Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Eiffage Génie Civil, venant aux droits de la société Eiffage Travaux Publics, a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la communauté d'agglomération de la Baie de Somme, venant aux droits de la communauté de communes de l'Abbevillois, à lui verser une somme de 2 886 104,18 euros toutes taxes comprises au titre du solde des lots n° 1, 5 et 7 du marché public de travaux pour l'opération de reconversion de la halle Sernam à Abbeville et de l'indemniser du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison de l'exécution de ces travaux, assortie d'une somme de 200 000 euros au titre des intérêts moratoires à compter du 3 février 2016, et de la capitalisation de ces intérêts, et de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de la Baie de Somme une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1602988 du 28 décembre 2018, le tribunal administratif d'Amiens a établi le solde du lot n° 7 " serrurerie " de ce marché, initialement fixé à la somme négative de 569 781,36 euros, à la somme négative de 65 397,14 euros, a condamné la société Eiffage Génie Civil à verser une somme de 2 000 euros à la communauté d'agglomération de la Baie de Somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des demandes de ladite société.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 28 février 2019, 15 décembre 2020 et 1er mars 2021, la société Eiffage Génie Civil, représentée par Me d'Herbomez, demande à la cour :
1°) d'infirmer ce jugement en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à ses demandes ;
2°) de condamner la communauté d'agglomération de la Baie de Somme à lui verser une somme de 2 754 443,18 euros toutes taxes comprises au titre du solde des lots n° 1, 5 et 7 du marché public de travaux pour l'opération de reconversion de la halle Sernam à Abbeville et de l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'exécution de ces travaux, assortie d'une somme de 200 000 euros au titre des intérêts moratoires à compter du 3 février 2016, et de la capitalisation de ces intérêts, de la décharger du paiement des pénalités qui lui ont été infligées pour retard de travaux et de remise de documents et de réintégrer en conséquence les sommes afférentes aux soldes des lots concernés ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de la Baie de Somme une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de la santé publique ;
- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Nil Carpentier-Daubresse, premier conseiller,
- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public,
- et les observations de Me d'Herbomez pour la société Eiffage Génie Civil, de Me Cattoir pour la communauté d'agglomération de la Baie de Somme et de Me Teguig pour la société Edeis.
Considérant ce qui suit :
1. La communauté de communes de l'Abbevillois, aux droits de laquelle vient la communauté d'agglomération de la Baie de Somme, a procédé à un appel d'offres pour un marché public de travaux en lots séparés à un prix global et forfaitaire portant sur la reconversion de la halle Sernam à Abbeville. La société Eiffage Travaux Publics a déposé des offres pour trois lots du marché. Par acte d'engagement du 9 mai 2012, il lui a été attribué le lot n° 1 du marché " démolition-gros-œuvre " pour un montant initial de 1 767 253,55 euros hors taxes, ramené à 1 735 835,50 euros hors taxes le 30 avril 2012. Par acte d'engagement du 4 mars 2013, il lui a été attribué le lot n° 5 du marché " menuiseries métalliques " pour un montant de 588 046,96 euros hors taxes. Enfin, par acte d'engagement du 7 mars 2013, il lui a été attribué le lot n° 7 " serrurerie ", pour un montant de 1 021 789,41 euros hors taxes. Les travaux, dont la durée devait être de dix-sept mois pour l'ensemble des lots, ont débuté le 18 juin 2012 pour le lot n° 1 et le 11 mars 2013 pour les lots n° 5 et 7. L'ouvrage a été réceptionné avec réserves le 8 avril 2015. Le 18 décembre 2015, la société Eiffage Génie Civil, venant aux droits de la société Eiffage Travaux Publics, a transmis au maître d'ouvrage le projet de décompte final de chaque lot faisant apparaître, pour le lot n° 1, un montant de 3 173 428,67 euros hors taxes, pour le lot n° 5, un montant de 1 194 254,24 euros hors taxes, et, pour le lot n° 7, un montant de 1 489 945,31 euros hors taxes. La communauté de communes de l'Abbevillois a transmis le 20 janvier 2016 le décompte général et définitif de ces trois lots faisant apparaître, pour le lot n° 1, un solde positif de 16 821,56 euros toutes taxes comprises, pour le lot n° 5, un solde positif de 12 102,89 euros toutes taxes comprises, et pour le lot n° 7, un solde négatif de 569 781,36 euros toutes taxes comprises. Le 22 février suivant, la société Eiffage Génie Civil a présenté des réclamations pour chacun des trois lots et transmis un nouveau décompte final faisant apparaître, pour le lot n° 1, un montant de 3 864 450,75 euros toutes taxes comprises, pour le lot n° 5, un montant de 1 432 642,62 euros toutes taxes comprises et, pour le lot n° 7, un montant de 1 785 850,59 euros toutes taxes comprises. Par courriers du 20 avril 2016, la communauté de communes de l'Abbevillois maintenait sa position et refusait les projets de décomptes finaux transmis pour les trois lots. Le 2 mai 2016, la société Eiffage Génie Civil a présenté un mémoire complémentaire de réclamation pour chacun des trois lots. Elle a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner la communauté d'agglomération de la Baie de Somme, venant aux droits de la communauté de communes de l'Abbevillois, à lui verser une somme de 2 886 104,18 euros toutes taxes comprises au titre du solde des trois lots de ce marché et de l'indemniser du préjudice qu'elle estime avoir subi en raison de l'exécution des travaux concernant ces trois lots. La société Eiffage Génie Civil relève appel du jugement du 28 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a fixé le solde du lot n° 7 " serrurerie " du marché à la somme négative de 65 397,14 euros et a rejeté le surplus de ses demandes.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme :
2. Aux termes de l'article R. 414-3 du code de justice administrative dans sa version alors applicable : " Par dérogation aux dispositions des articles R. 411-3, R. 411-4, R. 412-1, R. 412-2 et R. 611-1-1, les requérants sont dispensés de produire des copies de leur requête et de leurs mémoires complémentaires, ainsi que des pièces qui y sont jointes. / Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. / Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête. [...] ".
