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07/06/2022 | FRANCE | N°20DA01564

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 07 juin 2022, 20DA01564


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2020, et un mémoire, enregistré le 15 septembre 2021, la société Supermarchés Match, représentée par Me Caroline Meillard et Me Camille Treheux, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le maire d'Hallennes-lez-Haubourdin a délivré à la société Olibé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour l'aménagement d'une station-service, d'un " drive " et de services techniques de la ville rue Paul Colette ;

2°) de mettre à la ch

arge de la société Olibé et de la commune d'Hallennes-lez-Haubourdin une somme de 5 500 e...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 5 octobre 2020, et un mémoire, enregistré le 15 septembre 2021, la société Supermarchés Match, représentée par Me Caroline Meillard et Me Camille Treheux, demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le maire d'Hallennes-lez-Haubourdin a délivré à la société Olibé un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour l'aménagement d'une station-service, d'un " drive " et de services techniques de la ville rue Paul Colette ;

2°) de mettre à la charge de la société Olibé et de la commune d'Hallennes-lez-Haubourdin une somme de 5 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas démontré que les membres de la Commission nationale d'aménagement commercial ont été régulièrement convoqués au regard des dispositions de l'article R. 752-35 du code de commerce ;

- le comité partenarial n'a pas été consulté ;

- le dossier de demande était incomplet en ce qui concerne l'animation de la vie urbaine, la sécurisation des accès et les flux de circulation ; il ne comprenait pas les éléments sur les eaux pluviales et les risques liés au périmètre des champs captants ; il était insuffisant quant aux risques et mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs ;

- il ne comprenait pas tous les éléments garantissant la réalisation des travaux nécessaires à la desserte du projet ;

- le projet méconnaît le plan local d'urbanisme ;

- il est incompatible avec les dispositions du document d'orientations générales du schéma de cohérence territoriale de Lille Métropole ;

- il ne répond pas aux objectifs d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs, au regard de plusieurs des critères associés à ces objectifs, tels qu'ils sont fixés par les dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce.

Par un mémoire, enregistré le 22 décembre 2020, la commune d'Hallennes-lez-Haubourdin s'associe aux écritures de la société Olibé et conclut au rejet de la requête.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mai 2021, et un mémoire, enregistré le 27 septembre 2021, la société Olibé, représentée par Me Jean Courrech, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la société Supermarchés Match d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 18 décembre 2020, la Commission nationale d'aménagement commercial, représentée par son président, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la requête n'est pas recevable car il n'est pas démontré que la société requérante a accompli les formalités de notification prévues à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 22 octobre 2021, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Par courrier du 10 mai 2022, les parties ont été averties que la cour était susceptible d'écarter comme irrecevable le moyen tiré de la méconnaissance du plan local d'urbanisme.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code du commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Corinne Baes-Honoré, présidente assesseure,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- les observations de Me Irène Baton, représentant la société Supermarchés Match et de Me Bertrand Courrech représentant la société Olibé.

Considérant ce qui suit :

1. Le 23 mai 2019, la SAS Olibé a déposé auprès de la commune d'Hallennes-lez-Haubourdin une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour l'extension du commerce " E. Leclerc ", sur un terrain situé rue Paul Colette. La commission départementale d'aménagement commercial a émis, le 4 novembre 2019, un avis favorable au projet. La société Supermarchés Match a formé un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial, qui a émis un avis favorable le 11 juin 2020. Par un arrêté du 5 août 2020, le maire d'Hallennes-lez-Haubourdin a accordé le permis de construire sollicité. La société Supermarchés Match demande à la cour d'annuler ce permis en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale.

Sur la légalité de l'arrêté du 5 août 2020 :

En ce qui concerne la convocation des membres de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article R. 752-35 du code de commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. / Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : / 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; / 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; / 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; / 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale ".

3. Il ressort des pièces du dossier que les membres de la Commission nationale d'aménagement commercial ont été convoqués le 25 mai 2020 à la séance du 11 juin suivant au cours de laquelle la Commission a examiné le projet de la société Olibé. La lettre de convocation informait ses destinataires que les documents utiles seraient mis à leur disposition sur une plateforme de téléchargement cinq jours au moins avant la tenue de la séance. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les membres de la commission n'ont pas été régulièrement convoqués et n'ont pas reçu dans un délai raisonnable l'ensemble des documents prévus par l'article R. 752-35 du code du commerce doit être écarté.

En ce qui concerne la consultation du comité partenarial :

4. La société Match se borne à soutenir que la société pétitionnaire aurait dû consulter le comité partenarial (Copar) sans se prévaloir d'un texte imposant la consultation au cas d'espèce. Son moyen, insuffisamment assorti de précisions, doit donc être écarté.

