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21/10/2021 | FRANCE | N°20DA01743

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 21 octobre 2021, 20DA01743


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 5 juillet 2018 par laquelle le préfet du Nord a refusé de revaloriser son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (RIFSEEP) à la suite de son changement de poste ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux dirigé contre cette décision, d'enjoindre au préfet du Nord de revaloriser son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise à compter du 17 janvier 2018 et de lui verser les sommes

correspondantes, dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 5 juillet 2018 par laquelle le préfet du Nord a refusé de revaloriser son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (RIFSEEP) à la suite de son changement de poste ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux dirigé contre cette décision, d'enjoindre au préfet du Nord de revaloriser son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise à compter du 17 janvier 2018 et de lui verser les sommes correspondantes, dans un délai d'un mois à compter du jugement à intervenir et d'enjoindre au préfet du Nord de régulariser sa situation administrative comme demandé dans le courrier du 23 novembre 2017 du préfet délégué pour la défense et la sécurité Nord, et notamment que le poste de responsable zonal à la sécurité des systèmes d'information soit classé en catégorie 1 dans la cotation des emplois des systèmes d'information et de communication RIFSEEP, que son poste soit validé par le comité technique de préfecture et que la direction des ressources humaines du ministère soit informée de sa mobilité.

M. C... B... a également demandé au tribunal administratif de Lille de condamner l'Etat à lui verser, d'une part, la somme de 2 186 euros, à parfaire à la date du paiement à intervenir, augmentée des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, calculés sur la période s'écoulant entre le 16 janvier 2017 et la date du paiement et, d'autre part, la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence.

Par un jugement nos1810206,1902531 du 16 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 novembre 2020 et 25 mai 2021, M. B..., représenté par Me Julien Bouteiller, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 5 juillet 2018 par laquelle le préfet du Nord a refusé de revaloriser son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise à la suite de son changement de poste ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au préfet du Nord, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, de revaloriser son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise à compter du 17 janvier 2018 et de lui verser les sommes correspondantes, dans un délai d'un mois et d'enjoindre au préfet du Nord de régulariser sa situation administrative comme demandé dans le courrier du 23 novembre 2017 du préfet délégué pour la défense et la sécurité Nord, et notamment que le poste de responsable zonal à la sécurité des systèmes d'information soit classé en catégorie 1 dans la cotation des emplois des systèmes d'information et de communication RIFSEEP, que son poste soit validé par le comité technique de préfecture et que la direction des ressources humaines du ministère soit informée de sa mobilité ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 3 792 euros à parfaire à la date du paiement à intervenir, augmentée des intérêts au taux légal et de leur capitalisation sur la période du 16 janvier 2017 à la date du paiement à intervenir ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 ;

- l'arrêté du 16 décembre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... A..., présidente-rapporteure,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,

- et les observations de Me Julien Bouteiller, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est ingénieur principal des systèmes d'information et de communication. Il a été nommé, par décision du 9 juin 2011, au poste de responsable interdépartemental de la sécurité des systèmes d'information, à compter du 4 avril 2011, avant d'être nommé ensuite, par arrêté du 16 janvier 2017, au poste de responsable zonal de la sécurité des systèmes d'information, à compter du 17 janvier 2017, dans le cadre d'une mesure de réorganisation interne proposée par le préfet délégué pour la défense et la sécurité Nord par note du 16 novembre 2016. Par un courrier du 14 mai 2018, M. B... a sollicité auprès du préfet du Nord la revalorisation de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise (IFSE). Par un courrier du 26 juin 2018, M. B... a réitéré sa demande. Par une décision du 5 juillet 2018, le préfet du Nord a rejeté ses demandes. Par un courrier du 28 juillet 2018, M. B... a formé un recours gracieux contre cette décision. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le préfet du Nord sur ce recours. Par un courrier du 22 novembre 2018, M. B... a présenté une demande indemnitaire, laquelle est également restée sans réponse. Par deux requêtes distinctes, M. B... a demandé au tribunal administratif de Lille, d'une part, d'annuler la décision du 5 juillet 2018 du préfet du Nord refusant de revaloriser son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux, et, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme correspondant à la différence entre le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise qu'il aurait dû percevoir à la suite de sa revalorisation et celui qu'il a perçu et à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il estime avoir subis. M. B... relève appel du jugement du 16 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille, après joint les demandes, les a rejetées.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour écarter les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur de fait dont serait entachée la décision de refus de revalorisation du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise, les premiers juges ont notamment examiné de manière précise les fiches des deux postes occupés successivement par M. B... et relevé qu'il était rattaché pour ces deux postes directement au préfet délégué à la défense et à la sécurité. Ils en ont déduit qu'il ne pouvait être regardé comme ayant changé de fonctions au sens de l'article 3 du décret du 20 mai 2014. Ils ont ce faisant suffisamment motivé leur jugement. Par suite, le moyen doit être écarté.

