ou un titre exécutoire interrompent la prescription à la date de leur notification. La preuve de celle-ci incombe à l'administration.

11. Eu égard au principe énoncé au point 9, la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers n'est pas fondée à se prévaloir de la circonstance qu'elle n'aurait eu définitivement connaissance de sa créance qu'à compter de l'avis de la commission de réforme du 23 mars 2018. Si la directrice générale adjointe des ressources humaines et sa collaboratrice, au demeurant plus de deux ans après, attestent que M. B... a été informé oralement lors d'une réunion du 24 août 2018 qu'il était redevable d'un trop perçu lié à son dossier de maladie professionnelle, ces seules attestations ne peuvent en tout état de cause être regardées comme établissant l'existence d'une décision verbale interrompant la prescription. Dans ces conditions, en l'absence de cause interruptive de la prescription, les sommes indûment perçues avant le 1er mars 2017 par M. B... sont prescrites. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que la créance est partiellement prescrite en tant qu'elle porte sur des sommes indûment perçues avant le mois de mars 2017. Il en résulte que seules les sommes perçues en mars et avril 2017 ne sont pas atteintes par la prescription.

En ce qui concerne le plein traitement perçu en avril et mai 2017 :

12. Aux termes de l'article 57 de la loi 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territorial, dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite ".

13. Un agent de la fonction publique territoriale qui n'est plus apte à reprendre son service à la suite d'une maladie professionnelle et auquel aucune offre de poste adapté ou de reclassement n'a été faite a le droit d'être maintenu en congé de maladie avec le bénéfice de son plein traitement sans autre limitation que celles tenant à sa mise à la retraite ou au rétablissement de son aptitude au service. La consolidation, qui a pour objet de constater la stabilisation de l'état de santé du fonctionnaire, ne saurait valoir reconnaissance de l'aptitude de ce dernier à reprendre ses fonctions ni lui faire perdre le bénéfice du congé pour maladie professionnelle qui lui a été accordé.

14. Il résulte de l'instruction que dès l'avis du 8 janvier 2016 de la commission de réforme, la rhino-sinusite dont est atteint M. B... a été reconnue comme étant d'origine professionnelle et son inaptitude définitive à ses fonctions de maitre-nageur sauveteur en piscine a été reconnue. A la demande de la commission de réforme, une nouvelle expertise a été diligentée pour statuer sur l'état de santé de l'agent. Le 10 mai 2016, l'expert a confirmé l'inaptitude de M. B... à ses fonctions. Il a en revanche estimé qu'il était apte au service sur un poste aménagé et a également fixé la date de consolidation de sa pathologie au 10 mai 2016 ainsi que le taux d'IPP à 3 %. Par son second avis du 23 mars 2018, la commission de réforme, après avoir confirmé l'imputabilité au service de la rhino-sinusite de M. B..., a fixé la date de consolidation et le taux d'IPP, tels que préconisés par l'expert. Ainsi que le soutient à juste titre M. B..., la date de consolidation de sa pathologie ne pouvait être regardée comme la fin de son congé de maladie professionnelle. Il résulte néanmoins qu'à cette date, l'intéressé a été également reconnu apte à reprendre son service sur un poste adapté. Il s'était d'ailleurs vu proposer un poste temporaire d'animateur des activités physiques et sportives par courrier du 27 avril 2016 puis le 30 mai 2016 un autre poste d'éducateur territorial des activités physiques et sportives multisport, qu'il a d'abord refusé le 3 juin 2016 puis a finalement accepté en 2017. La demande d'imputabilité au service de l'hypoacousie, maladie déclarée le 3 juin 2016, dont est atteint M. B... a été rejetée par un arrêté du 2 octobre 2017. Contrairement à ce qu'allègue M. B..., il ne résulte pas de l'instruction que les arrêts de travail couvrant la période du 11 mai 2016 au 1er mai 2017 auraient été en lien avec sa rhino-sinusite, seule affection imputable au service. Dans ces conditions, alors que M. B... était apte à reprendre le service sur un poste adapté, et après l'avis émis par la commission de réforme le 23 mars 2018, la communauté d'agglomération, qui n'était pas tenue d'émettre un titre exécutoire pour obtenir la répétition de l'indu de rémunération dont M. B... était redevable, pouvait légalement placer M. B... rétroactivement en position de congé de maladie ordinaire entre le 11 mai 2016 et le 1er mai 2017.

