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04/10/2022 | FRANCE | N°22DA00586

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 04 octobre 2022, 22DA00586


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 janvier 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2105675 du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par un

e requête enregistrée le 9 mars 2022, M. B..., représenté par Me Navy, demande à la cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 4 janvier 2021 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2105675 du 31 décembre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 9 mars 2022, M. B..., représenté par Me Navy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du 4 janvier 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord de lui délivrer le titre de séjour sollicité, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, ou à défaut de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous la même condition d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, en application de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de séjour a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) communiqué par le préfet du Nord diffère de celui qui lui a été remis et ne permet pas de vérifier l'identité des médecins rédacteurs de l'avis ainsi que leur compétence, en méconnaissance de l'article 2 de l'arrêté du 9 novembre 2011, relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'authenticité de la signature électronique des médecins de l'OFII n'est pas établie ;

- la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 6, 7° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle méconnaît également les stipulations de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce qu'il ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine et qu'il avait droit à un titre de séjour de plein droit, sur le fondement de l'article 7 bis, h) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2022, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés dans la requête ne sont pas fondés et doivent être écartés pour les motifs exposés dans ses écritures de première instance.

Par une ordonnance du 30 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 30 juin 2022 à 12 heures.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Frédéric Malfoy, premier conseiller,

- et les observations de Me Guillaud pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 20 mars 1975, est entré en France le 20 décembre 2014, muni de son passeport revêtu d'un visa de court séjour valable du 20 décembre 2014 au 3 février 2015. Le 26 janvier 2016, il a été mis en possession d'une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé, laquelle a été régulièrement renouvelée jusqu'au 3 décembre 2019. Le 26 novembre 2019, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en invoquant ce même motif médical. Par un arrêté du 4 janvier 2021, le préfet du Nord a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. B... relève appel du jugement du 31 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat... ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. (...) / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Au vu du certificat médical et des pièces qui l'accompagnent ainsi que des éléments qu'il a recueillis au cours de son examen éventuel, le médecin de l'office établit un rapport médical, conformément au modèle figurant à l'annexe B du présent arrêté ". Selon l'article 6 de ce même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : / a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis mentionne les éléments de procédure. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ". Aux termes de l'article 1er du décret du 2 février 2010 pris pour l'application des articles 9, 10 et 12 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives : " Le référentiel général de sécurité prévu par l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 susvisée fixe les règles auxquelles les systèmes d'information mis en place par les autorités administratives doivent se conformer pour assurer la sécurité des informations échangées, et notamment leur confidentialité et leur intégrité, ainsi que la disponibilité et l'intégrité de ces systèmes et l'identification de leurs utilisateurs. / Ces règles sont définies selon des niveaux de sécurité prévus par le référentiel pour des fonctions de sécurité, telles que l'identification, la signature électronique, la confidentialité ou l'horodatage, qui permettent de répondre aux objectifs de sécurité mentionnés à l'alinéa précédent. / La conformité d'un produit de sécurité et d'un service de confiance à un niveau de sécurité prévu par ce référentiel peut être attestée par une qualification, le cas échéant à un degré donné, régie par le présent décret ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le référentiel général de sécurité ainsi que ses mises à jour sont approuvés par arrêté du Premier ministre publié au Journal officiel de la République française. L'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information concourt à l'élaboration de ce référentiel et à sa mise à jour en liaison avec la direction interministérielle du numérique. Ce référentiel est mis à disposition du public par voie électronique ". L'arrêté du 13 juin 2014 portant approbation du référentiel général de sécurité et précisant les modalités de mise en œuvre de la procédure de validation des certificats électroniques approuve, en son article 1er, la version 2.0 du référentiel général de sécurité prévu à l'article 2 du décret du 2 février 2010 et, en son article 2, en assure la disponibilité par voie électronique sur le site internet de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information et sur le site internet du secrétariat général à la modernisation de l'action publique.

