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27/10/2022 | FRANCE | N°20DA00421

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 4ème chambre, 27 octobre 2022, 20DA00421


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1702499 du 3 février 2020, le tribunal administratif de L

ille, d'une part, a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la fraction d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... B... ont demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1702499 du 3 février 2020, le tribunal administratif de Lille, d'une part, a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... en remboursement de frais kilométriques, d'autre part, a mis une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin, a rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2020, et par des mémoires, enregistré le 28 juin 2022, le 10 août 2022, le 29 août 2022 et le 6 septembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de constater qu'il n'y a pas lieu de statuer à concurrence du dégrèvement de 1 551 euros prononcé, en droits et pénalités, en cours d'instance en ce qui concerne les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2010 ;

2°) d'annuler le jugement du 3 février 2020 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge d'une partie des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige et mis la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de remettre à la charge de M. et Mme B... les suppléments d'impôt sur le revenu dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif de Lille, en tant qu'ils demeurent en litige s'agissant de l'année 2010 et à concurrence d'une base imposable de 17 790 euros et d'une base de prélèvements sociaux de 15 167 euros s'agissant de l'année 2011.

Il soutient que :

- l'administration demande que soient substituées aux dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts, sur lequel le service avait fondé les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux dont le tribunal administratif a prononcé la décharge, à titre principal, celles du c. du même article ou, à titre subsidiaire, celles du 2° du 1. de l'article 109 du même code ; une telle substitution de base légale, qui est demandée dans des termes suffisamment précis, peut être opérée, dès lors qu'elle n'a pour effet de priver les contribuables d'une garantie de procédure, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'étant, en particulier, pas compétente en matière de revenus distribués ;

- ces suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux sont susceptibles de trouver leur fondement dans les dispositions du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, dès lors qu'il est établi que M. B..., unique associé et gérant statutaire de la société distributrice, la société à responsabilité limitée (SARL) E..., a appréhendé les sommes réintégrées dans ses bases imposables ; à cet égard, l'administration est fondée à se prévaloir de la présomption d'appréhension attachée à la qualité de seul maître de l'affaire, qui était celle de M. B... au cours de la période vérifiée, dès lors qu'il était le seul à pouvoir librement disposer, en toute autonomie et sans contrôle, des fonds sociaux ; par ailleurs, les sommes inscrites, comme en l'espèce, au crédit d'un compte courant d'associé ouvert dans la comptabilité d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés sont, sauf preuve contraire, à la disposition de cet associé et ont, même dans le cas d'une erreur involontaire, le caractère de revenus distribués imposables entre ses mains sur le fondement du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ;

- les sommes en cause, inscrites sur le compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E... en tant que remboursement de frais professionnels et au sujet desquels l'intéressé n'a fourni que des justifications insuffisantes, insusceptibles d'établir la réalité ou le caractère professionnel des déplacements mentionnés, que l'intéressé a pu aussi accomplir pour les besoins de l'activité de l'autre société dont il est le gérant et qui lui a versé des indemnités kilométriques, ont également la nature d'avantages occultes imposables sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts ; le kilométrage déclaré pour le calcul des frais de déplacements que M. B... aurait effectués pour le compte de la SARL E... est d'ailleurs incompatible, en tenant compte des trajets pris en compte par l'autre société, avec la distance parcourue, au cours des deux années en cause, par le véhicule personnel de marque allemande de l'intéressé, telle qu'elle ressort des factures d'entretien fournies, alors qu'aucune facture d'entretien n'a été fournie pour l'autre véhicule que M. B... aurait également utilisé au cours de l'année 2010 et que l'intéressé n'a fourni aucun élément concernant l'utilisation privée de ces véhicules ; au surplus, le caractère non déductible des frais de déplacement comptabilisés par la SARL E... a été confirmé, au niveau de cette dernière, par un jugement du 3 février 2020, devenu définitif, du tribunal administratif de Lille ;

- en vertu du principe de l'indépendance des procédures, le moyen tiré de ce que les suppléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la SARL E... ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière est inopérant ;

- en tant que seul maître de l'affaire, M. B... est réputé avoir appréhendé les sommes portées en comptabilité, par la SARL E..., en tant que charges et dont la déductibilité des résultats imposables de cette société a, pour les motifs exposés dans les écritures produites au nom de l'Etat en première instance, été remise en cause à bon droit, le service était donc fondé à imposer entre ses mains ces sommes, qui ne sont pas demeurées investies dans la société, sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ;