En ce qui concerne la composition du dossier :

5. Aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable : " La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments suivants : / (...) / 4° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire. / Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : / a) Contribution à l'animation des principaux secteurs existants ; / (...) / c) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; / d) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules de livraison générés par le projet et description des accès au projet pour ces véhicules ; / e) Indication de la distance du projet par rapport aux arrêts des moyens de transports collectifs, de la fréquence et de l'amplitude horaire de la desserte de ces arrêts ; / (...) / g) En cas d'aménagements envisagés de la desserte du projet : tous documents garantissant leur financement et leur réalisation effective à la date d'ouverture de l'équipement commercial ; / 5° Effets du projet en matière de développement durable. Le dossier comprend une présentation des effets du projet en matière de développement durable, incluant les éléments suivants : / a) Présentation des mesures, autres que celles résultant d'obligations réglementaires, destinées à réduire la consommation énergétique des bâtiments ; / b) Le cas échéant, description des énergies renouvelables intégrées au projet et de leur contribution à la performance énergétique des bâtiments ; / (...) / e) Description des mesures propres à limiter les pollutions associées à l'activité, notamment en matière de gestion des eaux pluviales et de traitement des déchets ; / (...) / 6° Effets du projet en matière de protection des consommateurs. / (...) / d) Evaluation des risques naturels, technologiques ou miniers et, le cas échéant, description des mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs ; (...) ".

6. La circonstance que le dossier de demande d'autorisation ne comporterait pas l'ensemble des éléments exigés par les dispositions précitées, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation qui a été accordée que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. Si la société Supermarchés Match soutient que le dossier était lacunaire en ce qui concerne l'animation de la vie urbaine, il ressort de l'étude d'impact que celle-ci a également présenté l'ensemble des commerces situés dans la commune et les communes limitrophes et a précisé les taux de vacance commerciale et les évolutions démographiques de chaque commune.

8. Il ressort du dossier de demande d'autorisation que l'accès au site des véhicules de livraison se fera depuis un chemin rural, la commune ayant autorisé la société à créer un accès à sa parcelle depuis le chemin rural et s'étant engagée à lui céder ce chemin en cas d'obtention du permis de construire. Si la requérante soutient que l'étroitesse du chemin ne permettra pas aux véhicules de circuler en double sens comme l'indique le dossier de demande, il ressort du plan versé au dossier que ce chemin est d'une faible distance et offre une bonne visibilité. Dans ces conditions, et à supposer même que des camions ne pourraient pas se croiser en raison de la largeur du chemin, l'imprécision invoquée n'a pas faussé l'appréciation portée par la Commission nationale d'aménagement commercial sur le projet.

9. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le dossier de demande était accompagné d'une lettre du 26 mars 2019, par laquelle le maire de la commune a autorisé la société à créer l'accès au site et s'est engagé à céder le chemin rural en cas d'obtention du permis de construire, cession qui est au demeurant intervenue le 24 août 2021. Dans ces conditions, la réalisation de cette cession pouvait être regardée comme suffisamment certaine lorsque la Commission nationale s'est prononcée. Par ailleurs, dès lors que l'aménagement du chemin était à la charge de la société, il ne lui appartenait pas de produire, à l'appui de sa demande, les documents garantissant le financement d'un tel aménagement.

10. La société Supermarchés Match critique l'évaluation des flux de circulation générés par le projet, ainsi que les réserves de capacités d'absorption des infrastructures existantes. Si l'étude de circulation, réalisée par un bureau spécialisé, date de novembre 2016, il ne ressort pas des pièces du dossier que la situation aurait significativement évolué depuis cette date. Il ressort de cette étude que le trafic est faible à modéré dans la rue Paul Colette, notamment aux heures de pointe, les flux les plus importants étant observés sur des voies plus à l'est. Les réserves de capacité des voiries du périmètre d'étude sont qualifiées de modérées à confortables. Dans ces conditions, et alors qu'il ressort du dossier de demande que seul un flux de 130 nouveaux véhicules par jour est attendu en cas de réalisation du projet, les éléments du dossier ayant permis à la commission départementale et à la Commission nationale d'aménagement commercial d'apprécier l'impact des flux de circulation générés par le projet, étaient suffisants au regard des exigences de l'article R. 752-6 du code de l'urbanisme alors en vigueur.

11. Il ressort du dossier de demande que les eaux pluviales des toitures des bâtiments seront récupérées pour être réutilisées tandis que les eaux pluviales de ruissellement du parking seront récupérées, acheminées dans un bassin de rétention et infiltrées à la parcelle. Par ailleurs, la Commission nationale disposait d'un plan sur lequel la zone de vulnérabilité des champs captants a été matérialisée. Aucune insuffisance ne peut donc être retenue à ce titre.

