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01/06/2021 | FRANCE | N°20DA01549

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 01 juin 2021, 20DA01549


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 14 février 2020 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans les trente jours et fixation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002316 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a admis M. A... au bénéfice provisoire de l'aide juridictionnelle totale, annulé cet arrêté, enjoint au préfet de réexaminer la situation de M. A... en lui délivrant

une autorisation provisoire de séjour et condamné l'Etat à verser une somme de 1 000...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du préfet du Nord du 14 février 2020 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans les trente jours et fixation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 2002316 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Lille a admis M. A... au bénéfice provisoire de l'aide juridictionnelle totale, annulé cet arrêté, enjoint au préfet de réexaminer la situation de M. A... en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour et condamné l'Etat à verser une somme de 1 000 euros à Me C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 2 octobre et 7 décembre 2020, le préfet du Nord demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif.

Il soutient que les moyens de la demande, y compris le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration retenu par le tribunal administratif, n'étaient pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 24 novembre 2020, M. A..., représenté par Me D... C..., conclut à son admission provisoire à l'aide juridictionnelle, au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à verser à Me C... la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 31322, R. 31323 et R. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. L'article 8 de la loi du 10 juillet 1991 dispose : " Toute personne admise à l'aide juridictionnelle en conserve de plein droit le bénéfice pour se défendre en cas d'exercice d'une voie de recours ". La demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle ayant déjà été accueillie en première instance est sans objet en appel.

2. Si, à la suite d'une erreur de plume, l'arrêté a évoqué un avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 16 avril 2018, il ressort des pièces du dossier que cet avis a été émis en réalité le 16 avril 2019.

3. Il résulte de ce qui précède que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a déduit de ce que la préfecture n'avait pas produit cet avis du 16 avril 2018, que la régularité de la consultation de ce collège n'était pas établie.

4. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... en première instance et en appel.

5. L'auteure de l'arrêté, cheffe du bureau du contentieux et du droit des étrangers, bénéficiait d'une délégation de signature, suffisamment précise, sur le fondement de l'article 43 du décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 et d'un arrêté préfectoral du 2 janvier 2020 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture.

6. Le médecin rapporteur et les membres du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ont été désignés par une décision du directeur général de l'Office du 14 février 2019 publiée au Bulletin officiel du ministère de l'intérieur. Le moyen tiré de la violation des articles R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 doit donc être écarté.

7. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'évolution de l'état de santé de M. A... après la consultation du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration nécessitait une nouvelle consultation de cette instance avant l'arrêté.

8. L'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, qui impose à l'administration d'indiquer à un demandeur " les pièces et informations manquantes exigées par les textes législatifs et réglementaires ", ne s'applique pas lorsqu'un texte fixe une condition de fond et ajoute que le demandeur doit justifier remplir cette condition sans énumérer la liste des pièces à fournir. L'arrêté pouvait donc relever sans initier d'abord cette procédure l'absence de justification de la nationalité de la concubine de M. A... et de la date de début du concubinage.

9. Conformément aux articles L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'arrêté a énoncé dans ses considérants ou dans son dispositif, au regard tant de la santé que de la vie privée et familiale, les motifs de droit et de fait qui ont fondé ses différentes décisions.

10. Il ressort de la motivation de l'arrêté que son auteure a procédé, pour toutes ses décisions, à un examen particulier de l'ensemble des éléments alors portés à sa connaissance.

11. Il résulte de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui s'est référé à M. A..., que la référence d'un motif de l'arrêté à " M. B... " a procédé d'une erreur de plume sans influence sur la légalité de la décision.

12. Si M. A... est suivi pour une hépatite B et si le rapport médical de juillet 2019 a fait état d'une " réplication virale majorée " et a instauré un traitement par viread, le rapport médical de novembre 2019 n'a plus fait état de cette réplication, a évoqué une charge virale à 1785 Ul/ml correspondant à un porteur inactif et a justifié le recours au viread par une " fibrose minime ".

13. En tout état de cause, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que M. A... pourrait voyager sans risque vers le Bénin et y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et cette appréciation n'a été démentie ni par le courriel relatif à l'indisponibilité du viread au Bénin, qui n'évoque pas la substance active de cet anti-infectieux, ni par aucune autre pièce du dossier.

14. Dans les circonstances de l'espèce, l'arrêté n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation et n'a pas violé les articles L. 313-11, 11° et L. 511-4, 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3 de l'arrêté du 5 janvier 2017.

15. M. A..., né en 1985, est entré en France en juin 2015 avec un visa court séjour. Il a vécu la majeure partie de sa vie au Bénin où réside sa mère. Si son concubinage avec une ressortissante française, mère d'un enfant né en 2011, est établi à partir d'octobre 2017, à la date de l'arrêté le couple était récent et aucun enfant n'était né de cette union.

16. Dans les circonstances de l'espèce, même si M. A... a bénéficié d'un titre de séjour " étranger malade " de septembre 2016 à février 2019, même s'il a travaillé en 2017 et même s'il a suivi une formation, l'arrêté n'était pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation, n'a pas violé l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et n'a pas porté une atteinte disproportionnée à la vie privée et familiale garantie par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

17. Il résulte de ce qui précède que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté, enjoint au préfet de réexaminer la situation de M. A... en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour et condamné l'Etat à verser une somme de 1 000 euros à Me C... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

18. La demande présentée par le conseil du requérant, partie perdante, sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement du 29 septembre 2020 est annulé.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... en première instance et en appel sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me D... C... pour M. E... A..., au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise, pour information, au préfet du Nord.

2

N° 20DA01549


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20DA01549
Date de la décision : 01/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Marc Heinis
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : HENTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-06-01;20da01549 ?
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