Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 5 avril 2019 par lequel le maire d'Attin l'a exclue temporairement de ses fonctions pour une durée de trois jours, d'enjoindre à la commune de la réintégrer au sein de la cantine scolaire de la commune, de condamner la commune à lui verser la somme de 128,13 euros en réparation de son préjudice financier, la somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral et enfin la somme de 340 euros bruts au titre de la suppression de son indemnité d'administration et de technicité.
Par un jugement n° 1910600 du 13 novembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2021, Mme C... B..., représentée par Me Anne Painset-Beauvilain, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 avril 2019 du maire d'Attin ;
3°) d'enjoindre à la commune d'Attin de la réintégrer au sein de la cantine scolaire de la commune ;
4°) de condamner la commune à lui verser la somme de 128,13 euros en réparation de son préjudice financier, la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral ainsi que la somme de 340 euros bruts au titre de la suppression de son indemnité d'administration et de technicité ;
5°) de mettre à la charge de la commune d'Attin la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code pénal ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... A..., présidente-rapporteure,
- et les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., adjointe technique territoriale, a été titularisée à compter du 1er octobre 2011 par la commune d'Attin. Par un arrêté du 5 avril 2019, le maire d'Attin lui a infligé une sanction d'exclusion temporaire d'une durée de trois jours. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler cette sanction disciplinaire et de condamner la commune à lui verser diverses sommes en réparation de ses préjudices. Mme B... relève appel du jugement du 13 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 5 avril 2019 :
2. Aux termes de l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983, dans sa version applicable à la date de l'arrêté contesté : " Aucune mesure concernant notamment (...) la discipline (...) ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, aux autorités judiciaires ou administratives de faits constitutifs d'un délit, d'un crime ou susceptibles d'être qualifiés de conflit d'intérêts au sens du I de l'article 25 bis dont il aurait eu connaissance dans l'exercice de ses fonctions. / Aucun fonctionnaire ne peut être sanctionné (...) pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. ". Aux termes de l'article 6 de la loi du 9 décembre 2016 : " Un lanceur d'alerte est une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi, un crime ou un délit, une violation grave et manifeste d'un engagement international régulièrement ratifié ou approuvé par la France, d'un acte unilatéral d'une organisation internationale pris sur le fondement d'un tel engagement, de la loi ou du règlement, ou une menace ou un préjudice graves pour l'intérêt général, dont elle a eu personnellement connaissance ". Aux termes de l'article 8 de la même loi : " I. - Le signalement d'une alerte est porté à la connaissance du supérieur hiérarchique, direct ou indirect, de l'employeur ou d'un référent désigné par celui-ci. En l'absence de diligences de la personne destinataire de l'alerte mentionnée au premier alinéa du présent I à vérifier, dans un délai raisonnable, la recevabilité du signalement, celui-ci est adressé à l'autorité judiciaire, à l'autorité administrative ou aux ordres professionnels. En dernier ressort, à défaut de traitement par l'un des organismes mentionnés au deuxième alinéa du présent I dans un délai de trois mois, le signalement peut être rendu public ". Aux termes de l'article 223-1 du code pénal : " Le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. ".
3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a effectué, les 31 août 2018 et 3 septembre 2018, un signalement par courriel à la direction départementale de la protection des populations en dénonçant des manquements de sa nouvelle collègue aux règles d'hygiène au sein de la cantine scolaire, organisée dans la même salle polyvalente que la garderie municipale. Après mise en demeure adressée à la commune de se conformer à la réglementation, deux manquements ayant été constatés à savoir le manque de formation de la responsable de cuisine et l'absence de formalisation des procédures appliquées in situ, le niveau d'hygiène a été classé satisfaisant par la direction départementale de la protection de la population lors de la seconde inspection du 10 janvier 2019. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les faits que Mme B... a dénoncés constituent un délit de mise en danger de la vie d'autrui, tel que prévu à l'article 223-1 du code pénal. Dans ces conditions, Mme B... ne peut pas, en tout état de cause, se prévaloir de la qualité de lanceur d'alerte. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 6 ter A de la loi du 13 juillet 1983 doit être écarté.
4. Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l'avertissement ; le blâme ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ; (...) ".
5. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a pris l'initiative de mettre à disposition des parents d'élèves, sans en informer sa hiérarchie, un cahier de doléances avec la question " que pensez- vous de l'état de propreté de la garderie ' ". Si Mme B... soutient qu'il n'est pas établi que des parents se seraient plaints de cette démarche comme le prétend la commune, les faits qui lui sont reprochés sont néanmoins établis. Le moyen tiré de leur inexactitude matérielle doit donc être écarté.
7. Par cette initiative, Mme B... a mis en cause, en prenant à partie les parents d'élèves, l'entretien des locaux de la garderie effectué par les services de la commune. Un tel comportement méconnaît l'obligation de réserve qui s'impose à tout agent public. Mme B... ayant été précédemment sanctionnée d'un avertissement et eu égard à la nature des faits fautifs, le maire d'Attin n'a pas commis d'erreur d'appréciation en lui infligeant une sanction du 1er groupe, d'exclusion temporaire de trois jours.
8. Il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées par Mme B... à fin d'annulation de l'arrêté du 5 avril 2019, y compris par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction, doivent être rejetées.
Sur les conclusions indemnitaires :
9. En premier lieu, comme il a été dit précédemment, la sanction d'exclusion temporaire de trois jours n'est pas illégale. Mme B... n'est donc pas fondée à soutenir que la commune a commis une faute. Par suite, les conclusions indemnitaires tendant à la réparation des préjudices financier et moral résultant de cette sanction doivent être rejetées.
10. En deuxième lieu, si Mme B... soutient que deux autres sanctions prises à son égard les 2 octobre 2018 et 25 février 2019 lui ont causé un préjudice moral, elle n'articule aucun moyen d'illégalité à l'encontre de ces deux décisions et n'établit pas que la commune aurait commis une faute. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées à ce titre ne peuvent qu'être rejetées.
11. En troisième et dernier lieu, Mme B... se borne à demander la réparation d'un préjudice lié au non versement de l'indemnité d'administration et de technicité sans établir en quoi le non versement de cette indemnité serait illégal. Par suite, les conclusions présentées à ce titre doivent être également être rejetées.
12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Attin, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme réclamée par la commune d'Attin sur le même fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Attin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la commune d'Attin.
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N°21DA00070
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