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23/09/2021 | FRANCE | N°20DA00903

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 23 septembre 2021, 20DA00903


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... AH... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 11 juin 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours formé devant la commission des recours des militaires contre la décision du 1er décembre 2017 du ministre de l'intérieur portant inscription au tableau d'avancement pour l'année 2018 du personnel sous-officier de gendarmerie du cadre général de la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Nord et les décisions individuelles de nominatio

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... AH... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 11 juin 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours formé devant la commission des recours des militaires contre la décision du 1er décembre 2017 du ministre de l'intérieur portant inscription au tableau d'avancement pour l'année 2018 du personnel sous-officier de gendarmerie du cadre général de la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Nord et les décisions individuelles de nomination en découlant, d'annuler également la décision implicite de rejet née du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre de l'intérieur à la suite de sa saisine de la commission des recours militaires, le 6 décembre 2017, d'annuler, en tant que de besoin, la décision n° 34218 du ministre de l'intérieur du 1er décembre 2017 portant inscription au tableau d'avancement pour l'année 2018 du personnel sous-officier de gendarmerie du cadre général de la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Nord, d'annuler, en tant que de besoin, les décisions individuelles d'avancement au grade d'adjudant de la gendarmerie pour l'année 2018 des agents désignés dans le tableau d'avancement pour l'année 2018 du personnel sous-officier de gendarmerie du cadre général de la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Nord et d'enjoindre au ministre de l'intérieur, à compter de la notification du jugement, de le promouvoir au grade d'adjudant de la gendarmerie nationale au titre de 2018 et, en toute hypothèse, de réexaminer sa situation dans le sens du jugement sous astreinte de 200 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1805168 du 9 juin 2020, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2020, M. H... AH..., représenté par la Selafa Cabinet Cassel, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le décret n° 2008-952 du 12 septembre 2008 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme AN... C..., présidente-rapporteure,

- les conclusions de M. Hervé Cassara, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. AH..., qui a intégré la gendarmerie le 1er décembre 1981 en qualité d'élève gendarme, a été nommé au grade de maréchal des logis-chef le 1er mars 1997. Depuis le 1er août 1997, il est affecté à l'escadron 15/9 de gendarmerie mobile d'Amiens. Par une décision du 1er décembre 2017, le général de corps d'armée commandant la région de gendarmerie de Nord-Pas-de-Calais-Picardie et la gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité Nord a établi le tableau d'avancement au grade d'adjudant au titre de l'année 2018. M. AH..., dont le nom ne figure pas sur ce tableau d'avancement, a, le 6 décembre 2017, formé un recours administratif préalable à l'encontre de la décision du 1er décembre 2017. A la suite du silence gardé pendant quatre mois par le ministre de l'intérieur sur ce recours, une décision implicite de rejet est née. Par décision du 11 juin 2018, le ministre de l'intérieur a, après avis de la commission des recours miliaires, rejeté le recours administratif préalable de M. AH.... M. AH... relève appel du jugement du 9 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces trois décisions, ainsi que des décisions individuelles d'avancement au grade d'adjudant.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient M. AH..., les premiers juges ont répondu au point 7 du jugement au moyen tiré de ce que la commission d'avancement n'aurait pas procédé à un examen approfondi de son dossier. Par suite, le moyen tiré de ce que le tribunal administratif de Lille aurait omis de répondre à ce moyen doit être écarté.

Sur la recevabilité des conclusions d'annulation de la décision du 1er décembre 2017 et de la décision implicite de rejet de son recours administratif préalable :

3. Aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I.- Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. (...) ". L'institution par ces dispositions d'un recours administratif, préalable obligatoire à la saisine du juge, a pour effet de laisser à l'autorité compétente pour en connaître le soin d'arrêter définitivement la position de l'administration. Il s'ensuit que la décision prise à la suite du recours se substitue nécessairement à la décision initiale. Elle est seule susceptible d'être déférée au juge de la légalité.

4. M. AH... réitère devant la cour ses conclusions d'annulation dirigées contre la décision du 1er décembre 2017 établissant le tableau d'avancement au grade d'adjudant au titre de l'année 2018 et la décision implicite de rejet de son recours préalable. La décision du 11 juin 2018 arrêtant définitivement, après avis de la commission, la position de l'administration, s'est entièrement substituée à ces deux décisions initiales. Ainsi les conclusions de M. AH... tendant à l'annulation de ces décisions sont irrecevables et doivent être rejetées.