4. Il ressort des pièces du dossier que le préfet du Nord a versé en première instance l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) rendu le 15 juin 2020, lequel comporte toutes les mentions prévues à l'article 6 de l'arrêté du 27 septembre 2016 et a été émis au vu du rapport du médecin instructeur. Cet avis, qui comporte les signatures électroniques des trois médecins membres du collège médical de l'OFII, est revêtu de la mention " après en avoir délibéré ", qui fait foi quant au caractère collégial de cette délibération. S'il ressort de la comparaison de l'avis qui a été communiqué à M. B... par l'OFII et de celui produit à l'instance par le préfet du Nord, une différence de taille entre les signatures présentes sur l'avis médical du collège des médecins ainsi que la présence d'un tampon sous la signature de l'un d'entre-eux, ces circonstances sont sans incidence quant à l'identification des trois médecins membres du collège chargés de rendre l'avis dès lors que leurs noms et qualités figurent bien sur la liste annexée à la décision du 18 novembre 2019 modifiant la décision du 17 janvier 2017 portant désignation de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Par ailleurs, la circonstance que l'avis généré récemment à partir de l'application Thémis et transmis par l'OFII au requérant, vise les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vigueur à compter du 1er mai 2021 alors que celui produit par le préfet vise les anciennes dispositions n'a pas davantage d'incidence sur la régularité de l'avis médical du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

5. Enfin, il est constant que l'accès à l'application " Thémis ", qui permet l'apposition des signatures électroniques, n'est accessible aux médecins signataires qu'au moyen de deux identifiants et de deux mots de passe qui leur sont propres, elle présente ainsi les garanties de sécurité de nature à assurer l'authenticité des signatures ainsi que le lien entre elles et leurs auteurs. L'appelant, qui soutient qu'aucune des deux versions de l'avis ne comporte de précision sur la certification de la signature électronique de chaque médecin, l'horodatage ainsi que les dates et auteurs des modifications, ne présente pas d'éléments permettant d'établir que ce procédé aurait méconnu les orientations du référentiel général de sécurité instauré par les dispositions citées au point 2. De plus, compte tenu des garanties du dispositif de signature électronique des avis émis par les collèges de médecins de l'OFII, ce procédé de signature doit être regardé comme bénéficiant de la présomption de fiabilité prévue par les dispositions combinées de l'article 1367 du code civil, du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 et du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017.

6. Il résulte de toutes ces considérations que M. B... n'est pas fondé à soutenir que l'avis émis le 15 juin 2020 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration serait, à raison des signatures dont il est revêtu, irrégulier. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de délivrance de son titre de séjour aurait été prise au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". En vertu des dispositions citées au point 2, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance du certificat de résidence pour raison de santé, doit émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016 cité au point 3, au vu notamment du rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

8. En l'espèce, l'avis du collège de médecins de l'OFII en date du 15 juin 2020 considère que l'état de santé de M. B..., nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Pour remettre en cause cet avis, l'appelant a versé au dossier les éléments relatifs à sa situation médicale, qui permettent à la cour d'apprécier sa situation, sans qu'il soit besoin de demander l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'OFII. M. B... fait valoir qu'il souffre d'une insuffisance rénale ayant nécessité une transplantation rénale en mars 2014 suivie de trois reprises chirurgicales et qu'il est soumis à un traitement pour lequel six médicaments lui sont prescrits, dont un seul serait effectivement disponible en Algérie. Toutefois, les trois attestations obtenues auprès de trois pharmacies implantées dans la seule ville de Bouira, ne permettent pas d'établir l'indisponibilité de ces traitements sur l'ensemble du territoire algérien. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ne peut qu'être écarté, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...) / Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : / a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article ; b) À l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge ; c) Au ressortissant algérien titulaire d'une rente d'accident du travail ou de maladie professionnelle servie par un organisme français et dont le taux d'incapacité permanente est égal ou supérieur à 20 p.100 ainsi qu'aux ayants droit d'un ressortissant algérien, bénéficiaire d'une rente de décès pour accident de travail ou maladie professionnelle versée par un organisme français ; d) Aux membres de la famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence valable dix ans qui sont autorisés à résider en France au titre du regroupement familial ; e) Au ressortissant algérien qui justifie résider habituellement en France depuis qu'il a atteint au plus l'âge de dix ans ; f) Au ressortissant algérien qui est en situation régulière depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'un certificat de résidence portant la mention " étudiant " ; g) Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français résidant en France, à la condition qu'il exerce, même partiellement, l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins, à l'échéance de son certificat de résidence d'un an ; h) Au ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une validité d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", lorsqu'il remplit les conditions prévues aux alinéas précédents ou, à défaut, lorsqu'il justifie de cinq années de résidence régulière ininterrompue en France. / (...) ".

