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25/05/2021 | FRANCE | N°19DA01123

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ère chambre, 25 mai 2021, 19DA01123


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 16 mai 2019, et des mémoires, enregistrés les 29 janvier et 24 mars 2021, la société par actions simplifiée (SAS) Parc Eolien de la Croix Dorée, représentée par Me A... B..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté des préfets de la Somme et du Pas-de-Calais du 7 décembre 2018 portant refus d'autorisation d'exploiter six éoliennes et deux postes de livraison sur le territoire des communes de Lesboeufs, Le Transloy et Beaulencourt, ensemble la décision implicite, née le 23 mars 2019, qui a rejeté s

on recours gracieux ;

2°) d'enjoindre aux préfets de reprendre l'instruction d...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 16 mai 2019, et des mémoires, enregistrés les 29 janvier et 24 mars 2021, la société par actions simplifiée (SAS) Parc Eolien de la Croix Dorée, représentée par Me A... B..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'arrêté des préfets de la Somme et du Pas-de-Calais du 7 décembre 2018 portant refus d'autorisation d'exploiter six éoliennes et deux postes de livraison sur le territoire des communes de Lesboeufs, Le Transloy et Beaulencourt, ensemble la décision implicite, née le 23 mars 2019, qui a rejeté son recours gracieux ;

2°) d'enjoindre aux préfets de reprendre l'instruction de la demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative, notamment son article R. 311-5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Marc Heinis, président de chambre,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

1. L'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 7° Refusent une autorisation (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 : " La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

2. L'article L. 181-9 du code de l'environnement dispose : " L'instruction de la demande d'autorisation environnementale se déroule en trois phases : 1° Une phase d'examen ; 2° Une phase d'enquête publique ; 3° Une phase de décision. / Toutefois, l'autorité administrative compétente peut rejeter la demande à l'issue de la phase d'examen lorsque celle-ci fait apparaître que l'autorisation ne peut être accordée en l'état du dossier ou du projet. (...) ".

3. L'article R. 181-13 du code de l'environnement dispose : " La demande d'autorisation environnementale comprend (...) 5° (...) lorsque la demande se rapporte à un projet soumis à évaluation environnementale, l'étude d'impact réalisée en application des articles R. 122-2 et R. 122-3-1 (...) ". Selon l'article R. 181-16 : " (...) Lorsque l'instruction fait apparaître que le dossier n'est pas complet ou régulier, ou ne comporte pas les éléments suffisants pour en poursuivre l'examen, le préfet invite le demandeur à compléter ou régulariser le dossier dans un délai qu'il fixe. (...) ". Selon l'article R. 181-34 : " Le préfet est tenu de rejeter la demande d'autorisation environnementale dans les cas suivants : 1° Lorsque, malgré la ou les demandes de régularisation qui ont été adressées au pétitionnaire, le dossier est demeuré incomplet ou irrégulier ; (...) ".

4. L'article L. 122-1 du code de l'environnement dispose : " (...) III. (...) L'évaluation environnementale permet de décrire et d'apprécier de manière appropriée, en fonction de chaque cas particulier, les incidences notables directes et indirectes d'un projet sur les facteurs suivants : (...) 2° La biodiversité, en accordant une attention particulière aux espèces et aux habitats protégés au titre de la directive 92/43/ CEE du 21 mai 1992 et de la directive 2009/147/ CE du 30 novembre 2009 (...) ". Selon l'article R. 122-5 : " (...) II. (...) l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : (...) 3° Une description des aspects pertinents de l'état actuel de l'environnement (...) et de leur évolution en cas de mise en oeuvre du projet ainsi qu'un aperçu de l'évolution probable de l'environnement en l'absence de mise en oeuvre du projet (...) 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; (...) 8° Les mesures prévues par le maître de l'ouvrage pour : - éviter les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine et réduire les effets n'ayant pu être évités ; - compenser, lorsque cela est possible, les effets négatifs notables du projet sur l'environnement ou la santé humaine qui n'ont pu être ni évités ni suffisamment réduits. S'il n'est pas possible de compenser ces effets, le maître d'ouvrage justifie cette impossibilité. / La description de ces mesures doit être accompagnée de l'estimation des dépenses correspondantes, de l'exposé des effets attendus de ces mesures à l'égard des impacts du projet sur les éléments mentionnés au 5° ; 9° Le cas échéant, les modalités de suivi des mesures d'évitement, de réduction et de compensation proposées ; (...) ".