- dans le cadre de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, le service vérificateur a constaté que le compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de cette société présentait, à la clôture de l'exercice 2011, un solde débiteur de 4 685,54 euros, tandis que ce solde était créditeur de 12,38 euros à l'ouverture de cet exercice ; la variation positive de ce solde, soit 4 673,16 euros, a été regardée à bon droit comme correspondant à des revenus distribués imposables, entre les mains de M. B..., sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts ; si M. et Mme B... invoquent un remboursement du solde de ce compte et se prévalent, à cet égard, de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, en son paragraphe n°190, ils n'apportent, en tout état de cause, aucun élément de nature à justifier du remboursement effectif de la somme en cause, les pièces produites par eux ne permettant pas de justifier du solde du compte courant de M. B... au 12 avril 2013, ni, a fortiori, au 29 août 2013, date à laquelle la SARL E... a reçu l'avis de vérification qui lui avait été adressé le 27 août 2013 ;

- il y a lieu de tirer les conséquences de ce que la majoration d'assiette de 25 % prévue au 2° du 7. de l'article 158 du code général des impôts n'est pas applicable en matière de prélèvements sociaux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mai 2022, et par des mémoires enregistrés les 4 et 28 août 2022, M. et Mme B..., représentés par Me Guey, concluent au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement attaqué, en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction ; ils demandent également que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande de substitution de base légale présentée par le ministre n'est pas recevable, dès lors que la base proposée n'est pas définie avec une précision suffisante, l'administration ne pouvant concurremment invoquer deux fondements légaux ;

- si elle était opérée, la substitution de base légale sollicitée par l'administration conduirait à les priver de la possibilité de restitution prévue par les dispositions sur lesquelles les suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux dont la décharge a été prononcée par le tribunal administratif étaient fondés, à savoir les dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts ; elle les priverait, en outre, du bénéfice de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, qui énonce, en son paragraphe n°190, que, lorsque l'administration découvre qu'une avance taxable a été intégralement remboursée, on peut admettre, à titre de règle pratique, qu'il n'y a pas eu de distribution de revenus s'il apparaît que le remboursement a été opéré à une date antérieure à celle de la réception, par la société, de l'avis de vérification ou, en cas de contrôle inopiné, antérieurement au passage du vérificateur ;

- il incombe à l'administration de justifier de l'homologation, par une autorité compétente, des rôles émis pour le recouvrement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 ; or, il n'est pas établi que les rôles ont été signés par une autorité compétente ;

- l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de ce que les déplacements professionnels ayant donné lieu aux remboursements servis à M. B... et déduits des résultats imposables de la SARL E... ont été pris en charge par l'autre société dont l'intéressé est le gérant ; l'administration n'établit pas davantage que les clients figurant sur la liste qu'il a fourni étaient aussi des clients de cette dernière ; l'administration ne démontre pas non plus la discordance entre les éléments fournis par eux et les sommes portées en déduction par la SARL E... ;

- la procédure d'imposition mise en œuvre à l'égard de la SARL E... est irrégulière en ce qui concerne l'exercice clos en 2010, en ce que l'administration a mis à tort en œuvre la procédure de taxation d'office, de sorte que les sommes dont la déduction des résultats de cette société a été remise en cause ne pouvaient pas être regardées comme imposables, en tant que revenus distribués, entre les mains de M. B..., sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ;

- en tout état de cause, les charges dont la déductibilité par la SARL E... a été remise en cause ne pouvaient légalement être regardées comme correspondant à des revenus imposables sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ;

- les sommes imposées en tant que revenus distribués sur ce même fondement, qui, en vertu de l'article 110 du même code, s'entendent des sommes retenues pour l'établissement de l'impôt sur les sociétés, ne peuvent, en toute hypothèse, être supérieures aux rehaussements notifiés à la SARL E... ;

- la base d'imposition aux prélèvements sociaux a été, en ce qui concerne les années 2010 et 2011, majorée à tort de 25 % ;

- ils sont fondés à invoquer le bénéfice de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, en son paragraphe n°190, pour soutenir que l'accroissement du solde débiteur du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E... ne peut être regardé comme correspondant à des revenus distribués imposables sur le fondement du a. de l'article 111 du code général des impôts, dès lors que les sommes en cause ont été intégralement remboursées, comme ils en justifient ;

