La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/08/2021 | FRANCE | N°20DA01859

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 3ème chambre, 05 août 2021, 20DA01859


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... épouse B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 2002212 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2020 et 26 mars 2021, Mme E... épouse

B... C... représentée par Me Detrez-Cambrai demande à la cour dans le dernier état de ses écritur...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... épouse B... C... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé son pays de destination.

Par un jugement n° 2002212 du 16 octobre 2020, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 19 novembre 2020 et 26 mars 2021, Mme E... épouse B... C... représentée par Me Detrez-Cambrai demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'annuler l'arrêté du 26 juin 2020 portant assignation à résidence ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour conforme à son statut de conjoint de réfugié avec autorisation de travail ;

5°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au bénéfice de son conseil en application des dispositions de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve d'une renonciation à l'aide juridictionnelle.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... A..., présidente de chambre,

- et les observations de Mme E..., épouse B... C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., épouse B... C..., ressortissante centrafricaine née le 2 février 1990, est entrée en France le 11 septembre 2015. Elle a bénéficié d'un titre de séjour en tant qu'étudiante jusqu'au 30 septembre 2018. Par un arrêté du 1er avril 2019, le préfet de la Seine-Maritime a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination. Elle relève appel du jugement du 16 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé son pays de destination. Elle demande également l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a assignée à résidence dans les communes de la circonscription de sécurité publique de Rouen pour une durée de six mois renouvelable.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 26 juin 2020 :

2. L'appelante qui se bornait à demander en première instance l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et a fixé son pays de destination, demande pour la première fois en appel l'annulation de l'arrêté du 26 juin 2020 portant assignation à résidence. Dès lors, ces conclusions, nouvelles en appel, doivent être rejetées comme irrecevables.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 25 juin 2020 :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme E..., épouse B... C..., a entretenu une relation avec M. B... C..., né en République Centrafricaine, qui bénéficie d'une carte de résident en qualité de réfugié. Un enfant est né de cette relation le 16 avril 2019 qui a été reconnu par ses parents qui ont à cette occasion déclaré une adresse commune. Leur mariage a été célébré le 31 août 2019. Dans ces conditions, en décidant par l'arrêté du 25 juin 2020 d'obliger Mme E..., épouse B... C..., à quitter sans délai le territoire français, le préfet de la Seine-Maritime a porté au droit de Mme E..., épouse B... C..., au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel cette décision a été prise et a, par suite, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La décision portant obligation de quitter le territoire français doit par suite être annulée, et par voie de conséquence celle fixant le pays de destination.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme E..., épouse B... C..., est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 25 juin 2020 portant obligation de quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation retenu par le présent arrêt, l'annulation prononcée implique nécessairement que le préfet de Seine-Maritime délivre à Mme E..., épouse B... C..., une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Mme E..., épouse B... C..., a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Detrez-Cambrai la somme de 1 000 euros, sous réserve que cette dernière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du 16 octobre 2020 du tribunal administratif de Rouen et l'arrêté du 25 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a obligé Mme E..., épouse B... C..., à quitter le territoire français sans délai et a fixé son pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Maritime de délivrer à Mme E..., épouse B... C..., une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Detrez-Cambrai, conseil de Mme E..., épouse B... C..., une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E..., épouse B... C..., à Me Detrez-Cambrai, au préfet de la Seine-Maritime et au ministre de l'intérieur.

1

3

N°20DA01859

1

6

N°"Numéro"


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01859
Date de la décision : 05/08/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: Mme Ghislaine Borot
Rapporteur public ?: M. Cassara
Avocat(s) : DETREZ-CAMBRAI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-08-05;20da01859 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award