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30/08/2022 | FRANCE | N°22DA00722

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 30 août 2022, 22DA00722


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de réfugiée, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 2110023 du 7 février 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif

de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 9 décembre 2021 par lequel le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de réfugiée, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 2110023 du 7 février 2022, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 mars 2022, Mme A..., représentée par Me David Huart, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du 9 décembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois ou à défaut, de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois et, dans cette attente, lui délivrer sous huitaine une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu à son moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur sa situation personnelle ;

- elle n'a pas pu déposer un titre de séjour sur un autre fondement faute d'en avoir été informée comme le prévoit l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par une ordonnance du 10 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 31 mai 2022, à 12 heures.

Le préfet du Pas-de-Calais a produit un mémoire enregistré le 4 juillet 2022, soit postérieurement à la clôture d'instruction.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante angolaise née le 5 décembre 2001, serait selon ses déclarations entrée en France en octobre 2017. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 5 février 2021 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 4 octobre 2021 de la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 9 décembre 2021, le préfet du Pas-de-Calais a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de réfugiée, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme A... relève appel du jugement du 7 février 2022 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du jugement attaqué que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille n'a pas répondu au moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation de Mme A.... Par suite, le jugement est irrégulier sur ce point et doit être annulé en tant seulement qu'il porte sur les conclusions d'annulation dirigées contre la mesure d'éloignement.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Lille tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions.

Sur la décision de refus de titre de séjour en qualité de réfugié :

4. Aux termes de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger a présenté une demande d'asile qui relève de la compétence de la France, l'autorité administrative, après l'avoir informé des motifs pour lesquels une autorisation de séjour peut être délivrée et des conséquences de l'absence de demande sur d'autres fondements à ce stade, l'invite à indiquer s'il estime pouvoir prétendre à une admission au séjour à un autre titre et, dans l'affirmative, à déposer sa demande dans un délai fixé par décret. Il est informé que, sous réserve de circonstances nouvelles, notamment pour des raisons de santé, et sans préjudice de l'article L. 611-3, il ne pourra, à l'expiration de ce délai, solliciter son admission au séjour ".

5. La circonstance que l'administration n'aurait pas délivré à Mme A... l'information prévue par les dispositions précitées de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour l'inviter, le cas échéant, à présenter une demande d'admission au séjour à un autre titre que l'asile est sans incidence sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour en qualité de réfugié à l'encontre de laquelle ce moyen est exclusivement soulevé, dès lors que l'objet de ces dispositions est justement de permettre aux demandeurs d'asile de demander un titre de séjour sur un autre fondement que celui de l'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 431-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

7. Mme A... était en France depuis quatre ans à la date de la décision contestée dont presque deux ans sont liés à la durée de la procédure de traitement de sa demande d'asile. Elle est célibataire et sans enfant à charge. Elle n'établit pas être dépourvue de toutes attaches familiales dans son pays d'origine. Compte tenu des conditions de son séjour en France et en dépit de ses bons résultats scolaires, le préfet du Pas-de-Calais n'a pas porté au droit au respect à une vie privée et familiale de l'intéressée une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de Mme A....

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision lui refusant un titre de séjour. Elle n'est pas non plus fondée à demander l'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 7 février 2022 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lille est annulé en tant qu'il statue sur la légalité de la décision du 9 décembre 2021 obligeant Mme A... à quitter le territoire français.

Article 2 : La demande de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 9 décembre 2021 l'obligeant à quitter le territoire français et le surplus de conclusions de la requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me David Huart.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Pas-de-Calais.

Délibéré après l'audience publique du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 août 2022.

Le président-assesseur,

Signé : M. C...

La présidente de chambre,

présidente-rapporteure,

Signé : G. BorotLa greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Huls-Carlier

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N° 22DA00722

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00722
Date de la décision : 30/08/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-08-30;22da00722 ?
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