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25/05/2021 | FRANCE | N°19DA02620-19DA02670

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 25 mai 2021, 19DA02620-19DA02670


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Défense et promotion de cinq communes du plateau de Buchy " a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 21 juin 2017 par lequel le préfet de Seine-Maritime a autorisé la société anonyme (SA) Odièvre à exploiter une plateforme de stockage de produits classés sur le territoire de la commune de Vieux-Manoir.

Par un jugement n° 1801336 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I. P

ar une requête enregistrée le 29 novembre 2019 sous le n° 19DA02620 et un mémoire enregistré le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association " Défense et promotion de cinq communes du plateau de Buchy " a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 21 juin 2017 par lequel le préfet de Seine-Maritime a autorisé la société anonyme (SA) Odièvre à exploiter une plateforme de stockage de produits classés sur le territoire de la commune de Vieux-Manoir.

Par un jugement n° 1801336 du 24 octobre 2019, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 29 novembre 2019 sous le n° 19DA02620 et un mémoire enregistré le 14 janvier 2021, la SA Odièvre, représentée par Me A... F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen ;

2°) de rejeter la demande de l'association ;

3°) de mettre à la charge de l'association la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II. Par une requête enregistrée le 6 décembre 2019 sous le n° 19DA02670 et un mémoire enregistré le 14 janvier 2021, la SA Odièvre, représentée par Me A... F..., demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Rouen du 24 octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Claire Rollet-Perraud, président-assesseur,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me A... F..., représentant la société SA Odièvre, et de Me E... C..., représentant l'Association " Défense et promotion de cinq communes du plateau de Buchy " .

Une note en délibéré présentée par la société SA Odièvre a été enregistrée le 11 mai 2021.

Considérant ce qui suit :

1. Le 24 mars 2016, la SA Odièvre a déposé une demande d'autorisation d'exploiter une plateforme de stockage de produits classés relevant de la catégorie Seveso " seuil haut " sur le territoire de la commune de Vieux-Manoir. L'autorité environnementale a émis un avis le 8 juillet 2016. L'enquête publique s'est déroulée du 6 septembre au 18 octobre 2016. A son issue, le commissaire-enquêteur a émis un avis favorable au projet assorti de sept réserves. Le projet a reçu un avis favorable du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques le 14 février 2017. Le préfet de la Seine-Maritime a, par un arrêté du 21 juin 2017, accordé l'autorisation sollicitée puis, par un arrêté du 12 juin 2018, a fixé des prescriptions complémentaires.

2. L'association " Défense et promotion de cinq communes du plateau de Buchy " a demandé l'annulation de l'arrêté du 21 juin 2017 au tribunal administratif de Rouen qui, par un jugement du 24 octobre 2019, a fait droit à cette demande. Par la requête n° 19DA02620, la SA Odièvre fait appel de ce jugement. Par la requête n°19DA02670, elle demande à la cour de surseoir à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Rouen. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes qui sont relatives au même jugement pour qu'il y soit statué par un seul arrêt.

Sur la requête n° 19DA02620 :

3. Aux termes de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. (...) "

4. En vertu de cette disposition, le règlement et les documents graphiques du plan local d'urbanisme sont opposables à l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan. Il en résulte que les prescriptions de celui-ci qui déterminent les conditions d'utilisation et d'occupation des sols et les natures d'activités interdites ou limitées s'imposent aux autorisations d'exploiter délivrées au titre de la législation des installations classées.

5. Aux termes de l'article Uz2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Vieux-Manoir : " Occupations et utilisations du sol soumises à conditions particulières : (...) UZ.2.4 Les constructions à destination d'entrepôt, à condition qu'elles soient en conformité avec la législation et la réglementation en vigueur concernant la protection de l'environnement et qu'elles entraînent pour le voisinage aucune incommodité (bruit, émanation d'odeurs, circulation), et en cas d'accident ou de fonctionnement défectueux, aucune insalubrité, ni sinistre susceptible de causer des dommages graves ou irréparables aux personnes et aux biens. (...) ".