3. Cet article ne fait pas obstacle, lorsque l'auteur de la requête entend transmettre un nombre important de pièces jointes constituant une série homogène eu égard à l'objet du litige, à ce qu'il les fasse parvenir à la juridiction en les regroupant dans un ou plusieurs fichiers sans répertorier individuellement chacune d'elles par un signet, à la condition que le référencement de ces fichiers ainsi que l'ordre de présentation, au sein de chacun d'eux, des pièces qu'ils regroupent soient conformes à l'énumération, figurant à l'inventaire, de toutes les pièces jointes à la requête.
4. Il résulte de l'instruction que la requête introduite par la société Eiffage Génie Civil devant la cour comporte un nombre important de pièces qui sont, chacune, mentionnées dans un inventaire et identifiées par un signet. Par ailleurs, si chacune de ces pièces est constituée de plusieurs documents, notamment diverses annexes aux mémoires en réclamation produits par ladite société dans les trois lots dont elle était titulaire, ceux-ci constituent une série homogène eu égard à l'objet du litige et sont présentés conformément à l'inventaire produit. Par suite, la communauté d'agglomération de la Baie de Somme n'est pas fondée à soutenir que la requête est irrecevable au regard des dispositions de l'article R. 414-3 du code de justice administrative.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les difficultés liées à l'exécution des travaux des lots n° 1, 5 et 7 :
5. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l'estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.
S'agissant des conséquences de l'attribution tardive des lots n° 5, 7 et 10 sur le déroulement du lot n° 1 :
6. Aux termes de l'article 1.13.1 " coordination avec les autres lots " du dossier de consultation des entreprises du lot n° 1 : " Le titulaire du présent lot devra prendre contact avec les autres lots afin d'obtenir tous les renseignements nécessaires au bon déroulement du chantier. Notamment, il obtiendra entre autres, des lots serrurerie, métallerie... l'ensemble des contraintes et charges à prendre en compte pour le dimensionnement de ses ouvrages. ".
7. Il résulte de l'instruction que les lots n° 5 " menuiserie métallique ", 7 " serrurerie " et 10 " menuiserie intérieure " n'ont été attribués qu'en mars 2013, soit neuf mois après le démarrage des travaux du lot n° 1 " démolition-gros œuvre " en juin 2012, du fait du caractère infructueux des appels d'offres lancés. Si la société Eiffage Génie Civil soutient que ce retard a perturbé le déroulement du chantier du lot n° 1 dès lors qu'elle devait être préalablement en possession de certaines données de la part des titulaires de ces marchés, en particulier concernant les descentes de charges et les implantations des structures, afin de pouvoir réaliser les fondations, il résulte de l'instruction qu'elle n'a désigné la société D-FER en charge des travaux de dépose, démolition et désamiantage que par un acte de sous-traitance du 20 août 2012. Par ailleurs, il résulte des comptes rendus de réunions de chantier des 17 septembre 2012, 8 octobre 2012 et 22 octobre 2012 que les travaux de démolition menés par la société Eiffage Génie Civil et son sous-traitant avaient pris du retard. En outre, il résulte du compte-rendu de la réunion de chantier du 12 novembre 2012 que le maître d'œuvre a demandé à la société Eiffage Génie Civil de calculer elle-même les descentes de charges afin d'éviter une interruption du chantier. Enfin, il ne résulte pas des comptes rendus de chantier ultérieurs que la société Eiffage Génie Civil n'aurait pas été en mesure d'exécuter des travaux de gros œuvre jusqu'à la désignation des titulaires des lots n° 5, 7 et 10. Dans ces conditions, la société Eiffage Génie Civil n'établit pas que l'attribution tardive des lots n° 5, 7 et 10 lui aurait occasionné un préjudice direct au regard des conditions de déroulement du chantier du lot n° 1 entre les mois de juin 2012 et mars 2013. Par suite, sa demande d'indemnisation de préjudices sur ce fondement doit être rejetée.
S'agissant des conséquences de l'absence de diagnostic relatif à l'amiante sur le déroulement des travaux du lot n° 1 :
8. Aux termes de l'article L. 1334-12-1 du code de la santé publique : " Les propriétaires, ou à défaut les exploitants, des immeubles bâtis y font rechercher la présence d'amiante ; en cas de présence d'amiante, ils font établir un diagnostic de l'état de conservation de l'amiante dans les matériaux et produits repérés et mettent en œuvre, le cas échéant, les mesures nécessaires pour contrôler et réduire l'exposition. ".
9. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la réunion de chantier du 18 juin 2012, la société Eiffage Génie Civil et son sous-traitant ont fait état de risques d'une présence d'amiante dans le bâtiment alors que l'article 1.2.8. " prévention des risques liés à l'amiante " du cahier des clauses techniques communes était renseigné " sans objet " et que le diagnostic réalisé par le cabinet d'études techniques Philippe Poulain en 2008 n'en faisait pas état. Sur demande de la communauté d'agglomération de la Baie de Somme, la société Apave a réalisé un diagnostic lequel a, le 3 juillet 2012, mis en évidence la présence d'amiante. Toutefois, il résulte de l'instruction que deux avenants ont été notifiés à la société appelante en octobre 2012 et février 2013 pour des montants respectifs de 40 687,50 euros hors taxe et 29 522,99 euros hors taxe afin de prendre en compte le coût des travaux de désamiantage. La société Eiffage Génie Civil n'établit pas l'existence d'un préjudice distinct en se bornant à évoquer des coûts liés aux délais et contraintes qui découlent de la réalisation d'un désamiantage en cours d'opération alors au demeurant qu'une zone limitée était concernée par la présence d'amiante et que les travaux de désamiantage ont été retardés du fait de la société Espilon, sous-traitante de la société Eiffage Génie Civil, ainsi que cela résulte du compte-rendu de la réunion de chantier du 17 décembre 2012. Par suite, sa demande d'indemnisation de préjudices sur ce fondement doit être rejetée.
S'agissant des conséquences de la définition tardive des ouvrages au niveau du patio concernant les lots n° 1, 5 et 7 :
10. Les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat, soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique, mais pas du seul fait de fautes commises par d'autres intervenants.
11. Si la société Eiffage Génie Civil soutient que la définition tardive de l'implantation des ouvrages au niveau du patio, à l'entrée du bâtiment, est fautive, un tel manquement imputable au maître d'œuvre ne saurait ouvrir droit à une indemnité au profit de la société appelante en l'absence de faute imputable au maître d'ouvrage. En particulier, il ne résulte pas de l'instruction que ce dernier aurait commis une faute dans l'exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché concernant la définition des ouvrages au niveau du patio. Par ailleurs, la société appelante n'apporte pas d'éléments permettant d'établir qu'elle aurait subi un préjudice, y compris financier, entre le 11 mars 2013, date de début des travaux des lots n° 5 et 7 concernés, et l'émission des ordres de service du 5 juin 2014 qu'elle invoque relatifs aux travaux au niveau du patio. Enfin, il résulte de l'instruction, notamment du déroulé du chantier des lots n° 5 et 7 établi par le maître d'œuvre, que la société appelante est aussi à l'origine de l'allongement du délai d'exécution des travaux du fait de la transmission tardive de documents d'exécution. Par suite et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'irrecevabilité opposée par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme, la demande d'indemnisation de préjudices présentée par la société Eiffage Génie Civil sur ce fondement doit être rejetée.
S'agissant des conséquences de l'absence de réception anticipée du lot n° 1 :
12. D'une part, aux termes de l'article 41.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux alors en vigueur : " L'entrepreneur avise à la fois la personne responsable du marché et le maître d'œuvre, par écrit, de la date à laquelle il estime que les travaux ont été achevés ou le seront. / Le maître d'œuvre procède, l'entrepreneur ayant été convoqué, aux opérations préalables aux opérations préalables à la réception des ouvrages dans un délai qui, sauf stipulation différente du C.C.A.P., est de vingt jours à compter de la date de réception de l'avis mentionné ci-dessus ou de la date indiquée dans cet avis pour l'achèvement des travaux si cette dernière date est postérieure. / La personne responsable du marché, avisée par le maître d'oeuvre de la date de ces opérations, peut y assister ou s'y faire représenter. Le procès-verbal prévu au 2 du présent article mentionne, soit la présence de la personne responsable du marché ou de son représentant, soit, en son absence, le fait que le maître d'oeuvre l'avait dûment avisée. / En cas d'absence de l'entrepreneur à ces opérations, il en est fait mention audit procès-verbal et ce procès-verbal lui est alors notifié. [...] " Aux termes de l'article 42.1 du même cahier : " La fixation par le marché pour une tranche de travaux, un ouvrage ou une partie d'ouvrage, d'un délai d'exécution distinct du délai global d'exécution de l'ensemble des travaux implique, sauf stipulation différente au C.C.A.P., une réception partielle de cette tranche de travaux ou de cet ouvrage ou de cette partie d'ouvrage. / Les dispositions de l'article 41 s'appliquent aux réceptions partielles, sous réserve des 3 et 4 du présent article. ".
13. D'autre part, aux termes de l'article 3.2 " période d'exécution " de l'acte d'engagement : " Le délai fixé des travaux de l'ensemble des lots est de dix-sept mois à compter de la date fixée par l'ordre de service qui prescrira de commencer l'exécution du/des premier(s) lot(s). / Le délai d'exécution propre au lot pour lequel je m'engage sera déterminé dans les conditions stipulées à l'article 4-1 du CCAP. [...] " Aux termes de l'article 4.1.2 du cahier des clauses administratives particulières : " Le délai d'exécution propre à chacun des lots commence à courir à la date fixée dans le calendrier détaillé d'exécution. [...] Au cours du chantier et avec l'accord des différents entrepreneurs concernés, le responsable de l'OPC peut modifier le calendrier détaillé d'exécution dans la limite du délai de réalisation de l'ensemble des lots fixés à l'article 3 de l'acte d'engagement ".
14. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 2 juin 2014, la société Eiffage Génie Civil a indiqué au maître d'ouvrage que les travaux du lot n° 1 étaient en état d'être réceptionnés mais que ce dernier a, au cours de la réunion du 10 juin 2014, mentionné qu'une réception unique de l'ensemble des lots serait effectuée à l'issue du chantier. Toutefois, il résulte des articles 3.2 de l'acte d'engagement et 4.1.2 du cahier des clauses administratives particulières qu'un délai d'exécution propre au lot n° 1 avait été défini dans le calendrier détaillé d'exécution propre audit lot. S'il est constant que le maître d'ouvrage a notifié à la société appelante des ordres de service datés des 28 mars 2014 et 17 octobre 2014 visant à prolonger ce délai d'exécution, celle-ci s'y est opposée par des courriers des 16 avril 2014 et 6 novembre 2014, de sorte que le délai d'exécution propre au lot n° 1 ne saurait être regardé comme ayant été modifié dans les conditions prévues par l'article 4.1.2 du cahier des clauses administratives particulières. Ainsi, conformément à l'article 42.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux alors en vigueur, la fixation par le marché d'un délai d'exécution des travaux du lot n° 1 distinct du délai global d'exécution de l'ensemble des travaux correspondant aux dix-sept lots dudit marché devait conduire le maître d'ouvrage, en l'absence de stipulation contraire du cahier des clauses administratives particulières, à prononcer une réception partielle de cette partie d'ouvrage. Dès lors qu'il n'est pas contesté que les travaux du lot n° 1 étaient achevés au 2 juin 2014, date de la demande de réception des travaux transmise par la société appelante, l'absence d'une telle réception constitue une faute du maître d'ouvrage de nature à engager sa responsabilité.
15. La société Eiffage Génie Civil n'établit pas avoir, de ce fait, subi un préjudice au titre de dépenses d'encadrement du chantier et de pertes de rendement de la main d'œuvre dès lors que les travaux du lot n° 1 étaient terminés. En outre, elle n'établit pas le caractère certain des préjudices financiers qu'elle invoque ni leur lien direct avec la faute tirée de l'absence de réception anticipée de ce lot. En revanche, il résulte de l'instruction, notamment du tableau figurant en annexe à son mémoire en réclamation, qu'elle a supporté des dépenses au titre du compte-prorata postérieurement à l'exécution de ces travaux, soit entre le 2 juin 2014 et le 8 avril 2015, date de réception de l'ouvrage avec réserves. En retenant les dépenses afférentes aux " installations du chantier ", aux " fluides " et aux " frais de gestion " sur cette période, il sera fait une exacte appréciation de la somme due à la société Eiffage Génie Civil par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme en l'établissant à 31 164 euros hors taxes, soit 37 272 euros toutes taxes comprises.
S'agissant de la modification du tramage des fenêtres du lot n° 5 :
16. Il résulte de l'instruction que, si le maître d'œuvre a, au cours d'une réunion du 6 novembre 2013, sollicité des modifications à la programmation des menuiseries aluminium, il est finalement revenu sur sa décision par un courriel du 17 février 2014. Toutefois, ce revirement qui est imputable au seul maître d'œuvre ne saurait constituer une faute du maître d'ouvrage et ne saurait donc ouvrir droit au profit de la société appelante à une indemnité, en vertu du principe rappelé au point 10. Par suite, sa demande d'indemnisation de préjudices sur ce fondement doit être rejetée.
S'agissant des modifications apportées au lot n° 7 :
17. Il résulte de l'instruction que l'exécution du lot n° 7 a fait l'objet de plusieurs ajouts et suppressions de travaux. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que les travaux supplémentaires demandés à la société Eiffage Génie Civil pour ce lot n'auraient pas fait l'objet d'une juste rémunération. Par ailleurs, cette dernière n'établit pas que les modifications de travaux intervenues, bien que nombreuses, auraient engendré un préjudice certain. En outre, il résulte de l'instruction que la principale suppression de travaux correspondant à l'habillage de la gaine d'ascenseur et des façades en matériau " Duralmond ", dont le prix initial était fixé à 224 460 euros hors taxes, provient de l'absence de fourniture par l'un des sous-traitants de la société appelante de ce matériau. Par suite, sa demande d'indemnisation de préjudices sur ce fondement doit être rejetée.
S'agissant des conséquences de la prolongation des délais contractuels d'exécution des travaux des lots n° 1, 5 et 7 :
18. Il résulte de l'instruction que le délai d'exécution des lots n° 1, 5 et 7 a été prolongé à plusieurs reprises jusqu'au 13 février 2015. Toutefois, eu égard au caractère global et forfaitaire du prix, la prolongation des missions de la société appelante n'est pas de nature à justifier, à elle seule, une rémunération supplémentaire de celles-ci. En outre, il ne résulte pas de l'instruction que les travaux supplémentaires qui lui ont été demandés ne lui auraient pas été rémunérés. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit précédemment et hormis la faute relative à l'absence de réception anticipée du lot n° 1 qui a fait l'objet d'une indemnisation au point 15, il ne résulte pas de l'instruction qu'une faute du maître d'ouvrage aurait été à l'origine directe d'un préjudice, y compris financier au titre d'une perte d'industrie, de frais d'établissement du mémoire en réclamation et de frais financiers, pour la société appelante au regard de l'allongement du chantier, celle-ci ne pouvant utilement se prévaloir d'une faute du maître d'œuvre ou du bureau d'étude chargé de la mission d'ordonnancement, de pilotage et de coordination. Au demeurant, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit aux points 7, 9 et 11, que la société Eiffage Génie Civil a une responsabilité dans l'allongement de la durée du chantier. Enfin, la société appelante ne se prévaut plus, en appel, d'éventuelles sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat. Par suite, sa demande d'indemnisation de préjudices, au titre de l'allongement du délai d'exécution des travaux, doit être rejetée.