En ce qui concerne la possibilité de recouvrer le trop-perçu des mois de mars et avril 2017 :

15. Aux termes de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale : " La demande d'inscription à l'ordre du jour de la commission est adressée au secrétariat de celle-ci par l'employeur de l'agent concerné. / L'agent concerné peut également adresser une demande de saisine de la commission à son employeur, qui doit la transmettre au secrétariat de celle-ci dans un délai de trois semaines ; le secrétariat accuse réception de cette transmission à l'agent concerné et à son employeur ; passé le délai de trois semaines, l'agent concerné peut faire parvenir directement au secrétariat de la commission un double de sa demande par lettre recommandée avec accusé de réception ; cette transmission vaut saisine de la commission. / La commission doit examiner le dossier dans le délai d'un mois à compter de la réception de la demande d'inscription à l'ordre du jour par son secrétariat. Ce délai est porté à deux mois lorsqu'il est fait application de la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article 16. Dans ce cas, le secrétariat de la commission notifie à l'intéressé et à son employeur la date prévisible d'examen de ce dossier. / Le traitement auquel l'agent avait droit, avant épuisement des délais en cours à la date de saisie de la commission de réforme, lui est maintenu durant les délais mentionnés et en tout état de cause jusqu'à l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme ".

16. Il résulte de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale cité au point 12, de l'article 16 du décret du 30 juin 1987 relatif aux congés de maladie des fonctionnaires territoriaux et de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière que le fonctionnaire en activité a droit à des congés de maladie à plein traitement, pendant une durée de trois mois, en cas de maladie dûment constatée le mettant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Au-delà de cette période, il a droit à des congés de maladie à demi-traitement, pendant une durée de neuf mois, s'il lui est toujours impossible d'exercer ses fonctions. Toutefois, si la maladie est imputable au service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service. La commission de réforme étant obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice du 2ème alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, l'administration dispose, à compter de la demande du fonctionnaire de bénéficier de ces dispositions, d'un délai de deux mois pour se prononcer sur cette demande. Lorsque la commission de réforme fait application de la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004, ce délai est porté à trois mois. Sans préjudice du premier alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, tant que le délai de deux mois n'est pas expiré, ou, en cas d'application par la commission de réforme de la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004, tant que le délai de trois mois n'est pas expiré, l'administration n'est pas tenue d'accorder au fonctionnaire le bénéfice de l'avantage qu'il demande. En revanche, l'avis de la commission de réforme contribuant à la garantie que la décision prise le sera de façon éclairée, quand bien même cet avis n'est que consultatif, en l'absence d'avis de la commission dans le délai de deux mois, ou dans le délai de trois mois en cas d'application par la commission de réforme de la procédure prévue au deuxième alinéa de l'article 16 de l'arrêté du 4 août 2004, l'administration doit, à l'expiration de l'un ou l'autre, selon le cas, de ces délais, placer, à titre conservatoire, le fonctionnaire en position de congé maladie à plein traitement, sauf si elle établit qu'elle se trouvait, pour des raisons indépendantes de sa volonté, dans l'impossibilité de recueillir l'avis de la commission de réforme.