- la somme de 1 172,86 euros dont la déduction par la SARL E... a été remise en cause par l'administration correspond à des charges locatives déductibles ; il en est de même de la somme de 797,33 euros, qui correspond à une dépense publicitaire ; par ailleurs, la somme de 107,40 euros correspond à un don.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public,

- et les observations de Me Guey, représentant M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... B... détient l'intégralité des parts sociales de la société à responsabilité limitée (SARL) E..., dont il est le gérant statutaire et qui exerce une activité de gestion de biens. Cette société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2012. A l'issue de ce contrôle, l'administration a fait connaître à cette société, par une proposition de rectification qu'elle lui a adressée le 18 décembre 2013, qu'elle envisageait de rectifier, sur plusieurs points, ses recettes taxables et ses résultats imposables. Parallèlement, l'administration a estimé que M. B... avait bénéficié, de la part de cette société, de revenus distribués imposables entre ses mains dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Par une proposition de rectification adressée le 18 décembre 2013 à M. et Mme B..., l'administration leur a fait connaître le rehaussement des revenus imposables de leur foyer fiscal qu'elle envisageait, en conséquence de la réintégration des sommes correspondantes. Les observations présentées par M. et Mme B... n'ayant pas convaincu l'administration, les suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux résultant, pour les années 2010 et 2011, des rehaussements notifiés ont été mis en recouvrement le 30 juin 2014 à hauteur d'une somme totale de 27 811 euros, en droits et pénalités. M. B... a présenté une réclamation, qui a été partiellement admise par l'administration, qui a prononcé, à concurrence d'une somme de 4 499 euros en droits et pénalités, le dégrèvement des suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux contestés par l'intéressé.

2. Insatisfaits de cette issue partielle, M. et Mme B... ont porté le litige devant le tribunal administratif de Lille, en lui demandant, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, d'autre part, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement du 3 février 2020, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, a prononcé la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... et présentées comme des remboursements de frais kilométriques, d'autre part, mis une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, enfin, rejeté le surplus des conclusions de cette demande.

3. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement en tant qu'il prononce la décharge d'une partie des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige et qu'il met la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. et Mme B... demandent, par la voie de l'appel incident, l'annulation du même jugement, en tant qu'il ne leur donne pas entière satisfaction.

Sur l'étendue du litige :

4. Par une décision du 29 juin 2022, intervenue en cours d'instance d'appel, le directeur régional des finances publiques des Hauts-de-France a prononcé un dégrèvement, à concurrence de la somme de 1 551 euros, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2010. Le litige d'appel a, dans cette mesure, perdu son objet. Dès lors, il n'y a pas lieu, dans la même mesure, de statuer sur les conclusions de M. et Mme B... à fin de décharge des impositions et contributions dont l'administration leur a ainsi accordé la décharge.

Sur la requête du ministre :

5. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes. / Nonobstant toutes dispositions contraires, lorsque ces sommes sont remboursées (...) à la personne morale qui les avait versées, la fraction des impositions auxquelles leur attribution avait donné lieu est restituée aux bénéficiaires ou à leurs ayants cause dans des conditions et suivant des modalités fixées par décret ; / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...) ".

6. Pour prononcer, par le jugement attaqué, la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites, en tant que remboursement de frais professionnels, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E..., le tribunal administratif a estimé, d'office, que l'imposition de ces sommes, qui n'avaient pas la nature d'avances, de prêts ou d'acomptes, ne pouvait trouver son fondement dans les dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts. Au soutien des conclusions de sa requête dirigées contre ce jugement, en tant qu'il prononce cette décharge, le ministre demande que soient substituées à ces dispositions, à titre principal, celles du c. de l'article 111 du code général des impôts ou, à titre subsidiaire, celles du 2° du 1. de l'article 109 du même code.

7. La demande de substitution de base légale doit être regardée, eu égard aux termes dans lesquels elle est formulée, comme suffisamment explicite et précise, alors même qu'elle consiste à proposer, de façon alternative, deux fondements juridiques différents. Elle est, par suite, recevable et il y a, dès lors, lieu de l'examiner.

8. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que cette société avait, au cours des exercices clos en 2010 et en 2011, mis à la disposition de M. B..., son associé et gérant, par voie d'inscription au crédit de son compte courant d'associé, diverses sommes représentant les montants totaux de 10 803,10 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et de 9 127,92 euros au titre de l'exercice clos en 2011. Ces écritures ont eu pour contrepartie des inscriptions au débit du compte 625100 " Voyages et déplacements ", comportant un libellé faisant référence à des remboursements de frais exposés par M. B... dans le cadre de déplacements effectués pour les besoins de l'exercice de ses fonctions de gérant. Toutefois, la vérificatrice a estimé que les notes de frais produites par la SARL E..., à l'appui de ces écritures, dont les mentions étaient trop imprécises quant à l'objet de chaque déplacement, n'étaient pas de nature, même rapprochées des agendas que M. B... avait fournis au cours du débat oral et contradictoire, lesquels faisaient seulement mention, aux dates des déplacements en cause, du nom de personnes, à justifier du caractère inhérent à ses fonctions de gérant, ni d'ailleurs de la réalité, de ces déplacements. En outre, ayant eu connaissance de déplacements effectués par M. B... dans le cadre des fonctions de gérant exercées par lui au sein d'une autre société, le service a exercé son droit de communication auprès de cette dernière et a été amené à constater, au vu des éléments fournis en réponse par cette société, que celle-ci avait porté dans sa comptabilité des remboursements de frais de déplacement versés à M. B... à hauteur des montants de 19 788 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et de 18 510 euros au titre de l'exercice clos en 2011. Enfin, M. B... a précisé, au cours du contrôle dont la SARL E... a fait l'objet, avoir effectué l'ensemble des déplacements en cause à l'aide de ses véhicules personnels et a fourni des certificats d'immatriculation correspondant à une berline de marque suédoise et à un coupé de marque allemande, en précisant qu'il avait utilisé le premier de ces véhicules jusqu'au 6 août 2010, puis l'autre à compter de cette date. Il a fourni, en outre, des factures d'entretien se rapportant exclusivement au second de ces véhicules. Or, après avoir reconstitué, à l'aide du barème kilométrique publié par l'administration, les distances correspondant aux remboursements de frais servis à M. B... par la SARL E... et par l'autre société dont l'intéressé était le gérant, le service a constaté que ces distances étaient incompatibles avec celles ressortant des factures d'entretien fournies en ce qui concerne le second véhicule, tandis qu'aucun élément ne permettait de déterminer les distances parcourues par le premier véhicule. Après avoir remis en cause, pour ces motifs, la déductibilité de ces versements, en tant que charges des exercices clos en 2010 et 2011, des résultats imposables de la SARL E..., l'administration a regardé ces mêmes sommes, mises à la disposition de M. B... par voie d'inscription sur son compte courant d'associé, comme ayant la nature de revenus distribués imposables entre ses mains.

9. M. et Mme B... contestent la remise en cause de la déductibilité de ces versements des résultats imposables de la SARL E..., en faisant valoir que les écritures comptables correspondantes étaient suffisamment justifiées, et soutiennent que c'est à tort que les sommes correspondantes ont été regardées comme ayant la nature de revenus distribués imposables au niveau de leur foyer fiscal. Toutefois, M. et Mme B... ne produisent, au soutien de leurs allégations, aucun élément probant, les déplacements mentionnés dans les notes de frais, déjà fournies au service, qu'ils versent à l'instruction, étant, pour la plupart, dépourvus de précision quant à leur lieu de destination, la seule mention d'une destination située dans le Douaisis étant insuffisante à cet égard. En outre, s'ils font état de l'utilisation, par M. B..., d'un autre véhicule leur appartenant, en précisant qu'il était assuré pour une utilisation professionnelle, ils n'apportent aucun élément de nature à leur permettre de justifier d'une utilisation effective de ce véhicule par l'intéressé pour les besoins de l'exercice de ses fonctions de gérant de la SARL E..., alors d'ailleurs que les notes de frais qu'ils ont versées à l'instruction identifient exclusivement les deux autres véhicules, mentionnés au point 8, comme ayant été utilisés pour les déplacements en cause. Enfin, il n'est pas sérieusement contesté que M. B... a perçu de l'autre société dont il était le gérant, des remboursements de frais de déplacement à hauteur des montants de 19 788 euros au titre de l'exercice clos en 2010 et de 18 510 euros au titre de l'exercice clos en 2011 et que la conversion, au moyen du barème kilométrique publié par l'administration, de ces montants en distance, aboutit, en les ajoutant à celles correspondant aux remboursements servis à M. B... par la SARL E..., à des montants excédant largement les distances parcourues, au cours de chacune des années en cause, par le véhicule de marque allemande que l'intéressé a utilisé pour effectuer la majeure partie des déplacements en cause, telles qu'elles résultent des factures d'entretien communiquées au service. Dans ces conditions, et sans qu'il soit besoin, pour l'administration, de démontrer que les clients mentionnés sur les notes de frais produites étaient aussi clients de l'autre société ou de s'assurer que les déplacements portés sur ces fiches n'ont pas donné lieu à des remboursements concurrents de la part des deux sociétés, ce qu'aucun élément de l'instruction ne permet d'ailleurs de retenir, l'administration était fondée à écarter comme non déductibles des résultats imposables de la SARL E... les sommes versées par cette société à M. B... à titre d'indemnités kilométriques.

