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07/07/2022 | FRANCE | N°22DA00680

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 07 juillet 2022, 22DA00680


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un mois.

Par un jugement n° 2104046 du 18 janvier 2022, le tribuna

l administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requê...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un mois.

Par un jugement n° 2104046 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 mars 2022, Mme C..., représentée par Me Marie Verilhac, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté du 30 avril 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut de lui délivrer, dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous la même astreinte, une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ou dans l'hypothèse où elle n'obtiendrait pas l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat cette même somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision obligeant à quitter le territoire est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- le préfet s'est cru tenu d'accorder un délai de trente jours ;

- un délai supérieur aurait dû être accordé compte tenu de la situation de son fils ;

- la décision fixant le pays de destination est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire ;

- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2022, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 28 avril 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 18 mai 2022, à 12 heures.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- et les observations de Me Marion Thomas, représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante marocaine née le 29 juillet 1971, est entrée régulièrement en France le 21 août 2017, accompagnée de son fils. Elle a demandé le 12 mars 2018 une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 avril 2019, dont la légalité a été confirmée par un arrêt du 6 février 2020 de la cour, le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire français. Le 29 mai 2020, Mme C... a à nouveau sollicité le droit de séjourner en France sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 avril 2021, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de délivrer le titre sollicité, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un mois. Mme C... relève appel du jugement du 18 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de titre de séjour :

2. La décision contestée comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

3. Il ne ressort pas des pièces du dossier et des motifs de la décision en litige que le préfet de la Seine-Maritime n'aurait pas procédé à un examen sérieux et complet de la situation de Mme C....

4. Aux termes de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si leur présence constitue une menace pour l'ordre public, une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11, ou à l'étranger titulaire d'un jugement lui ayant conféré l'exercice de l'autorité parentale sur ce mineur, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ". Aux termes de l'article L. 313-11 du même code, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que le fils de A... C..., âgé de onze ans à la date de l'arrêté contesté, est atteint, depuis l'âge de sept ans, d'une paraplégie spastique grave au niveau des membres inférieurs. Il fait l'objet d'une prise en charge kinésithérapeutique et subit, notamment, des injections de toxine botulique ainsi que des séances de rééducation neuromotrice. Par son avis du 26 janvier 2021, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et l'intégration a estimé que le défaut de prise en charge de l'état de santé de son fils ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Ainsi que l'ont à juste titre retenu les premiers juges, aucun des différents comptes rendus médicaux établis par les médecins du service de neuropédiatrie du centre hospitalier de Rouen ayant suivi le fils de A... C... ne permet, eu égard à leur teneur, de remettre en cause cette appréciation. Quand bien même l'état de santé du fils de A... C... s'est notablement amélioré depuis sa prise en charge en France, le préfet a pu légalement refuser de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... est arrivée récemment en France, à l'âge de quarante-six ans. Si elle fait état de la présence en France de ses parents, chez qui elle est hébergée avec son fils, elle n'établit pas être isolée en cas de retour dans son pays d'origine, où réside son conjoint et ses autres enfants. Elle ne justifie d'aucune insertion sociale ou professionnelle notable, en se bornant notamment à produire en appel une promesse d'embauche non datée et à faire état de quelques actions bénévoles. Compte tenu des conditions et de la durée de son séjour en France, le préfet de la Seine-Maritime n'a pas porté au droit au respect à une vie privée et familiale de l'intéressée, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision a été prise et n'a par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, il n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de Mme C....

8. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

9. Mme C... fait état de la situation médicale de son fils, atteint d'une paraplégie spastique grave au niveau des membres inférieurs, et de sa prise en charge actuelle dans un institut médico-éducatif. Toutefois, par deux avis successifs, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et l'intégration a estimé que le défaut de prise en charge de l'état de santé du fils de A... C... ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité. Mme C... n'apporte pas plus en appel qu'en première instance d'élément circonstancié sur les conséquences d'un retour au Maroc de son fils quant à l'évolution ou l'aggravation de sa maladie, pas plus que sur la possibilité qu'il soit scolarisé au Maroc, ou même d'y être pris en charge dans une structure spécifique en bénéficiant d'un suivi médical. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1. de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 9 que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour est entachée d'illégalité.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

11. En application des dispositions du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation de quitter le territoire français qui assortit une décision de refus de titre de séjour, n'a pas à faire l'objet d'une motivation en fait distincte de celle de cette décision. Elle est, en l'espèce, suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

12. Il résulte de ce qui a été dit au point 10 que Mme C... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

13. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux point 7, il y a lieu d'écarter les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur la situation de Mme C... et de son fils.

14. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux point 9, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 11 à 14 que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français est entachée d'illégalité.

Sur la décision d'octroi d'un délai de délai de départ volontaire :

16. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. / (...) ".

17. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Maritime se serait cru tenu d'impartir à Mme C... un délai de trente jours à l'effet de quitter volontairement le territoire français. En outre, il n'est pas allégué que Mme C... aurait sollicité du préfet de la Seine-Maritime en faisant état de circonstances particulières tirées de sa situation et de celle de son fils, l'octroi d'un délai supérieur au délai de droit commun de trente jours fixé par les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

Sur la décision fixant le pays de destination :

18. La décision contestée fixe, comme pays de destination, le Maroc, pays dont Mme C... a la nationalité. Elle vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et relève que l'intéressée n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à cette convention. Cette décision est ainsi suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.

19. Il résulte de ce qui a été dit au point 15 que Mme C... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire pour une durée d'un mois :

20. Il ressort des termes mêmes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux.

21. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

22. Pour faire interdiction à Mme C... de revenir sur le territoire français pour une durée d'un mois, le préfet de la Seine-Maritime a, selon les motifs mêmes de l'arrêté contesté, pris en compte sa durée de présence en France, l'absence de liens d'une particulière intensité en France, le fait qu'elle a déjà fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement et qu'elle n'est pas une menace à l'ordre public. Par suite, le préfet, qui a examiné l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a suffisamment motivé, en fait comme en droit, sa décision.

22. Il résulte de ce qui a été dit au point 15 que Mme C... n'est pas fondée à invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

23. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " III. - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. /(...)/ La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

24. Compte tenu de la durée du séjour de Mme C... en France, de l'absence de liens forts en France hormis la présence de ses parents, son fils mineur ayant quant à lui vocation à l'accompagner et d'une insertion sociale et professionnelle notable, le préfet de la Seine-Maritime a pu prononcer une interdiction de retour, limitée à seulement un mois, sans méconnaître les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sans commettre d'erreur d'appréciation.

25. Mme C... ne justifie pas d'une insertion particulièrement notable dans la société française et a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement qu'elle n'a pas exécutée. Si ses parents résident en France, il ne ressort des pièces du dossier que la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un mois seulement, porterait atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision contestée sur la situation personnelle de Mme C... doivent être écartés.

26. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, assorties d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Marie Verilhac.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-Maritime.

Délibéré après l'audience publique du 23 juin 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Denis Perrin, premier conseiller, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2022.

Le président-assesseur,

Signé : M. D...

La présidente de chambre,

présidente-rapporteure,

Signé : G. BorotLa greffière,

Signé : C. Huls-Carlier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme

La greffière,

C. Huls-Carlier

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N° 22DA00680

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22DA00680
Date de la décision : 07/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-07-07;22da00680 ?
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