En ce qui concerne les travaux supplémentaires au titre du lot n° 5 :
19. Les dispositions de l'article 15.3 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, qui prévoient l'indemnisation des travaux supplémentaires réalisés au-delà de la masse initiale des travaux et sur ordre de service du maître d'ouvrage, pour des montants, dans le cas des marchés à prix forfaitaire, excédant le vingtième de la masse initiale, ne font pas obstacle à l'indemnisation de travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service du maître d'ouvrage, mais indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art, quel qu'en soit le montant.
20. Si la société Eiffage Génie Civil sollicite le paiement d'une somme de 730 euros pour la mise en place de limitateurs d'ouvertures sur les portes et châssis de l'ouvrage, elle ne justifie pas, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, que cette prestation aurait été demandée par le maître d'œuvre ou le maître d'ouvrage en se bornant à faire état d'un ordre verbal qui aurait été adressé à son sous-traitant, la société Tecmir. Par ailleurs, elle ne justifie pas du caractère indispensable de ces travaux à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art. En tout état de cause, si la société appelante se prévaut d'un devis en date du 19 janvier 2015, elle ne démontre pas qu'elle aurait effectivement supporté le coût de ces travaux. Par suite, sa demande d'indemnisation de préjudices sur ce fondement doit être rejetée. Enfin, eu égard au rejet de sa demande d'indemnités à titre de travaux supplémentaires, il n'y a pas lieu d'appliquer la clause de révision de prix.
En ce qui concerne les retenues opérées au titre du lot n° 7 :
21. Aux termes de l'article 39.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux alors en vigueur : " Si un vice de construction est constaté, les dépenses correspondant au rétablissement de l'intégrité de l'ouvrage ou à sa mise en conformité avec les règles de l'art et les stipulations du marché, ainsi que les dépenses résultant des opérations éventuelles ayant permis de mettre le vice en évidence, sont à la charge de l'entrepreneur sans préjudice de l'indemnité à laquelle le maître de l'ouvrage peut alors prétendre. ".
S'agissant du bardage extérieur de la cage d'ascenseur :
22. Il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit précédemment, que l'habillage de la gaine d'ascenseur en matériau " Duralmond " a été supprimé du fait de l'impossibilité d'un sous-traitant de la société Eiffage Génie Civil de fournir ce matériau. Par ailleurs, il apparaît que l'état de l'ouvrage, dont la société appelante était responsable, nécessitait une reprise dont le montant de 1 763,20 euros n'est pas sérieusement contesté dans son quantum. Par suite, la société Eiffage Génie Civil n'est pas fondée à contester la retenue opérée, à ce titre, par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme.
S'agissant du défaut d'étanchéité de la jardinière :
23. Il résulte de l'instruction que le défaut d'étanchéité de la jardinière a conduit le maître d'ouvrage à solliciter de la société Eiffage Génie Civil une reprise de celle-ci ainsi qu'au préalable, un vidage et un remplissage de cette jardinière pour un montant de 5 712,25 euros hors taxes ainsi que cela ressort de l'ordre de service n° 13 du 10 février 2015. Si aucun ordre de service du maître d'œuvre n'a été émis pour le remplissage de la jardinière comme le prévoyait cet ordre de service n° 13, il résulte de l'instruction que la société Eiffage Génie Civil n'a pas davantage réalisé le vidage de celle-ci et que l'ensemble de l'opération a été réalisée par la société Trancart. Par suite, elle n'est pas fondée à contester la retenue opérée par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme.
S'agissant de l'alignement des garde-corps :
24. Il résulte de l'instruction que, nonobstant la circonstance alléguée selon laquelle le mur de quai sur lequel les garde-corps étaient posés n'était pas neuf, il apparaît que certains d'entre eux n'étaient pas alignés. Dans ces conditions, la société Eiffage Génie Civil, qui ne conteste pas le montant de la reprise, n'est pas fondée à demander la suppression de la retenue de 2 075 euros hors taxes effectuée, à ce titre, par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme.
S'agissant du recours au matériau " Reynobond " :
25. Il résulte du compte-rendu de la réunion du chantier du 10 juin 2015 qu'il a été décidé de substituer aux matériaux " Alucobond " et " Dibond " le matériau " Reynobond " et de retenir un prix de 16 392,47 euros hors taxes contre 25 701,11 euros hors taxes initialement prévu au marché pour ces matériaux finalement abandonnés, de sorte que la société appelante n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'avait pas été informée de l'existence d'un prix nouveau pour ce matériau de substitution, dont elle ne conteste d'ailleurs pas sérieusement le niveau.
26. En revanche, il résulte de l'instruction que la communauté d'agglomération de la Baie de Somme a retenu une " provision " d'un montant de 20 000 euros hors taxes du fait de l'absence de production d'un avis technique transmis par la société Eiffage Génie Civil concernant la pose du matériau " Reynobond " en partie horizontale sur une structure en acier alors que l'avis technique disponible concernant ce matériau ne mentionnait qu'une pose en partie verticale sur un support en maçonnerie enduite ou en béton. Toutefois, la communauté d'agglomération de la Baie de Somme ne justifie pas avoir sollicité et obtenu un tel avis technique qui justifierait, en contrepartie, le paiement par la société appelante de cette somme. Par ailleurs, à supposer que le maître d'ouvrage ait entendu infliger une pénalité à la société appelante du fait d'un tel manquement, il ne justifie pas l'existence de stipulations contractuelles le lui permettant. Dans ces conditions et alors au demeurant qu'il résulte du courrier du 6 novembre 2015 que le fournisseur du matériau " Reynobond " a validé la pose de celui-ci sur structure métallique comme l'a également fait le bureau de contrôle, la société Eiffage Génie Civil est fondée à solliciter la suppression de la retenue de 20 000 euros hors taxes, soit 23 920 euros toutes taxes comprises, opérée par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme au titre du lot n° 7.