10. M. B... soutient qu'en sa qualité de ressortissant algérien résidant sur le territoire français depuis le 3 septembre 2015 sous couvert d'un titre de séjour régulièrement renouvelé, il justifie d'une durée de séjour ininterrompue de cinq années en France, lui permettant de se voir délivrer de plein-droit un certificat de résidence de dix ans au titre de la " vie privée et familiale ", sur le fondement du h) des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco algérien cité au point précédent.

11. S'il est constant qu'à la date de la décision attaquée, M. B... vivait de façon ininterrompue en France depuis cinq ans, aucune pièce n'établit cependant qu'il était titulaire à cette même date, d'un certificat de résidence d'une validité d'un an portant la mention " vie privée et familiale ". Par ailleurs, il ressort de la décision attaquée que celle-ci a été prise en réponse à une demande présentée le 26 novembre 2019, tendant au renouvellement du certificat de résidence prévu par les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien au regard de l'état de santé de l'intéressé, et non en réponse à une demande d'admission au séjour sur un autre fondement de ce même accord, et en particulier son article 7 bis. Par suite, le préfet du Nord, ne s'étant pas prononcé au regard des stipulations du 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations par la décision en litige doit être écarté comme inopérant.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

13. Entré en France en septembre 2015, M. B... se prévaut de son séjour régulier sur le territoire français et de ses efforts d'intégration, à travers son activité bénévole dans le milieu associatif, son investissement dans des formations en langue française et dans un projet professionnel d'accompagnant d'élèves en situation de handicap en milieu scolaire ainsi que de son recrutement, depuis le 3 novembre 2021, en tant qu'agent contractuel chargé de l'animation au sein de la ville de Roubaix. Ces éléments sont cependant insuffisants pour établir l'exercice d'une vie privée et familiale en France alors qu'il est constant que l'intéressé a conservé ses liens familiaux en Algérie, où résident encore son épouse et sa fille mineure, ainsi que sa mère, ses frères et ses sœurs. Dans ces conditions, en refusant de lui accorder le renouvellement de son certificat de résidence en raison de son état de santé, le préfet du Nord n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance par la décision litigieuse des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

14. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 13 que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

15. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

16. Comme il a été dit au point 8, si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, le traitement approprié est disponible en Algérie. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

17. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...) , lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré / (...) ". Toutefois, lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français.

18. Il résulte de ce qui a été dit au point 11, que M. B... ne peut se prévaloir d'un certificat de résidence de plein droit sur le fondement des stipulations précitées de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par conséquent, comme l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Lille, il ne saurait invoquer cette circonstance pour faire obstacle au prononcé de la mesure d'éloignement par le préfet sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

19. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Sanjay Navy.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience publique du 20 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Frédéric Malfoy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 octobre 2022.

Le rapporteur,

Signé : F. Malfoy

La présidente de chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Huls-Carlier

N° 22DA00586 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00586
Date de la décision : 04/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Frédéric Malfoy
Rapporteur public ?: M. Carpentier-Daubresse
Avocat(s) : NAVY

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-10-04;22da00586 ?
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