Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Oise a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre à la préfète de l'Oise de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2002844 du 23 décembre 2020 le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2021, Mme B... représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre à la préfecture de la Somme de lui délivrer une carte de séjour "vie privée et familiale" dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre la somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve d'une renonciation à l'aide juridictionnelle.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante tunisienne née le 9 juillet 2002, indique être entrée le 28 août 2019 sur le territoire français. Elle relève appel du jugement du 23 décembre 2020 du tribunal administratif d'Amiens qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 juillet 2020 par lequel le préfet de l'Oise a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de 90 jours et a fixé le pays de destination.
Sur la régularité du jugement :
2. Dans ses écritures de première instance, Mme B... indiquait que la préfecture lui aurait opposé l'absence d'études supérieures, ou de ne pas avoir présenté d'inscription dans un organisme de formation initial ou professionnel et aurait ainsi ajouté une condition à l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif n'a pas visé le moyen ainsi présenté et n'y a pas répondu. Dès lors, ce jugement a été rendu dans des conditions irrégulières et doit, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen d'irrégularité du jugement soulevé par l'appelante, être annulé. Il y a lieu, par la voie de l'évocation, de statuer sur la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif d'Amiens.
Sur la demande de première instance de Mme B... :
3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 1211 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 2112, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". Il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé. Par ailleurs, il ressort des dispositions de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français et fixe le pays de renvoi. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse portant obligation de quitter le territoire et celle fixant le pays de destination n'auraient pas été précédées de l'organisation de la procédure contradictoire préalable prévue par les dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté comme étant inopérant.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France.. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code prévoit que : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte pluriannuelle (...) sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-1 du même code : " L'étranger qui sollicite la délivrance d'une première carte de séjour doit présenter à l'appui de sa demande, (...) les pièces suivantes (...) 2° Sauf stipulation contraire d'une convention internationale applicable en France, un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois autre que celui mentionné au 3° de l'article R. 311-3 ". Aux termes de l'article R. 313-7 du même code : : " I.-Pour l'application du I de l'article L. 313-7, l'étranger qui demande la carte de séjour portant la mention " étudiant " (...)doit présenter, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-1, les pièces suivantes (...) 2° Un certificat d'immatriculation, d'inscription ou de préinscription dans un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation initiale, ou une attestation d'inscription ou de préinscription dans un organisme de formation professionnelle au sens du titre II du livre IX du code du travail, ou bien une attestation justifiant qu'il est bénéficiaire d'un programme de coopération de l'Union européenne dans les domaines de l'éducation, de la formation et de la jeunesse ;(....) Aux termes de l'article R. 313-10 du même code : " Peut être exempté, sur décision du préfet, de l'obligation de présentation du visa de long séjour prescrite au 2° de l'article R. 313-1 :/1° L'étranger qui suit en France un enseignement ou y fait des études, en cas de nécessité liée au déroulement des études. Sauf cas particulier, l'étranger doit justifier avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur. Il est tenu compte des motifs pour lesquels le visa de long séjour ne peut être présenté à l'appui de la demande de titre de séjour, du niveau de formation de l'intéressé, ainsi que des conséquences que présenterait un refus de séjour pour la suite de ses études ;/2° L'étranger qui a suivi une scolarité en France depuis au moins l'âge de seize ans et qui y poursuit des études supérieures. A l'appui de sa demande, l'étranger doit justifier du caractère réel et sérieux des études poursuivies. ".
5. D'une part, l'arrêté du 24 juillet 2020 oppose à Mme B... une absence de visa de long séjour pour ensuite relever qu'elle ne satisfait pas aux conditions posées par l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettant l'exemption d'un tel visa, tenant à une nécessité liée au déroulement des études, à la justification d'avoir accompli quatre années d'études supérieures et être titulaire d'un diplôme, titre ou certificat au moins équivalent à celui d'un deuxième cycle universitaire ou d'un titre d'ingénieur, ou avoir suivi une scolarité en France depuis au moins l'âge de seize ans et y poursuivre des études supérieures. L'arrêté lui oppose également qu'elle ne justifie pas des documents exigés par le 2° de l'article R. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme B... n'est pas fondée à soutenir que ce faisant l'arrêté aurait ajouté aux conditions posées par les textes et serait entaché d'une erreur de droit.
6. D'autre part, Mme B... n'allègue ni n'établit disposer d'un visa de long séjour ou satisfaire aux conditions posées par l'article R. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour en être exemptée. Par conséquent, le préfet de l'Oise a pu légalement, au seul motif qu'elle ne justifiait pas d'un visa de long séjour, lui refuser la délivrance du titre de séjour demandé.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Les dispositions du présent Accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'Accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent Accord, dans les conditions prévues par sa législation. ". Aux termes de l'article 7 quater de cet accord : " (...) les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale". ". L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
8. Mme B... arrivée sur le territoire français à l'âge de 17 ans, n'y était présente que depuis une année à la date de l'arrêté contesté. Elle a fait le choix de venir résider chez un oncle alors que ses parents vivent encore en Tunisie. Alors qu'il n'y a pas d'obstacle à ce que son oncle lui apporte un soutien matériel depuis la France, dans les circonstances de l'espèce, en lui refusant un titre de séjour, le préfet de l'Oise n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus. Il n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et de sauvegarde des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle de Mme B....
9. En quatrième lieu. aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 31311 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 31310 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 3132. / (...) ". Eu égard à ce qui a été exposé au point 8, le préfet de l'Oise n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant que Mme B... ne faisait pas état de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'un titre mention " vie privée et familiale " dans le cadre de la procédure visée par l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de Mme B... devant le tribunal administratif d'Amiens et sa requête en appel doivent être rejetées. Par voie de conséquence, les conclusions dont elles sont assorties, présentées par Mme B... aux fins d'injonction et au titre des frais exposés et non compris dans les dépens en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 199 doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2002844 du 23 décembre 2020 du tribunal administratif d'Amiens est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif et ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au ministre de l'intérieur et à Me C....
Copie en sera adressée pour information à la préfète de l'Oise.
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N°21DA00147
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