12. Le dossier de demande précise que sur le site existant, fermé depuis cinq ans, se trouve une station-service abandonnée. Si la société Match allègue que cette situation est de nature à entraîner des risques de pollution des sols, il n'est pas établi en quoi le dossier aurait été insuffisant en termes de protection des consommateurs.

En ce qui concerne la compatibilité avec le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du schéma de cohérence territoriale (SCoT) :

13. Aux termes du I de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige : " L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale (...) ". En matière d'aménagement commercial, s'il n'appartient pas aux schémas de cohérence territoriale, sous réserve des dispositions applicables aux zones d'aménagement commercial, d'interdire par des dispositions impératives certaines opérations de création ou d'extension relevant des qualifications et procédures prévues au titre V du livre VII du code de commerce, ils peuvent fixer des orientations générales et des objectifs d'implantations préférentielles des activités commerciales définis en considération des exigences d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement ou de qualité de l'urbanisme. Si de tels objectifs peuvent être pour partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux commissions d'aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent.

14. Selon les orientations du DOO du SCoT de Lille Métropole, " la priorité est donnée au renforcement du maillage commercial de proximité ", et les " centralités commerciales urbaines sont les lieux privilégiés d'implantation des activités commerciales ". A cette fin, une armature commerciale doit être construite, et la commune d'Hallennes-lez-Haubourdin est identifiée dans le SCoT comme une " centralité commerciale relais ". " Ces centralités relais répondent à des besoins courants et hebdomadaires, essentiellement alimentaires ". Le DOO prévoit également qu'il est " souhaitable d'autoriser des activités commerciales de type " drive " (cellules de 200 à 300 m² de surface de plancher maximum) à s'implanter dans les centralités commerciales urbaines et dans les pôles d'échanges en transport (...) ".

15. Si la société Supermarchés Match fait valoir que la taille du projet est très supérieure à la taille des cellules mentionnée par le DOO du SCoT, les orientations précitées sur la taille du drive et son implantation sont néanmoins formulées d'une façon peu contraignante. Par ailleurs, si " les espaces à dominante économique " n'ont pas de vocation commerciale, dès lors que " par principe le commerce doit être implanté dans le tissu urbain ", il ressort du dossier de demande qu'au sein du parc d'Hallennes se trouvent déjà quelques activités commerciales et services. Enfin, si le DOO poursuit l'objectif " d'optimiser la ressource foncière ", ce qui passe notamment par la " densification des opérations ", et vise à " réduire l'impact foncier du développement commercial ", le projet en litige, qui s'implante sur une friche, ne développe aucun bâti supplémentaire.

16. Enfin, le moyen tiré de la méconnaissance du plan local d'urbanisme est inopérant, les dispositions précitées du I de l'article L. 752-6 du code du commerce ne prévoyant aucune obligation de compatibilité avec ce document.

En ce qui concerne l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial :

17. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable : " (...) / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / (...) / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / e) La contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville de la commune d'implantation, des communes limitrophes et de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune d'implantation est membre ; / (...) / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique et des émissions de gaz à effet de serre par anticipation du bilan prévu aux 1° et 2° du I de l'article L. 229-25 du code de l'environnement, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / (...) / 3° En matière de protection des consommateurs : / (...) / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / (...) ".

S'agissant de l'aménagement du territoire :

18. Il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux vise à créer un drive, comprenant 8 pistes de ravitaillement, accompagné du déplacement de la station-service, du service de location de véhicules et de la réserve proche de l'hypermarché.

19. La société Match soutient que le projet aura des effets négatifs sur l'animation de la vie urbaine de la commune d'implantation, où les commerces sont disséminés le long de la RD 941, et des communes voisines et en particulier celle de Santes, en raison de la nature même du projet et de sa situation géographique, proche des grands axes routiers. La direction départementale des territoires et de la mer s'est cependant limitée à relever que le projet " pourrait déstabiliser la petite surface du centre-ville de Santes ", et il résulte de l'étude d'impact que cette commune compte 25 cellules commerciales avec 4 % seulement de vacance. Par ailleurs, l'impact global sur les centres-villes a été qualifié de faible. Il n'est en outre pas contesté que le drive offre un nombre de références limité, où la viande, le poisson et les fruits et légumes représentent une part minime de l'activité, qui est présentée dans des formes différentes du commerce de bouche traditionnel. Dans ces conditions, et alors que la requérante relève une croissance démographique importante dans la commune, il n'est pas établi que le projet conduira à la transformation de la ville en ville-dortoir.

20. En revanche, et ainsi que le soutient la société Supermarchés Match, la contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville sera nécessairement faible, voire inexistante.