3. Il ne ressort pas des écritures de première instance que M. B... aurait expressément soulevé un moyen tiré de la méconnaissance des énonciations contenues dans l'instruction du 25 octobre 2016 relative aux modalités de gestion de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise pour les ingénieurs des systèmes d'information et de communication. Par suite, les premiers juges n'ont pas pu omettre de répondre à un tel moyen et le moyen doit donc être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la légalité de la décision du 5 juillet 2018 :

4. Aux termes de l'article 1er du décret du 20 mai 2014 portant création d'un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel dans la fonction publique de l'Etat : " Les fonctionnaires relevant de la loi du 11 janvier 1984 susvisée peuvent bénéficier, d'une part, d'une indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise et, d'autre part, d'un complément indemnitaire annuel lié à l'engagement professionnel et à la manière de servir, dans les conditions fixées par le présent décret. / (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise est fixé selon le niveau de responsabilité et d'expertise requis dans l'exercice des fonctions. / Les fonctions occupées par les fonctionnaires d'un même corps ou statut d'emploi sont réparties au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : / 1° Fonctions d'encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; / 2° Technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaire à l'exercice des fonctions ; / 3° Sujétions particulières ou degré d'exposition du poste au regard de son environnement professionnel. Le nombre de groupes de fonctions est fixé pour chaque corps ou statut d'emploi par arrêté du ministre chargé de la fonction publique et du ministre chargé du budget et, le cas échéant, du ministre intéressé. (...) ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Le montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen : / 1° En cas de changement de fonctions ; (...) ". L'arrêté du 16 décembre 2015 pris pour l'application au corps des ingénieurs des systèmes d'information et de communication des dispositions du décret du 20 mai 2014 classe les fonctions occupées en trois catégories affectées chacune d'un montant minimal et d'un plafond d'indemnité.

5. Il résulte de ces dispositions que l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise fait l'objet d'un réexamen en cas de changement de fonctions, y compris au sein d'un même groupe de fonctions, sans toutefois que ce réexamen ne se traduise nécessairement par une modification de son montant.