Sur le bien-fondé du jugement :

5. Aux termes de l'article L. 4136-1 du code de la défense : " (...) L'avancement de grade a lieu soit au choix, soit au choix et à l'ancienneté, soit à l'ancienneté. Sauf action d'éclat ou services exceptionnels, les promotions ont lieu de façon continue de grade à grade et nul ne peut être promu à un grade s'il ne compte dans le grade inférieur un minimum de durée de service, fixé par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article L. 4136-3 de ce code : " Nul ne peut être promu au choix à un grade autre que ceux d'officiers généraux s'il n'est inscrit sur un tableau d'avancement établi, au moins une fois par an, par corps. Une commission dont les membres, d'un grade supérieur à celui des intéressés, sont désignés par le ministre de la défense, présente à ce dernier tous les éléments d'appréciation nécessaires, notamment l'ordre de préférence et les notations données aux candidats par leurs supérieurs hiérarchiques. Pour les militaires de la gendarmerie nationale, le ministre compétent est le ministre de l'intérieur (...). ". Aux termes de l'article L. 4136-4 du même code : " I. - Les statuts particuliers fixent : / 1° Les conditions requises pour être promu au grade supérieur ; / 2° Les proportions respectives et les modalités de l'avancement à la fois au choix et à l'ancienneté, pour les corps et dans les grades concernés ; / 3° Les conditions d'application de l'avancement au choix. / II. - Au titre des conditions pour être promu au grade supérieur, les statuts particuliers peuvent prévoir : / 1° Que l'ancienneté des militaires de carrière dans le grade inférieur n'excède pas un niveau déterminé. Dans le cas où des dérogations à cette règle sont prévues, les statuts particuliers en fixent les limites par référence au nombre de promotions prononcées chaque année dans les grades considérés ; / 2° Le temps minimum à passer dans le grade supérieur avant la limite d'âge. ". Aux termes de l'article R. 4135-1 du même code : " La notation est une évaluation par l'autorité hiérarchique des qualités morales, intellectuelles et professionnelles du militaire, de son aptitude physique, de sa manière de servir pendant une période déterminée et de son aptitude à tenir dans l'immédiat et ultérieurement des emplois de niveau plus élevé ".

6. Aux termes de l'article 23 du décret du 12 septembre 2008 portant statut particulier du corps des sous-officiers de gendarmerie : " Les promotions au grade supérieur ont lieu exclusivement au choix. ". Aux termes de l'article 24 du même décret : " (...) II. - Peuvent être promus au grade d'adjudant les maréchaux des logis-chefs comptant au moins deux ans d'ancienneté à ce grade. ". Aux termes de l'article 25 de ce décret : " L'avancement peut intervenir par branche ou spécialité. ". Aux termes de l'article 26 du même décret : " Les membres de la commission prévue à l'article L. 4136-3 du code de la défense et, le cas échéant, leurs suppléants sont désignés, pour chaque branche ou spécialité, par arrêté du ministre de l'intérieur. Cette commission est présidée par un officier général ou un officier supérieur. Outre le président, elle comprend de droit deux officiers supérieurs. La commission présente au ministre ses propositions d'inscription aux tableaux d'avancement. Elle procède, au préalable, à un examen approfondi de la valeur professionnelle des militaires susceptibles d'être promus compte tenu, notamment, de l'ordre de préférence, des notations et des propositions des supérieurs hiérarchiques et de l'appréciation portée sur leur manière de servir. L'appréciation de la valeur professionnelle peut également prendre en compte les difficultés des emplois occupés et les responsabilités particulières qui s'y attachent ainsi que, le cas échéant, les actions de formation continue suivies ou dispensées par le militaire. ". Enfin, selon l'article 27 de ce décret : " Pour l'application de l'article 23, les tableaux d'avancement sont établis, par branche ou par spécialité, par ordre de mérite. ".

7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'extrait du procès-verbal de la réunion de la commission d'avancement chargée des propositions d'inscriptions aux tableaux d'avancement 2018 de la région de gendarmerie Hauts-de-France et de la zone de défense de sécurité Nord branche " gendarmerie mobile ", que cette commission " a examiné tous les dossiers personnels réunissant les conditions statutaires " lors de sa séance du 27 novembre 2017, et qu'elle a notamment examiné la candidature de M. AH.... La seule circonstance que M. AH... n'ait pas été promu ne saurait suffire à révéler que la commission n'aurait pas procédé à un examen approfondi de sa valeur professionnelle. Par suite, le moyen tiré de ce que la commission n'a pas procédé à un tel examen doit être écarté.