21. Si le terrain d'assiette est vaste, s'élevant à 25 788 m², il ressort des pièces du dossier que le drive permettra de rénover les bâtiments existants, sans entraîner de consommation supplémentaire d'espace naturel.

22. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le chemin rural qui sera emprunté par les véhicules de livraison sera aménagé par la société Supermarchés Match, la commune s'étant engagée à céder la parcelle en cause. A supposer même que les véhicules de service emprunteraient ce chemin, il n'est pas contesté que la largeur de la voie sera de 5,10 mètres, et il ressort du plan reproduit dans le dossier que ce chemin offre une bonne visibilité aux véhicules avant de s'engager sur le chemin. Enfin, la circonstance que cette voie soit très proche du portail d'entrée du site d'activité voisin n'est pas de nature à établir les risques allégués pour la sécurité, les flux de livraison quotidiens décrits dans le projet de demande étant très limités.

23. Si la société Supermarché Match souligne qu'il n'existe pas de cheminement sécurisé pour les cyclistes, il ressort du projet que celui-ci est également desservi par deux lignes de bus et le site du projet est également accessible pour les piétons.

S'agissant du développement durable :

24. Il ressort du dossier de demande que des panneaux photovoltaïques seront installés sur la toiture du magasin et sont destinés à l'autoconsommation du site. Si la société Supermarchés Match soutient que ces panneaux ne sont pas les plus performants et les plus pertinents au regard du taux d'ensoleillement et que le projet ne prévoit pas de dispositif d'énergie supérieur à la réglementation en vigueur, il n'en demeure pas moins que ces panneaux permettront une production d'énergie renouvelable. Si, par nature, le projet favorise l'utilisation de véhicules et partant, la production de gaz à effet de serres, il ressort des pièces du dossier que le projet vise à réhabiliter une friche industrielle et que la surface d'espaces perméables augmente sensiblement.

25. Il résulte également du dossier de demande que le projet permet de récupérer des eaux pluviales des toitures et du parking, dans un bassin de rétention enterré. Les premières seront stockées pour être réutilisées. Si les pistes du drive sont en partie incluses dans le périmètre des champs captants, les eaux pluviales provenant du parking seront traitées avant d'être infiltrées à la parcelle. En outre, l'article 2 de l'arrêté contesté prévoit que les prescriptions de la métropole européenne de Lille précisées dans son avis du 21 juillet 2020 devront être respectées. Celui-ci indique que les eaux de pluie de ruissellement des aires de dépotage ou de distribution des carburants devront transiter par un débourbeur-séparateur à hydrocarbure dédié à cette zone avant de rejoindre le réseau public, et que les matières polluées du site seront à évacuer. Il ressort également du dossier de demande que la création de la station-service se fera en dehors des champs captants. Ainsi, ni les risques de pollution en général ni ceux portant sur la ressource en eau potable ne sont établis.

S'agissant de la protection des consommateurs :

26. Il n'est pas établi que le maintien de la station essence, déjà abandonnée, serait à l'origine de risques particuliers pour le consommateur. En outre, la société pétitionnaire fait valoir, sans être contredite, que le site doit être démantelé sous le contrôle de la DREAL. Enfin, si le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) a émis un avis défavorable au projet en raison du dépassement de sa capacité opérationnelle, l'article 3 de l'arrêté de permis contesté prévoit que l'ensemble des prescriptions émises par le SDIS dans son rapport du 27 juin 2019 devront être respectées.

27. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 18 à 26, l'absence de contribution du projet à la préservation ou à la revitalisation du tissu commercial du centre-ville mentionnée au point 20 ne saurait à elle seule justifier le refus d'accorder l'autorisation sollicitée. La Commission nationale d'aménagement commercial n'a donc pas fait une inexacte application de l'article L. 752-6 du code de commerce.

28. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposées en défense, que la société Supermarchés Match n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 5 août 2020.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

29. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat et de la commune d'Hallennes-lez-Haubourdin, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, les sommes que demande la société Match au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

30. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Supermarchés Match une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la société Olibé et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Supermarchés Match est rejetée.

Article 2 : La société Supermarchés Match versera la somme de 1 000 euros à la société Olibé au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Supermarchés Match, à la société Olibé à la commune d'Hallennes-lez-Haubourdin et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience publique du 17 mai 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Marc Heinis, président de chambre,

- Mme Corinne Baes-Honoré, présidente assesseure,

- Mme Naïla Boukheloua, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juin 2022.

La présidente-rapporteure,

Signé : C. Baes-HonoréLe président de la première chambre,

Signé : M. A...

La greffière,

Signé : C. Sire

La République mande et ordonne au préfet du Nord et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique chacun en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Christine Sire

N° 20DA01564 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01564
Date de la décision : 07/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Corinne Baes Honoré
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : CABINET LUMEA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-06-07;20da01564 ?
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