5. Saisie en mai 2017 de la demande d'autorisation environnementale présentée par la société Parc Eolien de la Croix Dorée, la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement des Hauts-de-France lui a demandé, par lettre du 26 septembre 2017, de compléter son dossier de demande sur les éléments évoqués dans une annexe jointe de vingt pages et relatifs à l'impact sur le paysage, les habitats et la flore, l'avifaune, les chiroptères et les émissions sonores.

6. La société a transmis en conséquence à l'administration un " volet écologique " de 140 pages et une " note complémentaire au volet écologique " de 27 pages apportant ses réponses à la lettre susmentionnée et explicitant les raisons pour lesquelles elle estimait les réponses qu'elle apportait suffisantes.

7. L'inspection des installations classées a analysé les compléments transmis par la société dans un rapport du 5 décembre 2018 qui a relevé, pour les mesures compensatoires prévues consistant à restaurer une prairie de fauche et planter une haie, l'absence de convention de mise à disposition des terrains et d'identification des modalités de restauration de la prairie et de gestion ultérieure de la prairie et de la haie et des garanties financières correspondantes, et pour les chiroptères l'absence de justification de la suffisance des inventaires, de réalisation d'inventaires complémentaires dont une écoute en altitude et en continu, d'éloignement de la haie de l'éolienne E4 et de définition de modalités de bridage des éoliennes.

8. Si l'arrêté du 7 décembre 2018 refusant l'autorisation d'exploiter était suffisamment motivé s'agissant des mesures compensatoires prévues à l'article L. 163-1 du code de l'environnement, il s'est borné à relever, au regard des exigences des articles L. 122-1 et R. 122-5 relatives au contenu de l'étude d'impact, " que l'analyse de l'état initial du site et de son environnement est insuffisante et que la description des mesures envisagées pour éviter les effets négatifs notables probables sur l'environnement, réduire les effets n'ayant pu être évités et compenser ceux qui n'ont pu être évités ni suffisamment réduits est, par voie de conséquence, également insuffisante " puis " que l'étude d'impact ne permet pas de décrire et d'apprécier les impacts du projet sur la biodiversité ". L'arrêté n'a fourni aucune autre précision sur les carences sur ces points des compléments transmis par la société.

9. Si l'arrêté visait le rapport de l'inspection des installations classées du 5 décembre 2018 " constatant que les compléments transmis le 28 août 2018 par la société sont insuffisants ", cette insuffisance n'était pas explicitée et ce rapport n'était pas joint.

10. Dans ces conditions, alors que le dispositif institué aux articles L. 181-9, R. 181-16 et R. 181-34 du code de l'environnement, inspiré par le rapport Duport " Accélérer les projets de construction, Simplifier les procédures environnementales, Moderniser la participation du public ", vise à accélérer l'instruction de la demande et à renforcer la sécurité juridique de la décision en permettant au demandeur de suppléer rapidement aux carences de son dossier, l'arrêté attaqué, ne mettant ainsi pas son destinataire en mesure, à sa seule lecture, de discerner ces carences , n'a pas comporté un énoncé suffisant des éléments de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour refuser l'autorisation sollicitée.

11. Il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2018 et de la décision du 23 mars 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Il résulte de la motivation de l'annulation prononcée par le présent arrêt qu'il y a lieu d'enjoindre aux préfets de la Somme et du Pas-de-Calais, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de statuer à nouveau, au terme de la phase d'examen, sur la demande d'autorisation présentée par la SAS Parc Eolien de la Croix Dorée. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'impartir à ces autorités un délai de quatre mois, à compter de la notification du présent arrêt, pour procéder à ce réexamen.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

13. Dans les circonstances de l'espèce, l'Etat, partie perdante, versera la somme de 1 500 euros à la SAS Parc Eolien de la Croix Dorée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 7 décembre 2018 et la décision du 23 mars 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint aux préfets de la Somme et du Pas-de-Calais de statuer à nouveau sur la demande d'autorisation présentée par la SAS Parc Eolien de la Croix Dorée, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la SAS Parc Eolien de la Croix Dorée au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... B... pour la SAS Parc Eolien de la Croix Dorée, à la ministre de la transition écologique et aux préfets de la Somme et du Pas-de-Calais.

N° 19DA01123 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19DA01123
Date de la décision : 25/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Heinis
Rapporteur ?: M. Marc Heinis
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SELARL HORUS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-05-25;19da01123 ?
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