10. Des avantages personnels dissimulés sous couvert de remboursements de frais professionnels constituent des avantages occultes au sens du c. de l'article 111 du code général des impôts, imposables comme revenus distribués. Il en résulte que l'imposition des sommes versées par la SARL E..., à titre d'indemnités kilométriques, à M. B..., sans que ces versements soient justifiés, dans leur principe comme dans leur montant, et sans que ces avantages aient fait l'objet de la comptabilisation explicite prévue à l'article 54 bis du code général des impôts, est susceptible de trouver son fondement dans les dispositions du c. de l'article 111 du code général des impôts que le ministre demande, à titre principal, de substituer à celles du a. du même article, initialement retenues par le service. Or, une telle substitution de base légale n'a pas pour effet de priver M. et Mme B... d'une garantie de procédure accordée par la loi aux contribuables, la possibilité, en cas de remboursement des sommes distribuées, d'obtenir une restitution de l'impôt, sur le fondement des dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts, ou une décharge, en invoquant la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, de cet impôt, ne présentant pas le caractère d'une garantie de procédure. Il y donc lieu de faire droit à cette demande de substitution de base légale. Il suit de là que le ministre est fondé à soutenir que le tribunal administratif de Lille n'a pu valablement prononcer la décharge d'une partie des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige, au seul motif que ces impositions méconnaissaient le champ d'application des dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts.

11. Toutefois, il y a lieu pour la cour, saisie, par l'effet dévolutif de l'appel, de l'ensemble du litige afférent à la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites, en tant que remboursements de frais professionnels, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E..., d'examiner les autres moyens présentés par M. et Mme B..., tant devant le tribunal administratif de Lille que devant elle.

En ce qui concerne l'homologation des rôles :

12. Aux termes de l'article 1658 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : " Les impôts directs et les taxes y assimilées sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet ou d'avis de mise en recouvrement. / Pour l'application de la procédure de recouvrement par voie de rôle prévue au premier alinéa, le représentant de l'Etat dans le département peut déléguer ses pouvoirs aux agents de catégorie A placés sous l'autorité des directeurs départementaux des finances publiques ou des responsables de services à compétence nationale, détenant au moins un grade fixé par décret en Conseil d'Etat. La publicité de ces délégations est assurée par la publication des arrêtés de délégation au recueil des actes administratifs de la préfecture. ". Pour l'application de ces dispositions, l'article 376-0 bis de l'annexe II à ce code précise que le grade mentionné au second alinéa de l'article 1658 du code général des impôts est celui d'administrateur des finances publiques adjoint.

13. Il résulte des éléments versés à l'instruction en appel par le ministre que les rôles émis le 28 mai 2014 pour le recouvrement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en litige, auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011, et sur le fondement desquels ont été émis les avis d'imposition supplémentaires adressés aux contribuables, ont été rendus exécutoires le 2 juin 2014 par M. C... A..., administrateur des finances publiques adjoint. M. A... bénéficiait, comme tous les collaborateurs du directeur régional des finances publiques du Nord-Pas-de-Calais et du département du Nord ayant au moins le grade d'administrateur des finances publiques adjoint requis par les dispositions énoncées au point précédent, d'une délégation de pouvoir qui lui avait été consentie par un arrêté du 21 février 2012 du préfet de la région Nord-Pas-de-Calais, préfet du Nord, et qui a fait l'objet, conformément à l'exigence posée par le dernier alinéa de l'article 1658 du code général des impôts, d'une publication le même jour au n°45 spécial du recueil des actes administratifs de la préfecture du Nord. Dès lors, le moyen tiré par M. et Mme B... de ce que les rôles émis pour assurer le recouvrement des suppléments d'impôt et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2010 et 2011 n'ont pas été régulièrement rendus exécutoires doit être écarté.