En ce qui concerne les pénalités au titre des lots n° 5 et 7 :
S'agissant des pénalités de retard dans l'exécution des travaux pour les lots n° 5 et 7 :
27. Aux termes de l'article 4.3.1 du cahier des clauses administratives particulières : " Les dispositions suivantes sont appliquées lot par lot, en cas de retard dans l'exécution des travaux, comparativement au calendrier détaillé d'exécution élaboré et éventuellement modifié comme il a été indiqué aux 4-1.2 A et D ci-dessus / A. Retard sur le délai d'exécution propre au lot concerné. Le titulaire subit une pénalité journalière de 1/500 du montant du lot considéré dans les conditions prévues à l'article 20.1 du CCAG ". Aux termes de l'article 20.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux alors en vigueur : " En cas de retard dans l'exécution des travaux, qu'il s'agisse de l'ensemble du marché ou d'une tranche pour laquelle un délai d'exécution partiel ou une date limite a été fixé, il est appliqué, sauf stipulation différente du C.C.A.P., une pénalité journalière de 1/3.000 du montant de l'ensemble du marché ou de la tranche considérée. Ce montant est celui qui résulte des prévisions du marché, c'est-à-dire du marché initial éventuellement modifié ou complété par les avenants intervenus ; il est évalué à partir des prix de base définis au 11 de l'article 13. / Les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation du retard par le maître d'œuvre. / Dans le cas de résiliation, les pénalités sont appliquées jusqu'au jour inclus de la notification de la décision de résiliation ou jusqu'au jour d'arrêt de l'exploitation de l'entreprise si la résiliation résulte d'un des cas prévus à l'article 47. / Les dispositions des deux alinéas qui précèdent sont applicables aux pénalités éventuellement prévues par le C.C.A.P. pour le cas de retard dans la réalisation de certains ouvrages, parties d'ouvrages ou ensembles de prestations faisant l'objet de délais particuliers ou de dates limites fixés dans le marché. ".
28. Il résulte de l'instruction que le délai d'exécution des travaux du lot n° 5 a été prolongé à plusieurs reprises et, en dernier lieu, jusqu'au 13 février 2015. Il résulte de l'instruction, notamment du relevé de la visite du 11 février 2015 effectuée dans le cadre des opérations préalables à la réception du chantier qu'à cette date, certains travaux à la charge de la société Eiffage Génie Civil portant sur le lot n° 5 n'étaient pas terminés. Par ailleurs, si la société appelante se prévaut de déclarations du maître d'œuvre faisant état, dès le mois d'octobre 2012, du caractère obsolète d'une grande partie du planning prévisionnel joint au dossier de marché, elle n'établit pas que le retard dans l'exécution des travaux à sa charge restant à effectuer au 13 février 2015 résulterait d'une faute du maître d'ouvrage. Par suite et en tout état de cause, c'est à bon droit que la communauté d'agglomération de la Baie de Somme lui a infligé une pénalité à hauteur de 13 089,41 euros pour le lot n° 5 au titre d'un retard de cinquante-trois jours jusqu'au 8 avril 2015.
29. En revanche, il résulte de l'instruction que, par un ordre de service n° 12 daté du 10 février 2015, la communauté d'agglomération de la Baie de Somme a sollicité de la société Eiffage Génie Civil la réalisation de prestations supplémentaires et modificatives nécessaires au marché du lot n° 7 et portant notamment sur l'ajout et la modification de garde-corps. La société Eiffage Génie Civil, qui a réceptionné cet ordre de service le 11 février 2015, a, dans son courrier du 17 février 2015, formulé des réserves sur ses conséquences sur le délai d'exécution du marché en évaluant à dix semaines le délai nécessaire à l'exécution de ces travaux. Dans ces conditions, le maître d'ouvrage ne pouvait retenir une date de fin d'exécution des travaux de ce lot au 13 février 2015. Par suite, c'est à tort que la communauté d'agglomération de la Baie de Somme a retenu un retard de cinquante-trois jours dans l'exécution des travaux du lot n° 7 et mis à la charge de la société appelante la somme de 16 101,40 euros à ce titre.