8. Le juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un recours tendant à l'annulation d'un arrêté portant inscription au tableau d'avancement et nomination dans un grade supérieur, ne peut se borner, dans le cadre de son contrôle restreint, à apprécier la valeur professionnelle d'un candidat écarté, et doit analyser les mérites comparés de cet agent et de ceux des autres agents candidats à ce même grade.

9. Il ressort des pièces du dossier et en particulier des fiches d'évaluation établies de 2012 à 2017 que M. AH... donne, globalement, satisfaction dans l'exercice de ses fonctions et qu'il a, depuis 2012, été reconnu comme disposant immédiatement " des capacités à occuper un emploi de niveau supérieur ". Toutefois, sa notation fixée à 12 n'a pas progressé depuis 2012. Ses fiches d'évaluation comportent des remarques négatives sur son comportement et des points à améliorer tels qu'en 2015, le " courage intellectuel ", l'intéressé ayant été relevé de ses fonctions d'adjoint à l'adjudant d'escadron. M. AH... a ainsi été classé 32ème sur les cinquante-et-un candidats promouvables, vingt-et-un maréchaux des logis-chefs ayant été effectivement promus au grade d'adjudant. Le ministre fait valoir que les quatre derniers inscrits au tableau d'avancement ont vu leur note rapidement progresser et que leurs appréciations élogieuses illustrent une constante progression dans leur manière de servir, mettant en évidence des mérites supérieurs à ceux de M. AH.... M. AH... soutient comme en première instance que le candidat inscrit en 14ème position au tableau, était classé 5ème sur la liste établie par leur chef d'unité, tandis que lui-même était positionné 4ème. Toutefois, ce rang de fusionnement local, qui a fait ensuite l'objet d'une fusion à un niveau supérieur, ne suffit pas à lui seul à remettre en cause l'appréciation des mérites des candidats et leur classement au tableau d'avancement définitif. Le ministre soutient d'ailleurs que les fiches d'évaluation de ce candidat démontrent que ses mérites sont supérieurs à ceux de M. AH.... Si M. AH... fait valoir ce que les fiches d'évaluation de ce collègue mentionnent seulement qu'il mériterait " à l'avenir " un avancement et que seule sa fiche de 2017 fait état d'un avancement immédiat possible, il ressort des évaluations de ce gradé que sa note a évalué d'un point chaque année, et que dès 2015, alors qu'il débutait dans son statut de jeune gradé, son supérieur indiquait déjà qu'il possédait les " potentialités qui devraient lui permettre d'accéder à l'avenir à des responsabilités supérieures ". Ainsi, les mérites du militaire classé au 14ème rang ne sont pas inférieurs à ceux de M. AH.... Dans ces conditions, même si la décision en litige mentionne que M. AH... s'est inscrit tardivement dans une démarche active d'avancement au grade d'adjudant, il ne ressort pas des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur, qui ne s'est pas fondé sur des faits inexacts, aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des mérites des différents candidats promouvables en écartant la candidature de M. AH... pour l'avancement au grade d'adjudant au profit des autres agents promus.

10. Il résulte de ce qui précède que M. AH... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction assorties d'astreinte ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. AH... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... AH..., au ministre de l'intérieur et à M. AJ... L..., à M. Q... S..., à M. U... T..., à M. Y... I..., à M. D... V..., à M. AO... AD..., à M. P... G..., à M. AQ... F..., à M. E... R..., à M. AQ... AC..., à M. W... AA..., à M. N... AF..., à M. AI... AG..., à M. AR... Z..., à M. K... J..., à M. O... AP..., à M. B... AE..., à M. A... AK..., à M. AL... AM..., à M. M... AB... et à M. AQ... X....

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N°20DA00903

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N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA00903
Date de la décision : 23/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-06-02-01-01 Fonctionnaires et agents publics. - Notation et avancement. - Avancement. - Avancement de grade. - Tableaux d'avancement.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : SELAFA CASSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-09-23;20da00903 ?
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