En ce qui concerne l'autre moyen :

14. L'inscription d'une somme au crédit d'un compte courant d'associé ouvert au nom du contribuable dans la comptabilité d'une société dans le capital de laquelle il a souscrit implique, par elle-même, la mise à disposition, dès la clôture de l'exercice concerné, de cette somme entre les mains de ce contribuable, qui a la libre disposition de ce compte sur lequel il lui est loisible d'effectuer des prélèvements, sauf à ce qu'il démontre qu'il se trouvait dans l'impossibilité de le faire. Par suite, M. et Mme B..., qui ne se livrent pas à une telle démonstration, ne peuvent utilement soutenir que le service n'aurait pas démontré, par l'identification d'un flux financier, la mise à disposition de leur foyer fiscal des sommes inscrites, au cours des exercices clos en 2010 et 2011, en tant que remboursements de frais professionnels, au débit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E....

15. Il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites, en tant que remboursement de frais professionnels, au crédit du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E.... Par voie de conséquence, le ministre est également fondé à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le tribunal administratif de Lille a mis la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur l'appel incident :

En ce qui concerne l'homologation des rôles :

16. Pour les motifs énoncés au point 13, le moyen tiré par M. et Mme B... de ce que les rôles émis pour assurer le recouvrement des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre des années 2010 et 2011 n'ont pas été régulièrement rendus exécutoires doit être écarté comme manquant en fait.

En ce qui concerne la régularité de la procédure de rectification mise en œuvre à l'égard de la société :

17. En raison du principe d'indépendance des procédures de rectification menées à l'encontre, d'une part, d'une société à responsabilité limitée et, d'autre part, de ses associés, les irrégularités de la procédure de redressement suivie à l'encontre de la société à responsabilité limitée, à les supposer établies, sont sans incidence sur l'imposition personnelle des associés au titre des revenus distribués entre leurs mains au prorata de leurs droits en application des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, alors même que l'article 110 de ce code dispose que, pour la détermination de la base assujettie à l'impôt sur le revenu, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. Il suit de là que M. et Mme B... ne peuvent utilement invoquer, au soutien de leurs conclusions tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis sur le fondement du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, l'irrégularité qui affecterait la procédure de rectification mise en œuvre à l'égard de la SARL E....

En ce qui concerne les autres sommes regardées comme distribuées au titre de l'année 2010 :

18. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / (...) ".

19. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que celle-ci avait déduit de son résultat imposable de l'exercice clos en 2010, en tant que charges, des dépenses, représentant un montant total de 5 862 euros, dont la réalité ou l'intérêt pour l'entreprise ne lui paraissait pas établi. La société ayant apporté, à l'appui de sa réclamation, des justifications concernant la nature et l'objet de ces dépenses, l'administration a accepté de ramener à 4 753 euros le montant des dépenses non justifiées. Parallèlement, l'administration, après avoir estimé que cette somme avait été désinvestie par la SARL E... et après avoir regardé M. B... comme le maître de l'affaire, a estimé que cette somme présentait la nature d'un revenu distribué imposable, moyennant l'application de la majoration d'assiette de 25 % prévue au 2° du 7. de l'article 158 du code général des impôts, entre les mains de l'intéressé, sur le fondement des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 de ce code. Ce chef de rehaussement ayant été contesté par M. et Mme B... dans le cadre de la mise en œuvre, à leur égard, de la procédure de rectification contradictoire, il incombe à l'administration de démontrer, d'une part, que la somme regardée comme distribuée a effectivement été désinvestie par la société distributrice et, d'autre part, que le contribuable peut être regardé comme le seul maître de l'affaire.

20. D'une part, la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SARL E... a donné lieu, ainsi que le rappelle le ministre, à un rehaussement des bénéfices imposables déclarés par cette société au titre, notamment, de l'exercice clos en 2010, lequel rehaussement résulte de la remise en cause d'écritures de charges. En outre, aucun des éléments relevés par la vérificatrice dans la proposition de rectification adressée à cette société, dont une copie est versée à l'instruction, ne fait état d'une décision d'investir ou de mettre en réserve tout ou partie du résultat réalisé par cette société au titre de l'exercice clos en 2010, de sorte que celui-ci doit être regardé comme susceptible d'avoir fait l'objet d'un désinvestissement, ce que confirme le ministre, dans ses écritures, sans être contredit.