S'agissant de la demande de modération des pénalités de retard dans l'exécution des travaux du lot n° 5 :
30. Les pénalités de retard prévues par les clauses d'un marché public ont pour objet de réparer forfaitairement le préjudice qu'est susceptible de causer au pouvoir adjudicateur le non-respect, par le titulaire du marché, des délais d'exécution contractuellement prévus. Elles sont applicables au seul motif qu'un retard dans l'exécution du marché est constaté et alors même que le pouvoir adjudicateur n'aurait subi aucun préjudice ou que le montant des pénalités mises à la charge du titulaire du marché qui résulte de leur application serait supérieur au préjudice subi. Si, lorsqu'il est saisi d'un litige entre les parties à un marché public, le juge du contrat doit, en principe, appliquer les clauses relatives aux pénalités dont sont convenues les parties en signant le contrat, il peut, à titre exceptionnel, saisi de conclusions en ce sens par une partie, modérer ou augmenter les pénalités de retard résultant du contrat si elles atteignent un montant manifestement excessif ou dérisoire, eu égard au montant du marché et compte tenu de l'ampleur du retard constaté dans l'exécution des prestations. Lorsque le titulaire du marché saisit le juge de conclusions tendant à ce qu'il modère les pénalités mises à sa charge, il ne saurait utilement soutenir que le pouvoir adjudicateur n'a subi aucun préjudice ou que le préjudice qu'il a subi est inférieur au montant des pénalités mises à sa charge. Il lui appartient de fournir aux juges tous éléments, relatifs notamment aux pratiques observées pour des marchés comparables ou aux caractéristiques particulières du marché en litige, de nature à établir dans quelle mesure ces pénalités présentent selon lui un caractère manifestement excessif. Au vu de l'argumentation des parties, il incombe au juge soit de rejeter les conclusions dont il est saisi en faisant application des clauses du contrat relatives aux pénalités, soit de rectifier le montant des pénalités mises à la charge du titulaire du marché dans la seule mesure qu'impose la correction de leur caractère manifestement excessif.
31. Il résulte de l'instruction que le montant de la pénalité restant en litige au titre des cinquante-trois jours de retard retenus par le maître d'ouvrage pour le lot n° 5 représente 1,86 % du prix de ce lot. Eu égard au montant du marché et compte tenu de l'ampleur du retard constaté dans l'exécution des prestations, et en l'absence de tout élément particulier fourni par la société Eiffage Génie Civil sur ce point, la somme de 13 089,41 euros en litige ne saurait être regardée comme manifestement excessive, de sorte qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de modération de celle-ci présentée par la société appelante.
S'agissant des pénalités pour retard de transmission d'un planning au titre du lot n° 7 :
32. Il résulte de l'instruction que la communauté d'agglomération de la Baie de Somme a infligé une pénalité de 4 253,20 euros à la société Eiffage Génie Civil pour un retard de quatorze jours, au 31 juillet 2014, dans la présentation de son planning. Toutefois, elle n'établit pas que le calendrier détaillé d'exécution prévoyait la présentation d'un tel planning au 17 juillet 2014 et qu'une pénalité, correspondant à quatorze jours de retard, pouvait ainsi être valablement infligée à la société appelante sur le fondement de l'article 4.3.1 précité du cahier des clauses administratives particulières. Par suite, la société Eiffage Génie Civil est fondée à en demander la décharge.
S'agissant des pénalités pour défaut de transmission de documents relatifs à la sous-traitance du lot n° 7 :
33. Aux termes de l'article 2.49.2 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux alors en vigueur : " L'entrepreneur est tenu de communiquer le contrat de sous-traitance et ses avenants éventuels à la personne responsable du marché lorsque celle-ci en fait la demande. Si, sans motif valable il n'a pas rempli cette obligation quinze jours après avoir été mis en demeure de le faire, il encourt une pénalité journalière de 1/1000 du montant du marché ; en outre, le défaut de communication du contrat de sous-traitance un mois après cette mise en demeure expose l'entrepreneur à l'application des mesures prévues à l'article 49. ".
34. Il résulte de l'instruction que, par un courrier du 14 octobre 2015, la communauté d'agglomération de la Baie de Somme a mis en demeure la société Eiffage Génie Civil de régulariser la situation administrative de son sous-traitant, la société Paul Damien, en lui transmettant une version amendée de l'acte spécial modificatif n° 1 ainsi que, dans un délai de quinze jours, l'ensemble des contrats de sous-traitance conclus. Si la société Eiffage Génie Civil soutient, en appel, que le contrat de sous-traitance initial et les avenants n° 1 et 3 conclus avec le sous-traitant ont été transmis par ce dernier au maître d'ouvrage, de sorte que la pénalité n'est pas justifiée, d'une part, elle ne conteste pas ne pas avoir transmis elle-même ces documents et, d'autre part, elle n'établit pas que la transmission par le sous-traitant serait intervenue avant la date d'expiration de la mise en demeure. Dans ces conditions, en l'absence de motif valable, la société Eiffage Génie Civil n'est pas fondée à demander la décharge de la pénalité de 84 761,13 euros retenue par les premiers juges, au titre des conclusions reconventionnelles présentées par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme et alors que le décompte général établi n'avait pas acquis un caractère définitif du fait de sa contestation.
En ce qui concerne le solde des lots n° 1, 5 et 7 du marché :
35. Il résulte de ce qui précède que le solde du lot n° 5, compte tenu du rejet des demandes de la société Eiffage Génie Civil, demeure fixé à la somme de 12 102,89 euros toutes taxes comprises. En revanche, eu égard aux éléments mentionnés aux points 14 et 15, le solde du lot n° 1, fixé initialement à la somme de 16 821,56 euros toutes taxes comprises, s'établit à la somme de 54 093,56 euros toutes taxes comprises. En outre, eu égard aux éléments mentionnés aux points 26, 29 et 32, le solde du lot n° 7, fixé par les premiers juges à la somme négative de 65 397,14 euros toutes taxes comprises, s'établit à la somme négative de 21 122,54 euros toutes taxes comprises.
36. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de diligenter une expertise, que la société Eiffage Génie Civil n'est fondée à demander la réformation du jugement du 28 décembre 2018 du tribunal administratif d'Amiens qu'en tant que celui-ci n'a pas établi le solde du lot n° 1 " démolition-gros-œuvre " du marché public de travaux portant sur la reconversion de la halle Sernam à Abbeville à la somme de 54 093,56 euros toutes taxes comprises et le solde du lot n° 7 " serrurerie " du même marché à la somme négative de 21 122,54 euros toutes taxes comprises.
Sur les intérêts moratoires et leur capitalisation :
37. Aux termes du 2° du II de l'article 5 du décret du 21 février 2002 relatif à la mise en œuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics, dans sa version alors applicable : " Pour les organismes soumis aux délais de paiement mentionnés aux 1° et 2° de l'article 98 du code des marchés publics [lequel vise les collectivités territoriales], qu'il soit ou non indiqué dans le marché, le taux des intérêts moratoires est égal au taux d'intérêt de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le premier jour de calendrier du semestre de l'année civile au cours duquel les intérêts moratoires ont commencé à courir, majoré de sept points. ".
38. Le solde du lot n° 5 demeurant inchangé et le solde du lot n° 7 s'établissant à une somme négative, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions tendant au paiement d'intérêts moratoires et à leur capitalisation.
39. En revanche, s'agissant du solde du lot n° 1 dont la procédure de passation a été engagée entre le 1er janvier 2009 et qui a été conclu avant le 16 mars 2013, il y a lieu de retenir, ainsi que le soutient la société appelante, non pas le taux des intérêts moratoires prévus par l'article 3.2.7 du cahier des clauses administratives particulières mais celui, supérieur, prévu par les dispositions précitées du 2° du II de l'article 5 du décret du 21 février 2002 dès lors que l'article 67 de la loi du 8 août 1994 interdit de façon absolue toute renonciation aux intérêts moratoires dus en raison de retards dans le règlement des marchés publics, que cette renonciation intervienne lors de la passation du marché ou postérieurement. Ces intérêts moratoires seront appliqués à compter du 24 mars 2016, soit à l'issue du délai de trente jours imparti par l'article 98 du code des marchés publics, dans sa version alors applicable, à la communauté d'agglomération de la Baie de Somme après la réception par celle-ci, le 23 février 2016, du mémoire en réclamation de la société Eiffage Génie Civil, et leur capitalisation à compter du 24 mars 2017.
Sur les conclusions d'appel provoqué :
40. L'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché public est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors de l'établissement du décompte général et définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties. L'ensemble des conséquences financières de l'exécution du marché sont retracées dans ce décompte même lorsqu'elles ne correspondent pas aux prévisions initiales. Toutefois, la circonstance que le décompte général d'un marché public soit devenu définitif ne fait pas, par elle-même, obstacle à la recevabilité de conclusions d'appel en garantie du maître d'ouvrage contre le titulaire du marché, sauf s'il est établi que le maître d'ouvrage avait eu connaissance de l'existence du litige avant qu'il n'établisse le décompte général du marché et qu'il n'a pas assorti le décompte d'une réserve, même non chiffrée, concernant ce litige.
41. Il résulte de l'instruction que les projets de décomptes finaux du groupement de maîtrise d'œuvre ont été envoyés à la communauté d'agglomération de la Baie de Somme le 5 février 2018 et que celle-ci a procédé au paiement des soldes le 21 mai 2018. A cette date, et alors qu'elle avait connaissance du recours introduit par la société Eiffage Génie Civil devant le tribunal administratif d'Amiens le 23 septembre 2016 qui était alors pendant, la communauté d'agglomération de la Baie de Somme n'a assorti les décomptes de la maîtrise d'œuvre d'aucune réserve concernant ce litige, celle-ci n'ayant présenté des conclusions d'appel en garantie devant les premiers juges que dans son mémoire du 28 novembre 2018. Par suite, le cabinet Gasnier-Gossart et la société Edeis sont fondés à soutenir que les conclusions d'appel provoqué présentées par la communauté d'agglomération de la Baie de Somme à leur encontre sont irrecevables et qu'elles doivent donc être rejetées.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
42. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Eiffage Génie Civil, qui n'est pas la partie perdante, la somme que la communauté d'agglomération de la Baie de Somme et la société Edeis demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté d'agglomération de la Baie de Somme le versement des sommes demandées par la société Eiffage Génie Civil et par le cabinet Gasnier-Gossart sur le fondement de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le solde du lot n° 1 " démolition-gros-œuvre " du marché public de travaux portant sur la reconversion de la halle Sernam à Abbeville est fixé à la somme de 54 093,56 euros toutes taxes comprises. La communauté d'agglomération de la Baie de Somme est condamnée à verser à la société Eiffage Génie Civil la somme de 37 272 euros toutes taxe comprises, assortie des intérêts moratoires au taux de la principale facilité de refinancement appliquée par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement principal la plus récente effectuée avant le 1er janvier 2016, majoré de sept points, à compter du 24 mars 2016 ainsi que de la capitalisation de ces intérêts à compter du 24 mars 2017.
Article 2 : Le solde du lot n° 7 " serrurerie " du marché public de travaux portant sur la reconversion de la halle Sernam à Abbeville est fixé à la somme négative de 21 122,54 euros toutes taxes comprises.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 28 décembre 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 et 2 du présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eiffage Génie Civil, à la communauté d'agglomération de la Baie de Somme, au cabinet Gasnier-Gossart et à la société Edeis.
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N°19DA00506
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