17. M. B... a demandé la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa rhino-sinusite, constatée le 5 juin 2013. Il est constant qu'il a perçu un plein traitement dans l'attente de la décision définitive prise sur cette demande jusqu'au 2 mai 2017, date à laquelle il a repris de manière effective des fonctions au sein de la communauté d'agglomération. Par un arrêté du 12 juillet 2018, il a été placé rétroactivement en congé de maladie ordinaire du 11 mai 2016 au 1er mai 2017. Conformément aux dispositions de l'article 57 précité de la loi du 26 janvier 1984, le plein traitement perçu à titre conservatoire, faute de décision de l'administration sur l'imputabilité au service ou non de la pathologie ou de l'accident, dans le délai de deux ou trois mois selon les cas, reste acquis à l'agent jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service. En l'espèce, si M. B... a repris ses fonctions de manière effective le 2 mai 2017 après avoir accepté un poste qui lui avait été proposé dès le 30 mai 2016, il résulte de l'instruction, et ainsi qu'il a été exposé au point 14, qu'il était en état de reprendre son service dès le 11 mai 2016. Cette date constitue l'issue de la procédure justifiant la saisie de la commission de réforme au sens de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 et en conséquence, celle à partir de laquelle il ne pouvait plus bénéficier d'un plein traitement. Dans ces conditions, l'administration pouvait légalement lui demander la restitution des sommes versées, en sus du seul demi-traitement qui lui était dû dans le cadre de son congé de maladie ordinaire pour les mois de mars et avril 2017. Par suite, le moyen tiré de ce que M. B... avait droit à son plein traitement jusqu'au 2 mai 2017, en application du dernier alinéa de l'article 13 de l'arrêté du 4 août 2004 doit être écarté.

Sur le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence :

18. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers a pu légalement placer M. B... rétroactivement en congé de maladie ordinaire pour la période du 11 mai 2016 au 2 mai 2017. Dans ces conditions, en l'absence d'illégalité fautive de l'arrêté du 12 juillet 2018, les conclusions présentées par M. B... tendant à l'indemnisation d'un préjudice moral et de troubles dans les conditions d'existence ne peuvent qu'être rejetées.

19. En second lieu, il résulte de ce qui a été exposé au point 11, que la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers a commis une faute en procédant à des retenues sur traitement d'une créance partiellement prescrite. Toutefois et en tout état de cause, M. B... n'établit pas la réalité de son préjudice moral en lien avec cette illégalité en produisant un certificat médical daté du 12 mars 2019 mentionnant seulement un lien entre son état de santé et son " environnement de travail " et le dépôt d'une plainte pour harcèlement moral contre son employeur le 17 juin 2019. Par ailleurs, si M. B... justifie être dans une situation financière délicate, il ne démontre pas, par les seules pièces qu'il produit, dont certaines font état de dettes de l'intéressé antérieures aux retenues effectuées à compter de mars 2019 par l'administration, le lien entre ses troubles dans les conditions d'existence et la faute commise par la communauté d'agglomération. Dans ces conditions, les conclusions présentées par M. B... tendant à l'indemnisation d'un préjudice moral et de troubles dans les conditions d'existence doivent en tout état de cause être également rejetées.

20. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... est seulement fondé à demander la condamnation de la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers à lui verser la somme correspondant aux retenues sur traitement déjà effectuées couvrant la période du 11 mai 2016 au 28 février 2017 durant laquelle il a perçu à tort un plein traitement.

Sur les frais liés à l'instance :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et sur le fondement des mêmes dispositions, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lille du 19 février 2021 est annulé.

Article 2 : La communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers est condamnée à verser à M. B... la somme correspondant aux retenues sur traitement déjà opérées couvrant la période du 11 mai 2016 au 28 février 2017.

Article 3 : La communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers versera à M. B... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Lille et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 5 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté d'agglomération Grand Calais Terres et Mers.

Délibéré après l'audience publique du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- Mme Dominique Bureau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 novembre 2022.

Le président-assesseur,

Signé : M. C...

La présidente de chambre,

présidente-rapporteure,

Signé : G. BorotLa greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au préfet du Pas-de-Calais en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Huls-Carlier

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N° 21DA00837

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3

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA00837
Date de la décision : 10/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : LAFFARGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-11-10;21da00837 ?
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