21. D'autre part, le ministre fait valoir, sans davantage être contredit, que M. B..., détenteur de l'intégralité des parts sociales de la SARL E..., dont il est le gérant statutaire, était seul titulaire, en cette qualité, du pouvoir de disposer, sans contrôle des fonds sociaux, et que celui-ci était seul autorisé à mouvementer le compte bancaire ouvert au nom de cette société. Par ces éléments, qui ne sont pas contestés, et alors qu'il n'est pas allégué qu'une autre personne aurait exercé, de fait, des pouvoirs équivalents, le ministre doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, que M. B... était, au cours de l'année 2010 en litige, le seul maître de l'affaire.

22. Il résulte de ce qui a été dit aux points 20 et 21 que le ministre doit être regardé comme apportant la preuve, qui lui incombe, de l'appréhension, par le foyer fiscal de M. B..., des charges injustifiées déduites, par la SARL E..., de son résultat de l'exercice clos en 2010. Il ressort des éléments exposés par le ministre, dans ses écritures, que, compte-tenu du dégrèvement, mentionné au point 4, intervenu en cours d'instance, le rehaussement maintenu à ce titre par l'administration, soit 4 753 euros, n'excède pas, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme B..., l'assiette sur la base de laquelle la SARL E... a été imposée, de ce chef, à l'impôt sur les sociétés. En outre, l'administration a tenu compte, pour prononcer ce dégrèvement, de sa décision d'abandonner, pour cause d'inconstitutionnalité, la majoration d'assiette de 25 % initialement appliquée à la base assujettie aux prélèvements sociaux. Par ailleurs, si M. et Mme B... soutiennent que les sommes versées par la SARL E... au syndic de la résidence de Mormal à Aulnoye-Aymeries ainsi qu'au golf de Sin-le-Noble ont la nature de charges déductibles et ne pouvaient, dès lors, être regardées comme des revenus distribués, il résulte des éléments, non contestés, repris par le ministre dans ses écritures, d'une part, que la SARL E... n'était plus propriétaire, au titre de l'exercice clos en 2010, d'aucun logement au sein de la résidence de Mormal, de sorte que le rattachement de cette dépense à cet exercice ne peut être tenu pour établi, et, d'autre part, qu'elle n'a pas justifié, par une facture établie, d'ailleurs en 2009, au nom d'une tierce société, que la somme de 797,33 euros versée au golf de Sin-le-Noble correspond, comme M. et Mme B... l'allèguent, à une dépense liée à la mise en place d'un support publicitaire et présentant un caractère déductible du résultat de l'exercice clos en 2010, enfin, qu'il n'est pas justifié de l'intérêt direct que revêtait, pour la SARL E..., le versement d'une " dotation ", selon les termes mêmes de la facture produite, d'un montant de 107,40 euros, effectué au bénéfice, non pas de l'association gestionnaire du golf de Sin-le-Noble, mais d'une entreprise ayant son siège à Wasquehal et commercialisant des équipements de golf. Dans ces conditions, eu égard à la présomption d'appréhension qui s'attache, pour l'application des dispositions du 1° du 1. de l'article 109 du code général des impôts, à la qualité de seul maître de l'affaire, M. et Mme B... ne peuvent utilement alléguer que la somme que l'administration a regardée comme correspondant à un revenu distribué par la SARL E... n'aurait pas été effectivement versée par celle-ci.

En ce qui concerne les autres sommes regardées comme distribuées au titre de l'année 2011 :

23. En application des dispositions, citées au point 5, du a. de l'article 111 du code général des impôts, sont regardés comme des revenus distribués, sauf preuve contraire, les montants des soldes débiteurs des comptes courants ouverts dans les écritures d'une société au nom des associés, actionnaires ou porteurs de parts.

24. Au cours de la vérification de comptabilité dont la SARL E... a fait l'objet, la vérificatrice a constaté que le compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de cette société présentait, à la clôture de l'exercice 2011, un solde débiteur d'un montant de 4 685,54 euros, alors que le solde de ce compte était, à l'ouverture du même exercice, débiteur d'un montant de 12,38 euros. L'administration a estimé que la somme de 4 673,16 euros, correspondant à l'accroissement, au cours de l'exercice clos en 2011, de ce solde débiteur correspondait à un revenu distribué imposable au sein du foyer fiscal de M. B... sur le fondement des dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts.