6. S'agissant de la plateforme de stockage de produits classés de la société Odièvre, l'étude de danger a d'abord relevé quatre types d'accidents possibles soit, par ordre d'importance décroissant, l'incendie qualifié de risque majeur, l'explosion, l'inondation et la pollution par un effluent liquide ou gazeux entendue comme non consécutive à un incendie. Elle a ensuite envisagé trois scénarios : d'une part l'incendie d'une cellule du stockage de produits phytopharmaceutiques avec pour conséquences des flux thermiques, la dispersion d'un nuage toxique et la pollution des eaux d'extinction, d'autre part l'explosion du local de charge et enfin la perte de confinement.

7. Dans le cas d'un incendie et après prise en compte des mesures de prévention et de sécurité, la gravité de l'évènement a été évaluée, sur une échelle allant du niveau 1 " négligeable " au niveau 6 " désastreux ", du niveau 2 " modéré " au niveau 4 " important " selon que l'incendie concernerait une cellule ou se propagerait à d'autres cellules voire à toute la plateforme.

8. Plus précisément, le niveau de gravité des effets toxiques pour les parcelles et installations situées à moins de 100 mètres, pouvant affecter une dizaine de personnes dont deux dans l'élevage porcin voisin et les autres se trouvant dans le bâtiment de Cap Seine appartenant à la Coopération Natup dont la société pétitionnaire est la filiale, a été évalué au niveau 3 " sérieux ". L'effet thermique a été évalué en cas d'incendie de plusieurs cellules à 3 kW/m2, soit des effets irréversibles sur l'homme, et en cas d'incendie de toute la plateforme, sur les autres bâtiments du site et certains bâtiments voisins situés hors de la propriété de la société notamment l'élevage avicole, à 5 kW/m2 correspondant aux premiers effets létaux sur l'homme et une destruction de vitres significative.

9. Ainsi, un incendie déclenché sur le site de l'installation en cause est susceptible de causer des dommages graves ou irréparables aux personnes et aux biens.

10. Si le scénario de l'incendie d'une cellule, et a fortiori celui de l'incendie de plusieurs cellules, a été qualifié par l'étude, après prise en compte des mesures de prévention et de maîtrise du risque, de " très improbable ", soit tout de même le niveau D sur une échelle allant du niveau A " courant " au niveau F " non plausible ou non dimensionnant ", il résulte de la rédaction et de la finalité de l'article Uz.2.4 du règlement du plan local d'urbanisme que seule la gravité du sinistre doit être prise en considération pour son application.

11. Il résulte de ce qui précède que l'autorisation d'exploitation de l'installation en litige méconnaît cet article Uz.2.4.

12. Si l'article Uz.2.11 du même règlement du plan local d'urbanisme autorise l'implantation d'installations classées dans des zones d'effets létaux ou irréversibles " reportées sur le document graphique ", lesquelles correspondent aux zones dangereuses existantes, le site du projet n'est pas compris dans l'une de ces zones et cette disposition est donc sans influence sur la solution du litige.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté en litige.

Sur la requête n° 19DA02670 :

14. Par le présent arrêt, la cour statue sur les conclusions présentées par la SA Odièvre tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Rouen du 24 octobre 2019. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur les conclusions présentées par la société requérante tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

15. D'une part, il résulte de ce qui précède que les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la SA Odièvre, partie perdante, doivent être rejetées.

16. D'autre part, il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SA Odièvre une somme de 2 000 euros à verser à l'association " Défense et promotion de cinq communes du plateau de Buchy ".

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n°19DA02670.

Article 2 : La requête n°19DA02620 de la SA Odièvre est rejetée.

Article 3 : La SA Odièvre versera une somme de 2 000 euros à l'association " Défense et promotion de cinq communes du plateau de Buchy " au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié Me A... F... pour la SA Odièvre, à Me D... B... pour l'association " Défense et promotion de cinq communes du plateau de Buchy ", et à la ministre de la transition écologique et solidaire.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine Maritime.

N° 19DA02620, 19DA02670

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA02620-19DA02670
Date de la décision : 25/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-02 Nature et environnement. Installations classées pour la protection de l'environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: Mme Claire Rollet-Perraud
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SCP BOIVIN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-05-25;19da02620.19da02670 ?
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