6. En premier lieu, il ressort des énonciations du point 2.2.2 de l'instruction du 19 octobre 2017, dont M. B... se prévaut, relative aux conditions préalables à une revalorisation consécutive à un changement de poste que " lorsqu'un agent, et ce, quel soit le type de mobilité hors le cas du déplacement d'office prononcé dans le cadre d'une procédure disciplinaire, change de poste, il bénéficie, à compter de sa date d'affectation, d'une revalorisation s'il remplit les conditions suivantes : - justifier d'une durée sur le poste précédent d'au moins trois ans à compter de sa prise de fonctions - avoir au moins trois ans d'ancienneté dans le corps ". Il ressort toutefois également du point 1.2 relatif à la revalorisation du montant de cette indemnité que le principe du réexamen du montant de l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise prévue à l'article 3 du décret du 20 mai 2014 n'implique pas une revalorisation automatique. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir en tout état de cause qu'il avait droit à une revalorisation quasi-automatique sur le fondement des dispositions de cette instruction.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... était responsable interdépartemental en matière de sécurité des systèmes d'information pour les préfectures et les directions départementales interministérielles du Nord et Pas-de-Calais. Pour des " raisons historiques ", il était alors déjà placé sous l'autorité du préfet délégué pour la défense et la sécurité. A compter du 17 janvier 2017, il a changé de fonctions et a été nommé, auprès du préfet délégué pour la défense et la sécurité, responsable zonal en matière de sécurité des systèmes d'information, en lieu et place du directeur des systèmes d'information et de communication du secrétariat général pour l'administration du ministre de l'intérieur (SGAMI), qui occupait précédemment cette fonction de responsable zonal. Il ressort des pièces du dossier que l'ancien poste occupé par M. B... comme son nouveau poste relèvent tous deux de la catégorie 1 au sens de l'arrêté du 16 décembre 2015. Mais M. B... fait valoir que ses responsabilités ont été accrues puisqu'elles impliquaient qu'il coordonne par la voie fonctionnelle l'action des responsables départementaux en matière de sécurité des systèmes d'information de la zone de défense Nord. Toutefois, il ressort de l'examen comparé des deux fiches de poste en question, que M. B... avait, outre des missions de nature opérationnelle, déjà un rôle d'animation et de coordination à l'échelon certes local avec les correspondants locaux de sécurité des systèmes d'information (CLSSI). Il avait également déjà un rôle d'audit quant à l'application de la législation auprès des directions départementales interministérielles et la préfecture. En tant que responsable zonal, il lui revient désormais d'assurer des audits en matière de sécurité des systèmes d'information auprès de partenaires territoriaux et dans le cadre de secteurs d'activité d'importance vitale. Par ailleurs, dans ses précédentes fonctions, il avait en charge de mettre en œuvre le programme annuel de sensibilisation des personnels de préfecture et des directions départementales interministérielles en matière de sécurité des systèmes d'information. En tant que responsable zonal, cette mission se retrouve dans son rôle de " diffusion d'une culture de la cyber sécurité dans l'ensemble des services de la zone de défense ", en partageant notamment les bonnes pratiques appliquées aux systèmes d'information et de communication du ministère. S'il est vrai que le champ d'intervention géographique de M. B... a été étendu et que le préfet délégué à la défense et à la sécurité a, dans un courrier du 23 novembre 2017, appuyé une réévaluation de l'indemnité de M. B... auprès du secrétaire général de la préfecture du Nord, ses responsabilités n'ont pas été accrues dans une mesure telle qu'elles impliquaient une réévaluation de son indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise. Par suite, l'administration n'a pas commis d'erreur d'appréciation ni d'erreur de fait, à l'occasion de ce changement de fonctions, en refusant de réévaluer et de modifier à hauteur de 1 000 euros par an l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise de M. B....

8. Il ressort des motifs de la décision contestée que le préfet du Nord a également refusé la revalorisation de l'indemnité en litige au motif que la nomination de M. B... au poste de responsabilité zonale aurait été irrégulière faute de consultation du comité technique paritaire sur la réorganisation du pôle de sécurité des systèmes d'information, initiée par le préfet délégué pour la défense et la sécurité et faute d'avoir publié le poste au plan national. Un tel motif qui révèle un manque de diligence de l'administration elle-même est illégal. Toutefois, il résulte de l'instruction que le préfet du Nord aurait pris la même décision en se fondant sur l'unique motif tiré de l'absence de changement de fonctions de M. B... au sens des dispositions de l'article 3 du décret du 20 mai 2014.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 6, que le préfet du Nord n'a commis aucune faute en refusant de revaloriser l'indemnité de fonctions, de sujétions et d'expertise à l'occasion du changement de poste de M. B... en tant que responsable zonal. La responsabilité de l'Etat n'étant pas engagée, les conclusions indemnitaires présentées par M. B... ne peuvent qu'être rejetées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

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N°20DA01743

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01743
Date de la décision : 21/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : BOUTEILLER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-10-21;20da01743 ?
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