25. M. et Mme B... ne contestent pas avoir eu la disposition de la somme de 4 673,16 euros, mais soutiennent avoir remboursé, après le 31 décembre 2011 mais avant la réception, par la SARL E..., de l'avis informant cette société de l'engagement d'une vérification de sa comptabilité, le solde débiteur de ce compte courant d'associé de M. B.... Ils invoquent, en conséquence, les dispositions, citées au point 5, du second alinéa du a. de l'article 111 du code général des impôts, en vertu desquelles, lorsque les sommes mises à la disposition d'un associé, par voie d'inscription à son compte courant d'associé, sont remboursées par lui à la personne morale qui les lui avait versées, la fraction des impositions auxquelles leur attribution a donné lieu est restituée à cet associé ou à ses ayants cause dans des conditions et suivant des modalités fixées par un décret, qui a été codifié aux articles 49 bis à 49 sexies de l'annexe III au code général des impôts.

26. Toutefois, d'une part, les dispositions du second alinéa du a. de l'article 111 du code général des impôts ouvrent au contribuable, non pas la possibilité de demander la décharge ou la réduction de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu assise sur les avances, prêts ou acomptes que lui a consentis une société, mais un droit à restitution de l'imposition en principal à proportion des remboursements de ces sommes à la société, à la condition que le contribuable ait procédé, au préalable, au paiement effectif des impositions procédant de la taxation de ces sommes. D'autre part, l'extrait, arrêté au 12 avril 2013, du compte courant d'associé ouvert au nom de M. B... dans la comptabilité de la SARL E... n'est pas, à lui seul, de nature à établir la réalité du remboursement dont il est fait état. Enfin, si M. et Mme B... invoquent, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice des énonciations du paragraphe n°190 de la doctrine administrative publiée le 12 septembre 2012 au bulletin officiel des impôts sous la référence BOI-RPPM-RCM-10-20-20-20, selon lesquelles, lorsque l'administration découvre qu'une avance taxable a été intégralement remboursée, il est possible d'admettre, à titre de règle pratique, qu'il n'y a pas eu de distribution de revenus s'il apparaît que le remboursement a été opéré à une date antérieure à celle de la réception par la société de l'avis de vérification, ils n'établissent pas, ainsi qu'il vient d'être dit, avoir opéré un tel remboursement, ni, par suite, entrer dans les prévisions de cet extrait de doctrine.

27. Enfin, il résulte de l'instruction et, notamment, des termes mêmes de la requête qu'en déterminant l'étendue des conclusions de son appel, qui ne tend qu'à un rétablissement partiel des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2011, le ministre a tenu compte de sa décision d'abandonner, pour cause d'inconstitutionnalité, la majoration d'assiette de 25 % initialement appliquée à la base assujettie aux prélèvements sociaux. En conséquence, le moyen tiré, par M. et Mme B..., de ce que cette majoration d'assiette ne pouvait légalement être appliquée aux suppléments de prélèvements sociaux mis à leur charge au titre de l'année 2011 est sans portée.

28. Il résulte de ce qui a été dit aux points 16 à 27 que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

29. Enfin, il résulte de ce qui a été dit aux points 15 et 28 que l'Etat ne peut pas être regardé comme ayant la qualité de partie perdante à l'instance d'appel, au sens et pour l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Dès lors, les conclusions présentées par M. et Mme B... sur le fondement de ces dispositions doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. et Mme B... tendant à la décharge, à concurrence de la somme de 1 551 euros, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2010.

Article 2 : Le jugement n° 1702499 du 3 février 2020 du tribunal administratif de Lille est annulé en tant, d'une part, qu'il prononce la décharge, en droits et pénalités, de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 à raison de la réintégration, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... en tant que remboursement de frais kilométriques et, d'autre part, qu'il met une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, auxquels M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2010 et 2011 et dont la décharge a été prononcée par ce jugement est remise à la charge des intéressés, en intégralité s'agissant de l'année 2010 et à concurrence d'une base imposable de 17 790 euros et d'une base de prélèvements sociaux de 15 167 euros s'agissant de l'année 2011.

Article 4 : Les conclusions de la demande présentée par M. et Mme B..., accueillies par le tribunal administratif de Lille, ainsi que leurs conclusions d'appel incident et celles qu'ils présentent devant la cour au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. et Mme D... B....

Copie en sera transmise à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Christian Heu, président de chambre,

- M. Bertrand Baillard, premier conseiller,

- M. Jean-François Papin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2022.

Le rapporteur,

Signé : J.-F. PapinLe président de chambre,

Signé : C. Heu

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

Nathalie Roméro

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N°20DA00421

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00421
Date de la décision : 27/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. Sauveplane
Rapporteur ?: M. Jean-François Papin
Rapporteur public ?: M. Arruebo-Mannier
Avocat(s) : CAMPBELL-BOULOGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-10-27;20da00421 ?
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